Le Blizzard Approchant
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An 302, Lune 8, Semaine 3
Les festivités étaient enfin terminées et Alaric n’en était que plus rassuré. Cela avait été long et il faut le dire, assez stressant pour le vieux Grand Mestre qui avait passé la nuit à récupérer de cette “fête” où il avait été plus un figurant qu’autre chose, ce qui ne le gênait pas, très loin de là. Il était ravi de savoir au moins que Sa Majesté avait fait le déplacement jusqu’au Val d’Arryn pour se présenter au nouveau seigneur du Val, chose qui n’avait pas été faites depuis 250 ans. Le Grand Mestre espérait sincèrement que cette visite permettrait d'apaiser des tensions, régler des questions épineuses et surtout affirmer l’autorité du Roi sur toute la région, face à l’Hiver approchant, et qui s’annonçait ô combien rude.
Le vieux Grand Mestre n’avait pas idée d’à quel point il était dans le vrai.
Ayant pris le temps de se réveiller dans un château encore calme et plongé dans une matinée grise, brumeuse et très fraîche pour ne pas dire froide, Alaric s’était permit une petite toilette dès son réveil comme à son habitude, avec eau sur les parties hygiéniques du corps, un bain de bouche et un éclaircissement des narines et des oreilles. Ceci fait, dressé dans ses habits gris et humbles avec sa chaîne autour du cou avec un manteau par-dessus bien plus large pour lui tenir chaud, Alaric se permit de sortir de la petite chambre qui lui était attribué afin de faire sa promenade matinale, pour être en forme d’esprit et de corps pour la journée s’annonçant.
Passant parmi serviteurs et gardes qu’il salua tous, le Grand Mestre arriva bientôt dans la cour du château, doucement bercée par un fil de neige s'accommodant parfaitement avec l’ambiance et la météo de la journée.
S’amusant tout en marchant à jouer avec la buée qu’il faisait à chacune de ses respirations, mains dans le dos, Alaric avançait seul dans une cour bien silencieuse, mais calme et sereine, ce qu’appréciait particulièrement le Grand Mestre surtout après les festivités du jour précédent. Il était clair que Sa Majesté souhaitait vite rentrer à Port-Réal, sa rencontre avec le seigneur du Val faites et Alaric comptait donc bien profiter de ces quelques instants tant qu’il le pouvait, observant avec fascination les formations rocheuses et montagneuses du Val d’Arryn dans lequel il venait pour la première fois de sa vie...et peut-être bien la dernière.
C’est une voix étrangère qui l'interrompit dans son observation et le fît s’arrêter :
- Grand Mestre ? Grand Mestre Alaric ?
Se retournant aussitôt, toujours les mains dans le dos, le sus-nommé Grand Mestre aperçu un homme approchant, avec une allure et des vêtements digne d’un vrai guerrier, voir d’un...marin ? Difficile à dire, mais quelque chose dans son apparence fît tiquer le Grand Mestre...mais dur de dire pourquoi à cette distance.
L’homme se trouvait à une quinzaine de pas du Grand Mestre quand il l’avait interpellé, et ce dernier ne tarda pas à répondre de manière douce et amicale comme à son habitude, bien que son visage trahissait une légère surprise et interrogation :
- Oui ? Qui le demande je vous prie ?
Recevant un flocon de neige sur le nez, Alaric garda le regard sur l’homme venant de l’interpeller. Que pouvait-on lui vouloir ? Il n’était pas un garde royal, ni un homme de la Princesse, alors qui pouvait le quémander, et surtout si tôt alors qu’une majeure partie du château dormait encore à poings fermés ?
Encore une fois, la curiosité du Grand Mestre s’en trouva vite piquée à vif. Et il adorait ça !
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Le Blizzard Approchant ft. Alaric
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L’homme s’était approché avant de se présenter au Grand Mestre qui le fixait calmement, petit sourire présent sur le visage, permettant à ce dernier d’enfin détaillé l’homme qui se posait face à lui. Outre son aspect...pour le moins négligé avec ses longs cheveux en bataille et non-entretenus et sa barbe sauvage, l’odeur de sel et de mer qui se dégageait de l’homme ne fît que convaincre la première pensée d’Alaric concernant le fait qu’il était en face d’un marin, au minimum.
Et la présentation de l’homme lui donna raison, et plus encore qu’il ne l’aurait jamais imaginé.
Jacaerys Velaryon, amiral de Lamarck. Un des derniers haut-valyrien de Westeros, à l’appartenance d’une ancienne, ancestrale et ô combien historiquement et importante maison de Westeros, liée intrinsèquement à l’histoire du continent et de la dynastie des Targaryen depuis les tout débuts, depuis la fuite de l’ancienne Valyria.
Maintenant qu’il s’était présenté et que le Grand Mestre connaissait l’identité de son interlocuteur, le détail qui le faisait tiquer juste avant lui sautait enfin aux yeux, surtout que maintenant l’amiral était juste en face de lui. Yeux violacés, la peau pâle et des cheveux couleur argent -bien que la saleté ternissait grandement le dernier point-, Alaric avait bel et bien en face de lui un authentique haut-valyrien, “sang pur”, ce que n’était pas par exemple la Princesse actuellement présente aux Portes de la Lune, aux côtés de son père.
Jacaerys Velaryon donc. Nommé comme le premier fils -supposément- de Rhaenyra Targaryen et de Laenor Velaryon, également descendant d’Alyn Velaryon, dit “Poingdechêne” et lié par le sang sur des générations à l’actuelle famille régnante des Targaryen, Jacaerys Velaryon traînait un très grand héritage derrière lui, un héritage aussi unique qu’incroyable, chose que savait toute personne cultivée et intéressée par l’histoire et les nobles maisons de Westeros.
Et le Grand Mestre faisait partie de ces personnes, et la simple mention du nom de son interlocuteur amena dans son esprit tous ces détails, toutes ces lectures sur cette famille et ses illustres membres, et Alaric s’en retrouva sincèrement intimidé. Ce n’était pas tout les jours après tout que l’on croisait un tel personnage, avec un tel héritage et une telle statute si particulière au sein de Westeros, partagée uniquement par quelques rares autres personnes et une seule autre réelle maison -voilà bien longtemps que les Celtigar avaient eux perdus leur “pur sang”-.
Face à tout cela, la réaction du Grand Mestre fut assez prompte. Il s’inclina très respectueusement devant l’amiral juste après qu’il se soit présenté, bafouant un peu sous le coup de la surprise et du stress l’ayant prit en à peine un battement de coeur :
- M-Messire Velaryon ! Q-Q-Quel honneur que de rencontrer un illustre personnage comme v-vous ! J’ai tant lu sur votre famille, vos hauts-faits et vos glorieux ancêtres, je n’en suis qu’honoré que de rencontrer un membre de cette i-i-illustre maisonnée-ée !
Le Grand Mestre se redressa ensuite, ayant de regrouper ses esprits, la confusion et le stress soudain bien visibles sur son visage, qu’il esseya de combattre en se forçant à sourire et en gardant de son sérieux. Il était le Grand Mestre par les Sept ! Il avait une tenure à respecter, et un respect à faire preuve auprès des seigneurs et gentes dames de Westeros !
- Vous n’avez pas à vous excuser Messire ! Je suis à votre service, il en est donc de mon devoir d’écouter vos paroles et demandes ! Et puis, je ne suis sans doutes pas non plus un bel élément de décor à mettre parmi les grands du Royaume, je ne me permettrait donc nul jugement sur votre personne !
Il se permit un petit rire, technique habituelle de sa personne pour évacuer le stress, avant de se racler la gorge, d’avoir un petit regard circulaire, puis de revenir sur l’amiral Velaryon et de répondre quand à ses dernières paroles :
- Pardi Messire, l’Hiver arrive pour sûr ! Voyez vous ces flocons, cette neige et cette fraîcheur ? Je ne suis jamais venu au Val par avant de ma vie, mais je doute que cela soit ce qui attends la région en plein Été ! Et puis les Eyriés sont inaccessibles, donc…
Sentait qu’il était parti pour faire un cours d’histoire et un débat en monologue comme il en avait trop la mauvaise habitude depuis son entrée dans la Citadelle des décennies d’avant cela, Alaric se reprit et toujours en souriant reprit la parole :
- Nous savons pour le Nord et les sauvageons franchissant le Mur. Cela est très regrettable je dois bien l’admettre, mais cela n’est point la première fois qu’un tel événement arrive et à chaque fois cette peuplade de par-delà le Mur a été repoussée, par la Garde, par le Nord, et par le Trône de Fer si besoin. Je suis certains que le seigneur Stark malgré sa jeunesse saura faire preuve du comportement et des réactions adéquates pour mettre fin à ce problème, et si grand besoin vient à se faire, en tant qu’ancienne pupille de notre bien-aimé Roi, je suis certains que Sa Majesté répondra présent si un appel à l’aide lui est émis depuis Winterfell ! Donc rien de particulièrement alarmant, ne pensez-vous pas ?
Il se permit alors un autre rire...qui s’éteignit bien vite quand son visage prit une allure bien plus sérieuse et inquiète en voyant la tête absoluement et totalement sérieuse qu’était en train de faire l’amiral Velaryon, lui rappelant que trop étrangement ce même regard que pouvait avoir Sa Majesté ainsi que sa fille, la Princesse. Le "Regard du Dragon" comme l’appelait Alaric dans ses écrits et pensées.
Et ce regard n’annonçait jamais rien de bon.
-...Ah moins qu’il n’y est autre chose. De plus grave.
Dit alors le Grand Mestre à la manière d'une affirmation, qui témoignait de sa grande prise de gravité face à Jacaerys avec sa tête devenue instantanément sérieuse, le stress toujours là mais remplacé par l’impératif de son statut et rôle de Grand Mestre des Sept Couronnes, conseiller du Roi Rhaegar et membre du conseil restreint.
La curiosité d’Alaric était désormais bouillante, prête à exploser. Quel pouvait être cet impératif, ce danger, pour qu’un Velaryon vienne jusqu’aux Portes de la Lune dans un tel état malmené et si pressé ?
Il craignait déjà d’entendre la réponse à son affirmation.
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Le Grand Mestre observa très attentivement l’amiral de Lamarck, son regard intrigué et inquiet étant porté sur l’amiral des marées qui selon lui avait bel et bien besoin d’un bon bain et d’un bon décrassage en règle, l’odeur en restant à son contact commençant à devenir très forte, rappelant à Alaric parmi les plus horribles encens et concoctions qu’il avait pu avoir à sentir à la Citadelle.
A l’entente des paroles, le Grand Mestre sembla brièvement soulagé et se permit une brève réponse :
- Et bien, il est dommage que vous n’ayez peut apprendre plus tôt les mésaventures secouant le Nord, mais comme dit il s’agit de simples sauvageons…
Et sa voix resta en suspens au travers de la gorge du Grand Mestre alors que ce dernier semblait avoir comprit la teneur des paroles que venait d’avoir le Velaryon pour lui et qu’il sembla bloquer, bouche ouverte, avant de rapidement se secouer mentalement la tête, se racler la gorge et reprendre, son très bref sourire de soulagement s’effaçant pour reprendre cette mine intrigué et inquiète.
- La Longue Nuit ? Les Marcheurs Blancs ? L’Âge des Héros ?
A l’entendre, même le Grand Mestre ne semblait y croire, et cela se voyait à la stupeur et la décontenance de son visage, faisant ressortir ses rides et des traits marqués par une soirée de festivités qu’il n’avait pas encore totalement eut l’occasion de récupérer.
- Mais cela était il y a 8 000 années au moins Messire Velaryon, bien avant...tellement de choses. C’est un âge mythique, un âge de légendes, les écrits sont si rares, et les histoires si...rocambolesques, si enfantines, si...magiques !
Il joignit ses mains, comme pour chercher à se calmer. Il n’était pas en colère, mais un tourbillon de sentiments était en train de s’emparer du Grand Mestre qui était pourtant d’habitude si posé et maître de lui -sauf face à de nobles et honnêtes Dames-, et il en était déstabilisé, son coeur s’accélérant rien qu’à l’idée de penser qu’un seul instant que toutes ses histoires d’antans, ces légendes, ces mythes d’un autre temps, glorifiés et mystifiés par le temps, pouvaient être pour qu’une seule once êtres infiniment vrais. C’était impossible.
- C’est...C’est impossible, ce que vous dites est complètement fou Messire, je…
Il eut un nouvel arrêt, son regard fuyant dans son tourbillon de sentiments revenant sur Jacaerys, semblant calmer le Grand Mestre.
Reprenant alors la parole, sa voix sembla reprendre un ton plus posé et son bref excitement semblait être retombé, mais la consternation et l’hésitation était fichée droit sur le front d’Alaric, visible pour tous.
- Quoi donc Messire Velaryon ? Qu’est-ce qui par les Sept et les barbes des Archimestres peut vous faire penser une telle chose ? Que les...Marcheurs Blancs et des “morts-vivants” sont là, par-delà le Mur ?
Un air glacial sembla frapper le Grand Mestre qui prit un air brièvement choqué.
- Les auriez-vous...vus ?!
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Alaric resta très circonspect face à la réponse de l’amiral de Lamarck. Sa curiosité en prenait un coup, mais cela n’était rien. Il comprenait. Sa Majesté l’avait mandaté, très probablement pour une excellente raison, et ce jusqu’au Mur voir peut-être même au-delà. Le roi savait donc t-il pour tout cela ? Avait-il donc eut ces rumeurs de morts revenants à la vie, de marcheurs blancs ? Si cela était bien le cas, alors ce n’en était que plus inquiétant. Même si Sa Majesté montrait des signes évident de grande paranoïa et d’un manque de confiance aveugle envers pourtant de nombreuses personnes prêtes sincèrement à l’aider -dont Alaric- s’il avait été prêt jusqu’à envoyé Messire Velaryon jusque au Mur et que ce dernier en revenait avec de telles paroles, l’importance n’en semblait que plus grande.
Tout comme le danger.
Le cœur d’Alaric se serra et il dut reprendre un grand souffle. Il fixa alors à nouveau Jacaerys et l’invita alors d'un lent et large mouvement de la main vers le restant de la cour :
- M’accompagneriez vous Messire Velaryon ?
Puis ce faisait, le Grand Mestre se mit en marche, de manière très lente, bras dans le dos et mains enlacées, le regarde perdu vers le sol avançant lentement sous son regard, ses pensées chamboulées et son cœur commençant à perdre tout contrôle. Mais il n’en montrait pas grand chose sur son visage, si ce n’est une grande inquiétude et sévérité dans le regard et dans ses traits tirés par la vieillesse. Sa voix trahissait cependant une bonne part de son ressenti :
- J’ai environ soixante années le savez-vous amiral de Lamarck, et c’est la première fois que j’entends de telles choses. De telles choses qui me…
Ses mots se perdirent quelques instants, avant de finalement trouver la force de sortir, emplis d’inquiétude et de peur, en accompagnement du regard du Grand Mestre :
-...Qui me terrifie.
Après quelques instants de silence, le Grand Mestre s’arrêta et se tourna vers Jacaerys, le fixant dans ses yeux violacés, les admirant au passage, mais ses rides marquant la peur sur son visage, marquant encore plus son grand âge :
- La Garde de Nuit est juste et honorable. Je pense leurs mots, comme les vôtres, honorable amiral. Si...Si…
Cela le tuait intérieurement que d’avoir à dire ça, et il ne semblait -et n’était pas- encore en mesure de pleinement saisir toute la vérité et la teneur même de ses propres paroles, tant pour lui cela semblait...impossible :
- Si les morts se relèvent, et que quelque chose approche par le Nord, faisant fuir les Sauvageons en tel nombre et pouvant relever ceux tombés…
Son regard ne pu supporter plus longtemps celui de l’amiral, et le Grand Mestre se tourna, admirant la neige douce commençant à tomber à nouveau sur les monts du Val, dignes et silencieuses, qu’importe les dangers, qu’importe les hommes, qu’importe les magies et les dieux. Sa voix sembla se fracasser en cet instant, dans cette phrase qu'il prononça :
- Que pouvons-nous faire…? Ohhh...les Sept soient priés, que pouvons-nous faire ?
Il secoua alors délicatement la tête, malmené par sa conversation avec Messire Velaryon.