[MINI-EVENT] L'Ouest tombe les masques

Le faste déployé par les Lannister était incroyable – à croire que ce n’était pas Tywin qui rentrait, mais que les têtes couronnées elles-mêmes nous rendaient visite à l’Ouest. Honnêtement, ce n’était pas pour me déplaire. J’avais besoin de cette distraction, parce qu’elle me permettait d’oublier ces dernières semaines. Les attentes interminables, les angoisses nocturnes, cette impression de ne pouvoir en parler à personne… Sans la franchise de Dolerone, sa façon de me cuisiner lorsque je m’échappais pour grignoter quelques friandises tard le soir, je pense que je serais devenue folle. Ou entrée dans une catatonie dépressive. Moi qui adorais passer des heures sur des parchemins, j’en étais venue à les détester. Les missives d’Ashter m’apportaient autant de réconfort que de panique, et le plus souvent, elles étaient si courtes que j’en concluais qu’il n’avait ni le temps, ni l’envie, d’y répondre sincèrement. Mes mots, d’abord enjoués et curieux, s’étaient lentement transformés en un rituel monotone que j’avais fini par délaisser à mon tour. Depuis, il n’y avait plus d’oiseaux à ma fenêtre. A quoi rimait cette union ? J’en avais parlé avec Dolerone, longuement, et c’étaient ses conseils qui m’avaient permis d’y voir plus clair. Je l’estimais énormément, tout en me faisant l’idée que parce qu’elle avait pu voir davantage et expérimenter plus que moi, elle possédait un savoir que je n’aurais jamais. Vrai ou faux, dans ce cas de figure, elle avait su me redonner l’envie d’essayer. Un mariage arrangé n’était jamais parfait, pourtant j’avais l’espoir que le mien soit un peu plus harmonieux. Alors, j’avais tenté d’en apprendre davantage sur mon fiancé – sur l’homme derrière le titre de chevalier, sur le cadet de la famille propulsé héritier. Or, la seule personne qui avait les réponses que je recherchais était également la plus proche de lui : Beren. Je ne savais pas s’il allait se rire de ma requête, la rapporter à son frère d’armes ou pire, s’en servir pour abuser de ma confiance. J’imaginais qu’après tout ce que j’avais pu entendre à leur sujet à tous les deux, ils étaient des hommes d’honneur… et finalement, mon audace paya.

Le ruban était ceint à mon poignet depuis plusieurs minutes déjà lorsqu’un duo bien particulier passa près de moi. J’avais laissé à l’homme de Dorne des indications précises pour que nous puissions nous reconnaître malgré nos masques, aussi mes prunelles lavande s’attardèrent-elles une seconde de trop sur l’inconnu au masque noir et or. Il n’était pas le seul à avoir opté pour ces teintes, néanmoins il était le seul à être accompagné d’un blond à la carrure d’épéiste, vêtu aux couleurs des Lannister. Ils riaient fort, et malgré moi, j’en vins à sourire devant leur complicité. Je virevoltais dans un froissement de tissu cuprifère, évitant habilement la confrontation directe avec eux, pour mieux me fondre dans la foule sans cesse grandissante. Sans le savoir, j’avais à l’origine décidé de payer mes respects aux lions de la même manière que le chevalier qui m’était promis. Reflets d’or et de cuivre rougeâtre réhaussaient la pâleur naturelle de ma peau et donnaient un éclat flamboyant à mes cheveux rendus presque blonds par l’absence d’exposition au soleil dernièrement. Je regrettais, pour la énième fois ce soir, l’absence de Dolerone à mes côtés. Sa fougue savait me donner le courage nécessaire à ce genre d’initiative et, désormais privée de son soutien, je retournais à ma timidité naturelle. Pour autant, je ne fuirais pas. J’avais bien l’intention de surprendre Ashter ce soir, afin de lui prouver qu’en dépit de nos rares missives, j’étais toujours prête à faire ma part du chemin menant à notre destinée commune.

Une femme toute de bleue vêtue me dépassa, donnant l’étrange impression d’attirer dans son sillage son époux – alors qu’habituellement, les hommes menaient la danse. Je l’observais s’emparer d’un ruban, puis détournais mon attention d’elle. En temps normal, je me serais extasiée sur la délicatesse de son masque, sur les pierreries savamment utilisées, mais mon esprit était ailleurs. J’avais grand hâte que les valses débutent.