En secret, juste une fois

Une mêlée. Je regardais l'épée que Meliodas m'avait fait faire il y a si longtemps. Une mêlée. Je pourrais peut-être participer en secret. Il fallait toujours un chevalier mystère n'est-ce pas. Je devais juste convaincre Dame Cersei. Elle pouvait bien me laisser faire cela ? Je le lis debout. Ma main sur mon épée pour me mettre à danser avec au milieu des meubles de la chambre que je partageais avec Félicité. Comme la dernière fois, je devrais juste me faire passer pour sa servante. Mais, il n'y avait personne dans la chambre ou les appartements des Lannister. Alors j'en profitais dans cet espace étroit. Après tout en mêlé, il n'y avait pas beaucoup plus de place, pas vrai ?

Ma lame sifflait dans les airs, là où je voulais. La mêlée. En portant les couleurs de Meliodas. Juste une fois. Pour lui rendre hommage. Juste une fois. Elle l'avait vu pendant les sièges. Je savais me battre. À part quelques blessures superficielles je n'avais jamais rien eut. Elle ne pouvait pas ne pas me laisser participer ! Elle... Elle devrait avoir confiance en moi ! J'espérais du moins... J'espérais réellement pouvoir la convaincre. Je ne savais toujours pas jongler avec les mots... Et même si je contenais beaucoup plus mes émotions en public..
En privé j'étais toujours un ouragan, enfin j'avais un ouragan prêt à tout détruire en moi. Je m'arrêtais net en entendant la porte des appartements s'ouvrir. J'étais encore en chemise et chausse. Je n'avais pas encore passé la robe bleue que Félicité avait choisis pour moi. J'entrouvris légèrement la porte pour voir qui s'était. L'épée toujours en main. Dame Cersei avec Qyburn.

Je glissais mon épée à son fourreau dans mon ceinturon avant de sortir de la chambre et de m'incliner devant les deux personnes tour à tour.

" Dame Cersei. Qyburn. "

Pas de titre pour lui il en avait autant que moi. Je portais mon regard sur Dame Cersei.

" Pourrais-je abuser de votre temps un instant ma dame ? "

C'était rare que je fasse autant d'effort de langage. Même face à elle, mais cela me tenait à coeur.

La matinée était radieuse ce jour-là. Un doux soleil était apparu dès les premières lueurs de l’aube tandis qu’un vent frais et agréable en provenance de la Néra rafraîchissait l’atmosphère et chassait les puanteurs des bas quartiers de la ville des narines des nobles ayant l’honneur de séjourner au coeur même du Donjon Rouge. Ils étaient arrivés il y avait une semaine de cela, mais Cersei n’avait pas encore eu le temps d’aller se promener sur les différentes collines et hauts lieux de la ville. Et puis, elle désirait ardemment voir Fossedragon, même de loin. Avec Vaelarr à ses côtés depuis quelques années, ce site légendaire prenait un sens différent à ses yeux. Elle songea que cette petite sortie pourrait intéresser Félicité et Sacha, et comme elles allaient passer non loin du quartier mal famé du Culpucier, les compétences à l’épée de la jeune fille doublée de la garde qui l’accompagnerait sur son trajet, seraient forcément des plus appréciées. Même Qyburn osa signaler son intérêt pour ces lieux à la Lionne qui accepta sa compagnie. Le vieil homme était un puits de savoir en histoire autant qu’en médecine. Sa présence conférerait un côté culturel à leur sortie, elle qui préférait voir les vestiges du passé de ses yeux plutôt que d’en admirer les esquisses dans des livres.

Ainsi, à peine le petit-déjeuner pris, Cersei s’habilla et se chaussa pour pouvoir sortir et marcher plusieurs heures sans ressentir de fatigue ou de douleur. Qyburn avait conseillé, pour les longues heures de marche ou de position debout, des chaussures plus amples et à semelles plates, ceci afin également de ne point trop réveiller sa blessure de guerre, souvenir du siège des Ferren, au mollet droit. Les bottes étaient loin d’être belles et ni du goût de Cersei mais nulle ne les verrait, dissimulées comme elles l’étaient sous une longue robe rouge sombre aux manches brodées d’or.

Comme cette sortie était imprévue, elle se rendit elle-même à la chambre que partageait Félicité et Sacha pour les en informer. Au vu de l’heure avancée de cette matinée, elle entra dans l’appartement sans se donner la peine de s’annoncer, Qyburn sur ses talons. Ce dernier referma la porte sur leur passage tandis que Cersei observait les lieux d’un air approbateur. L’appartement était propre, rangé et frais. On avait dû ouvrir les fenêtres il n’y avait pas si longtemps que cela pour laisser rentrer l’air marin de la Baie de la Néra. C’est vers l’une de ces fenêtres que Cersei se dirigea, y jetant un rapide coup d’oeil avant d’être interrompue par Sacha, qui sortait de sa chambre.

— Bonjour Sacha, lui répondit-elle, avec un léger sourire sur les lèvres. Elle détailla brièvement la tenue de Sacha et la trouva appropriée pour leur sortie même si, en d’autres circonstances, elle aurait grimacé face à ce manque de féminité flagrant chez elle. Cersei n’eut d’ailleurs pas le temps de lui exprimer son souhait d’excursion culturelle et historique car Sacha embraya vite sur une question qui semblait dissimuler un sujet de grande importance pour elle.

— Fais vite dans ce cas. Cersei tira une chaise en bois, lissa sa robe avant de s’y asseoir puis entremêla ses doigts qu’elle posa sur ses cuisses. Sa tête se pencha légèrement sur le côté, en signe qu’elle l’écoutait.

— Parle, je t’écoute.

Qyburn, lui, restait silencieux et observait la scène, légèrement appuyé contre le mur près de la porte d’entrée.

@Sacha   | dialogue : gras | pensées : italique

Pourquoi, même en ayant rien fait et face au sourire de la Lionne, je me sentais comme une gamine ayant causé une faute importante. Cela n’avait absolument aucun sens ! Mais ce n’était pas tout à fait le moment de se sentir mal à l’aise. Même si… visiblement, elle n’avait que peu de temps à me consacrer. Je restais très droite devant elle après ma révérence. J’attendis qu’elle s’installe devant moi bien droite. Je n’aimais pas Qyburn… Même s’il avait sauvé mes mains quand je m’étais entraînée à en avoir des ampoules et que j’avais continué malgré tout à m’entraîner à les crever et à… presque perdre la peau de mes mains. J’en avais encore des cicatrices, très fines, certes, mais des cicatrices. J’attendis qu’elle me donne l’autorisation pour parler pour rouvrir la bouche.

« Je souhaiterais participer à la mêlée du tournoi en tant que chevalier mystère en portant les couleurs de Meliodas. »

Et j’avais entendu bien des rumeurs sur les participants… Elle devait les avoir entendus aussi !

« Je sais que Ser Garlan y participe, ainsi que Jon Snow, et d’autres noms de gens qui sont très forts, dont celui du capitaine de la garde de Hautjardin. »

Autant dire… de grands noms, ou du moins, des personnes avec biens des qualités guerrières bien supérieures aux miennes… Et quelque part bien plus d’expérience que moi ou ce genre de chose. Je repris la parole, les mots sortaient très vite de mes lèvres comme-ci j’avais peur qu’elle me coupe pour m’empêcher de finir ce que je voulais dire. J’avais presque l’impression de ne plus avoir de souffle :

« Je sais très bien ainsi que je n’ai que très peu de chance de gagner. Voir aucune même, et que je serais sans doute même la plus faible de la mêlée. »

Être honnête avec Dame Cersei et soi-même pour ses compétences… Quand bien même j’avais progressé… je doutais que c’était largement assez, je savais que je serais éliminé très rapidement, mais je l’empêchais de trop y penser, reprenant aussitôt.

« J’aimerais… juste… participer rien qu’une fois à un tournoi, j’ai déjà combattu en conditions réelles ! Vous… Je n’ai presque pas été blessé. »

D’accord. Je serais sans doute pas bien classée, voir pas du tout… Je n’avais pas beaucoup de chance généralement. Je soutiens le regard de la lionne alors que j’avais les joues brûlantes. Elle m’avait couvé comme un œuf fragile pendant des années… et maintenant je sentais parfois une certaine distance ! Ou alors c’était moi qui avais peur qu’elle m’abandonne ? Et que je sois à nouveau toute seule ? C’était possible aussi. Je gardais mes mains dans mon dos, presque au garde à vous, mais mes poings étaient serrés à en avoir les phalanges blanches. Heureusement que Qyburn ou dame Cersei ne pouvaient pas le voir.

   

Impassible, Cersei écouta le flot de paroles quasi-ininterrompu qui sortait de la bouche de sa protégée. Certes, elle avait grandi et aujourd’hui, les rôles s’étaient inversés. C’était Sacha qui protégeait Cersei grâce à son épée et son entraînement acharné. En tout cas, elle la protégeait des attaques physiques mais pouvait-elle la protéger aussi des rumeurs, les mots pouvant faire aussi mal que les lames ? Le regard de la Lionne Ailée glissa un instant sur la silhouette effacée de Qyburn, toujours adossé contre le mur près de la porte. Le vieil homme affichait ce léger sourire indéchiffrable qu’il semblait toujours avoir greffé sur le visage pour toutes les situations qu’il jugeait…délicates. Et ce que demandait Sacha était, effectivement, délicat.

Porter les couleurs de Meliodas Trant était un beau geste en sa mémoire et puis, Cersei était en fait de l’attachement profond et paternel entre son ancienne épée-lige et sa protégée. Mais ceci, couplé au petit gabarit de Sacha face à des adversaires redoutables qui ne ressemblaient en rien aux soldats qu’elle avait pu affronter à Ferren, par exemple, acheva de la rendre très perplexe face à sa requête. « J’entends ta demande et salue l’hommage que tu souhaites rendre à notre regretté Ser Meliodas », commença-t-elle. « Je vois aussi que tu as soigneusement préparé ton argumentaire. » Ses yeux se plissèrent et un sourire en coin orna ses lèvres. Sacha avait les joues aussi rouges que le tissu de sa robe.

Cersei finit par se lever et se dirigea vers une commode près de Qyburn sur laquelle trônait une carafe en verre remplie de vin. Deux verres ciselés aux armoiries des Lannister n’attendaient plus qu’à être rempli. Cersei se remplit un verre et le porta à ses lèvres avant de se retourner vers sa protégée. « Tu veux faire tes preuves, je l’entends. Et quoi de mieux que durant un pareil tournoi, devant tant de regards et de personnes importantes ? Mais… » La Lionne pencha la tête sur le côté, faisant rouler sa longue cascade de cheveux d’or dans son dos et sur sur son épaule. « Pourquoi participer si tu te sais d’avance vaincue? » A nouveau, Cersei porta son verre à ses lèvres, non sans quitter Sacha du regard. Déjà à moitié vide, Cersei tenait son verre des deux mains contre son ventre. Il n’y avait nulle pitié ni condescendance dans ce regard qu’elle braquait sur Sacha, seulement de la mise en garde.

« Si je te permets de participer, ce n’est pas pour voir un chevalier-mystère comme il y en a eu tant d’autres avant lui entrer sur le terrain de mêlée les épaules basses et les pieds traînants de se savoir d’ores et déjà bon dernier de la liste. Si je te donne mon accord, ce sera pour que tu montres à tous ces hommes ce dont une femme est capable, me suis-je bien faite comprendre ? »

Là-dessus elle s’interrompit, finit son verre en deux longues gorgées et le reposa sur la commode. Son index se leva, comme si une pensée venait de lui traverser l’esprit. « Et encore une fois, si je te donne mon accord, tu devras soigner ton apparence. Mon père n’est guère friand de chevaliers-mystères, en particulier lorsque ceux-ci sont des femmes proches de son nom. » Porter les couleurs de la Maison Trant, après la perte que celle-ci venait de subir, ne serait qu’un indice de trop pour les plus perspicaces et les mieux informés des spectateurs. Cela ne lui faisait aucun doute; même avec le meilleur des « déguisements », quelqu’un reconnaîtrait forcément Sacha…

@Sacha   | dialogue : gras | pensées : italique

J’avais l’impression d’avoir couru une centaine de lieux… J’avais les joues brûlantes et plus aucune goutte de salive en bouche. J’inspirais lentement en attendant le verdict. Ce n’était pas une centaine de lieux que j’avais couru… Mais j’étais bien un condamné à attendre sa sentence. Dame Cersei avait cet… aura qui, lorsqu’elle me fixait ainsi, me rendait très mal à l’aise. J’avais l’impression qu’elle allait me tuer, ou pire, à chaque fois. Je serrais plus fort mes poings dans mon dos en silence. Préparé son argumentaire… J’inclinai la tête avec lenteur.

« Je ne pouvais vous présenter ma volonté sans l’avoir réfléchi derrière. »

Même si elle disait Ser, Meliodas n’avait jamais été chevalier… Sinon j’étais presque sûre qu’il m’aurait adoubé lui-même… Enfin… il était mort, ce n’était plus la peine d’insister ou de remuer le couteau dans la plaie. Je restais muette face à ses mots. « Mais ». Mais… Il y avait toujours un mais… Je ne détournai pas les yeux. Pourquoi participer si je me savais déjà vaincue ?

« Pour voir le chemin qu’il me reste à parcourir. Me mesurer aussi à d’autres personnes que ceux avec qui je m’entraîne habituellement. »

Et on ne savait jamais ce qu’il pouvait se passer dans un combat. Mais j’avais un grand doute de réussir… Je soutiens son regard. Je secouai la tête à sa remarque.

« Même si je sais que je ne serais pas première, je ferais de mon mieux et je n’avancerais pas déjà la tête basse. Vous avez été limpide dame Cersei. »

Même si je ne réussirais pas à gagner… je n’avancerais pas comme une future perdante, je ferais de mon mieux. Je me mordis la langue, j’avais vraiment l’impression qu’elle était devenue en parchemin. C’était assez gênant pour parler. Soigner mon apparence. J’eus un rictus à ses mots en m’inclinant légèrement devant elle.

« Ma dame, je saurais me travestir parfaitement en homme, même si je suis plus fine que les autres, votre père, ou même d’autres personne, ne saura pas que c’est moi sous le chevalier mystère. »

Puis… je crois qu’il ne m’avait jamais parlé, jamais réellement vu combattre… Aucune de mes armures ne portait le symbole de la lionne, je ne portais pas de bijoux en combattant pouvant indiquer de qui j’étais. Je glissai un regard vers Qyburn qui semblait ne pas vouloir me lâcher du regard. Pitié, mes mains vont bien ! Cela date d’il y a plusieurs années que je me suis trop entraînée et que j’ai eu des problèmes… À force de s’entraîner, j’avais eu des ampoules, mais à cause de la… rupture si on pouvait dire ainsi, avec Ashter, j’avais continué l’entraînement et les ampoules avaient explosées, en quelque sorte, et la peau s’était collée au cuir des gants. Le retirer avait été particulièrement douloureux. Cela remontait maintenant et mes mains allaient très bien. Pas la peine de s’inquiéter.

« Cependant, au vu des pointures, je voulais vous prévenir de ne pas vous attendre à de trop bons résultats. »

Il y avait bien Ser Garlan après tout… Ce n’était pas n’importe qui, c’était lui qui m’avait en partie formé, les bases du moins.
   

Se mesurer à d'autres combattants qu'à ceux auprès de qui elle s'était déjà mesurée lors de ses entraînements. C'était une idée qui se tenait, de son point de vue. Et puis, en-dehors des mêlées propres aux tournois, Sacha avait déjà participé à quelques véritables combats où l'enjeu n'est pas de finir premier, mais bel et bien de rester en vie. Sa protégée n'avait pas encore à son actif de hauts faits d'arme mais pour en avoir, rien ne valait l'exercice constant, quitte à devoir se frotter à plus fort et plus expérimenté que soit. Et puis, même si Sacha n'avait pas la force d'un chevalier aguerri, elle avait l'agilité et la rapidité de sa jeunesse et de sa condition de femme. Cela pourrait jouer pour elle et bien que Cersei rechignait à la laisser se mettre en danger et à porter de blessures qu'on pouvait largement éviter en s'abstenant simplement de participer, elle savait aussi que si elle lui refusait cette participation, cela jouerait sur le moral de sa protégée.

La Lionne plissa les yeux tandis que Sacha lui affirmait, pleine de conviction, qu'elle saurait brouiller suffisamment les pistes pour empêcher quiconque de la reconnaître, y compris ceux qui l'ont côtoyé de près ou de loin par le passé. Cersei eut un sourire en coin et se pencha légèrement sur le côté de son siège afin de rencontrer le regard de son mestre personnel. "Qu'en pensez-vous Qyburn? Sacha est-elle prête à se mesurer à des noms comme Garlan Tyrell ou au jeune bâtard du Nord? Tout mal né qu'il soit, on le dit particulièrement doué au combat." Qyburn eut un sourire de circonstance et s'écarta pour la première fois du mur contre lequel il était adossé depuis le début de cette entrevue pour glisser vers Cersei.

- La décision finale vous revient, ma Dame, répondit-il de sa voix à peine plus forte qu'un murmure en se postant sur la droite de Cersei. Néanmoins et bien que je ne sache pas ce que vous aviez prévu comme...déguisement, reprit-il à l'attention de Sacha, plus vous vous attacherez à camoufler votre silhouette menue, plus vous handicaperez la fluidité de vos mouvements. Et plus vous serez une proie facile pour vos adversaires.

Cersei arqua un sourcil et hocha doucement la tête, laissant les paroles de Qyburn faire leur effet avant de poursuivre.

- Qyburn dit vrai mais je serais d'avis de te laisser tenter ta chance. Tu n'as peut-être pas entièrement leur niveau, mais tu pourrais être capable de leur tenir tête...

Quittant son siège, Cersei se leva et lissa sa robe puis déclara: "Soit. Tu as ma bénédiction pour t'inscrire à l'épreuve de la mêlée. Tâche de faire honneur à tes longs entraînements que t'a jadis dispensé Meliodas. Si tu ne combats pas pour me faire honneur, fais-en sorte de ne pas faire honte à sa mémoire. A présent, accompagne-moi donc à Fossedragon avant qu'il ne soit trop tard et que je ne sois en retard pour le déjeuner."

Puis elle passa, impériale et fière, près de Sacha et s'engouffra dans le couloir menant à son appartement, prête à aller observer de ses yeux la demeure ancestrale des dragons de la Maison Targaryen.

@Sacha   | dialogue : gras | pensées : italique

La partie n’était pas gagnée d’avance. Pas du tout même. Mais je sentis que la dame semblait d’accord. Je restais silencieuse alors qu’elle interrogeait Qyburn. Ce n’était pas spécialement un allié, mes doigts se resserrent compulsivement sur eux-mêmes lorsque le souvenir de ses soins il y a des années, sur les plaies, me revient. C’était il y a bien longtemps, mais c’était toujours particulièrement douloureux… Qu’importe. Garlan ou Jon… J’étais dans la merde. Est-ce que je réussirais à passer le premier tour ? J’en doutais de plus en plus. Je posais mon regard sur Qyburn avant de répondre à sa question :

« Je vais bander ma poitrine. Tout simplement. »

Quant à mes cheveux longs, je ne serais pas la seule à en avoir… Mais qu’importe… il n’avait pas non plus besoin de venir m’assister pour cette tâche. C’était hors de question. Mais je serais déjà une proie… Surtout face aux mastodontes. Mais je ferais de mon mieux. Je reviens vers la dame qui se levait. Je hochais la tête à ses mots avant de m’incliner bien bas.

« Je combattrais aussi bien pour la mémoire de Meliodas que pour vous faire honneur. Je vous suis ma dame. »

Je la suivis aussitôt sans attendre. Je me serais malgré tout passée de la pression…

La foule criait avec ferveur depuis le début de l’épreuve de la mêlée, chaque spectateur et spectatrice encourageant son champion. Mais la Lionne, elle, restait silencieuse, assise sous l’auvent protégeant la tribune d’honneur. Elle se contentait d’observer la scène sans laisser rien paraître, répondant aux commentaires et aux exclamations de ses voisins et participant même aux paris. Seul un observateur particulièrement doué aurait pu voir que les yeux clairs de la Lannister ne se détachaient jamais de l’un des combattants, celui qui semblait le plus frêle des participants, quoique sa stature et son gabarit ne l’empêchèrent pas de se battre avec ferveur…jusque’à ce que deux chevaliers, dont l’un était bien connu de Cersei puisqu’il s’agissait de Ser Garlan Tyrell, ne l’envoient au sol sans aucun ménagement. La Lannister serra ses poings jusqu’à ce que les jointures de ses doigts ne virent au blanc, tandis que le corps inconscient du combattant était porté hors du champ où se déroulait l’épreuve.

« Fais preuve de discrétion et va voir si tout va bien » souffla-t-elle à l’oreille de Félicité Hill qui s’était approchée et penchée vers elle après que Cersei lui ait fait signe de la rejoindre. La jeune fille s’éloigna aussitôt, laissant Cersei en proie à une profonde inquiétude. Le coup - ou plutôt les coups - que Sacha avaient reçu étaient particulièrement violents. Elle allait être sonnée et elle gardera assurément un souvenir de cette épreuve sur sa chair et dans son égo pendant un moment. Pourtant, Cersei l’avait prévenu. Les noms des combattants étaient connus de tous et la Lionne se doutait que Sacha, aussi bien entraînée soit-elle, ne faisait pas encore le poids face à des hommes de la trempe de Garlan Tyrell.

Afin de ne pas éveiller l’attention sur elle, Cersei resta jusqu’à ce que l’on déclare l’épreuve terminée pour la journée. Elle bavarda encore avec ses voisins et voisines pendant quelques temps avant de s’excuser et de prendre congé. Qyburn dans son sillage, Cersei se rendit aux tentes servant à accueillir les éventuels blessés. A l’extérieur de l’une d’entre elles l’attendait Félicité. La jeune fille se triturait les mains, l’air très inquiète. « Comment va-t-elle? » s’enquit immédiatement Cersei.

- Mal. Elle ne voulait pas que je reste; elle a l’air de souffrir atrocement.

Cersei soupira, très inquiète à son tour puis se tourna vers Qyburn. « Allez chercher vos affaires. Elle aura besoin de vos soins, Mestre. » Qyburn s’inclina puis n’attendit pas une seconde de plus pour tourner les talons et rejoindre le Donjon Rouge et les appartements qui leur furent prêtés par la famille royale. Cersei intima à Félicité de monter la garde devant la tente et de venir la prévenir si quelqu’un d’autre que Qyburn voulait entrer. Puis elle entra à son tour, écartant sèchement les pans de la tente, la mine inquiète et pleine de reproches. « Tu n’es pas en position de renvoyer qui que ce soit. » déclara-t-elle en la toisant de loin. « Regarde-toi… » Cersei secoua la tête et soupira. « Quand apprendras-tu donc? Fais donc appel au peu de piété qui se trouve en toi et prie bien les Sept que personne, je dis bien personne, ne t’ait reconnu. »

La Lionne se montrait dure envers Sacha mais derrière cette dureté se cachait une profonde angoisse tant Sacha était mal en point.

@Sacha   | dialogue : gras | pensées : italique

La honte me brûlait le thorax à chaque respiration. La Honte et la Colère. Une colère sourde, dévastant tout sur son passage. Dans ma tête se dessinait un monde régit par la colère, un monde où les dragons seraient rois et maîtres, des couronnes de flammes posées à même des crânes pour se souder à leurs chairs avant de répandre la brûlure du feu des dragons sur les paysans, les champs les gens… Juste sous le coup de la colère. Un royaume dont le roi serait la personnification de la colère, qui grattait les os de mon crâne pour être libre de s’exprimer comme elle le souhaitait.. Cependant, ce n’était pas ce monde où la colère dominait, où se trouvait mon corps. Alors, elle devait être ravalée, contrôlée. C’était, au-delà de la honte et de la colère, la douleur qui broyait mes tempes de ses mains d’aciers. Les coups en mêlés étaient violents et mon cerveau tintait comme mille cloches. Il était absolument hors de question d’aller voir des guérisseurs ou quoi que ce soit. C’était ma punition pour avoir échoué de toute manière. La solitude était ce dont il m’était absolument nécessaire, c’était bien pour cela que Félicité était ressortie aussi vite, ma colère lui avait broyé sans doute le poignet en plus de mon ordre.

Ordre que de toute manière on ne respectait pas. Mon regard restait braqué sur la table.Il y avait une fissure dans ce bois brun. Large d’une demie phalange, elle serpentait comme la Mander ou tout autre rivière au Conflans dans le bois de cette table, était-ce mon fait ? Peut-être. L’envie d’y enfoncer mes doigts, juste pour qu’une nouvelle vague de douleur ne déferle dans mon esprit pour canaliser la colère, toucha mon esprit. Plonger les doigts dans cette rivière d’absence de bois. Non, c’était hors de question. Surtout quand c’était la voix de Dame Cersei qui claquait à mes oreilles. Pas en position. Jamais cette position me serait accordée… Mes épaules s’arrondirent en silence et ma tête se rentra dans mes épaules alors que mes ongles se plantaient dans le bois et ses échardes sans qu’aucun mot ne franchisse mes lèvres que mes dents mordaient de toute manière à sang. Son goût métallique emplit ma bouche, il était fort probable que dans mon sang soit mélangé celui de Dorne, au vu de ma promptitude à être en colère, de voir mon orgueil et ma fierté touchée. Même si ma pudeur était loin d’être celle inexistante de ces royaumes trop brûlant.

Si mon corps avait encaissé les coups, mon esprit subissait maintenant les assauts de Dame Cersei sans faiblir, parce ses mots, sans doute mon esprit les avait déjà pensés et enfoncer à l’intérieur de lui-même plus d’une fois. Une douleur vrilla mon ongle et mes yeux se braquèrent dessus, à force de serrer les poings, alors que mes ongles étaient plantés dans le bois, l’un d’entre eux venait de commencer à s’arracher. Merveilleux. Bravo Sacha. Tu auras une médaille pour ta connerie. Il me semblait que Dame Cersei eut fini et une respiration hachée par la colère gonfla à nouveau ma poitrine. C’était presque douloureux également.

« Apprendre quoi ? Que mon niveau est pitoyable ? Ça, c’était bien compris, ma dame. Quant à ma piété… Elle est toujours intacte, mais le guerrier n’écoute pas visiblement les chiennes comme ma personne, car son bras ne m’a pas aidé malgré les entraînements. »

C’était presque un grondement qui sortait de ma gorge avant qu’elle ne crache même un sombre ricanement. Il était hors de question que la colère n’explose comme autant de lave se déversant sur le monde.

« Personne ne m’a reconnu, Dame Cersei. Et vous savez pourquoi ? Parce que personne ne me connaît ! Personne ne fera jamais le lien avec moi. Personne ne pourra même penser que la sale p’tite brune qui vous accompagne partout sait se battre ! Vous devriez être rassurée. »

Qu’elle en soit satisfaite. Son honneur était sauf. Mes doigts réussirent enfin à se décontracter pour aller défaire les couleurs de Meliodas. Le goût amer revient avec force dans ma gorge alors que mes poumons me forcèrent à expirer longuement un air vicié de mes poumons. Le monde tangua tout autour de moi et mon corps prit appuie sur la table pour ne pas tomber. Ce n’était nullement le moment Sacha de t’effondrer à nouveau.

« Vous parlez d’un hommage à Mel… Bordel… Il m’aurait salement claqué la gueule pour cet échec honteux. »

Et il aurait eu mille fois raison de me coller une raclée à l’entraînement pour me corriger de la moindre de mes fautes. Le monde tangua à nouveau autour de moi. Sept… Ce n’était pas le moment. Mes yeux se refermèrent pour me plonger dans l’obscurité alors que mes doigts restaient cramponnés à ce morceau de tissu… Ils se rouvrirent très vite mes yeux  alors que le tournis devenait de plus en plus fort. Tout ce que mon cœur avait souhaité… c’était de faire honneur à Mel… et même ça ce n’était pas possible. Bordel… il devait avoir honte de moi… Pardon Mel… Pardon.

La table se dédoublait sous mes yeux alors que mon corps semblait aller de droite et de gauche. Pourquoi est-ce que le sol tanguait encore sous mes pieds ? Des voix passèrent la porte de toile et elle s’ouvrit avant de se refermer, mes dents se serrèrent plus fort encore. Pourquoi ? Qu’avait ma tente de si spéciale pour que tout le monde s’y réunisse ? Un soupir s’arracha à mes lèvres alors que la table tanguait en double avec le sol. Ce n’était absolument pas quelque chose d’agréable. La solitude me tendait ses bras, alors que mon regard ne s’était toujours pas posé sur quoi que ce soit d’autre que cette maudite table qui bougeait et se séparaient en plusieurs tables sans que mon esprit n’arrive à saisir le pourquoi du comment… Était-ce la fatigue ? Ou le coup qu’on m’avait donné était beaucoup plus violent qu’on aurait pu le penser. Mes yeux avaient maintenant même du mal à se focaliser sur la fissure.
   

Il en fallait beaucoup pour surprendre la Lionne, mais les mots que sa protégée lui renvoya au visage hurlaient d'une colère que la honte, probablement, ne faisait que rendre plus mauvaise et plus froide. Droite, stoïque, elle ne fit pas un geste ni un pas pour se rapprocher du lit de la blessée. Pourtant, là où Félicité avait contemplé Sacha avec inquiétude et pitié, Cersei, elle, n'éprouvait en cet instant rien de plus qu'un profond mécontentement doublé du choc de s'entendre adresser la parole dans un langage aussi châtié et rustre. Sacha s'imaginait-elle qu'en raison de sa position à ses côtés et de sa cuisante défaite, cela pouvait-il justifier qu'elle s'adresse à elle en ces termes ? "Tu oublies à qui tu t'adresses", fit-elle entre ses dents serrées, menaçante. Elle n'était pas son amie, ni sa mère et dans un cas comme dans l'autre, jamais Cersei n'aurait permis que l'on s'adresse à elle en utilisant un tel langage. "Je t'ai recueilli à mes côtés et t'ai offert plus que tu ne pouvais en rêver à cette époque et c'est ainsi que tu me remercies ? En me parlant comme si j'étais un de ces soldats avec qui tu t'entraînes ? Tu mériterais d'être battue pour cela, peu importe que tu sois déjà en train de souffrir."

La compassion était un sentiment étranger pour la Lionne du Roc, habituée à être traitée dans le luxe et le respect des autres membres de la haute société, et dans la dureté et l'autorité par les membres de sa propre famille. De compassion ou d'amour, elle n'en connaissait pas grand chose. Le peu dont elle s'en rappelait encore grâce aux souvenirs qui lui restaient de sa mère ou de Jaime, elle le donnait à ses fils, à Vaelarr, ainsi qu'à ses rares amis proches qui se comptaient sur les doigts d'une main. Sacha bénéficiait d'autre chose de sa part: sa protection. Mais celle-ci, elle pouvait la lui retirer à tout instant et elle ne se priva pas de le lui rappeler. Lentement, telle une lionne jaugeant sa proie, elle s'approcha du lit de la blessée. "Je vais mettre tes paroles sur le dos de la douleur. Mais adresse-toi à moi encore une seule fois en ces termes, et je te ferai couper la langue avant de te jeter dehors sans la moindre pièce d'or. Me suis-je bien faite comprendre?" Cersei laissa ses mots s'imprégner dans l'esprit de Sacha et la contempla, amochée et souffrante, allongée dans ce lit qui n'était, visiblement, d'aucun secours face à sa douleur. "Je suis en revanche d'accord avec toi sur un point. J'espère que Ser Meliodas n'a rien vu de ta piètre performance. Peu importe où il peut bien se trouver."

Derrière elle, Félicité souleva imperceptiblement le pan de la tente et se racla la gorge pour se manifester. Cersei se détourna de Sacha et la rejoignit. "Mestre Qyburn est là, ma Dame", souffla-t-elle. Cersei écarta vivement le lourd morceau de tissu opaque et imperméable et invita le vieil homme à entrer. "Mestre Qyburn va regarder ton état de plus près." N'attendant ni confirmation de la part de Qyburn, ni protestation de la part de Sacha, Cersei revint près du lit de la blessée et écarta d'un geste sec la couverture. Mais en voyant l'absence de réaction de la part de Sacha, Cersei tourna un regard inquiet vers Qyburn. Ce dernier posa sa pochette de cuir remplit de ses ustensiles de soin sur la table près du lit et plaça ses mains sur le visage de Sacha, ses doigts tâtant sa nuque, son crâne et ouvrant ses yeux que la jeune fille semblait ne plus avoir la force ou la volonté de garder ouverts. "Le choc au niveau de la tête semble plus important que je ne le pensais", murmura-t-il comme pour lui-même avant de poursuivre. "Compresses de plantes et bandages devraient aider à diminuer les migraines. Des infusions également, lorsque les maux de tête et les vertiges auront cessé pour lui permettre de se relever."

- Félicité ? appela Cersei, va chercher de l'eau chaude, des bandages et des serviettes.

Et tandis que Qyburn s'affaira et que Félicité s'en était allée, Cersei s'assit sur le bord du lit et prit une des mains de Sacha dans les siennes en soupirant. "Petite idiote..." fit-elle, non sans ressentir soudain un élan d'inquiétude face à l'état de sa protégée, aussi fougueuse et vulgaire puisse-t-elle être.

@Sacha   | dialogue : gras | pensées : italique

Mais là, une idée me traversa l’esprit.* Si je n’étais même pas capable de vaincre en mêlée, est-ce que j’avais vraiment ma place dans l’entourage de Dame Cersei ? Je ne savais plus où j’en étais. Le monde tanguait beaucoup trop autour de moi. C’était comme-ci j’étais sur un putain de bateau ivre. Et j’avais l’impression qu’il me manquait un bras, le droit. Je baissai les yeux. Ah si. Il était là. En trois exemplaires. C’était bien, trois fois plus de lames à porter. Quoi que cela ne me rendrait pas forcément plus efficace ? Je crois. Lourdement, je me laissai retomber sur le lit, le monde tanguait toujours affreusement autour de moi. J’étais pieds nus… Depuis quand l’étais-je ? Je n’avais pas souvenir d’avoir enlevé mes bottes… Je me recroquevillai sous les draps comme-ci être roulée en boule me permettait de limiter la douleur. Les mots de dame Cersei étaient d’autant plus violents qu’ils me pénétraient avec violence le crâne pour y rebondirent et me rendre folle. J’avais envie de me boucher les oreilles, mais je ne le fis pas. J’en avais trop fait. Je me laissai tomber sur le côté, mes yeux se fermant tout seul. Je me mordis les lèvres en hochant la tête les yeux clos. Mais le monde tanguait toujours. Comment étais-je censée rester debout ? Néanmoins, je me forçai à redresser ma tête et garder les yeux ouverts pour répondre à la dame qui avait plus que raison :

« Oui Dame Cersei… Je vous présente mes excuses. »

Réussis-je à articuler difficilement j’avais l’impression d’avoir une patate chaude dans la bouche et que ma langue était ivre. Je laissai mes paupières se refermer toutes seules, l’obscurité, c’était ce qu’il y avait de mieux, l’obscurité… C’était comme un bonbon visuel. J’avais envie de vomir et je ne sentais toujours plus mon bras droit. Est-ce que c’était normal ? Je n’en étais pas sûre… Meliodas. Mel… Mon Mel… J’espérais que tu étais en sécurité où que tu sois. En sécurité, bordel, t’étais mort quoi ! Mort ! Putain de mort dans un putain de combat. Tu n’aurais pas dû crever… Mon Mel… Tu m’aurais interdit de tenter, tu m’aurais ligoté pour que je ne participe pas. Je ne dis rien en fermant plus fort les yeux, je détestais ces sensations, je ne voulais pas les ressentir, pourquoi d’un coup j’avais envie de vomir alors que le monde entier semblait me fracasser le crâne à coup de masse. Où est-ce qu’il était ? Au paradis des guerriers ? J’espérais. Je tentais de refermer mes doigts sur le tissu, mes doigts semblaient avoir du mal à fonctionner. Je ne réagis pas au bruit de la tenture, mais je ne rouvris pas les yeux, je n’en étais pas capable de toute manière. J’entendis à nouveau dame Cersei. Je tentai de marmonner une réponse, mais j’avais bien l’impression que je n’arrivais pas à parler ou même à respirer comme il le fallait. Je pris une grande respiration, tentai. L’air me brûlait les poumons. Je sentis quelqu’un m’arracher la couverture, je ne réagis même pas. Je n’y arrivais pas. Je sentis mes paupières se soulever et mon regard se posa difficilement sur… Qui était-ce ? Son visage ne me disait rien. C’était ? Qyburn ? Il avait ce visage ? Je ne fixai même pas mon attention au fait de ne pas trop m’en souvenir, il relâcha mes paupières que je les refermai aussitôt, je ne tentais pas de le repousser, je n’avais pas la force. Et même, je voulais bien qu’il m’aide pour l’instant, j’avais envie que… la douleur s’estompe un peu. Les coups sur ma tête devaient être plus violents que ce que je pensais si je ne pouvais même pas reconnaître Qyburn. C’était Qyburn. J’avais vraiment les idées embrouillées. Et il avait les mains chaudes, c’était agréable.

J’entendis la consigne de Dame Cersei sans même bouger, je ne sentis pas sa main, puisque je ne sentais pas le bras qu’elle tenait. J’ouvris péniblement les yeux en tentant de la regarder, mais elle se dédoublait beaucoup trop. L’envie de vomir me frappa et je roulai maladroitement pour vomir aussi loin d’elle que je le pouvais. De la bile. Mon estomac se contracta à nouveau pour éjecter une deuxième fois de la bile à même le sol. J’avais mal à la gorge… Je toussai un peu en essayant de me redresser, je sentis une main me retenir et m’installer lui-même presque de force sur le côté et glisser une cuvette à portée si je vomissais de nouveau, ce qui serait sans doute le cas vu que mon estomac se soulevait encore sans pour autant aller jusqu’au bout. Je refermai les yeux pour me laisser retomber sur le côté. Pourquoi mon bras droit n’existait plus ? Je ne comprenais plus rien, est-ce que si je m’enfonçai dans le sommeil cela irait mieux, n’est-ce pas ?

« Il faut qu’elle reste consciente. »

Non… je voulais juste dormir. C’était bien dormir, non ? On pouvait sans doute me laisser faire ? Qyburn… S’il te plaît, je veux juste dormir en paix pendant quelques heures, ce n’est pas si important non ? On râlait toujours que je ne me reposais pas, alors pourquoi quand je voulais dormir maintenant on me l’interdisait ?

« Dormir… »

Réussis-je à articuler, me laissant aller vers cette libération, mais je me forçai à nouveau à rouvrir les yeux maladroitement avant d’arrêter de tenter. Dormir c’était bien… Je sentis une main lever mes paupières de force et grognai légèrement en essayant de les refermer mais mon regard se posa vaguement sur un visage. Je tentai d’articuler à nouveau :

« Je ne sens plus… mon bras droit ? »

Aucune idée si c’était compréhensible ! Mais au moins je l’avais dit. Est-ce c’était important ? Je n’en avais pas l’impression et le monde se dédoublait toujours joyeusement alors que j’aurais aimé qu’il reste un peu plus fixe. J’en avais pris des coups dans la tête, mais ce double coups d’épée de la part du des Essaims et de Garlan… C’était comme se retrouver entre le marteau et l’enclume : douloureux.


*Furia Perfax Sébastien de Castell