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[FB] Pour une Dame danseront tes Lames ¤ ft. Lanna Cole

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[Flashback] Pour une Dame danseront tes Lames ~ ft. @Lanna Cole


[Braavos – An 297, Lune 7, semaine 3]



Le soleil cognait la Bâtarde de Valyria. Ses rayons fusaient entre les jambes du Titan de Braavos – gardien noir de lumière lorsqu'il embrassait l'astre – et cascadaient à travers les rues de la Cité. Ils semblaient jouer avec les ombres des mille ponts, pics et canaux dont se composait la ville. L'eau grouillait entre les îles en mosaïque autant que les badauds entre les vagues de briques.
Innombrables êtres à filer, besogner, s'amuser au sein de la fourmilière, leur présence paraissait frêle et éphémère au pieds du colosse, mais aussi en comparaison des bâtisses toujours puissantes. Le temps se gravait aux murs de la Cité comme dans une chair. Peau de la Bâtarde contant son histoire. Les prestigieux hôtels particuliers, les palais où se jouait le pouvoir et les demeures des nobles gardaient chaque jour souvenance du passé. Surplombant le va-et-vient citadin, frontons craquelés, façades ridées, emblèmes des aristocrates froissés par l'âge, murs détruits et reconstruits comme autant de peaux en mue... tout témoignait des années qui comme le sang y coulaient dans un cycle éternel. Et cependant de tels lieux côtoyaient des boyaux où s'entassaient les pauvres – tripailles de cloaques dont la fragilité ne pouvait guère dire un trop long passé et où flottait surtout le miasme.
Au milieu des marchands et des Grands de Braavos, le peuple de l'ombre lui aussi officiait. Les larrons chipaient, les mendiants imploraient, un public se formait autour des artistes. Un voyageur non averti s'offrait aux affaires de cette parade d'histrions. Les uns ravissaient les citadins de leurs pirouettes, les autres ravissaient les bourses. Forêt de mains crasseuses, volant de poche à poche.

En s'engageant, ce jour-là, jusqu'à une petite place de la Cité, l'on découvrait un attroupement joyeux autour de ce qui ne se révélait pas au premier coup d'œil. Il fallait fendre la mer de corps pour discerner au centre l'objet des regards. Sans cela, il ne paraissait que fragmenté, comme aspiré, caché, menaçant à chaque instant de disparaître, ou pressé au milieu de la masse des marcheurs. Car lui ne marchait pas, il glissait. Non loin, une vieille mendiante jouait un air à la flûte.
Profitant de la musique offerte par l'aïeule, un garçon – à peine douze ans – fusait à vive allure, assis sur un singulier véhicule. Installé au creux d'un landau composé d'une piètre caisse en bois et d'un châssis usé, tout son corps effilé ondoyait au rythme de sa chaise. Ses longues mains auraient été blanches si elles ne partageaient pas la saleté des roues qu'elles actionnaient, à force de traverser des voies pleines d'immondices. Mais les doigts en l'occurrence jouaient dans les airs telles feuilles au vent, pianotaient çà et là, éphémères, fugaces. La chariote, elle, achevait de tournoyer seule, profitant de sa légèreté et d'un élan donné par son propriétaire via une impulsion sur ses roues. Une tignasse châtain-rousse, assortie aux larges yeux ambrés du gamin, batifolait avec les mouvements alertes de son corps-souffle, aux airs frêles et qui néanmoins dansait avec vigueur.
Public de curieux en ébullition. Tantôt l'on riait, tantôt l'on battait des mains autour de l'attraction. Quelques gloussements concurrençaient les sifflets d'admiration. Tintement de piécettes laissées en une coupelle, pour la vieille et l'enfant qui se les partageraient. Des commentaires serpentaient. Railleurs... « Qui c'est-y qui laisse c't'éclopé parasiter la rue ? » « V'là de la mauvaise graine ! » « Ça ferait mieux de s'trouver un travail, un vrai. » « Moi j'reste pas là, les infirmes c'est d'mauvais présages je dis. Y portent le Mal. » Ou enchantés et complices... « Olé ! » « Comme il y va Tourne-Soleil ! »

La place présentait le rare avantage d'avoir des pavés plus droits, plus lisses et praticables pour un fauteuil, à côté de trop d'endroits de Braavos. L'estropié y élisait domicile pour ses numéros.
Au milieu d'un remous de surprise, il ralentit son mouvement pour sortir, de derrière son dos, deux fins couteaux étincelants. Il les fit valser. Les armes tintèrent, dansèrent en un sifflement sonore. Elles dessinèrent des cercles vifs dans lesquels elles semblaient devenir le prolongement de la silhouette féline. Le môme tantôt donnait au véhicule de brusques impulsions, tantôt jouait des lames. Au-dessus de sa tête, ses bras s'enroulaient ou se croisaient comme un couple de serpents joueurs.
Les courbes des membres et du bassin se mariaient à celle des roues. Le petit corps ne faisait qu'un avec son siège, le temps d'un tableau éphémère, de transcender ce qui n'était que véhicule d'infirme. Cohortes d'yeux suivant le gosse. Ses doigts s'écartaient, se refermaient, avalant les couteaux avant de les laisser rejaillir comme des griffes. Il les lança enfin. Elles se fichèrent dans un pilier voisin.
L'enfant rit, ivre de son jeu, bien loin de penser alors à sa situation précaire ou au piètre état de ses hardes flottant au rythme de ses gestes. Ne comptait que le plaisir de sentir la musique aboyer dans ses veines mieux qu'un alcool. Il roula, pirouetta, fila, revint. Son dos plongea en arrière. Ses vertèbres s'enroulaient. Il apprécia le délié de chacune d'elles, devenant coquille à l'arrondi parfait ou une vague en pleine course. Puis le flux se redressa, ondoya, serpenta, jouant à passer tout près de certains spectateurs. On voulut l'attraper. Mais il coulait tel un filet d'eau entre les doigts.
À son cou maigre, un enchevêtrement de bijoux faits main sautait, claquait, tournait en spirale au rythme du ballet. Des gouttes de sueur lui coulaient le long des bras et aux tempes. Parfois, ses mouvements étonnaient en se faisant brusques : des gestes fauves par lesquels il plongeait vers le sol pour planter ses doigts dans la Terre, comme autant de racines venant y boire avant de rejaillir de plus belle. Et ses roues de funambuler.
...Jusqu'à ce qu'il donne un coup de frein, intimidé soudain par l'approche d'une présence qu'il crut reconnaître. Était-ce... celle que, en ces bas-quartiers, on appelait Dame de Bon Secours ? L'infirme rougit mais achèvera le spectacle.
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Pour une Dame danseront tes Lames
@Thracy & Lanna Cole


« An 297 Lune 7 Semaine 3 * Braavos, Place des Artistes »
La chaleur était à nouveau difficilement supportable aujourd’hui. Il faisait si lourd et il n’y avait pratiquement pas un souffle de vent, excepté en bord de mer et encore, ce n’était qu’un souffle chaud, rempli des embruns de la mer et des relents pestilentiels des quais. Nombreux étaient ceux qui étaient à plaindre…Ceux qui n’avaient pas le sous pour se loger, se protéger de la chaleur ou se désaltérer grâce à une eau pure. Lanna Cole était bien au courant de cette misère qui allait en s’aggravant, à mesure que les jours passaient. La misère, elle l’avait cotoyé dans chaque cité où il lui fut donner de vivre, que ce soit d’abord avec sa famille puis aux côtés de Tylan. Enfant, ses parents lui avaient inculqué des valeurs strictes mais une maxime revenait souvent dans le discours de sa mère : Nous avons la chance d’être bien nés mais nombreux en ce monde ne connaitront jamais que la misère et le manque. Donnons de notre temps et de notre personne pour ces pauvres êtres, et R’hllor, un jour, nous accueillera à Ses côtés et en Sa lumière et jamais nous ne connaîtrons les ténèbres. Cette phrase avait marqué la jeune Lanna et de ce fait, elle avait depuis toujours fait en sorte de se rendre utile auprès des bonnes œuvres des cités où elle vécut. Et Braavos n’échappa pas à la règle que la Myrienne s’était fixée.

Aujourd’hui cependant, si elle se trouvait dans les rues animées de Braavos, ce n’était pas parce qu’elle venait d’aider son prochain ou allait le faire. Elle était sortie pour faire quelques achats au marché, en compagnie d’une de ses servantes. Elle était en route pour se rendre à la mercerie où elle avait ses habitudes lorsque l’attention des deux femmes fut attirée par de grandes exclamations en provenance de la petite place, à quelques mètres en contrebas de leur position.

Que se passe-t-il donc ? demanda Lanna, quelque peu intriguée.

La Place des Artistes, ma Dame, lui répondit sa servante, humblement. Il y a toujours de l’animation là-bas.

La Place des Artistes ? répéta Lanna en tournant son regard brun vers la jeune femme. J’ignorais qu’on la nommait ainsi. Viens, allons voir !

Elle assura à la marchande qu’elle repasserait plus tard car il lui fallait du tissu pour repriser quelques vêtements de son fils aîné et entraîna sa servante à sa suite, vers la Place des Artistes. Plus elles s’en approchèrent, plus les exclamations de la foule de spectateurs étaient fortes. Lanna peinait à voir quoi que ce soit, derrière tous ces corps. Elle entendait cependant une petite mélodie ainsi que des bruits qu’elle peinait à identifier…Comme si l’on faisait rouler quelque chose sur les pavés. Soudain, elle vit de petites choses brillantes lancées dans les airs. Les rayons du soleil captaient parfois ses objets et les faisaient alors briller subrepticement, provoquant de nouvelles exclamations admiratives des spectateurs. Mais Lanna identifiait aussi des commentaires moins enjoués, entendant même le terme d’ « éclopé » à plusieurs reprises. Ainsi, c’était un infirme, l’objet de toutes ces attentions ? Lanna tenta de s’approcher, se frayant un passage parmi les corps serrés les uns contre les autres. Certains la reconnaissaient et s’écartaient poliment d’eux-mêmes, geste que Lanna remercia d’un sourire poli. Et finalement, elle vit enfin la personne responsable de cet attroupement.

Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’elle découvrit qu’il s’agissait d’un enfant, un enfant évoluant dans une sorte de landau confectionné pour sa taille. Le bruit de roulement qu’elle avait entendu étaient ceux des roues de cet étrange objet, roues qui grattaient avec vigueur le pavé de la place. Mais ce qui impressionna plus encore la Myrienne, se fut l’agilité de l’enfant, tant avec son fauteuil roulant qu’avec ses lames. Au-delà du danger que représentaient ces objets, Lanna eut soudain le coeur peiné de voir un enfant obligé de faire pareil spectacle, mettant sa vie en danger, pour une bouchée de pain en fin de journée, si la chance était avec lui. D’ailleurs, alors qu’il leva la tête vers elle et qu’elle lui sourit, le rouge lui monta aux joues mais il se reprit bien vite et finit son numéro avec un succès…mitigé, jugea-t-elle. Elle applaudit néanmoins de bon cœur et sa servante en aurait fait de même, si elle n’avait pas déjà les bras chargés de paniers remplis de leurs quelques achats au marché. Petit à petit, la foule se dispersa, mais Lanna, elle, resta et s’avança même jusqu’au jeune garçon qui rangeait ses lames :

Bonjour, lui dit-elle avec un doux sourire. Je n’ai pas eu la chance de voir l’intégralité de ton tour mais j’ai été impressionnée par ce qui me fut donnée de voir ! Comment t’appelles-tu mon enfant ?

(c) DΛND ELION
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[Flashback] Pour une Dame danseront tes Lames ~ ft. @Lanna Cole

[Braavos – An 297, Lune 7, semaine 3]


À peine achevait-il sa danse dans un dernier tour de roue, donné d'une impulsion du pied contre le pavé, que Thracy posa son regard vagabond sur la personne dont la tenue se démarquait parmi la foule des petites gens. Tandis qu'il s'inclinait en une profonde et élégante révérence – bras déployés dans un arc de danseur, munis de leurs couteaux qu'il venait d'aller récupérer – ses prunelles d'ambre ne pouvaient quitter la silhouette de Lady Cole. Car c'était bien elle : il la reconnaissait à présent pour l'avoir déjà vue de loin, offrant des victuailles à des orphelins, et pour avoir entendu murmurer dans les sombres venelles les récits de sa générosité. Comme sa robe claire étincelait, là au milieu de la troupe des hardes grisonnantes ! Un fin tissu la vêtait, dont les plis lui retombaient autour de la taille tels ceux des statues. Des broderies lui couraient le long des épaules, autour du buste, pareilles à l'herbe cascadant contre certaines façades de riches demeures. Une dame de cette qualité n'avait pu que capturer le regard du petit estropié, qui se releva et récolta les dons qu'on lui voulait bien donner. Il faisait tourner un vulgaire bol de terre cuite où sonnaient les pécunes.
On l'applaudissait. La noble également. Son sourire toucha le petit danseur qui cependant ne s'y arrêta par longtemps, craignant l'inconvenance. Ses pupilles bifurquèrent sur la femme aux côtés de celle qui était sans doute sa supérieure : de nombreux paquets occupaient ses bras et elle se tenait si près de la Dame Cole, comme son ombre – car il n'y avait que les puissants pour jouir de cet étrange privilège de n'avoir pas qu'une seule ombre dans leur sillage. Un instant, le gamin infirme se dit que la servante avait de la chance de travailler dans cette maison-là, si la noble se conduisait à l'intérieur de sa demeure de même qu'à l'extérieur auprès des pauvres. La crainte d'une pure représentation venait instinctivement à l'esprit du gosse, qui déjà si jeune était parfois aussi méfiant que peu dupe. Mais en l'occurrence il sentait une bonne intuition. Il lisait la sincérité sur le visage de la noble. Ces traits de figure comme messager involontaire et que Thracy aimait déchiffrer lors d'une rencontre.
Si intimidé d'avoir attiré l'attention de la Lady – flatté aussi, sans doute... – Thracy avait veillé à ne pas l'observer avec trop d'insistance, préférant cueillir les regards que les autres spectateurs lui adressaient avec parfois une piécette. On portait sur lui cette collection d'émotions auxquelles il était désormais habitué : fascination, curiosité bien ou mal placée, amusement, pitié, mépris... Un éventail de la nature humaine donné bien tôt à découvrir à certains marmots.
Les rangs se clairsemèrent, la foule se dispersa, fondit à vue d’œil : le spectacle restait un simple intermède dans le quotidien laborieux et pressé. Les souliers plus ou moins raffinés s'en allaient tapoter le pavé. Thracy ne put s'empêcher de suivre des yeux certains pieds maigres, couverts de corne et de boue, avec la pensée ironique que sa position assise était privilège de Grands. Lady Cole et sa suivante cependant restaient près de lui. La noble dame approcha, même, et le salua avec une douceur bien rare. Par réflexe, le gamin baissa humblement le regard. Ses doigts s'entortillèrent entre les pans de sa tunique défraîchi.

« B'jour M'dame » souffla sa voix fragile, à peine masculine encore, dans une esquisse de sourire. Il ne manqua pas d'adresser au passage un petit hochement de tête en guise de salut cette fois-ci à l'attention de la servante.

Il suspendit ses mouvements : elle le complimentait pour son numéro. Vraiment ? Sur la fin, celui-ci n'avait pourtant pas été idéal... Une pirouette que le môme réussissait bien d'ordinaire s'était dessinée de façon un peu trop pataude pour le geste papillon qu'il souhaitait danser. La spectatrice avait toutefois apprécié et aurait bien voulu en voir davantage ? Son sourire s'élargit et ses grands yeux remontèrent à tâtons chercher ceux de sa prestigieuse vis-à-vis.

« Oh b'en... je... Merci beaucoup M'dame. » trouva-t-il seulement à dire avant d'ajouter, alors qu la vieille musicienne approchait de lui : « Faut dire que chuis joliment accompagné. Ce s'rait moins bien sans les notes de Phaïdée. »

Regard complice entre eux. Le visage froissé de l'aïeule s'étira dans un sourire crénelé. Puis elle prit soin elle aussi de saluer humblement Lady Cole. Ses doigts, parcourus par le léger tremblement dû à son âge, amassèrent sa part de pièces au sein du petit bol encore sur les genoux du gamin et qu'il lui présenta. Au moins aujourd'hui, grâce à la présence de la noble qui honorait le duo de sa compagnie, aucun autre vagabond ne viendrait appliquer la loi de la jungle de ces rues et tenter de subtiliser aux artistes la recette tout juste acquise. Cela arrivait quelquefois – rarement, heureusement. Phaïdée empocha l'argent. Un rapide au-revoir de la main à Thracy, une révérence devant la noble... et la joueuse s'éclipsa pour aller retrouver les petits-enfants qui, savait l'invalide, l'attendaient un peu plus loin. Le danseur s'empressa de reporter son attention sur sa spectatrice inattendue :

« J'm'appelle Thracy, M'dame. »

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Pour une Dame danseront tes Lames
@Thracy & Lanna Cole


« An 297 Lune 7 Semaine 3 * Braavos, Place des Artistes »
Comme cet enfant doit être jeune… songea Lanna en l’observant, maintenant qu’elle pouvait le voir de plus près et qu’il était plus immobile. Il ? Etait-ce seulement un jeune garçon ou bien s’agissait-il d’une jeune fille ? Sa voix fluette pouvait aisément induire quiconque en erreur mais au-delà de son jeune âge et de sa voix légère, c’est surtout le handicap de l’enfant qui peina la Myrienne. Ses bras et ses jambes étaient bien maigres, à l’instar de tous ces pauvres enfants qu’elle voyait parfois passer à l’auspice où un repas chaud était distribué une fois par jour pour les plus démunis. A chaque fois, Lanna avait le coeur brisé de voir tant d’enfants quémander une pièce dans les rues, être contraints de voler pour leur propre survie ou venir, sales et affamés, recevoir leur bol de soupe accompagné d’un morceau de pain en fin de journée, un repas qu’ils engloutissaient en moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire. Pourquoi le sort s’acharnait-il tant sur ces malheureux ? Pourquoi ? Qui décidait de leur sort, juste avant leur naissance ? R’hllor était-il cruel à ce point pour sceller, avant même leur venue au monde, le sort de ces pauvres créatures ? Pourquoi certains naissaient-ils dans des familles aisées et d’autres dans la rue ? Pourquoi certaines naissaient-ils valides et d’autres non ? Toutes ces questions restaient malheureusement toujours sans réponses pour Lanna, mais à voir cet enfant dans son chariot, elles se rappelèrent à son esprit, plus vivaces et injustes que jamais.

Lanna offrit un sourire compatissant à l’enfant, ne faisant guère attention à son parlé bien familier ainsi qu’à cet accent que prennent tous les pauvres vivant dans les rues. Son sourire s’élargit davantage à le voir tout gêné de son compliment. Elle n’avait pas dit cela uniquement pour paraître gentille et avenante ; elle avait été réellement impressionnée par les prouesses et l’agilité dont il fit preuve devant la foule, et qui plus est en tant qu’invalide. Ses yeux sombres quittèrent la frêle silhouette de l’enfant et se décalèrent vers une personne d’un âge fort avancé qui venait vers eux. Il s’agissait d’une vieille femme répondant au prénom de Phaïdée.

Il est vrai que cela a fort bien rythmé tes acrobaties, répondit-elle avant de se tourner vers sa servante. D’un regard, elle lui fit comprendre de donner quelque chose à cette femme. La servante comprit et tira une pièce d’argent d’une petite bourse de cuir. Lanna prit la pièce et la mit dans les mains tâchées et ridées par l’âge de la vieille musicienne :

Allez dans la Paix et dans la Lumière du Maître, la bénit-elle avant de la laisser s’en aller de son petit pas traînant sur les pavés de la ville.

Bien que cette Phaïdée se vit partager le maigre butin collecté par l’enfant des suites de leur représentation, au moins, avec cette pièce supplémentaire, pourrait-elle manger à sa faim ce soir et tout le jour suivant. Cela mit du baume au cœur de la Myrienne, comme à chaque fois qu’elle faisait une bonne action pour les plus pauvres.

Et bien je suis enchantée de te connaître Thracy, répondit Lanna en se baissant pour être à la hauteur du regard de l’enfant. Je m’appelle Lanna et voici Myra, fit-elle, présentant sa servante tout en évitant de s’encombrer de son titre de noblesse. Qu’est-ce que cela démontrait-il aux yeux de Thracy, sinon qu’elle avait tout alors qu’il n’avait rien et de plus, elle était sûre qu’à son âge, il avait très bien pu deviner son statut rien qu’en observant ses vêtements. Au-dessus d’eux, le soleil avait passé le zénith ; on devait être en début d’après-midi et ni Lanna, ni Myra, n’avaient encore mangé.

Nous avons encore quelques achats à faire mais avant cela, je suis prête à parier que tu as faim.

Myra jeta un regard surpris à sa maîtresse mais elle garda les lèvres closes.

Si nous allions voir ce que les pêcheurs ont ramené dans leurs filets ? proposa-t-elle avec un sourire bienveillant.

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[Braavos – An 297, Lune 7, semaine 3]


La douceur ressentie dans les grands yeux de cette noble dame toucha Thracy – le gêna même un peu : il n'y était pas habitué. Il n'avait aucune idée de ce à quoi pouvait ressembler l'affection maternelle : jamais l'enfant n'avait connu la sienne. Si loin que remontait la collection embrouillée de ses souvenirs, fouillant au milieu d'eux, le gamin n'y trouvait que des choses sans rapport avec cet attachement des plus sincères. Beaucoup d'ordres à exécuter. D'interdictions à observer. Des jeux avec certains autres bambins, parfois – mais toujours superficiels et courts puisque la troupe de caravanes où il servait errait en permanence sur les routes d'Essos. Oh, parmi les nomades qui l'avaient exploité jusqu'à l'année dernière, il y avait bien ces trois femmes qui lui offraient un peu de complicité, des moments de répit – voire de tendre divertissement – et souvent le défendaient. Rien d'autre toutefois ne lui permettait d'envisager la lien maternel ordinaire entre un enfant et celle qui l'avait engendré. Aussi appréciait-il la tendresse de ce regard posé par une dame sur un marmot mais ne le comprenait-il pas : ce ne serait pas pure gratuité ? Elle allait lui demander quelque chose ?
D'abord enveloppé dans la douceur que Lady Cole lui adressait, Thracy passait donc malgré lui sur la réserve. Son candide sourire ne quittait pas ses lèvres – cependant la défensive du petit animal et ses débuts de questions germaient sous le masque. L'idéal d'une vie sans avoir à se défendre à chaque instant, sans avoir à rendre un service en échange d'un bienfait qui somme-toute n'en était pas un, voilà qui semblait réservé à d'autres et seuls les dieux en auraient l'éventuelle explication. Un dispensaire des bas-quartiers permettait certes d'aller quérir la soupe en cas d'extrême difficulté – et Thracy ne manquait pas de s'y rendre – mais tel était le seul endroit de répit dans un quotidien de subsistance, d'antennes aux aguets. Et encore, des garnements ne se privaient pas d'arracher leur pitance à des malheureux congénères une fois ces derniers servis.
Même le temple de R'hllor n'était guère sûr : pour qui venait chercher la paix du Maître, les abords du sanctuaire grouillaient d'errants prompts à détrousser, ou à se garder les bons postes de mendicité. Et dire qu'il y en avait pour penser que le quotidien d'un vagabond était celui d'un paresseux, qu'ils n'avaient qu'à fainéanter en attendant l'obole ! La rue était une jungle pleine de ses fauves. Les prêtres de R'hllor enseignaient le Bien, le Mal, la Lumière et les Ténèbres mais l'enfant peinait à les séparer dans un univers où chacun devenait prédateur de son voisin, où le malheur d'un faisait le bonheur d'un autre, où c'était de l'Enfer d'un homme que se composait le Paradis de son voisin.

Thracy quitta ses élucubrations devant le sourire de Dame Lanna, qui complimenta Phaïdée pour ses notes. Il la vit lui tendre une rondelette pièce d'argent que sa servante, sur demande d'un simple regard, venait de tirer d'une bourse. Ainsi la musicienne put-elle empocher ce don en plus des pécunes ramassées au creux du bol de Thracy selon leur accord. Phaïdée reçut avec émotion la bénédiction de Lady Cole et inclina pieusement la tête. Thracy l'écouta en se posant beaucoup trop de questions pour la petite tête d'un gosse... Est-ce que cela marchait si n'importe qui donnait une bénédiction ? Ou seulement de la main des prêtres et nobles ? Pouvait-on tous aller dans la même paix du Maître si sa Lumière était si inéquitablement répartie ? À moins que ceux qui avaient l'air de jouir de tout n'aient à souffrir aussi de leur lot de ténèbres... beaucoup plus invisibles ?
Quand la vieille femme eut récupéré le don, salué la noble, puis se fut laissée aller à tapoter l'épaule du petit infirme dans un geste complice, elle disparut retrouver plus loin ses petits enfants.

« Enchanté... » murmura la minuscule voix de Thracy à la présentation de Dame Lanna, sans savoir quoi ajouter de sérieux. Il aima entendre également le prénom de cette servante, qui ainsi était véritablement quelqu'un – pas une ombre vivante ou un genre de meuble tels qu'il en suivait d'autres Grands en ces Citées. Myra, Lanna... C'était élégant et doux à l'oreille, ces prénoms. Touchant, aussi, que de les entendre sans une parade de titres comme celle avec laquelle les nobles se faisaient annoncer. Le choix d'une égalité même éphémère entre la supérieure, la servante et le môme roulant. Et si l'identité et les titres étaient des pièces de vêtement dont on pouvait aussi se défaire, voire changer au gré des circonstances ? Et en cet instant cela avait l'air tellement facile.

« Faim ? Oh b'en oui alors ! » s'égosilla-t-il à l'appel de son estomac et sous l'impulsion de Lady Cole, une fois passé son trouble et son fond de timidité craintive. Si l'environnement restait hostile, quelque chose disait à Thracy que ce ne serait pas de cette bienfaitrice qu'il aurait à se défier. Après tout, on la connaissait pour sa charité. Le bref temps de méfiance qu'il avait eu plus tôt lui sembla stupide – résultat d'un suspend de conscience face à de la bienveillance si peu expérimentée.

Il empoigna les roues de son véhicule et suivra Lanna le long des pavés, pour rejoindre les quais où se déchargeait le fruit des pêches. Le ressac et les puissantes fragrances de poisson embaumèrent l'air – autant que la transpiration soutenue de tous ces travailleurs aux heures les plus chaudes qui écrasaient Braavos. Heureusement, l'atmosphère se voyait un peu atténuée par les assaisonnements d'herbe qu'y mêlaient certains vendeurs pour rendre leur marchandise plus alléchante que celle du voisin. La loi du marché. Ou une jungle là encore, jungle d'un autre genre.
Les pupilles de Thracy furent attirées par le triste spectacle de crève-la-faim en meute qui, sur le bas côté, prenaient en chasse un couple de vendeurs sans doute guère plus fortunés qu'eux... mais disposant de produits dont se nourrir – raison amplement suffisante. Tant d'anonymes prêtes à assassiner pour grailler un jour de plus et survivre une nouvelle nuit. Ça gueulait, ça battait le pavé, mêlé de jurons puis du claquement des bottes des agents de l'ordre public à la poursuite des voleurs.

« Est-ce que eux, si quelqu'un les avait bénis aujourd'hui, eh b'en y seraient aussi dans la paix... et même que ça les aurait aidé à trouver à manger ? » demanda naïvement Thracy alors qu'il repensait aux paroles prononcées plus tôt par Lady Cole. « Ou c'est juste un truc en plus, mais qu'aurait rien changé à comment y doivent s'débrouiller ? Comment c'est qu'on est dans la Lumière ? »

Alors qu'ils arrivaient enfin au plus près des marchands, entourés de leurs poissons et fruits de mer aux cent couleurs, Thracy tut le flot de questions qui venait de quitter ses lèvres avant qu'il ne devienne trop débordant et encore plus incohérent qu'il ne l'était déjà. Il espéra... Aussi intensément qu'un môme attendant l'éclairage d'une grande personne sur une énigme. Dame Lanna semblait si douce : accepterait-elle de répondre à sa curiosités, elle qui invoquait le Maître au secours d'autrui ?

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« An 297 Lune 7 Semaine 3 * Braavos, Place des Artistes »
La chaleur devenait vraiment écrasante. Même si tous les trois s’étaient mis en marche, se dirigeant vers les quais de Braavos où ils trouveraient assurément un peu d’air charrié par la mer, Lanna savait déjà que ce serait probablement de l’air chaud et remplis des embruns salés de la mer et des odeurs de poisson. Rien de bien rafraîchissant, en quelque sorte… Mais au moins, plus ils se rapprochaient des quais, plus la chaleur étouffante de la Place des Artistes se dissipait, semblant comme s’évaporer de leur corps. Lanna ouvrit sa main droite vers Myra, qui comprit, à ce geste, qu’elle quémandait silencieusement son éventail. Aussi la servante le tira du dessus du panier qu’elle portait et le tendit à sa maîtresse, qui la remercie d’un sourire silencieux, avant de baisser son regard vers l’enfant, juché sur son étrange chaise roulante. D’un geste sec, elle fit s’ouvrir son éventail et commença à l’agiter doucement devant son visage et sa gorge, ce qui rafraîchit un peu sa peau mise à rude épreuve par le soleil de Braavos. R’hllor était aujourd’hui généreux en lumière comme en chaleur. Il fallait voir cela comme une bénédiction du Maître de la Lumière mais Lanna avait quand même bien hâte de se plonger dans un bon bain parfumé afin de retirer de sa peau et de ses cheveux cette odeur de transpiration ainsi que celle de poisson qui allait lui coller à la peau ainsi qu’aux vêtements. Mais en regardant l’enfant à ses côtés, elle fut prise d’un élan de tristesse et de pitié. Elle avait eu la chance d’être bien née, de pouvoir manger à sa fin, se désaltérer à sa guise, avoir une hygiène décente et digne d’une dame de son rang, d’abord en tant que fille d’une riche famille de magistrats originaire de Myr, puis en tant que Dame de la Maison Cole, toute exilée de Westeros soit-elle. Mais cet enfant, Thracy, lui, n’avait rien. Il n’avait pas choisi cette vie et pourtant, Lanna en devint presque admirative de voir tant de combativité, de volonté, d’optimisme en une si jeune personne, en plus amoindrie physiquement. Cela forçait presque le respect et c’est pourquoi, son coeur l’avait poussé à lui offrir au moins de quoi manger pour aujourd’hui. C’était tout ce qu’elle pouvait faire pour lui venir en aide, un geste, une main tendue pour faire comprendre que non, l’enfant n’est pas invisible de tous. Elle l’a vu. Sûrement fallait-il y voir un signe du Maître de la Lumière. Il avait choisi de mener ses pas jusqu’à cet enfant infirme et pourtant si courageux. Elle ne pouvait se contenter d’un simple don d’une pièce d’argent, comme elle l’avait fait envers cette vieille femme qui l’accompagnait à la musique. Thracy méritait plus, elle le ressentait en elle. Ainsi lui sourit-elle chaleureusement avant de détourner le regard car les voilà tous trois arrivés au niveau des quais de Braavos.

Immédiatement, des odeurs de mer, de poissons, mais aussi d’épices lui arrivèrent aux narines. Ces dernières étaient fortes et couvraient presque l’autre odeur, tout aussi présente, de saleté des environs, odeur exacerbée par la chaleur. Lanna connaissait un marchand chez qui sa cuisinière s’approvisionnait toujours. Ses produits étaient toujours de grande qualité et jamais personne n’avait été malade ou ne s’était plaint de la fraîcheur de sa marchandise.

Par ici, fit-elle en désignant le chemin longeant les bords de mer sur leur droite. Et tandis qu’ils cheminèrent vers l’endroit où ce marchand tenait son échoppe en face de laquelle mouillaient deux de ses navires, Lanna baissa à nouveau la tête vers Thracy. L’enfant venait de lui poser plusieurs questions pleine de cette naïveté enfantine qui prêtait à faire sourire. Mais si Lanna sourit, c’était plus un sourire triste qu’un sourire amusé par tant de puérilité. A l’évidence, Thracy se posait beaucoup de questions au sujet de ce Maître de la Lumière et des bénédictions que Lanna profana envers Phaïdée. Bravos était une cité où la foi en R’hllor était très présente. Beaucoup de prêtres rouges allaient et venaient dans les rues et ruelles de la cité, prompts à dispenser bonnes paroles, bénédictions mais aussi mis en garde envers ceux qui donnaient leur foi à d’autres Dieux, ennemis de R’hllor. Relevant la tête, Lanna aperçu plusieurs pauvres erres qui fuyaient les quais avec leur maigre butin dans leurs mains sales, chassés par les forces de l’ordre de la ville. Elle s’arrêta un court instant et soupira devant tant de malheur et de pauvreté. Alors elle se pencha vers Thracy pour lui répondre:

Les prêtres rouges les bénissent quotidiennement; cela ne leur enlèvent pas moins leur misère, répondit-elle après son long soupir. Pour eux, la foi est tout ce qu’il leur reste j’en ai peur. C’est une chose immatérielle qu’on ne peut ni atteindre, ni blesser, ni retirer à quiconque. Les plus croyants d’entre eux y puisent leur force ou quelque réconfort. Ainsi se disent-ils que, même si les mortels les ont abandonné à leur triste sort, le Maître de la Lumière, lui, ne saurait les laisser de côté. Un jour, ils marcheront dans Sa Lumière, à ses côtés. Et ce jour-là, ils seront plus riche que le plus grand Seigneur qui aura jamais foulé cette terre, lui expliqua-t-elle. Cela ne rempli pas l’estomac, ni ne désaltère le corps. Mais cela soulage le coeur et l’esprit. Et de soulagement, nous en avons tous besoin un jour ou l’autre. Certains l’oublient, dans leur richesse et leur aisance. Mais nous sommes tous égaux aux yeux de R’hllor. Ceux qui l’oublient finiront dans les Ténèbres, oubliés à leur tour par Lui. On m’a apprit très tôt à aider mon prochain pour rester dans Sa Lumière. Et c’est ce que je compte bien faire jusqu’à mon dernier souffle, termina-t-elle, toujours avec son doux sourire sur les lèvres. En ce qui te concerne, tu ne peux pas ne pas être dans Sa Lumière, pas en faisant preuve d’autant de combativité et de courage pour subsister dans l’état qui est le tien. Cela force l’admiration, mon admiration…Ainsi que mon respect, ajouta-t-elle en faisant passer un de ses doigts sur le front humide de transpiration de Thracy, y délogeant une mèche rebelle.

A présent hâtons-nous, fit-elle d’un air joyeux en se redressant. Allons voir si la pêche fut bonne !

Et elle se remit en chemin vers l’échoppe du marchand, Myra toujours près d’elle, suivit du roulement de la chaise de Thracy.

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[Flashback] Pour une Dame danseront tes Lames ~ ft. @Lanna Cole

[Braavos – An 297, Lune 7, semaine 3]


Le soleil de plomb s'écrasait de toute sa poigne sur la cité, en cette heure de midi qui pourtant n'arrêtait en rien l'agitation des quartiers populaires et des quais. Coûte que coûte, le travail se poursuivait. Rien ne savait arrêter les mouvements des corps chargeant et déchargeant leurs ballots, vidant les cagettes, triant les poissons dont les senteurs venaient se mêler aux fortes odeurs de sueur. Le rafraîchissement était tout relatif. Au milieu de ces senteurs, tout de même : la salutaire effluve salée de la mer, en note de fond un peu plus agréable dans ce magmas tournoyant qui prenait toutes les narines. Thracy osait rarement venir seul à ces bords de mer, souvent si noirs de monde, si pleins d'énormes véhicules et de mouvements pressés, qu'il lui serait vite fait de s'y faire heurter ou voler ses rares piécettes. Il leur préférait le relatif désert des ruelles plus étroites, plus discrètes – pas forcément plus sûres mais qu'il connaissait comme sa poche – ou la sécurité de petites places plates, pavées, qu'il élisait pour ses numéros. Ces cloaques cependant empestaient trop souvent détritus et déjections – tel était le prix à payer. Aussi apprécia-t-il les odeurs du port : on ne pouvait pas les dire bonnes... mais déjà moins mauvaises. Il reçut aussi avec elle les très plaisants coups d'air frais dégagés par l'éventait que la Dame agitait vers sa gorge. Ses pupilles furent alors accrochées par les motifs du bel objet davantage que par son mouvement. Des couleurs délicates, une peinture subtile sur le papier fin dansant autour du visage de la Lady. Des touches de beauté comme celle-ci étaient assez rare pour que le petite garçon ne les attrape pas au vol, ne nourrisse pas son esprit créatif de ses teintes et courbes. Comme il aimerait dessiner des choses aussi fines et aériennes !

Il quitta vite, néanmoins, ses égarements dans les formes et couleurs pour revenir à l'âcre spectacle des corps transpirants, muscles bandés sous les efforts, et surtout des malfrats en fuite. La course de ces derniers avait attiré son attention et généré chez lui tant de questions, posées toutes ensemble à la Dame en un fouillis malhabile. Thracy vit que son sourire était triste. Qu'il reflétait une rare et immense compassion loin d'être partagée par tous les membres de sa classe. Triste – et humble, car cette affliction lui signifia que toute croyante qu'elle était, elle n'en avait pas la prétention d'avoir des réponses rassurantes à plaquer sur la misère du monde. Le gamin fut désolé. Il ne voulait pas la peiner alors que c'était une si belle journée et qu'elle lui offrait cette balade et à manger... Il n'aurait peut-être pas dû ? Ses petits doigts s'entortillaient dans un morceau effiloché de son habit.
Mais alors elle s'installa à sa hauteur et lui détailla la consolation que sa foi offrait. Immobile, Thracy écoutait avec une grande attention comme en aurait eu un élève face à un sage l'instruisant. Les prêtres parlaient en public, mais rarissimes étaient les fidèles recevant un discours qui leur était adressé à eux – rien qu'à eux, et à leurs interrogations. Le garçon ne devrait pas – ce serait jugé très impoli par beaucoup... mais ses immenses yeux restaient plongés droit dans ceux de la Lady. Il intégrait ce qu'elle lui disait de cet espoir et de cette force mis au cœur par le Maître de la Lumière.

« Alors y a... un genre d'aut' monde, où que les gens comme eux, y seront dans la Lumière et riches comme des seigneurs ? Mais dans c'cas, c'monde-ci en attendant c'est quoi : une épreuve à traverser avant d'êt' bien enfin ? » essayait de comprendre Thracy, troublé par l'idée de cette dualité – l'idée qu'il faille se tenir fort et patient en un premier monde dur, en espérant un genre de... récompense... seulement dans un second temps. Pourquoi attendre ce ''un jour'' et pourquoi, avant ce moment où on a l'air de vivre enfin, passer par une antichambre de peine ? « Ou alors ça va arriver là, sur not' terre même, les beaux jours qu'vous dites ? » murmurait le gamin, pouce au coin de la lèvre, à se demander comment un tel bouleversement pourrait se faire s'il devait arriver ici-bas. Dans ce cas-là il n'y aurait pas à attendre un autre monde, mais il n'y avait qu'un seul et unique monde qui pouvait déjà être beau... C'était bien compliqué tout ça, et intimidant pour sa petite tête qui se chargeait d'un fouillis de questions et de mystères. « Ceux qui oublient s'ront à leur tour oubliés... C'est quoi ? Une récompense des bons et une punition des mauvais ? » L'idée lui était curieuse. Et si certains étaient gentils juste par peur de la punition et pas tellement par vrai soucis pour les autres... Enfin... c'était sûrement déjà une première étape, à entendre combien la Lady croyait à ce temps où l'égalité serait rappelée, et combien elle y contribuait – or chez elle, Thracy sentait que les gestes étaient sincères. Vraiment venus du cœur et non pour éviter le revers de bâton. La douceur des traits de la Lady disait combien ces principes faisaient partie d'elle. Depuis quand ? Comment ?
L'enfant allait ouvrir la bouche mais se retint en recevant l'affection d'une main maternelle – si tendre pour un enfant qu'elle ne connaissait que depuis peu. Il eut un petit rire à la mèche qui le chatouilla tandis qu'elle le recoiffait. Et ne sut rien répondre d'autre qu'un mine rosie aux paroles d'admiration qu'elle lui adressait. Il n'avait jamais entendu ça. Thracy ne savait pas comment y réagir ni quels mots avoir. Aucun ne lui vinrent, ils auraient été trop bêtes, trop insuffisants. C’était si neuf et déconcertant qu'il apprécia simplement, muet, et un regard luisant parla à sa place.

Il remit les mains à ses roues et s'empressa de suivre Lady Cole lorsqu'elle l'invita à aller voir la pêche. Sur le chemin, le gamin retrouva un peu de ses phrases au milieu de son émoi et put formuler tout ce qu'il venait de se demander plus tôt : « Et vous, M'dame, c'est... c'est qui ou c'est quoi, qui vous a enseignée, pour le Maître ? Qu'est-c'qui a fait qu'vous êtes... si différente ? On dirait qu'vous avez tellement à donner au prochain comme si qu'c'était votre enfant ! » Et lui vint alors le petit mot espiègle, à l'idée de ces innombrables prochains et enfants : « Ça vous en fait beaucoup ! »
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Pour une Dame danseront tes Lames
@Thracy & Lanna Cole

Les embruns de la mer, l'odeur iodée qui en émanait. Voilà qui faisait du bien, un semblant de fraîcheur après avoir traversé ces rues et ruelles souffrant de la chaleur du soleil, au zénith à cette heure de la journée. Bien que vêtue de façon à combattre cette arrassante chaleur, Lanna transpirait tout autant que Myra et que Thracy, probablement. Elle agitait frénétiquement son éventail sur sa gorge pour augmenter l'air frais, dira-t-on en comparaison du manque d'air écrasant des rues à l'intérieur de la cité, qui lui arrivait sur le visage. Cela lui faisait du bien mais elle ne sera pas contre une boisson fraîche ou quelques fruits juteux pour se désaltérer. De côté, elle sentit le regard plein d'admiration du jeune garçon mais elle ne lui rendit pas ce regard, occupée à regarder, d'un air plutôt désolé, la fuite de ces bandits vers les recoins sombres de Braavos dans lesquels ils se terraient. Lanna laissa échapper un soupir en tournant ses yeux sombres sur Myra avant de poursuivre lentement son chemin vers l'une des extrémités du quai sur lequels ils se trouvaient lorsqu'elle s'arrêta et se tourna vers le jeune infirme.

Thracy était peut-être une de ces pauvres âmes errant dans les rues sans autre but que celui de gagner un peu d'argent pour pouvoir se sustenter au moins une fois dans la journée des restes un peu douteux qu'une des nombreuses auberges de la ville voudrait bien lui céder. Cependant, il avait aussi un esprit vif et curieux qui criait à Lanna qu'à côté de cela, il n'était encore rien de plus qu'un gamin comme les autres, avide d'apprendre et l'esprit rempli de questions; une réponse amenant toujours avec elle deux questions de plus. Debout à ses côtés, elle désigna un petit coin d'ombre de la tête, à l'écart de la foule qui circulait sur les quais et s'y rendit, suivit de Myra et de Thracy. Là, à l'ombre d'un des commerces de poissons de la ville, elle put répondre plus aisément, sans souffrir de la chaleur écrasante du soleil ou des passants susceptibles de la bousculer.

C'est ce que nous enseigne notre foi, en effet, répondit-elle toujours de son air bienveillant et pédagogue. Ce monde-ci est une sorte de mise à l'épreuve, comme tu l'as justement deviné. La vie qui est la nôtre ici est dure, remplie de choix importants qui déterminent ce que nous étions, ce que nous sommes et ce que nous deviendrons un jour. Il n'appartient qu'à nous de nous la rendre plus aisée, mais elle commence cependant avec une chose dont personne n'y peut rien: notre lieu de naissance. Il est aisé, pour une personne bien née, de se rendre la vie facile alors que la tâche est ô combien plus ardue pour ceux comme toi qui en ont été privés. C'est pourquoi j'admire ceux de basse naissance qui essaient malgré tout de s'en sortir. Je trouve cela très noble et impose le respect, fit-elle, sincère.

Mais d'autres questions fusaient de la bouche du jeune garçon:

Ou alors ça va arriver là, sur not' terre même, les beaux jours qu'vous dites ?... Ceux qui oublient s'ront à leur tour oubliés... C'est quoi ? Une récompense des bons et une punition des mauvais ?

Lanna se mit à rire doucement. Elle ne se moquait pas de lui, elle était juste heureuse de parler de ces choses-là avec un enfant qui parlait à sa façon, d'un air simple et détaché mais en même temps qui faisait preuve de vivacité et de curiosité qui plaisaient beaucoup à la Cole:

Que je suis heureuse de t'avoir rencontré Thracy ! rétorqua-t-elle avec un grand sourire. Je n'ai pas souvent ce genre de conversations et je suis ravie de voir que tu t'intéresses à ce point à ces choses-là, et cela pas uniquement dans le but que je tienne ma promesse et t'offre ton déjeuner. Cela, je m'y tiendrais quoi qu'il advienne. Mais pour en revenir à tes questions...Hélas, les beaux jours n'arriveront pas ici, dans notre monde je veux dire, tenta-t-elle d'expliquer le plus simplement possible. Une prophétie du Maître de la Lumière annonce même la fin du monde des vivants, tel que nous le connaissons toi et moi. Mais ce n'est qu'une prophétie destinée à nous effrayer et à punir ceux qui, comme tu l'as justement compris, s'écarteraient trop de la voie qu'a tracé pour nous R'hllor dans Sa sagesse, expliqua-t-elle, espérant que cela rassurerait le jeune garçon. Rien de certains en tout cas, rajouta-t-elle à mi-voix. Allons, hâtons-nous avant qu'il ne reste plus rien ! fit-elle gaiement et ils se remirent en marche vers l'extrémité du quai où se trouvait le marchand chez qui Lanna avait l'habitude d'envoyer ses servantes faire leurs achats en poissons et fruits de mer.

Thracy avait remis les mains sur les roues de son étrange fauteuil et les suivait à leur rythme. Malgré sa maigreur, il dissimulait une certaine force dans ses mains et dans ses bras pour avancer à un rythme aussi rapide. Lanna l'observa avec douceur tandis qu'une nouvelle question parvenait à l'esprit de Thracy. Celle-ci la concernait elle directement:

Et vous, M'dame, c'est... c'est qui ou c'est quoi, qui vous a enseignée, pour le Maître ? Qu'est-c'qui a fait qu'vous êtes... si différente ? On dirait qu'vous avez tellement à donner au prochain comme si qu'c'était votre enfant !...Ça vous en fait beaucoup !

A cette remarque, Lanna éclata de rire de bon coeur: En effet oui ! Me voilà mère de bien plus d'enfants que des trois que j'ai mis au monde ! Ce sont mes parents qui m'ont enseigné tout ceci, Thracy, lui répondit-elle. Je suis née à Volantis dans une famille de magistrats originaires de la cité de Myr. Mes parents ont toujours eu à coeur de nous enseigner l'humilité, la reconnaissance et à aider autrui. Vois-tu, ces préceptes, je les ai reçu de mes parents avant de les retrouver dans la foi qui est la nôtre. Je n'ai jamais cherché à savoir si ce sont des valeurs que mes parents voulaient que j'ai ou si c'était une sorte de préparation à embrasser la foi de R'hllor. Toujours est-il que c'est à eux que j'estime devoir ses valeurs. Le Maître de la Lumière m'a aidé à les developper et à les offrir à ceux qui en ont besoin.

Elle échangea un coup d'oeil complice avec Myra puis s'arrêta devant l'échope d'un vieil homme ridé par le soleil aux cheveux et à la barbe cependant blanc comme une perle.

Dame Lanna !, la salua-t-il en la reconnaissant. Il voulu se lever mais Lanna le fit se rasseoir d'un signe:

Non je vous en prie restez assis, fit-elle. La pêche a été bonne?

Pour sûr ma Dame, rétorqua-t-il en désignant les palourdes, huitres et autres langoustes et écrevisses ramenées de la mer et stockées dans des cages à l'ombre du soleil. Qu'est-ce qui vous f'rait plaisir? demanda-t-il en jetant un coup d'oeil méfiant à Thracy.

Lanna se pencha alors vers le garçon et lui murmura: Qu'aimerais-tu manger Thracy? Puis, en se tournant vers  le marchand: Pourrais-je abuser de votre bonté et nous donner un peu d'eau fraîche à tous les trois je vous prie?

Certainement...Certainement... répondit-il avant de se lever avec difficulté et de rentrer à l'intérieur de son échoppe, à la recherche d'eau fraîche et de gobelets. Pendant ce temps, Lanna patientait tranquillement aux côtés de Thracy et de Myra, mains jointes devant elle et le regard tombant sur le jeune garçon, un regard rempli de bonté mais aussi de pitié. Elle savait qu'elle allait devoir le laisser bientôt, le laisser à nouveau aux rues et à leur terrible vie. Mais elle devrait rentrer; ses fils l'attendaient, de même que son époux.
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[Braavos – An 297, Lune 7, semaine 3]


Enfin parvenus aux abords des quais, la fraîcheur qui tournoyait, portée par les flux et reflux de la mer, était proprement libératrice. Thracy l'inspira à pleins poumons. Un fin sourire vint éclore à ses lèvres. Porté par le relâchement drainé par cette brève douceur saline, il s'oublia à un tournoiement habile imprimé aux roues de sa chariote. Le garçon suait autant que Dame Lanna et sa servante. Malgré tout, son enthousiasme enfantin parlait dans ses gestes et le petit danseur aimait cette façon d'accueillir l'instant de répit offert à lui. Il savait que celui-ci serait fort bref, que bientôt il devrait retourner aux rues, à ses numéros de saltimbanque, à ses chapardages... et à la perpétuelle nécessité d'échapper aux archers de l'ordre public. Quand ce n'était pas des bourgeois – persuadés que voir un infirme portait le mauvais œil – qu'il fallait fuir. Thracy rêvait qu'un jour, il vivrait pleinement de son art : les tours de passe-passe auxquels il lui plaisait de se livrer avec ses cartes de tarot, l'aisance de ses doigts avec ses lames ou à sculpter des breloques... Finalement il reprit sa route, rasséréné et plein d'un meilleur entrain à actionner son humble véhicule malgré les escarpements du terrain.
Tout n'était que mouvement perpétuel. Parce que son quotidien ne se résumait qu'au changement et à l'incertain, le gamin des rues essayait de ne pas s'attrister. Pas même du fait que, bientôt, il serait à nouveau seul par les chemins de Braavos. Autant aimer l'ici et maintenant ; profiter de la compagnie précieuse de Lady Cole et Myra. C'était agréable, pour une fois, de se laisser pleinement aller aux soins d'autrui. Comme un éternel voyageur se déleste un temps de sa besace. Aujourd'hui, une dame bienfaitrice allait lui offrir à manger. Mais plus encore que le repas, ce serait de le partager avec elle que le gosse allait savourer. À ses côtés, l'invalide contempla la remontée des filets, les dansantes ombres des corps à l'ouvrage dans ce qui lui parut être une impressionnante fresque qui mériterait le pinceau d'un artiste. Croisant le regard de quelques pêcheurs, Thracy les saluait d'un timide sourire.

« Alors tout ça, ça s'rait juste un genre d'avant-monde... » reprit Thracy, toujours aussi interpellé par ce que Dame Lanna lui enseignait du Maître de la Lumière. « C'est poétique et... et ça m'fait un peu peur à la fois. Si on est dans une épreuve, si le Maître est là pour voir si on s'comporte bien ou mal... j'crains de pas faire c'qui faut. » confia-t-il à mi-voix, intimidé par ce Dieu de bonté... mais qui porterait malgré tout un œil comptable sur ses créatures ? Et qu'était-ce qu'une bonté, une lumière qui soumettait d'abord les mortels à l'épreuve avant de donner ou non la joie ? Serait-il possible, ou orgueilleux, d'espérer plaisir et bonheur ici-bas ? Cela devait dépasser son esprit de neuf ans. « Mais c'est beau, c't'idée qu'on a tous le choix. Vous pensez que quelque part même un esclave est libre ? Y a des fois où j'me demande si tout c'qu'on fait vient de nos choix... ou pas du tout, que c'est prévu par un tas d'choses et qu'on s'en rend pas compte. Là où on est nés, not' famille, not' richesse, not' corps... » Ces questions travaillaient souvent le saltimbanque invalide. Que ferait-il à cette heure si ses parents l'avaient conservé, s'il avait été bien-portant ou que savait-il encore. Et cette noble avec lui, dans quelle mesure avait-elle eu le choix ou été prédisposée à vivre comme elle le faisait ?
L'enfant arqua un sourcil, étonné d'entendre l'aristocrate confier que dans son milieu – que Thracy s'imaginait pourtant plein de savants et d'amateurs de conversation de haute volée – il se trouvait somme-toute peu de monde captivé par ces réflexions. Cela était dommage. Et même difficilement compréhensible pour lui, si vorace de connaissances, d'images et de clés l'aidant à lire le monde. Le petit mystique savourait sincèrement cette discussion – à des années-lumière de l'idée que cela pouvait juste lui servir à plaire à son interlocutrice, comme cette dernière d'ailleurs le soulignait. La prophétie qu'elle évoqua lui ralluma un souvenir vivace, fit dansoter une flamme au fond de ses prunelles. « Une prophétie... à Volantis, y a une prêtresse qui m'en a confié une. Elle a dit que j'ferai un grand voyage. Et qu'j'aurai une façon bien à moi de déchiffrer et révéler... des choses. » Des paroles qui lui semblaient encore bien sibyllines – et chargées de grandes promesses pour ses petites épaules. Il en eut un rire nerveux. « Ça paraît fou comme ça... mais... j'ai envie d'la croire. »

Il reçut comme un baume l'appréciation de la Lady sur sa volonté d'agir dans les épreuves. Après tout, lui serait-il légitime d'aspirer à une vie sereine et ne pas attendre l'Autre-Monde pour cela ? « Merci. » murmura-t-il avant de plaisanter : « C'bien la première fois qu'on m'dit qu'ce que j'fais est noble ! » Ses iris ambrées égarées dans celles de la Lady, il souffla, curieux de la noble pour tout ce que sa condition avait d'exotique au regard du gosse des rues : « Et vous... Est-c'que vous diriez qu'vous avez une vie plus facile ? Y a des gens aigres qui pensent qu'vous, riches, z'avez davantage l'choix et jamais d'ennuis mais... » Il n'osa poursuivre, cependant un je-ne-sais-quoi de frêle chez Dame Lanna, de trop sensible pour qu'elle n'ait jamais souffert, lui sautait à l'intuition.
Et justement elle lui parla un peu d'elle, de sa famille, des nombreux enfants qu'elle se sentait avoir en plus de ceux que la Nature lui avait donnés. Et de ses parents. Thracy se figura Lady Cole en passeuse, intermédiaire entre ceux qui l'avaient élevée et ceux qu'à son tour elle faisait grandir. Le gosse des rues lui envia le bienfait d'une place au sein d'une lignée. Compter pour quelqu'un. Avoir un nom. Le sentiment d'être une branche, une pièce dans quelque chose de bien plus grand à quoi l'on participait. Trois enfants. « J'espère qu'y hériteront d'vos valeurs, comme z'avez fait avec celles d'vos parents. » espéra-t-il. « Comme ça, même s'y sont loin des fois, les branches se continuent et se rejoindront. » Silence. Tracy avait semblé égaré en parlant, suivant les lignes du visage de la Lady comme s'il voulait y lire. Il ne savait pas bien pourquoi il avait eu besoin d'ajouter ces mots.

Lanna le fit avancer vers le présentoir d'un marchand qui aussitôt se leva pour la saluer avec tout le respect dû à une femme de son rang. Humblement, elle l'invita aussitôt à se réinstaller. Le garçon tout intimidé se tenait un peu en retrait, dans le sillon de la Lady. D'autant qu'il voyait le regard lourd de suspicion que le vendeur lui réservait. Des commerçants de la ville le connaissaient comme chapardeur. Deux fois déjà il s'était fait prendre et châtier... quant aux autres, ils se fiaient à l'habit faisant le moine. « B'jour Monsieur » murmura Thracy, yeux baissés, avant d'oser enfin contempler l'étalage de fruits de mer où la noble l'invitait à faire son choix. Il ne connaissait pas certains mets. Aussi s'imprégna-t-il des odeurs et couleurs. « Ça a l'air tout bon ! » Il finit par pointer les coques des langoustes et leurs reflets rutilants. C'était d'un rouge fauve et si beau ! « Merci. » ajouta-t-il dans un grand sourire autant pour Lanna et Myra que pour le commerçant qui se mettait à leur service. L'eau fraîche ! Le petit infirme s'en réjouit comme si on lui avait annoncé un caviar !
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@Thracy & Lanna Cole

Tandis qu’elle patientait tranquillement pendant que le marchand de fruits de mer était allé leur quérir de quoi se désaltérer à tous les trois, Lanna baissa à nouveau son regard sur le jeune infirme. Pendant toutes ses réflexions au sujet de son discours et des explications qu’elle lui avait apporté au sujet de sa religion, du Maître de la Lumière et de ses propres croyances et valeurs, pour certaines héritées et apprises dès le berceau puisque ce sont ses parents qui les lui ont enseignés, Lanna ne cessait de hocher doucement la tête par intermittence. Du haut de son jeune âge et malgré son manque d’éducation, Lanna, tout comme Myra à laquelle elle envoyait de temps en temps un regard approbateur sur ce que le jeune garçon disait, découvrait un esprit affûté derrière ce regard pétillant et ce visage juvénile qui avait pourtant déjà connu tant de malheurs et de souffrances. Lanna eut un sourire presque fier en l’entendant tirer de lui-même les bonnes conclusions au sujet de ce monde actuel, de la poésie dissimulée sous les rites et prières - pour certains assez extrêmes et brutaux elle voulait bien le reconnaître - consacrés au Maître de la Lumière et des épreuves auxquels nous sommes tous confrontés de notre vivant. Celles-ci semblaient d’ailleurs l’inquiéter; Lanna le devina à l’intonation de sa voix qui, soudain, se fit moins forte et moins assurée. Elle s’accroupit pour être à sa hauteur juste au moment où Thracy se reprit et la questionna sur la notion de liberté:

Mais c'est beau, c't'idée qu'on a tous le choix. Vous pensez que quelque part même un esclave est libre ? Y a des fois où j'me demande si tout c'qu'on fait vient de nos choix... ou pas du tout, que c'est prévu par un tas d'choses et qu'on s'en rend pas compte. Là où on est nés, not' famille, not' richesse, not' corps…

Je dirais que cela dépend de leur maître, répondit-elle après quelques secondes de réflexion. Chez nous par exemple, il n’y a pas d’esclaves. Nous avons des serviteurs, comme Myra, mais ils sont payés et éduqués, deux choses qui sont généralement refusées aux esclaves. Certaines de mes connaissances ont des esclaves et ont par exemple décidé de donner une petite éducation aux enfants de leurs esclaves. Mais il est vrai que d’autres, la majorité j’en ai peur, n’ont pas cette chance. Heureusement que l’esclavage est interdit à Braavos. En tout cas, reprit-elle, il y a une chose que personne ne pourra jamais leur enlever. Sa main droite se leva et son index toucha la tempe humide de transpiration de l’enfant: Leur liberté de penser. Comme toi Thracy, qui me semble être un jeune garçon d’une grande curiosité! Ne cesse jamais de l’être car ce que tu apprendras des autres sera ta richesse.

Lanna eut un beau sourire encourageant afin de rassurer le jeune garçon mais ce fut ensuite à son tour d’être très intriguée. En effet, Thracy évoqua une certaine prophétie qu’une prêtresse de Volantis lui aurait fait:

Une prophétie... à Volantis, y a une prêtresse qui m'en a confié une. Elle a dit que j'ferai un grand voyage. Et qu'j'aurai une façon bien à moi de déchiffrer et révéler... des choses… Ça paraît fou comme ça... mais... j'ai envie d'la croire.

Lanna l’écouta avec grande attention. Elle releva une fraction de seconde ses yeux vers Myra qui hocha doucement la tête d’un air entendu. Puis, tandis que ses yeux sombres retombaient sur la frêle silhouette de l’enfant, Lanna souffla: R’hllor est grand… Puis elle reprit d’une voix plus audible et surtout empreinte d’un grand sérieux: Les prêtresses ne se trompent que très rarement Thracy. Je suis née à Volantis et j’y ai passé toute mon enfance. N’aies pas envie de la croire. Crois-là.

Prenant appui sur ses genoux, Lanna se redressa et le contempla de toute sa hauteur: Je savais que tu n’étais pas un simple garçon des rues. Cette prophétie t’annonce un avenir loin d’être banal. Je prierai pour qu’elle se réalise et que cela t’apporte une meilleure vie que la présente.

Lanna hocha la tête et son sourire s’étira plus encore, surtout après la réflexion de Thracy sur ses soi-disant nobles actions, ce qui fit légèrement rire Lanna ainsi que Myra. Cependant, les deux femmes retrouvèrent leur sérieux à la question, très pertinente, du jeune garçon:

Assurément, rétorqua Lanna. Nous avons aussi nos ennuis, comme tu le dis. C’est pour cela que j’estime que nous n’avons pas le droit de nous plaindre, pas lorsque nous savons à quel point les miséreux, eux, souffrent chaque jour et chaque nuit.

Elle s’interrompit et resta silencieuse à son tour, car cette réflexion lui rappela sa fille. Son départ forcé avait été la pire épreuve de sa vie et la réponse de Thracy au sujet de ses valeurs qu’elle transmettra sûrement à ses enfants lui arracha un sourire triste. Elle s’y employait effectivement chaque jour avec Lester et Landor. Ses fils seraient un parfait mélange entre sa propre culture et ses valeurs ainsi que celles de son époux. Mais qu’en sera-t-il de Melara, sa fille qui avait grandi si loin de sa mère? Elle souhaitait juste que la famille qui l’hébergeait était honorable et cela, Tylan le lui assura plus d’une fois.

Je l’espère aussi et te remercie pour tes gentils mots, Thracy, finit-elle par répondre, d’une voix néanmoins toujours teintée de tristesse. C’est à cet instant que le marchand revenait avec de quoi se désaltérer. S’il tendit évidemment le premier verre à Lanna, le deuxième à Myra puis le dernier, presque à contrecoeur, à Thracy, Lanna le remercia chaleureusement et trempa ses lèvres dans l’eau fraîche. Cela lui fit un bien fou et, tandis que Thracy avait jeté son dévolu sur des coques de langoustes, elle entendit Myra lui jeter un:

Bon choix ! enjoué, ce à quoi Lanna répondit par un hochement de tête affirmatif. Le marchand prit quelques coques et disparu à l’arrière de la boutique pour les préparer. Il ne fut pas absent longtemps et lorsqu’il revint pour tendre l’assiette à Thracy, Lanna lui tendait en retour une pièce d’or et quatre d’argent pour ce repas ainsi que pour l’eau fraîche:

Mille merci ma Dame, mille merci, la remercia-t-il. Vous ne voulez rien Dame Lanna?

Oh non, nous allons malheureusement devoir rentrer. Mais nous repasserons demain matin, tôt, pour vous prendre quelques palourdes et crabes, avant qu’il ne fasse à nouveau trop chaud.

Le marchand s’inclina bien bas puis Lanna se tourna vers Thracy:

C’est ici que nos chemins se quittent Thracy. Ta rencontre a embelli ma journée. J’espère te revoir prochainement et n’hésites pas à venir au dispensaire dans le quartier du Port Pourpre, dans la grande rue qui mène au palais du Seigneur de la Mer. Le dispensaire lui appartient et j’y officie deux à trois fois par semaine. Tu es le bienvenu si tu désires un repas chaud et je serais ravie de t’y revoir, un jour prochain.

Lanna se pencha alors et déposa un doux baiser sur le front de l’enfant:

Que R’hllor te bénisse et te protège des ténèbres…à jamais.

Puis elle se redressa, salua une dernière fois le marchand et s’éloigna doucement, Myra sur ses talons.

(c) DΛND ELION


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[Flashback] Pour une Dame danseront tes Lames ~ ft. @Lanna Cole

[Braavos – An 297, Lune 7, semaine 3]

Thracy était si habitué à s'entendre dire qu'il divaguait, qu'il cousait parfois des mots à tort et à travers, qu'il était fêlé ou excessivement causant – qu'il se sentit tout chose devant les hochements de tête approbateurs de la Lady ainsi que de sa suivante. Alors, ce qu'il racontait n'était pas bête ? On ne lui demandait pas de la boucler, on ne lui rétorquait pas qu'il pensait et bavardait trop ? Il semblait. Et que ces dames ne se moquaient pas. Trouver telle sincérité, telle proximité chez une aristocrate – membre de ces gens qu'il croyait si au-dessus du petit peuple, un soleil immobile à la fenêtre de leur tour d'ivoire – lui gonfla le cœur d'émoi. Il leur rendit un radieux sourire, semblable à ceux qu'il faisait à quiconque s'arrêtait pour nouer un peu de contact avec lui. Moment rare quand on n'avait nulle attache, que le quotidien se voyait surtout occupé à trouver de quoi survivre, que l'on était au gré des rues un corps qui passe au milieu de tant d'autres corps qui passent.
Ce sourire resta accroché à ses lèvres alors que Lady Cole lui décrivait la situation des serviteurs au sein de son domaine. Pas d'esclaves... Thracy se prit à rêver qu'il aurait pu grandir entre d'aussi bonnes mains, avec des adultes pour l'éduquer. Mais il prit une nouvelle fois le parti d'aimer son destin. De se payer le luxe de décider de lui-même qu'il n'y avait nulle fatalité : les choses pour lui commençaient. Tout tournait et rien ne se scellait. « Vous savez quoi ? J'crois qu'les maîtres qui respectent comme ça leurs serviteurs et éduquent leurs esclaves, y s'rendent service à eux-mêmes au passage. C'est vrai : j'ai jamais compris comment on peut êt' fier de dire à un aut' : ''Toi, t'es plus quelqu'un. T'es un meuble. T'es une chaise, voilà.'' Qu'est-ce qu'il y a comme honneur à s'faire obéir d'une chaise ? L'obéissance, c'est beau quand c'est mérité, quand l'aut' te la donne. De sa propre réflexion. Et sa réflexion, faut qu'on lui permette de la faire pousser. Moi j'espère pouvoir faire pousser ça. Et avoir quelqu'un à qui l'donner un jour. Et j'espère aussi que j'serai jamais une chaise. »

Comme il fut impressionné une nouvelle fois par la fervente croyance que la noble Dame mettait en R'hllor ! L'invalide entendit sa louange prononcée à fleur de lèvres, pour accueillir sa confidence quant à la prophétie de la prêtresse. Ainsi la grandeur du Maître s'exprimerait aussi dans ses indices laissés, par la voix de ses ecclésiastiques, aux plus petits de ses enfants ? Thracy haussa le menton dans un geste de fierté... autant que d'injonction à lui-même : il s'en rendra digne ! Ses yeux luisants dévisagèrent Lady Cole, qui lui assurait qu'il devait croire cette prédiction. Et qu'elle prierait pour lui. « Oh merci ma Dame ! Et moi, j'ai entendu parler de tellement de dieux, que j'sais pas vraiment le nom duquel j'dois prier... mais quel que soit le nom qu'on lui donne au final, ce Dieu, j'le prierai aussi. Parce qu'il faut que j'rende grâce à quelqu'un d'vous avoir croisées, cette prêtresse et vous. Puis que j'lui demande d'vous garder heureuse si vous l'êtes... et d'vous rendre plein'ment heureuse s'y vous manque quelqu'chose... »  Car oui, il savait en réalité si peu de cette femme bienfaitrice. Elle donnait tant, mais que recevait-elle ? Thracy ne pouvait que lui souhaiter le meilleur.
Il arqua un sourcil à cette rude interdiction de se plaindre qu'elle s'imposa. « J'pense... qu'on a tous ce droit, vu qu'on a tous celui d'êt malheureux chacun à sa façon. C'est humain. Et même qu'y paraît que les blessures, ça donne les plus fortes œuvres d'art ! Alors qu'les artistes, c'pas tous des pauvres non ? Y a un peintre des rues que j'regardais travailler une fois, et qui m'a dit qu'y faut tracer autant l'ombre que la lumière. » Il se mordilla la lèvre à son effusion de pensée qu'il espéra n'avoir pas été impertinente, puis se recentra sur le principal conseil qu'il lisait en creux dans la règle que se fixait la Lady. « Oui... L'truc... c'est sûrement d'avoir juste la lucidité de jusqu'où on a droit d'se plaindre. Pour rester bon, faut mesurer. Comme en cuisine ! » Le garçon partit dans un gloussement à son image saugrenue, inspirée par cette tâche quotidienne pour les nomades qu'il avait servi quelques temps... « Une fois dans la rue où je jonglais, y a une dame riche qui faisait tout un caprice parce qu'elle sortait d'chez le tailleur et qu'il avait mis les fleurs la tête en haut et pas la tête en bas, sur la nouvelle cotte pour son chien ! Si vous voulez mon avis, le chien y s'en fichait ! Même qu'il a pissé, sûrement pour le dire. » Un nouvel éclat de rire orna de fossettes espiègles les joues du vagabond.

Ses bavardages auront au moins, espéra-t-il, eu le mérite de divertir un peu la Dame de la tristesse qu'il avait vu poindre à ses traits. Notamment lorsqu'il avait été question d'enfants. De branches distendues. Pourvu qu'elles ne cassent pas et puissent se rejoindre plus haut. À ses remerciements, Thracy ne vit rien qu'il aurait été intelligent d'ajouter. Aussi avança-t-il les doigts, d'abord timide, puis avec franchise autour de la paume de Lady Cole. Cela ne dura que deux secondes avant que l'enfant ne les retirât. Avait-il le droit ? Pas sûr. Mais ce ne serait pas la première fois qu'il prendrait un droit avec culot, tandis qu'il sentait qu'une porte de douleur venait d'être franchie. Et qu'il était peut-être bon de la refermer aussitôt, comme on ne doit surtout pas rentrer dans la chambre d'un adulte et ses secrets. Alors, Thracy avait blagué. Le chien. De quoi divertir : apparemment, cela signifiait à la fois ''jouer'' et ''se détourner du malheur'' – un prêtre l'avait dit pendant un sermon.

Mais déjà le repas arrivait ! Le gamin bouffa des yeux le rouge fauve de ces langoustes, non sans relever les pupilles vers le marchand qui lui tendit son mets. Il servit un allègre : « Merci M'sieur ! » L'homme disparut une fois payé, après ses politesses aux deux Dames. Les longs doigts-fuseaux de Tracy entreprirent de découdre cet enchevêtrement de pattes, de coquilles, de ligatures, au milieu desquelles il plongea pour tirer les morceaux bien dodus. Le jus qui lui coula le long des mains aurait paru sale à beaucoup, cependant il fit partie de son plaisir à lui. Le goût, le rouge pour la vue, l'odeur du voyage, le plaisir pris à ouïr les craquements de coque, ses doigts touchés par la graisse – et lui par la grâce en ce jour – tout ses sens lui faisaient festin.
Au milieu de sa dégustation, il arriva néanmoins ce qui devait finir par arriver : Lady Cole et Myra avaient à s'en retourner vers d'autres affaires. Déjà ! Une soudaine montée de larmes vint au garçon, toutefois il sut la faire repartir aussi vite qu'elle impulsait... avant même d'avoir pu paraître. C'était comme ça. Et cette rencontre fut belle ! D'autant que selon la promesse de la bienfaitrice, et à en croire son invitation au dispensaire, un moment comme celui-là se réitérerait. « Oh oui j'viendrai ! Sûr que j'oublierai pas ! J'viendrai. Les jours où qu'vous aurez pas déjà trop d'monde. Si... si jamais ça existe, ça. » Et Thracy de bondir dans l'envie d'une étreinte reconnaissante. Heureusement pour la robe de la Lady, il retint son élan, contempla ses menottes toutes grasses, écarta les doigts et tira la langue en une grimace de faux dégoût. Le gamin ne s'arrêtera pas pour autant : pliant ses avant-bras, les portant en hauteur, ce sera presque des coudes qu'il donnera son accolade. « Merci. Merci pour tout. » murmura-t-il, passé en deux secondes du jeu au plus sincère émoi. Il n'oublia pas de dire à l'attention de Myra avec un salut de la main : « Au r'voir M'dame. » Mais surtout à Lady Cole, après son chaleureux baiser et sa bénédiction, en posant une dernière fois ses iris-soleil sur le visage de la mère à tellement d'enfants : « Et vous, gardez vot' lumière. »

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