[EVENT] Siège de Bandallon

Un jour nouveau se lève sur Bandallon. Le ciel bleu et la légère brise témoigne du retour de l'Eté sur le continent mais l'ambiance générale n'est guère aux réjouissance. Lorsque les épais rideaux de velour de la chambre seigneuriale s'ouvre, Addam Négrebar ne peut que constater que les bateaux du blocus sont toujours à la même place que la veille, et ceci depuis des lunes. Tandis qu'il se prépare pour une énième journée confiné entre les quatres murs de son chateau, Elissa Négrebar prend le petit déjeuner avec ses enfants. La Dame de Bandallon est anxieuse : voilà plus de six lunes qu'elle doit rassurer sa progéniture et les choses sont pires depuis qu'un amas de tentes s'accumulent en contrebas des remparts. Du haut de ses derniers, Leo jauge l'animation du camp de loyaliste avant de retourner à l'intérieur pour une énième inspection de l'armurerie. Ce spectacle coloré aux portes du château, Mildred le regarde avec inquiétude : enfermée dans sa chambre depuis son retour de Hautjardin, elle est sans doute la personne qui a le plus envie de voir la fin du siège. Ils ne le savent pas encore, mais la routine installée depuis des semaines va prendre fin aujourd'hui.

Déambulant parmi les allées de fortune, Theodore Tyrell a un plan : il se rend dans la tente de commandement où l'attend déjà son fils, Luthor, ainsi que Garth Hightower. Dans la nuit, Agramore Flowers et un autre soldat du nom de Portifer, tous deux membres de l'armée de Villevieille, on trouvé un moyen d'entrée dans la forteresse. Une porte condamnée, oubliée, datant d'un ancien plan de la bâtisse mais dont il faut encore finir de déblayer le passage en tout discrétion. Tandis qu'Andrew Vouyvère rejoint le centre de commandement, il voit l'un de ses hommes flirtant avec l'une des prostituées du camp. Alayne est une habitante d'un hameau non loin de Bandallon : la présence de ces soldat est une aubaine pour elle !

Les épais rideaux de velours de ses appartements seigneuriaux s'ouvraient et Addam ne pouvait quitter du regard cette vision devenu commune. Ces bateaux, qui les bloquaient, devenaient l'ombre de ses doutes, cela durait depuis trop longtemps, mais malgré les tourments de ses hésitations, Addam ne flanchait pas. Il avait pris une décision, choisi de soutenir le Roi Viserys assurant ainsi un meilleur avenir à sa famille, un avenir que son défunt frère n'aurait jamais pu envisager, il était si faible, si chétif...Et malgré tout cela, il restait son frère, son frère qui aurait dû être seigneur, son frère qui n'était plus et qui lui manquait même s'il n'en dirait jamais mot à quiconque. 

Le seigneur de Badallon ne pouvait faire preuve de faiblesse, surtout en ce moment de confinement ou il devait porter sa famille, pour ne pas dire supporter certains. Des fois, des jours de colères, il pouvait menacer certains d'entre eux de les donner au camp adverse, au moins, aurait-il la paix, mais il ne le pensait pas réellement, ce combat, c'était pour eux, quoique qu'ils en pensent. Pour eux et pour lui, voulant se prouver qu'il méritait d'être à la tête de cette maison.

Détournant finalement le regard des bateaux, il repoussa l'aide de son serviteur, voulant pour aujourd'hui se vêtir seul. C'était lassant d'avoir l'impression que rien ne changeait jour après jour, et cela serait son petit changement de la journée. Enfilant sa veste, il porta un regard à son miroir. Toujours lui, toujours seigneur. Soufflant un grand coup, il se préparait à une énième journée à vaquer à ses occupations de seigneur sans pouvoir sortir de son château. 

Mildred était plongée dans son observation silencieuse. En contrebas, les bannières loyalistes flottaient au vent tandis qu'elle ne se cessait de ruminer en rêvant à un ailleurs qui lui était inaccessible. Elle avait une fois de plus renvoyé son petit-déjeuner à peine entamé, à l'exception de quelques myrtilles, incapable qu'elle était d'avaler quoique se soit, l'estomac noué. Elle avait honte.

Ce n'était pas tant la trahison envers le Roi, mais plus encore celle envers leur famille Suzeraine qu'elle avait servi des années durant, au moyen de sa place auprès de la Reine des Épines, qui la dérangeait. Elle n'osait même pas imaginer ce qu'Olenna penserait de tout cela. Quel déshonneur ! Rien que d'y songer, elle ne savait plus où se mettre. Comment Adam avait-il permit cela ? Elle ne comprenait toujours pas. Et elle était furieuse. Furieuse et renfrognée.

Parquée comme une paria, elle ne quittait plus sa chambre et les visites se faisaient rares. A croire qu'elle n'était même plus chez elle en ces lieux. Et à dire vrai, elle se demandait sans cesse si elle avait encore envie de considérer Bandallon comme chez elle. Elle voulait partir d'ici. Le problème, c'est qu'elle ignorait bien comment elle serait accueillie si tel était le cas. Sa position était tout bonnement impossible Qu'allait-elle devenir ? Et le nom de Negrebar ? Tout cela lui donnait les pires insomnies qu'elle eut jamais connue, ce qui ne l'avait pas empêche d'exprimer le fond de sa pensée au jeune Lord des lieux, sans prendre la peine de mâcher ses mots.

Revêtir son armure chaque jour depuis le commencement de la Bataille de Trois-Tours avait laissé de profondes marques sur son corps. Il n'était plus dans ses jeunes années et la fatigue dûe tant aux combats qu'aux nuits sans sommeil ou aux nombreux déplacements avait creusé de profondes cernes d'une couleur semblable à celles des MYRTILLES sous ses yeux. Cependant, il en fallait encore plus pour que Ser Andrew Vouyvère ne s'avoue PERDANT dans cette guerre.

D'un geste sec, il écarta les pans de sa tente aux couleurs de la Maison Vouyvère et contempla les alentours. Des fumées s'élevaient ça et là devant les tentes d'autres seigneurs et chevaliers ainsi que devant celles, plus petites et plus nombreuses, des soldats composant leurs effectifs. Sur sa droite s'élevaient les murs de Bandallon et c'est d'un AIR résigné, presque triste, qu'Andrew finit par détourner le regard de la bâtisse, songeant à regret à sa nièce Elissa qui y vivait, en tant que Dame de Bandallon.

Accompagné de deux hommes en armure de sa maison, Andrew fendit les rangées de tentes et se dirigea vers la plus grande, celle de Ser Theodore Tyrell (  @Clifford Swann ). Alors qu'il approchait de la tente, il fut rejoint par Ser Emmon de la Maison Cuy (  @Sacha ). Lui aussi avait les traits creusés par ces jours et ces nuits de conflits depuis Trois-Tours, mais il était plus jeune que lui et tirait sa force de son impulsivité légendaire.

- Le bonjour, Ser Emmon, le salua-t-il en arrivant à portée de voix. Les deux hommes avaient rejoint la tente de Theodore Tyrell presque en même temps et ils en franchirent les lourds pans de tissus l'un derrière l'autre. Croisant alors le regard du chevalier Tyrell, Andrew inclina légèrement le buste, dissimulant une grimace de douleur en serrant la mâchoire tant son dos le faisait souffrir.

- Ser Theodore, commença-t-il. Toujours rien de la part de Négrebar? J'ai observé les murs de la forteresse en venant jusqu'ici. Celle-ci semble aussi amorphe qu'hier et que les jours précédents mais je me méfie de cette apparente tranquilité...

Car comme le disait l'adage, Bandallon semblait respirer le calme avant la tempête...

 | dialogue : ff99cc | pensées : italique | Mots pour la Guerre des Trônes : gras et MAJUSCULES | Nombre de mots : 377 mots

Ce siège ne pouvait plus durer.

Plusieurs lunes qu’ils attendaient là, perdant presque patience, lorsqu’ils ne prenaient pas racines. Ce jour serait cependant différent. Garth en avait la certitude. Aujourd’hui, tout comme Trois-Tours, Bandallon tomberait. Il en avait connu d’autres, des batailles et des guerres. Celle-ci ne serait sans doute pas sa dernière mais l’idée d’un assaut prochain ne le rendait pas craintif, bien au contraire. Les Nègrebar se jouaient depuis bien trop longtemps de son neveu. D’eux également. Un affront que l’armée massée non loin de cette maudite forteresse ne manquerait pas de laver.

Les hommes avaient été passés en revue. De la pointe des flèches au tranchant des épées, rien n’avait été laissé au hasard. Des soldats qui avaient déjà connu une première victoire à Trois-Tours. Gris-Acier espérait que cela leur donnerait courage et vaillance. Car ils devaient absolument prendre Bandallon. Ils s’y étaient déjà trop attardés et Garth ne pouvait qu’imaginer les conséquences d’une guerre qui s’enlisait.

La tente de commandement était encore bien silencieuse. L’air y était lourd. Gris-Acier observait ces cartes et ces plans maintes fois étudiés et lu. A force, tout le monde les connaissait par cœur, ici. Mais quelque chose de différent les attendait aujourd’hui. Agramore avait fait une découverte, disait-on. Une fois de plus, Garth se félicitait d’avoir eu la clairvoyance de garder cet homme à ses côtés. Il se révélait chaque jour plus efficace et peut-être qu’il leur apporterait la clef de cette victoire tant attendue.

Alors que les autres meneurs entraient dans la tente, Garth les salua d’un signe de la tête entendu. Bientôt, ils pourraient commencer et toutes les questions trouveraient une réponse. Ou du moins pouvait-il l’espérer. Aussi, il guetta la réponse que Théomore formulerait à l’attention d’Andrew. Ils les savaient tout aussi pressés que lui d’en finir avec ce siège et de chasser cette infestation de leurs terres.

Putain, de putain de putain ! Ce siège me gonflait sérieusement ! Et j’en avais ras le dos de ce siège. Il me fallait absolument quelque chose… J’étais pourtant fatigué des dernières batailles, mais… il me fallait de l’action ou quelque chose à faire. On allait pas non plus passer des lunes sous ces murailles. Je quittai ma tente en buvant une grande rasée d’eau fraîche. Pas de bière, j’avais besoin de tous mes moyens en permanence. Au moins c’était sûr qu’un siège c’était plus reposant pour le corps, moins pour les nerfs. Et encore, moi j’étais du bon côté dus murailles ! Je ne pouvais pas non plus rester à rien faire… Une pointe d’agacement me monta alors que je finis par avaler une poignée de myrtille pour finir mon petit déjeuner et je mis mon armure avant de me diriger à grands pas vers la tente de commandement. Bon sang ! Ce maudit château semblait nous regarder avec un air moqueur ! J’allais finir par le raser pierre par pierre ! Non Emmon, il faut prendre ton mal en patience, même si tu as l’impression de prendre racine ici ! Tout va bien se passer. Un de mes hommes me suivait alors que je croisais Andrew Vouyvère.

« Salutation à vous Ser Andrew. »

Je m’approchai de lui et de la tente de Theodore Tyrell.

« Comment vous portez vous Ser ? »

La fatigue ne se lisait pas sur son visage. Pour ma part… c’était un peu plus compliqué… Je saluais le Tyrell airsi que le Hightower avec respect, cependant, je ne m’assiérais pas, je ne tenais pas en place malgré mes efforts ! Mais c’était autre chose. Face aux mots de Ser Andrew, j’inclinai la tête, en accord avec lui.

« Effectivement, ce calme ne me dit rien qui vaille. Aujourd’hui doit se passer quelque chose, le siège doit prendre fin. »

Je n’avais point parlé d’un ton craintif mais ferme, plus cette situation durait, moins le moral serait bon. Putain ou pas putain dans le camp. De toute manière, j’allais finir par exploser tout seul face à cette attente.

Elwood faisait de son mieux.

Il faisait de son mieux pour tout. Pour être un bon fils pour sa maman. Pour être un bon écuyer avec son oncle. Mais surtout pour être un bon grand frère. Et même pour être un bon héritier pour son père. Oui, il essaye d’être tout ça à la fois ! Le petit déjeuner est peut-être un peu fade mais Elwood encourage comme il le peut ses cadets, faisant mine de se régaler de ce qui se trouve dans son assiette. Il sera toujours là pour eux, il leur a dit. Et une promesse est une promesse ! Même s’il n’est pas encore chevalier, le petit à de l’honneur. Il a peur mais ne le montrera pas. Il l’a promis aux Sept. A sa maman, même si elle ne le sait pas. Et peut-être à son père aussi, malgré la pointe de peur qui lui transperce le cœur par moments à son sujet.


Comme à chaque début de journée depuis trop de lunes maintenant, ils sont tous les quatre assis autour de la table. Elwoord regarde son assiette, puis celle de sa sœur. Il faut qu’elle mange. Elle est plus petite que lui, elle a besoin de force. Avec un entrain qu’il souhaiterait contagieux, le garçon prit quelques unes des myrtilles qui se trouvaient là. Il n’en avait pas besoin. Du moins, il aimait le penser. Sa sœur ne mangeait pas beaucoup mais il était certain que ça lui plairait et qu’elle ferait un effort. Elle avait peur. Il le savait et il s’évertuait à lui changer les idées comme il le pouvait. Il était son grand frère, c’était son rôle !


« Mère ( @Naerys Des Essaims), pensez-vous que Père va nous rejoindre ? »


A dire vrai, Elwood craignait la réponse qu’il recevrait. Non pas qu’il craignait sa mère. Au contraire. C’était juste que… qu’il savait que la présence de leur père rassurerait peut-être un peu son frère et sa sœur. Du moins, s’il n’était pas d’humeur maussade. Quelque part, dans tous les cas, cette réponse lui permettrait d’y voir plus clair. Il pourrait adapter son comportement en conséquence et faire en sorte que ses cadets souffrent le moins possible de la situation.

Il marchait si vite que son cœur allait imploser dans sa poitrine, mais peu lui importait, Agramore voulait arriver le plus vite possible à la tente de Ser Garth. "Ser Hightower, grande nouvelle et non des moindres, avec Portifer nous avons... Ser ? Vous n'êtes pas là... Pour ma grande nouvelle, vous n'êtes pas là", il regarda tout autour de lui, espérant le trouver derrière son bureau, mais la tente était désespérément vide. Ser Garth avait déjà prit la route pour la tente de commandement, sans l'attendre, "c'est un comble", continuait-il à marmonner dans sa barbe, vexer par de sa non présence. Il aurait aimé l'avertir en avant-première, qu'il soit le premier à entendre la bonne nouvelle. Tant pis pensa-t-il, il l'entendra en même temps que les autres. Avec une ardeur presque enfantine, Agramore pressa le pas. Il était surexcité, si fière de sa trouvaille. Le temps était long ici. Rien ne se passait vraiment et cet état de vieille était difficile à supporter, même pour lui. Quoi de pire que d'attendre que quelque chose se passe et que rien ne se passe ? Et aujourd'hui, grâce à lui et à Portifer, quelque chose d'extraordinaire allait se passer.

De sa main libre, il poussa lentement les pans épais de la tente du seigneur Tyrell et passa la tête, à la recherche de Sir Garth ( @Melior Vouyvère ). "Bonjour mes seigneurs", dit-il avec une sourire mielleux, jubilant sur place, "puis-je monopoliser votre attention ?". Il attendit un accord avant de commencer, "ce jour sans fin est terminé". D'un geste sec, il déroula son parchemin sur la grande table du seigneur et indiqua avec son doigt un emplacement bien spécifique. Il avait fait ce dessin à la hâte, mais il était suffisamment détaillé pour se repérer facilement, "il y a une porte. Il savourait l'effet que cette annonce avait provoqué ''pour le moment elle est scellée" , il recula légèrement pour laisser de la place et permettre à tous d'observer cette carte mal dessiné ''peut-être qu'elle ne mène nulle part, mais un peu d'action ne nous feras pas de mal".

Luthor restait dans un coin de la tente comme souvent ces derniers temps : en vérité, il ne comprenait pas trop ce qu'il faisait là mais puisque son père avait ordonné qu'il l'accompagne, il n'avait eut d'autre choix que d'acquiescer et faire ses affaires. C'était une Lia Serry en larme qu'il avait quitté ce matin qui les vit prendre la route de Villevieille et il se demandait encore s'il lui serait donné de la revoir. Toutefois, il n'en disait mot : cela ne servait pas à grand chose de chercher à s'épancher sur l'étrangeté de sa présence ici, au pied de Bandallon. Etait-ce la présence de sa tante entre les murs ou le contexte particulier qui menait à se battre entre bieffois ? Il l'ignorait mais il avait rapidement compris une chose : il devait se taire et écouter. La seule personne qui le considérait réellement comme un être capable de pensée c'était Ser Simon ( @Alla Tyrell) qui lui servait plus de chaperon que de garde du corps. Enveloppé dans sa cape sombre, Luthor regarda l'agitation qui animait soudainement la tente : l'aide de camp de Ser Garth venait d'entrer avec une nouvelle qui, aux oreilles de Luthor, semblait assez bonne mais tandis qu'il aurait bien des questions à poser, il se trouvait dans l'obligation de garder le silence. Il se pencha sur Simon, lui demandant. « Cela veut-il dire que nous pourrons attaquer ? Ou est-il prévu que l'on explore discrètement ce qu'il y a derrière cette porte ? » C'était son premier siège, sa première bataille. Tout lui semblait nouveau et rien ne paraissait tenir du bon sens. Il sentit cependant son coeur se mettre à battre à la chamade : une petite anxiété commença à naître en lui tandis que l'idée d'un combat plus que prochaine résonnait dans son esprit.

Il aurait préféré être l'écuyer de Ser Garth, songea Luthor tout en voyant qu'Agramore Flowers s'adressait plus à lui qu'à quiconque dans cette pièce : il aurait aimé être écouté, qu'on le renseigne, qu'on lui enseigne. Au lieu de cela, il restait assis toute la journée, trompant l'ennui en de trop rares entrainement avec Simon, ou en promenade à travers le camps. Rester là, silencieux, et faire comme s'il n'existait pas. C'était un peu son quotidien depuis la disparition d'Elinor : leur mère passait ses journées à pleurer au début, puis elle s'était trouvé une occupation pour s'occuper l'esprit. Son père avait fait l'exact opposé et désormais c'était sur ses épaules que reposait tout le poids de ses attentes. Mais quelles attentes puisqu'il ne lui parlait presque pas ? Avec un soupire, Luthor appuya sa joue contre sa main, sentant les os de son coude s'enfoncer dans sa cuisse. Etait-ce vraiment la fin de l'attente ou simplement une fausse joie dans une journée aussi morose que d'ordinaire ?

Un jour de plus à attendre, un jour de plus à espérer…quoi ? Rien. Que le siège se débloque tout seul, peut-être. Armer des catapultes, raser le fort, et qu’on en finisse, se disait parfois Theodore Tyrell en revêtant son armure. Bandallon déroulait ses tours entre lui et la mer. Et à l’intérieur du château…quoi ? aucune idée. Il rêvait de prendre le fort et de montrer qu’il n’était pas fini. D’action en somme. Mais à la vérité il redoutait l’affrontement. Là-dedans, il y avait sa sœur. Il avait autant peur que Olene soit comme les autres, qu’elle ait trahi aussi – non, impossible, il refusait d’y croire - que de se lancer dans la bataille pour la perdre. Il ne pouvait pas décevoir Willos. Et puis évidemment, il y avait Luthor, évidemment, dont il ne savait que faire. Il avait voulu l’emmener et en faire un homme, mais maintenant Theodore regrettait un peu. C’était le seul enfant qu’il lui restait. Il refusait de le perdre comme il avait perdu Elinor, qu’il n’avait pas encore fini de pleurer – qu’il ne finirait sans doute jamais de pleurer.

Mais déjà c’était l’heure de faire le point, comme tous les jours, ou presque, et la réunion d’état major, aujourd’hui serait peut-être plus prometteuse, au vu des entreprises récentes qui avaient été menées... « Aide-moi à passer mon plastron, fils. » Lança Tyrell à Luthor (@"Delena Pommingham") « Allons. » Insista-t-il gentiment. Luthor était aussi secret qu’il était emporté. Ils ne se comprenaient pas bien, ce qui l'attristait...

Il finissait de boucler son ceinturon lorsqu’entrèrent Emmon Cuy (@Sacha) et Andrew Vouyvère, (@Cersei Lannister) bientôt suivis de Garth Hightower  (@Aemma Massey), avec qui il dirigeait les troupes. « Le bonjour, messers. » Tyrell trouva aux deux premiers l’air fatigués et se demanda s’il partageait le même – à moins que ce ne fut Trois-Tours…il avait bien conscience que cela faisait beaucoup, une raison de plus pour que le siège ne dure pas. Tous, lui compris, étaient impatients que cela cesse. « Rien de nouveau du côté des Négrebar, en effet. Mais ser Garth et moi-même avons confié à Agramore Flowers le soin de mener quelques recherches et il doit nous… »

...Faire un compte rendu tout à l'heure ? Theodore n’acheva pas, interrompu par ledit Agramore (@Selyse Dunn), qui venait de faire dans la tente l’entrée la plus spectaculaire de la matinée. Cela lui fit arquer un sourcil surpris, mais c'était pour annoncer – enfin – une bonne nouvelle, ou du moins une piste, une possibilité de dénouer le sac de nœuds dans lequel ils étaient pris, alors il pardonna aussi sec cette entrée en matière cavalière. « Ah ! Un homme selon mon cœur ! Félicitations, ser Agramore. » S’exclama Tyrell, tapant du poing sur la table, ragaillardi, avant d'examiner le dessin à son tour. Décidément, Gris-Acier savait s'entourer...pas comme lui, à qui Willos avait flanqué ce fichu ambitieux de ser Simon (@Alla Tyrell) ...ou était-il encore celui ci, d'ailleurs ? Dans son dos, bien sûr, à abreuver son fils d'idioties. « Voilà peut être notre meilleure chance, messers. Combien d’hommes pensez vous qu’il faudra pour dégager la porte ? Combien de temps ? Et pensez-vous qu’ils risquent de nous voir ? Et combien pensez vous pouvoir en faire entrer par là si nous y parvenions ? »

Il posait ces questions parce qu’il fallait les poser, bien sûr, mais déjà son esprit avait bondi et il extrapolait, se projetant vers une porte dégagée et leur donnant accès à tout le château pour prendre les Négrebar à revers : « Bon, il faudra peut être faire diversion pendant qu’une partie d’entre nous dégage la voie – si vous avez des idées à ce propos elles sont bienvenues – mais une fois la porte ouverte nous entrons…nous nous déployons…et nous les prenons à revers pour nous rendre maitres du château. A moins que…nous attendions la nuit pour faire entrer un seul homme et qu’il nous ouvre grand les portes. Qui se sentirait capable de le faire ? » Des stratégies risquées, précaires, mais pas infaisables, que Tyrell était partant pour tenter sur le champ.

Le point noir apparaissait et disparaissait, fondant avec une lenteur énervante, et surtout à peine visible. Des chocs électriques commençaient à lui remonter depuis l'articulation des doigts jusqu'à l'épaule, mais son mouvement n'en devenait que plus méthodique à mesure que l'agacement s'agrégeait. C'était comme une étincelle pour l'exaspération qu'était son bois, et lui était plein d'huile. Les mouvements s'accélérèrent dans un bruit de coton et enfin, le point noir parut se dissiper sensiblement sous le morceau de chiffon, provoquant tant un gloussement victorieux qu'une frénésie furieuse. Il s'agrippa au marbre pour se donner de l'appui et mordit sa lèvre inférieure, concentré sur la grossièreté récalcitrante. La sueur s'était mise à perler sur son front par petites goûtes uniformes, mais il ne paraissait pas s'en rendre compte, absolument absorbé par sa tâche. Par la tâche. Le petit rond informe venait de prendre une teinte légèrement grisâtre, puis tout à fait anthracite, avant de s'étaler dans un gris d'étain, et de définitivement disparaître. Il lui fallut encore quelques allers-retours pour s'en assurer, mais tout avait enfin disparu. Bertrand se redressa, vaguement essoufflé, les yeux rivés sur le socle comme s'il craignait une hallucination. Il n'y avait plus rien.
« Le monde est poussiéreux. »
Ses yeux remontèrent lentement et contemplèrent la statue. Il l'adorait. Une petite statue, pas plus haute que deux pommes empilées, elle représentait un taureau sur le point de renverser un ennemi invisible. La légende familiale disait qu'il s'agissait d'une sculpture en pierre noire des Iles aux Crapauds. D'abord procession de pirates, elle fut troquée avec nulle autre que la Princesse Nymeria, qui l'emporta sur le continent lors de son passage par les Iles d'Eté. Bernard ne savait pas si c'était vrai et honnêtement, il s'en fichait ; l'histoire se suffisait à elle-même. Depuis quelques temps, la chasse aux imperfections était devenue son activité de prédilection ; d'un œil d'esthète, il sillonnait les couloirs et les chambres, s'érigeant en parangon de la propreté ascétique. L'ombre seule d'un grain de poussière - sa seule idée ! - parvenait à lui faire sortir l'arsenal d'assainissement. Parfois, son sujet de nettoyage entrait en perspective avec l'horizon lointain ou flottaient les drapeaux de... encore ! Une tâche. Il finissait toujours par relever la tête, parce que la négation n'était pas son genre, mais ne rien faire était insupportable.  
Dans la demeure, chacun avait trouvé de quoi se distraire du monde extérieur à sa façon. Du moins, Bertrand s'était assuré que tous les domestiques soient en permanence occupés et ne se laissent pas conquérir par un sentiment d'impuissance. Mais comme toujours, ce qu'on ne disait pas avait un écho étourdissant. Il fallait dire que l'écho ne venait pas nécessairement de l'extérieur, car le silence le plus significatif venait de Lady Mildred.  
« Monsieur, dit une petite voix dans son dos qui le fit sursauter, elle a de nouveau renvoyé son...
- Et qu'est-ce que vous voulez que j'y fasse ? » Bougonna-t-il sans laisser la servante terminer ce qu'il savait déjà.  
En la voyant, il leva les yeux au ciel, s'essuya le front et sortit de la pièce. La petite était impressionnable et effrayée, craignant que la Lady fasse un malaise ou ne meure de faim, mais Bertrand savait bien que la seule chose dont elle pouvait mourir, c'était de honte. Néanmoins, il était l'un des rares domestiques à l'avoir connue avant son départ. Devant la porte, il étira sa nuque et réhaussa le menton en passant une main scrupuleuse pour inutilement défroisser ses vêtements. Il toqua, puis fit ce qu'il avait déjà ponctuellement fait pour calmer les nerfs de ses dames et gazouilla à travers la porte en attendant l'autorisation :
« Ma Dame, vous n'avez encore rien touché. S'il-vous-plait... »
Sa phrase ne connut pas de fin tant elle était banale : ils étaient tous épuisés.

Quelques coups à sa porte la firent sursauter. Perdue dans ses sombres ruminations, et recevant si peu de visites, elle ne s'était pas attendu à être dérangée
si tôt après le déjeuner. A moins qu'il ne s'agisse...?

« Ma Dame, vous n'avez encore rien touché. S'il-vous-plait... »

Le minaudement de l'intendant parvint quelque peu étouffé à ses oreilles mais elle n'était pas encore sourde, que les Sept l'en garde, et elle comprit parfaitement ce qu'il attendait d'elle. Soupirant, elle se détourna de la fenêtre, sentant une pointe d'agacement percer parmi la miriade d'émotions qui la secouaient alors. Elle alla s'asseoir dans un fauteuil non loin, ajustant les plis de ses jupes. Elle hésita quelques instants, tentée de conserver le peu de libre arbitre qu'elle possédait encore en ce lieu, en lui refusant l'accès à son antre.

« Entrez Bertrand. » consentit-elle finalement, presque à contrecœur.

Presque, car elle ne pouvait se permettre de chasser un visiteur alors qu'elle menaçait de devenir folle à force d'enfermement. Elle plus que tous les autres, probablement. C'était bien là tout le tragique de la situation. Et puis l'homme, bien que peu conventionnel, n'en restait pas moins une tête connue et d'une compagnie appréciable, pour peu qu'on s'habituait à ses manières. Pour être honnête, Mildread l'aimait bien, même si elle s'était bien gardée de lui en faire part. Alors qu'il pénétrait les lieux, elle lui jeta un regard acéré.

« Que voudriez que je fasse d'autre ? » cracha-t-elle pour tout préambule, « Impossible d'avaler quoique se soit avec tous ces spectateurs à nos fenêtres ! Mais vous devriez vous en réjouir, mon cher, il y aura bientôt une bouche de moins à nourrir. Un soucis logistique de réglé. Cela vous permettra de faire quelques économies et de tenir ce siège encore quelques jours de plus, avant que vous ne mourriez tous de faim ... »

Elle ne souhaitait cela à personne ici, quand bien même était-elle en désaccord avec les décisions prises par son neveu. Néanmoins, comment imaginer une issue différente ?

Elle observa attentivement son interlocuteur, tentant de lire sur ses traits les signes d'inquiétude que ne manquerait assurément pas de provoquer sa tirade. Que pouvait donc bien passer par la tête d'un domestique dans un cas comme celui-ci ? Sa loyauté allait-elle jusqu'à envisager de mourir pour les décisions de son Seigneur alors même qu'elles ne lui apporteraient au mieux rien de plus qu'un travail supplémentaire, ou différent ? N'étaient-ils pas toujours les perdants de l'histoire ?

Fidèle au poste, jour après jour, Morgil Hill se trouvait une nouvelle fois sur les remparts de Bandallon alors que le soleil se levait. Silencieux, observateur, attentif, il regardait les armées loyalistes qui s’étaient installées devant la forteresse quelques semaines plus tôt. De l’autre côté, se trouvait la flotte Bieffoise. Bandallon était assiégée de toute part et pourtant, elle tenait encore. Cela lui fit décrocher un léger sourire. Il savait pourtant que rien n’était encore gagné, que ce calme ne durerait pas, que les sièges ne resteraient pas des sièges. Il s’était même attendu à un assaut des armées Tyrell mais il n’en fut rien, laissant de nouveaux jours de répit au seigneur des lieux. Terminant son rituel matinal, Morgil quitta alors les remparts et lança à un soldat sur son chemin.

- Au moindre mouvement, vous me prévenez. Au moindre bruit, vous me prévenez. C’est clair ?

Le soldat répondit par la positive d’un signe de tête et Morgil passa son chemin, prenant le chemin du bureau d’Addam. Une nouvelle journée commençait à Bandallon et il y avait, comme toutes celles avant, fort à faire. Morgil était devenu un ami et un confident du seigneur des lieux, en qui il avait une confiance aveugle et il le bâtard de l’Ouest le lui rendait bien. Considéré enfin à sa juste valeur, il devait tout à Addam et rien à sa famille d’origine qu’il reniait tout simplement. Il était l’humble serviteur de lord Addam Nègrebar (@Torrhen Holt) et ne vivrait que pour le servir, le protéger et le sortir de cette situation désastreuse dans laquelle il se trouvait désormais. Il le croisa finalement, sortant de ses appartements. Cela tombait plutôt bien.

- Prêt pour cette journée, mon seigneur ? Rien n’a bougé du côté des troupes Tyrell. J’ai mis au parfum tous les gardes. Au moindre mouvement, nous serons prévenus.

Morgil était un homme confiant, fier, orgueilleux, sûr de lui. Nul ne sait pourtant ce qui va se passer aujourd’hui tout comme ils ne savaient pas ce qui se passerait les autres jours, mais Morgil Hill restait confiant, un peu trop peut-être. Ça, l’avenir le lui dire et peut-être plus rapidement que prévu.

Elissa était matinale, elle avait quitté Addam et leur quartier pour allait s’occuper de ses enfants. La seule chose qu’elle pouvait réellement faire depuis que Bandallon était assiégé par les loyalistes. Elle qui aimait partir se balader à cheval, ne pouvait plus le faire. A part aller s’occuper rapidement de l’animal qui était le sien, cela était très restreint. La jeune femme prenait donc son petit déjeuner avec ses enfants. Ses enfants étaient apeurées face à la situation, ce qu’elle comprenait parfaitement. Ce n’était pas évident de se retrouver confiner et sous la menace constante de force armée à leur âge. Son aîné, Elwood tentait de ne rien montrer, s’occuper de son petit frère et de sa petite sœur pour les rassurer.

Ce matin-là, il donna quelques myrtilles à sa sœur afin qu’elle les mange, qu’elle prenne des forces. La peur et l’angoisse nouaient l’estomac de la petite. Elle pouvait aisément le comprendre. La rousse leva les yeux vers son fils quand ce dernier lui demanda si Addam allait se joindre à eux. Elle eut un doux sourire chagriné, elle ignorait ce qu’avait prévu son époux.
« Je l’ignore Elwood (@Aemma Massey). Votre père est fort occupé avec la situation actuelle. »

La dame se leva et alla prêt de sa fille pour la prendre dans ses bras, lui déposa un léger baiser sur le sommet de son crâne pour la rassurer et l’encourager à manger. En voyant un serviteur passer par là, elle l’interpella et lui souffla à voix basse :
« Dites à mon époux (@Torrhen Holt) que ses enfants désirent le voir. Insistez sur le côté urgent ou important, grossissez le trait si nécessaire. »

Addam pouvait parfois être têtu, il n’était pas facile à vivre tous les jours. Mais pour ses enfants, elle estimait qu’il pouvait faire un effort.

Des lunes que la situation était au point mort. Le soleil s'était levé bien des jours au-dessus des remparts de la forteresse, et jamais Leo n'avait manqué d'être à leur sommet à ce moment crucial de la journée. Homme de guerre, il n'avait pourtant jamais été aussi longtemps du côté de ceux qui se retrouvaient acculés. Qu'il s'agisse des voiles zébrant l'horizon ou des bannières qui leur répondait à terre, le paysage restait le même. C'est à peine s'il eut remarqué les tentes que l'on montait ou déplaçait parfois pour l'arrivée d'une énième nobliaud du Bief, comme les Tyrell en avaient tant à leur service. Lui-même marié à une cousine de l'homme qu'il ne considérait plus comme son suzerain, il avait du faire le nécessaire pour s'assurer que son épouse ne trahirait pas leur cause.

Unis depuis des décennies devant les Sept, cela ne l'avait pas empêché de condamner Olenne Tyrell à une retraite de complaisance dans leurs appartements depuis le début du siège. Car si elle n'avait rien tenté pour révéler à sa parentèle les réelles intentions de Bandallon jusqu'ici, Leo ne pouvait se permettre de douter la concernant. Leur situation était déjà bien trop périlleuse comme cela. Imaginer son épouse tenter de prendre contact avec leurs assiégeants ne ferait que peser sur son esprit calculateur mais fatigué. Dévoué à sa maison et aux siens avant tout, l'oncle du Sire de Bandallon ne supporterait jamais d'amener la ruine de sa maison par son union. Tout comme pour sa sœur (@Melleah Yarwyck),  l'entourage et les serviteurs de sa femme avaient donc petit à petit diminué en nombre. Seuls les plus fidèles membres de leur maisonnée pouvaient désormais la visiter.

Assurer la défense de la forteresse était désormais son fardeau. Pour son neveu et seigneur, il devait faire payer à leurs ennemis - autrefois alliés ou parents - la moindre once d'audace qu'ils mettraient dans l'assaut de ces murs. Aucun renfort ne viendrait. Il en avait depuis longtemps gagné la certitude à ne voir aucune bannière de leur camp se dessiner au loin. Cela le rendait plus amer encore. Ses hommes en faisaient les frais, Leo exigeant d'eux une discipline de fer et une attention de tous les instants. Ils œuvraient pourtant à protéger le principal chef-lieu rebelle depuis leur défaite: Noircouronne. L'attention de Hautjardin était portée sur eux pour le moment. Et si cela lui coûtait, Leo tiendrait le plus longtemps possible la place. Rendre coup pour coup, faire payer à leurs assaillants son entêtement. Tel était son devoir, au-delà même des considérations d'allégeance ou de politique. Il était le chien de garde de la forteresse.

Ses occupants pourraient dormir tranquille tant qu'il veillerait.

- « Je veux un rapport toutes les heures. Le moindre mouvement doit m'être signalé. », rappela t-il à la sentinelle qui occupait le chemin de ronde avec lui.

Connaissant son rôle depuis bien des semaines, l'homme ne dit mot et se contenta d'acquiescer. Laissant l'occasion au vieux guerrier d'aller tromper l'ennui et sa hantise de l'assaut en allant inspecter l'armurerie du château de ses ancêtres.