[EVENT] Bataille de la Baie des Crabes

Porté par notre victoire, nous nous élançions au devant des flots, croyants en notre bonne étoile. J’étais moi aussi, pris d’une bouffée de confiance en moi. Le Formidable Idiot n’était certes pas dans un état glorieux mais notre petite victoire nous avait redonné la vigueur qu’il manquait à l’équipage, je regardais fièrement mes hommes, ils étaient tous concentrés à leur tâche, l’ombre sur les visages avait disparue. Quelques hommes s’occupaient de faire remonter l’ancre de notre navire, nous voguions vers un groupe de bateaux qui s’engageaient dans une bataille effréné, nous allions foncer dans le tas d’un coup, espérant compter sur l’effet de surprise. Mais alors que notre course était à peine entamée et que notre ancre était encore en train d’être remontée, un vaisseau se jetait à notre encontre, une sorte de gros bâtiment affichant les couleurs de la Compagnie Dorée, ma dernière rencontre avec l’un de leurs navires m’était resté en travers de la gorge.
Mais le navire adverse avait été trop lent, au lieu de nous accoster, nous étions tellement pris dans notre élan que celui-ci avait juste le temps de frôler notre poupe. Je regardais la scène, observant cette tentative ratée d’un œil ironique. J’étais rassuré dans mes convictions sur ma propre capacité de marin. “La misaine ! Libérez la misaine ! Prenons un peu de vitesse messieurs !” Je posais ma main sur l’épaule du timonier. “On ne s’arrête pas pour lui, on continue. Le temps qu’on atteigne le groupe de navires à quatorze heure, l’ancre sera remontée et en dessous ils auront finis de colmater les brèches un peu plus sérieusement.”
“Bien cap’ !”
Je sentais dans la voix de mon officier une certaine fierté, visiblement lui aussi semblait très heureux de l'amélioration de notre situation. La misaine était ouverte par un groupe de marins et le vent s'engouffrait alors directement dedans, nous propulsant encore plus vite. Il y avait désormais entre nous et le navire de la Compagnie Dorée une distance suffisante. Je ne pouvais m’empêcher de narguer notre adversaire de quelques gestes d'au revoir de la main.

La bataille faisait rage depuis plusieurs heures à présent, à en juger par la lumière du soleil, de plus en plus forte même à travers les nuages. Mais pour la première fois depuis le début de la bataille, la Tortue Sanglante se trouvait menacée. Un navire de guerre ennemi fondait droit sur le bâtiment de Lord Estremont, toutes voiles dehors. Il n’était pas encore à porter de tirs qu’Aemon entendait déjà les archers hurler des propos belliqueux à leur attention.

- Pourritures de traîtres, pesta-t-il pour lui-même avant de se tourner vers son second. Que les archers se tiennent prêts !

Il fit virer de bord le navire lui-même, le faisant pivoter sur la gauche afin d’éviter la salve de flèches que son nouvel ennemi venait juste de décocher dans sa direction. Il jubila, tout comme ses hommes, en voyant ces mêmes flèches plonger tête la première dans les eaux de la Baie des Crabes.

- ARCHERS ! EN POSITION !! beugla-t-il à ses hommes postés sur le pont.

A nouveau, il fit virer de bord la Tortue Sanglante, vers la droite cette fois, pour revenir vers son assaillant. Les voiles du navire gonflèrent sous l’effet du vent qui s’y engouffra soudain et propulsa la Tortue Sanglante sur une trajectoire idéale pour permettre à ses soldats de faire feu sur l’ennemi.

- ENCOCHEZ !!!

Comme un seul homme, les archers bandèrent leur arc, prêts à tirer sur l’ordre de leur commandant et capitaine. Aemon patienta juste ce qu’il fallait pour être sûr de ne pas rater sa cible, à l’instar de ce qu’il s’était heureusement passé pour lui quelques secondes plus tôt. Soudain, il hurla un furieux « TIREZ !!! » et les flèches s’envolèrent droit vers l’ennemi. Le spectacle qu’elles firent sur le navire et les hommes face à eux engendra une violente vague de cris d’enthousiasme sur le pont de la Tortue Sanglante. Toutefois, l’ennemi était toujours de ce monde, ce qui rembrunit le capitaine au point de ramener le calme sur son navire :

- CE N’EST PAS ENCORE TERMINE ! NOUS NOUS REJOUIRONS QUE LORSQUE NOUS LE VERRONS REJOINDRE LES ABYSSES !!!

Lancé de dé #3, navire en bon état (vs. Humfrey Stone):

@Ilyn Selmy  | dialogue : ff99cc | pensées : italique

Lorsqu'il s'était élancé ce matin même dans la bataille, il avait craint le feu de son ennemi. Mais c'était finalement l'eau qui le menait à sa perte. Elle avait remporté ce bras de fer. Elle avait englouti les restes du navire avec tellement de rapidité que les hommes l'avait abandonné. Un certain nombre sauta en mer avant qu'il ne soit trop tard, alors que d'autres, comme Arstan, continuèrent jusqu'à la dernière minute. Il ne restait plus rien du Le Lady Fell à présent. Seulement des morceaux de bois éparpillés dans les tumultes de l'océan et une immense carcasse qui disparaissait dans le fond marin. Le Lady Fell, navire qui était nommé en l'honneur de cette femme qui était resté loyale à son serment, perdant sa tête pour avoir soutenu sa reine, n'était plus.

Tandis qu'il nageait avec rapidité, il pensait à ce navire, à ce sentiment de rage qui bouillonnait en lui. Il se moquait éperdument d'avoir perdu cette bataille, bien que très heureux ne pas avoir été le premier à perdre son bâtiment, mais il était véritablement attaché à ce navire. Il avait été sa demeure durant des années, son but ultime. Et c'était ça le plus douloureux. Il avait l'impression d'avoir perdu un vieil ami. À présent, alors que la rive était à portée de vue, il se sentait vide. Qu'allait-il faire maintenant ? Qui était-il sans son navire ? Au moins, il était vivant. C'était déjà ça.

Le dé du destin:

Lancés à pleine allure, notre allégresse allait vite se dissiper. Les navires vers lesquels nous nous élancions semblaient jusqu’ici être à l’état de siège, en cours d’abordage. J’avais bêtement confondu un pavillon orageois avec ce qui était en réalité celui d’une petite maison valoise. Nous venions de nous avancer vers ce qui était loin d’être un abordage mais une réparation d’un navire valois par la flotte Grafton. A peine nous étions arrivé à porté de tir que l’ensemble des bâtiments adverses nous arrosait d’une pluie de flèches enflammées. La première volée tua beaucoup d’hommes par surprise. Pris au dépourvu je trouvais de quoi me protéger alors que je voyais mon timonier tomber au sol, une flèche planté dans la gorge, une giclée de sang continuait à sortir de son cou, rythmée par les pulsations de son cœur qui petit à petit se calmait jusqu’à s’arrêter définitivement. Plus personne n’était à la barre et il régnait sur le pont une anarchie comme je n’en avais jamais vu. La grand voile était en feu et mon blason, l'hippocampe rayé de rouge, disparaissait dans un nuage de fumée noire.

Mais je ne perdais pas espoir, je ne perdais alors jamais espoir, j’avais connu des situations tout aussi dramatiques dans ma vie et je m’en étais sorti. Il était hors de question que je me laisse abattre. Je me relevais après une seconde salve de flèches qui mettait le feu à la misaine cette fois. Je prenais la barre en main, le pont étant jonché de cadavres, je voyais une main se débattre sous une pile d’hommes, quelques archers tenter de rendre coup pour coup à nos adversaires. Le navire au blason inconnu que j’avais confondu plus tôt s’approchait de nous. “Il vont nous couler, jeter leur tout ce qu’on a comme inflammable !” A peine avais-je donné l’ordre que les tonneaux d’enduits pour enflammer les flèches étaient jetés à la mer. “Mais pas maintenant… Mais qu’ils sont cons… Mais oh…” Ce n’était pas de la panique mais je ne pouvais m’empêcher de rire. Voilà une magnifique critique de la façon de diriger de mon frère, loin des hommes, nous étions assuré d’être des étrangers à bords et nos ordres n’avaient aucun sens. Monford, lui et son mépris de merde.

J’avais à peine le temps de finir de rire que d’un coup sec le navire ennemi défonçait notre proue et de sa longueur ravageait le pont du Formidable Idiot d’une salve de flèches. Si au moins ils avaient voulu nous aborder j’aurais eu quelques chances de m’en sortir mais visiblement les dieux n’étaient pas avec moi aujourd’hui. “Ma foi, pourquoi pas ? Après tout !” Je lachais la barre. Je voyais le maître voilier monter sur le pont supérieur, une flèche plantée dans le bas du ventre. “Capitaine ! Qu’s’é qu’on fait ?!” j’attrapais le marin par les jambes et sans qu’il comprenne ce qu’il lui arrivait je le renversais par-dessus bord. “Messieurs, ce fût un plaisir, saluer les valois de ma part !”

Je posais le pied sur la préceinte, donnant un grand salut de la main au bâtiment ennemi, puis dans un rire particulièrement aiguë je me jetais à l’eau. Le Formidable Idiot était déjà en train de couler. Je nageais jusqu’à un morceau de ce que je reconnaissais être notre beaupré qui flottait paisiblement depuis que le bateau valois l’avait arraché brutalement à l’avant de mon navire. Je regardais mon premier bateau s’enfoncer pathétiquement dans l’eau, quelques hommes se jetaient à la mer en tentant de m’imiter, c’était trop tard. Dans un grand fracas le mât d’artimon s’effondrait sur le pont, le transperçant et accélérant l’inévitable. Dans un mélange de feu et de bouillonnement, le Formidable Idiot était engloutis par les eaux devant moi.
“Il faudra absolument que je raconte ça à Vaelle ! Haha !”. Je n’avais pas perdu mon cynisme et quitte à rire du destin autant que ça soit surtout quand il s’en prenait à moi. J’allais, à ce moment, soit mourir soit être capturé par l’ennemi. Je trouvais quelques réconfort dans l’idée de mourir maintenant.

Face au spectacle qui se déroulait sous ses yeux, Stannis Baratheon tentait de contenir sa colère. Quarante navires constituaient sa flotte. Quarante ! Mais cela ne suffisait apparemment pas pour venir à bout des flottes Grafton et de la Compagnie Dorée. Conjuguée aux forces Velaryon, la flotte du Cerf s’épuisait à mesure que le combat maritime se poursuivait. Menant son navire vers un nouvel ennemi à combattre, Stannis remarqua un nouveau bateau en difficulté. Son équipage et lui étaient encore hors de portée et il décida alors, face au silence insupportable de Neina, d’aller porter secours à cette nouvelle victime. Il n’arriva malheureusement pas à temps pour sauver le navire qui sombra dans les flots déchaînés de la Baie des Crabes. Quelle bataille ! Vaincront-ils l’ennemi ici et aujourd’hui ? Plus la bataille avançait, plus Stannis ne le croyait plus. Mais que fallait-il faire alors ? Partir ? Poursuivre le combat ? Le Cerf ne savait pas trop. Plongé dans ses pensées, il ordonna qu’on mette le navire à l’écart de la bataille, de se tenir à distance des navires qui pourraient l’attaquer. Il avait besoin de rassembler ses pensées, calmer son esprit, ne pas s’énerver. C’est alors qu’un des matelots hurla sur le pont.

- UN HOMME À LA MER !!! UN HOMME À LA MER !!!*

Stannis regarda alors par-dessus bord et aperçut comme tout le monde cette tête blonde qui avait sauté de son navire. Le bâtard de Lamarck (@Aurane Waters) n’était pas mort finalement. Voilà un homme de plus dans son équipage mais là n’était pas l’objectif de Stannis. Il ne voulait pas finir la bataille avec un seul navire et tous les capitaines dessus. L’ennemi n’aurait alors qu’à lancer une attaque et gagner la bataille en un coup. Laissant ses hommes s’occuper du capitaine déchu, Stannis retourna près de Neina et lui demanda alors conseil. Plus que jamais, il avait besoin d’elle. Il avait besoin de la lumière de R’hllor.

Lancé n°4 : Sauvetage d'Aurane

Après son ingénieux triomphe, l'Impératrice avait fait demi-tour sous les ordres de son capitaine, à présent suspendu à l'échelle de corde qui menait au premier étage du grand mât, goûtant l'air marin avec un plaisir tout différent. Leur manœuvre les avait éloignés de la bataille, et c'est exaltés qu'ils y retournaient, prenant le temps de savourer cette victoire leur ayant rappelé cet avantage qu'ils avaient sur leur ennemi, qui était celui d'être nés ici et de vouloir y mourir. Les cheveux au vent, crépus par le sel et le soleil reflété par les vagues, Marwyn regardait les navires se déchirer dans des craquements qu'il entendait malgré le tumulte de la mer. Des bourrasques balayaient une fumée noire sur fond de flammes éparses, peignant une fresque infernale toute particulière, où les vagues engendraient un feu ardent qui noircissait le ciel... Quel chaos ! Les épaves allaient s'échouer sur les côtes du Val pendant des mois entiers et se rappeler à la mémoire de chacun, que des hommes étaient morts un jour ici. Marwyn se renfrogna tandis qu'ils se rapprochaient, cherchant du regard le ventre mou d'une bête prête à succomber : ils n'en étaient plus à reluire d'un lustre rutilant et fier, ils avaient déjà tous un pied dans l'eau, l'autre dans la tombe. La seule chose qu'il pouvait faire, c'était noyer autant de loyalistes que possible et leur faire regretter qu'ils eussent un jour sorti leur poing de leur poche. Ses ennemis, il les avait d'abord envisagés sur un pied d'égalité, tant en termes de stature que d'honneur, mais le blocus que la couronne leur avait imposé avait tout changé. On pouvait considérer que la guerre avait tous les droits, mais lorsque l'on naviguait depuis aussi longtemps que Marwyn, on savait que la distinction entre la guerre menée entre chevalier et celle menée contre des civils était aussi claire qu'un pied posé à terre ou sur le plancher d'un bateau.  
« A bâbord ! » Cria-t-il soudain avec force en pointant sa main vers un navire dont l'apparence s'apparentait davantage à celui d'une épave.
Le Cerf Ardent s'en éloignait, voiles aux vents, abandonnant derrière lui un agonisant qu'il n'avait même pas pris la peine d'achever proprement. Marwyn sentit monter un élan de rage inutile à l'égard d'un sentiment de négligence. Il faillit donner l'ordre de le poursuivre, encore excité par leur récente réussite et se sentant particulièrement invincible au milieu des décombres embrasées et des marins fatalement séduits par le chant des sirènes...  
« Mon capitaine, l'Etoile des Mers...(@Jayne Bracken) l'interpella son second, le regard tourné vers ce navire qu'ils dépassaient, et qui avait commencé à prendre l'eau.
- Sortez les planches ! Tirez les cordes ! » Ordonna un officier, après qu'ils eurent tous constatés des survivants à bord du navire.  
Marwyn se dirigea rapidement vers l'un des ponts de fortune qui avait été établi entre l'Impératrice et l'Etoile des Mers, juste à temps pour voir son capitaine en descendre. On pouvait ne pas considérer ça comme une tournure favorable, mais pour avoir vu tant de gens de qualité mourir sur le champ de bataille, Marwyn s'élança pour fermement serrer la main de son allié, en remerciant les Dieux de l'avoir épargné :  
« Templeton ! Mon ami, c'est une véritable chance... une chance. Mais ne vous en faites pas, pour chaque chose qu'ils nous auront pris, nous en prendrons dix. »

Sauvetage de Conrad Templeton:

Un moment, le combat continua comme si de rien n’était, rien de décisif ne se produisant. Ils trainaient trop, songea Isembard, il fallait tenter d’enfoncer ou ils seraient enfoncés eux-mêmes. Prophétie auto-réalisatrice, sans doute, car il ne vit pas venir le mouvement suivant du navire de Torth, qui les percuta par l’arrière, enfonçant le bastingage du château où il se trouvait avec son second et le projetant au sol. Sans même avoir le temps de jurer, Isembard perdit l’équilibre et parti en avant dans les escaliers du château arrière. Sonné, il se releva tant bien que mal dans la confusion la plus totale pour chercher son second du regard, mais ne le vit nulle part. A première vue, le gouvernail avait tenu bon et le château n’était pas totalement hors d’usage, mais rapidement, une voix paniquée le détrompa : « VOIE D’EAU OUVERTE SOUS LE CHÂTEAU ARRIERE ! »

Arryn se précipita, entreprenant de descendre les quelques marches qui menaient autrefois à sa cabine. Tout avait été ravagé par la proue et surtout l’eau montait par une fente plutôt impressionnante à une vitesse où il serait probablement difficile de l’arrêter, sauf s’ils avaient beaucoup de chance. Par là passait la lumière et on distinguait le safran, pas encore inutilisable mais bien endommagé lui aussi.  La flotte montait doucement. Elle lui arrivait déjà jusqu’aux genoux e ça continuait. Arryn avait d’ailleurs l’impression que le Rédemption penchait sinistrement vers l’arrière en se soulevant au dessus des flots. Il remonta en courant sur le pont : « Et merde ! Charpentiers ! Redescendez et rebouchez-moi ça ! » Croisant son second, il lança du ton ferme de celui qui est habitué à gérer l’urgence : « Que tous ceux qui peuvent aider aident à reboucher ! » Quant à lui, se précipitant vers la cloche qui servait d’alarme il se mit à la sonner comme un forcené pour attirer l’attention de ses alliés. C’était la preuve que la situation était dramatique, mais pas encore désespérée, mais s’il vit la panique de ses hommes quand l’un des charpentiers lui lança : « On coule, capitaine ! » Arryn se contenta de rugir en réponse : « VEUX PAS LE SAVOIR ! REBOUCHEZ ! DU NERF MES GAILLARDS ! » Un équipage paniqué abandonnerait plus facilement. S’il le fallait il les laisserait partir, mais hors de question de les alarmer plus qu’ils ne l’étaient déjà. Il lança donc à voix basse à son second :  « S’ils ne parviennent pas à reboucher rapidement, faites évacuer, Edgerran. Je resterais avec les volontaires pour garder le Rédemption et affronter Torth. Il ne va pas tarder à donner l’assaut. »

C’était sa dernière bataille. Son dernier voyage. Et c’était son rôle. Rien de grave, donc, juste quelque chose de normal. « Mais capitaine, si nous coulons… » Arryn sourit paisiblement : « Je coulerais avec mon navire, gamin. Mais on n’en est pas encore là. ECOPEZ, REBOUCHEZ, PLUS VITE QUE CA, ET PREPAREZ VOUS A L’ASSAUT ! » Car maintenant, l’Orageois allait sans doute vouloir tenter sa chance. Il tira son épée pour se battre, haranguant son adversaire. Arryn était marin avant d’être soldat, mais il ne serait pas dit qu’il ne savait pas défendre sa peau : « Allez viens, Torth, qu’on en finisse ! » Il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour résister, se sauver, et surtout sauver les hommes sous sa responsabilité, mais Arryn était résigné : un capitaine n’abandonne que le dernier son navire. S’il l’abandonne. Et ce n'était pas son genre.

Tout n'était plus que chaos, fracas de coques brisées et vagues disloquant les plus malchanceux des navires au gré des flots. Les côtes de la région se couvriraient pendant des semaines de corps en nombre, offrant aux crabes un festin pantagruélique. Lui-même en difficulté, sa coque endommagée sans que ses hommes aient pu y remédier, Ser Marq se sentait pourtant plus vivant que jamais. Né l'épée à la main, le mercenaire se sentait à sa place dans le vacarme de la bataille. Qu'elle soit sur terre comme en mer, l'officier de la Compagnie Dorée ne s'était pas tant distingué par ses talents de meneur que son éternelle motivation pour le conflit et le gain qu'il finirait par en retirer. Hurlant donc sur ses pauvres marins désœuvrés pour remettre en ordre de bataille La Manticore et s'engouffrer à nouveau au milieu de la "mêlée", l'épée-louée trépigna d'enthousiasme lorsque la fumée se dissipa l'espace d'un instant.

Cramponné au bastingage du navire à scruter les alentours lorsqu'il ne beuglait pas ses ordres, il distingua avec bonheur une bannière des plus prestigieuse et connue flotter en vent. Et même si l'étendard au cerf embrasé était tout aussi flétri que celui des mercenaires d'Essos, leur meneur ne put laisser passer une nouvelle occasion d'envoyer par le fond le suzerain de l'Orage. Dans l'instant, il en oublia toute notion de prudence. Emporté par sa soif de gloire et l'ambition qui le prenait à nouveau, Ser Marq harangua une énième fois ses hommes.

Allons, marauds ! Voyons si le Maitre de la Lumière est toujours avec ce chien de Baratheon ! Fendons les vagues et sus à l'Orageois !

Beaucoup moins enthousiaste qu'auparavant, son équipage obéit avec défiance. Craignant tout de même d'avantage le courroux de l'irascible coupe-jarret, ses hommes mirent en branle la coque de noix amochée qu'était devenue La Manticore avec difficulté. Ses voiles en parties déchirées, sa coque amochée, le navire parvint à se frayer avec difficulté un chemin au travers des débris. Avec en ligne de mire le Cerf Ardent de Stannis Baratheon, les suppôts de la Compagnie Dorée comptait user de sournoiserie pour prendre par surprise le seigneur d'Accalmie, occupé à aider les ouestriens voués à nourrir les poissons. La volée de flèches qu'ils s'apprêtèrent à lui décocher, suivi d'un éperonnage en règle, leur fut refusée par la force des éléments, la Manticore se retrouvant déviée de son cap qu'elle s'efforçait si ardemment de tenir.

Qui m'a donné un équipage pareil !? Pas fichu de tenir un cap ! Ramenez-moi vers lui, ou vous finirez tous au fond de la baie !

Ce serait un véritable miracle s'il ne subissait pas une mutinerie avant la fin des combats... A moins que la Mère Nature ne s'en charge ? Car s'il n'était pas encore voué au naufrage, Ser Marq Mandragore se vit une nouvelle fois refuser la gloire du combat par la force des courants et des vents de la Baie des Crabes...

 

L’impact avait été rude mais il avait eu la vertu de sortir Byzan de ce trop plein d’assurance qui le caractérisait jusqu’alors.


Totalement dégrisé, il avait secoué la tête, adressant un vif regard sur le déroulé des évènements. Il avait déjà perdu quelques hommes mais rien qui n’empêcherait une contre-attaque digne de ce nom. Des hommes si vaillants, de si bons marins. Quel gâchis. Byzan cracha sur le côté, un mélange de sang et de salive. Il s’était mordu la langue, surpris par le choc qui avait ébranlé son navire. Mais cela ne serait pas suffisant pour l’empêcher de faire ce qu’il faisait de mieux. Un certain désordre régnait sur son bâtiment. Une chose tout bonnement intolérable dans un pareil moment ! L’air afflua à nouveau dans ses poumons avant qu’un cri ne s’échappe de sa gorge :


« Messieurs, vous avez connu bien pire épreuve ! A vos postes, le premier que je vois lambiner va nourrir les poissons ! Du nerf, virons de bord, nous pouvons encore les surprendre à notre tour ! »


Une certaine clameur lui répondit. Son équipage était composé de vrais marins, accoutumés au fait de manœuvrer le Cormoran Pourpre en pleine tempête. Une bataille n’en différait pas tant. Si un vent de panique avait soufflé quelques instants auparavant, chacun avait retrouvé son poste, avait remplacé un camarade trop blessé pour poursuivre sa tâche. La manœuvre fut vive, inattendue, violente. L’espace d’un instant, Byzan se demanda si ce lugubre bruit provenant de son précieux navire ou de celui de leurs adversaires. L’affolement qui régnait sur l’autre embarcation lui répondit.  La coque adversaire était ouverte sur le flanc. Il fallait passer à l’action dès à présent, la panique ne durerait pas !


Accompagné d’une partie de ses hommes, Byzan aborda le navire qui avait failli causer bien du mal à leur pauvre Cormoran. La résistance fut brève, presque inexistante dans certaines parties de l’embarcation. Il ne leur fallut que quelques minutes pour découvrir le capitaine, le tenir en respect et l’emmener avec eux. Un invité de marque, cela ne se refusait pas ! Il serait bien traité et devrait prier pour leur salut depuis leur cale s’il souhaitait retrouver la terre ferme.


Quant aux survivants de l’équipage… Byzan leur laissait le soin de maintenir leur navire à flots. S’ils y parvenaient. Après un ultime regard, le Myrien s’en retourna sur son navire, qui ne tarda pas à s’éloigner de sa proie précédente.

Il semble au Seigneur de la Vesprée que la Baie des Crabes n’est plus qu’un bain de sang ; il ne manque que le feu d’un dragon pour que l’adage Targaryen soit complet. Mais cela, il s’applique à ne pas y penser trop fort, car s’il a l’impression qu’il peut vaincre un homme, il craint ne pas avoir le courage d’affronter un dragon.
Un de ses matelots, muni d’une longue vue, n’a de cesse de lui rapporter l’abordage d’un navire allié ou l’engloutissement d’un équipage orageois. Il a envie de lui hurler dessus de se taire, de cesser de lui rapporter ces funestes nouvelles, mais ça ne serait pas sage. Au lieu de ça alors, Selwyn Torth hurle sur son capitaine de changer de bord pour attaquer Isambard Arryn (@Clifford Swann) par l’arrière-train. La colère le déborde d’ailleurs tellement qu’il formule cet ordre d’une façon nettement plus vulgaire qui ne sera pas retranscrite ici, mais cela semble avoir l’effet escompté. Après une série de salves de flèches insuffisantes, la proue de l’Etoile du Matin va s’enfoncer dans le château arrière de la Rédemption. Selwyn Torth s’autorise alors une nouvelle apostrophe hautement vulgaire signifiant en somme son ravissement d’être parvenu à largement abîmer le navire ennemi sans avoir trop endommagé le sien. Il peut voir, sur le pont ennemi, les traîtres s’agiter pour tenter de maintenir leur bâtiment à flots ; leur capitaine quant à lui entreprend de provoquer celui de l’Etoile-du-Matin en duel.

Le Seigneur de la Vesprée a en effet promis à son équipage un abordage ; toutefois derrière-lui, ce satané matelot à la longue vue hurle comment le Cerf Ardent est de nouveau dans la ligne de mire du Manticore, et qu’il risque de ses flèches une nouvelle attaque. Le bâtiment de la Compagnie Dorée est le premier que Selwyn Torth a voulu voir au fond des flots, déjà après une première attaque perpétrée par ces mercenaires contre son Suzerain. S’il ne parvient pas à savoir comment Mandragore (@Durran Bulwer) a pu emmener ses hommes jusqu’ici, il sait que s’il doit noyer quelqu’un, ce n’est pas un ouestrien. D’ailleurs, alors qu’il demande des nouvelles à la longue-vue, il apprend que Manticore n’a pas pu tenir son cap sur le Cerf Ardent, et qu’il se rapproche dangereusement de lui. Torth s’exclame alors, tournant le dos à Isambard et son épée bientôt rouillée : « MATELOTS ! Laissons la Rédemption dans notre sillage pour nous concentrer sur une autre cible qui doit finir au fond des flots : cette *BIP* de Mandragore » – là encore, l’édition n’a pas retranscrit la vulgarité vespréienne.

Torth laisse alors derrière-lui s’égosiller le vieil Arryn, son sort désormais dévolu à la bienveillance des vagues et à la merci des dieux. Devant lui, un autre adversaire se lève, et il ne doit lui laisser aucune place pour aller sauver des flots celui qui est probablement le dernier Arryn de Val (Selwyn n’en garde plus le compte). Le navire aux voiles myrtilles s’approche alors rapidement de celui de son ennemi, et une première salve de flèches est lancée, la plupart atteignant leur cible. Torth hurle alors à son équipage, pour leur donner du courage : « *** *** *** »  

Marwyn était reconnaissant lorsqu'il voyait les décombres qui flottaient à la surface et le sang qui se diluait dans l'écume ; il était reconnaissant lorsqu'il songeait à la chance qu'ils avaient eu de tirer des flots un allié inestimable, un capitaine expérimenté et une partie de son équipage. Mais ils commençaient à compter les morts et les blasons qui continuaient à flotter dans la brise au bout du mât d'un bateau ayant déjà touché le fond sablonneux. Combattre devenait difficile, entre la mêlée et les épaves, et ignorer les cris de certains matelots ballottés entre les vagues, mais qu'il était impossible de secourir, déchirait le cœur. De temps en temps, un officier jetait une corde à la mer pour tenter de sauver une pauvre âme, mais la plupart étaient trop épuisés pour s'agripper correctement et l'Impératrice ne pouvait pas s'arrêter à chaque fois...  
Néanmoins, inlassablement, Marwyn et son équipage scrutaient les vagues pour y déceler un allié en détresse, ou nécessitant de l'aide. Il regrettait presque d'être revenu au cœur de la bataille : la visibilité était devenue mauvaise et il était facile de se retrouver au croisement de plusieurs tirs, alors qu'à longer le périmètre, son survol et évaluation auraient été bien meilleurs. Parfois, quelqu'un criait en pensant avoir vu quelque chose, mais la plupart du temps, il ne s'agissait que de mirages et de tromperies fabriquées par une perspective distordue.  
De loin, il suivait le Cerf Ardent, qui était aussi prisé qu'un butin que chacun voulait se déchirer, d'autant que déjà, plusieurs hommes étaient montés sur son pont pour échapper à la mort, ce qui en faisait un paratonnerre valois, enclin à attirer leur foudre. Nombreux s'y étaient tentés, avec plus ou moins de succès, tant la mer semblait bouillir de tous ses gouvernails qui la remuaient sans cesse. Les manœuvres devenaient de plus en plus serrées, et certains bâtiments se penchaient tant pour virer de bord, qu'ils paraissaient à deux doigts de prendre l'eau. Déjà, un navire de la Compagnie Dorée avait été évincé par un violent remous dans sa tentative, tout de suite ébranlé par un duo de Soleils et de Lunes. Marwyn ne sut même pas qui défendre ou attaquer, tant tout paraissait incertain et chaotique ; il songea un instant à tenter sa chance et à s'attaquer, dans son état bien plus préservé, à ce trophée ultime ! Mais dans le sillon du Torth, il remarqua soudain une effigie familière prendre doucement le fond... Dans un râle pressé, il ordonna à l'Impératrice de prendre la direction du Rédemption (@Clifford Swann). Il pria que personne ne les atteigne avant eux, que personne ne tente d'achever un travail cruellement bâclé.  
«Isembard !» Cria-t-il, familier et avec le sourire, à ce vieux loup de mer avec qui il avait partagé la capitainerie goëvillaise.  
Connaissant la vieille branche, elle s'était dignement préparée à couler comme une enclume avec son bateau, mais Marwyn éprouvait seulement une joie débordante à diminuer le nombre de cadavres que la mer allait recracher sur leurs rivages. Néanmoins, il se rendait également compte que comme un trésor accumulé, son navire commençait à mirer celui du Cerf Ardent et risquait d'attirer les convoitises... Lorsque tout l'équipage survivant fut remonté sur son navire, il les employa sur son pont et somma la prudence : ils allaient devoir être rapides et malins, mais la bataille n'était pas encore terminée...  

Sauvetage d'Isembard Arryn:

Plus que les combats eux-mêmes, les éléments parurent se jouer du mercenaire batailleur et chevronné qu'était Ser Marq. Plusieurs fois déjà il avait eu à portée de ses flèches des cibles de choix. Plusieurs fois la puissance des courants lui avait refusé toute triomphe. Pourtant, tout autour, de nombreuses embarcations coulaient lentement. Leurs bannières déchirées brûlaient ou disparaissaient dans un bain d'écume. Des corps par dizaines, sinon centaines, étaient bringuebalés par les flots. Mais aucun de ces navires envoyés par le fond n'était de son fait. Cela l'enrageait peu à peu. Il n'avait pas prit la tête d'une partie de cette flotte pour faire de la simple figuration. Pourtant il était relégué à un rôle de second plan, cherchant vainement le succès du combat pour ne connaitre que l'acharnement des vassaux de Stannis Baratheon.

Encore une fois, le navire de Selwyn Torth rencontra celui du mercenaire, encore une fois la Compagnie Dorée ressentit la morsure du seigneur de l'Ile aux Saphirs sans pouvoir rendre la monnaie de sa pièce à l'adversaire. Se retenant difficilement de ne pas jeter par dessus bord un pauvre matelot hébété qui trainait autour de lui, l'irascible chevalier remonta tout entier le pont de son navire pour s'installer à côté du barreur. Occupé à scruter une ouverture dans la mêlée depuis la hauteur de la poupe, le sort lui fit éviter de peu une flèche destinée à faire taire ses beuglements. A la place, se sont ceux de l'homme à ses côtés qui retentirent, manquant d'arracher un rire sadique au vieux briscard. En se retournant pour trouver la source de cette énième nuisance, Mandragore posa ainsi son regard sur la main de son marin, clouée à la barre par une flèche des plus... chanceuses ?

Les crabes auront de quoi se nourrir ce soir ! Tu feras un appât de choix si ce rafiot finit par le fond ! Beugla le mercenaire d'un ton moqueur au malheureux en lui arrachant sommairement le projectile de sa main meurtrie.

S'effondrant de douleur, prostré au pied de la barre, Ser Marq ne s'embarrassa même pas de quérir de l'aide alors qu'il tenta tant bien que mal de reprendre le contrôle de la Mandragore. En vain, la puissance des flots l'éloignant à nouveau de son bourreau Orageois.

Ce ne sera pas pour aujourd'hui, Torth ! Trouva t-il tout de même l'audace de balancer par delà le bastingage de sa coque de noix qui flottait à peine.

Une chose paraissait certaine: il resterait un homme détestable jusqu'à la fin. Dusse t-il finir lui-même en pâtée pour les poissons.
 

Les flots étaient de plus en plus agités. Et pourtant, il n’y avait nulle tempête à l’horizon. Non, tous ces remous étaient dus aux bâtiments qui sombraient désormais jusqu’aux abysses. Byzan ne parvenait même pas à dire s’ils avaient l’avantage ou non. Peut-être était-ce le cas ? Peut-être avaient-ils perdu autant d’un côté comme de l’autre ? Durant quelques instants, le Myrien chercha du regard quelques pavillons amis. La Manticore se trouvait non loin, toujours en état de flotter, lui semblait-il. Il s’agissait du seul navire que Byzan pouvait identifier avec certitude à ce moment. Le temps n’en était plus à l’observation. Il ne pourrait avoir de certitudes qu’une fois tout cela terminé… et une fois que les poissons et les crabes auraient eu leur dû.


Byzan ne croyait pas si bien dire. Car l’attaque suivante fut bien plus violente que la précédente. Les coques se fracassèrent de plein fouet. Un cri, suivi de bien d’autres, résonna alors. Ce n’était pas des plaintes de quelques blessés mais celle d’un équipage qui avait découvert le pire. La coque prenait l’eau, brisée en plusieurs endroits suite aux attaques répétées ou encaissées depuis bien trop longtemps. Alors, le Myrien pesta. Retrouvant le contrôle de ses hommes, il envoya une partie d’entre eux juger de l’ampleur des dégâts. Il fallait écoper toute cette eau le plus longtemps possible ! Ils avaient encore la possibilité de faire quelques réparations de fortune ! La panique avait cependant prit comme un feu de paille et mobiliser toutes les forces restantes leur avait déjà coûté quelques minutes.


« Vous êtes des hommes ou des fillettes incapables de nager ?! Beugla le Myrien. Ecopez tout ça et plus vite que ça ! Ce n’est pourtant pas votre première voie d’eau, bon sang ! »


Mais il n’était pas trop tard. Pas encore. Des pavillons alliés n’étaient pas loin. Il avait cru en voir, quelques instants auparavant. Les ordres pleuvaient comme toute cette eau. Les Myriens retrouvèrent quelque peu de leur contenance, s’acharnant à sauver ce navire qui était le leur. Ils avaient affrontés bien des tempêtes ensemble et Byzan ne voulait pas croire que celle-ci serait la dernière. Cette guerre, ils espéraient tous en voir la fin. Ou au moins celle de cette bataille, s’il fallait ne pas se montrer trop gourmands avec le destin.

Stannis attendait une réponse de Neina mais aucune n’eut le temps d’arriver jusqu’à lui. Les navires s’entrechoquaient, se croisaient, sombraient dans les eaux profondes de la Baie des Crabes. Ils n’avaient pas le temps de discuter, il fallait de nouveau attaquer. Stannis reprit alors le commandement et donna l’ordre de foncer sur un navire ennemi, celui-là même qui l’avait attaqué quelques heures plus tôt. Cette bataille était devenue un grand n’importe quoi. Aucun camp ne semblait prendre le dessus sur l’autre malgré la supériorité numérique des loyalistes. Le coup stratégiques des rebelles avait bien été mené. Même Stannis aurait pu le saluer si cela ne le menaçait pas directement. Pensant aux capitaines sur son navire, à Neina, au mestre, aux hommes venus se battre pour lui, le suzerain de l’Orage ordonna l’attaque du navire du capitaine rebelle dont il ne savait rien. Que R’hllor les guide tous, que R’hllor guide le Cerf Ardent vers la victoire. Le navire sembla s’arrêter net et le choc fut d’une telle violence que Stannis passa par-dessus une rambarde et tomba sur le pont, inconscient.

- Lord Stannis, le bateau coule ! Réveillez-vous, Lord Stannis !!

Toujours allongé sur le pont, Stannis se réveilla avec un mal de tête et une douleur dans tout le corps. La chute n’avait pas été mortelle ni extrêmement douloureuse, juste assez pour agacer le suzerain qui se releva avec force, repoussant même le mestre qui avait tenté de l’aider. Les hommes sur le navire tentaient tenir le navire à flot mais le choc avait fragilisé la partie réparée, reformant un trou dans la coque. Le navire coulait de nouveau. Stannis hurlait les ordres de tout tenter mais seule l’aide d’un de ses alliés pourrait à nouveau lui être utile. L’idée de sonner la retraite lui traversa l’esprit mais que dirait-on de lui après cela ? Ne devait-il pas tenir, pour le roi, pour montrer aux rebelles que leur lourde trahison se paierait le prix fort ? Son regard se porta alors sur la bataille, les navires, ses alliés, ses ennemis. Il ne voulait pas être le perdant de la bataille de la Baie des Crabes.

Lancé de dés

A nouveau, les flots séparent l’Etoile-du-Matin du Manticore, comme une blague déjà trop racontée. Ils se sont écharpés, leurs navires respectifs usés par des heures de bataille navale, et quand ils ont cru, chacun, qu’ils vaincraient, un dieu des mers en a voulu autrement. Le Seigneur de la Vesprée doit accorder à son adversaire une forme d’enfer. Ça fait bien des heures qu’il s’égosille sur le pont de son bateau troué de tous les côtés, et Marq Mandragore (@Durran Bulwer) tient encore debout pour hurler suffisamment fort que manifestement, ça n’est pas aujourd’hui qu’il le fera couler au fond des flots. Cette audace parvient jusqu’aux oreilles abîmées de Selwyn Torth, remuant encore plus sa rage de savoir ses adversaires aidés par des mercenaires grassement payés. Lui, toutefois, sent son corps fatiguer, et il veut profiter de ce temps de répit, voyant le Manticore s’éloigner, pour s’asseoir, boire quelques lampées d’un alcool qui lui nettoiera le gosier, et fermer un peu les yeux. Autour de lui, les bateaux coulent de tous les côtés. C’est un massacre.

Il entend derrière lui son capitaine ordonner quelques réparations, mais il faut dire que le Manticore, dusse-t-il être fort bien payé, n’est pas parvenu ne serait-ce qu’à percer le moindre trou dans la coque de l’Etoile-du-Matin. C’est la grand-voile, myrtille, qui a subit le plus, Lord Torth toutefois n’est même pas certain qu’on puisse blâmer les bigorneaux d’Essos, puisque ça pourrait aussi bien être les flèches de son propre équipage qui l’auraient percée. En tous cas, la couture et l’empiècement est entreprit alors que le bonhomme de l’île-aux-saphirs élève ses pieds déformés par deux oignons sur un petit tabouret, facilitant sa circulation sanguine. Ça va mieux.

Quelques minutes passent, comme ça, peut-être une quarantaine, jusqu’à ce qu’un hurlement ne vienne percer le silence que d’autres auraient jugés trop calme. Le seigneur de la Vesprée, lui, s’est simplement assoupi. Réveillé en sursaut par le cri, il entend le guetteur perché sur son nid-de-pie annoncer un abîmage, non loin d’eux, à quelques miles de là. Il a loupé l’information, toutefois, sans doute donnée quand il roupillait encore, du pavillon de ce bateau, mais la voix étranglée du guetteur ne lui dit rien qui vaille. Selwyn Torth court alors à l’avant de son bateau, attrapant une longue vue au passage, et bientôt, sous son œil cerné et ridé, il est témoin d’un massacre. Celui du Cerf Ardent sous l’assaut du Manticore.

Ce n’est plus seulement une blague trop racontée, alors. C’en est une mauvaise, bien trop mauvaise, que Lord Torth a déjà vécu une première fois, plus tôt dans la journée. Cette fois-ci toutefois, la situation semble largement plus dangereuse, alors il donne l’ordre : il faut aller secourir son Suzerain. Sa grand-voile rapiécée se gonfle fièrement, et l’écart se creuse entre sa cible et l’Etoile-du-Matin. Il file rejoindre son capitaine, qui tient la barre, à qui il suggère de tenter de placer le navire entre le Cerf Ardent et le Manticore, si la mer le leur permet. Au moins ainsi, un front pourra assurer la défense, tandis que l’autre pourra aller aider l’équipage du Suzerain. Et alors que le navire cossu de l’Ile-Aux-Saphirs s’approche du massacre, Lord Torth réalise que tout cela est bien pire que ce qu’il imaginait. Sur le pont crevé du Cerf Ardent, il reconnaît d’autres capitaines, @Aurane Waters et Blurd Mervault (@Elias Dunn) ; le Formidable Idiot et le Lady Marya doivent ainsi reposer au fond de la baie des crabes…

La manœuvre du Seigneur de la Vesprée réussit, il parvient à s’insérer à portée du Cerf Ardent, bloquant le passage au Manticore. Cherchant du regard son Suzerain dans la masse, il examine la situation, et comprend qu’il n’est pas l’heure pour le Baratheon d’abandonner son navire. « Quartier-maitres, embarquez tout ce que vous pouvez sur le Cerf Ardent, il ne peut pas couler !!! Maître calfat, charpentiers, filez secourir votre Suzerain, on se reverra cette bataille terminée !! Archers, contre la sénestre, en joue !! Si ça bouge de l’autre côté, tirez jusqu’à ce que vos munitions soient épuisées !! » Le Seigneur Torth fait alors volte-face, et cherche celui qu’il aurait dû couler dès que tout cela avait commencé : « Tu entends ça, Mandragore ? Ta mort, c’est pas pour demain !!! »