Préférer le Dragon au Lion ?

Ce jour était inévitable. Cela aurait été de la folie de penser qu’on pouvait garder le secret sur l’apparition d’un dragon à Castral Roc. Cersei n’était pas folle, c’était pour cela qu’elle avait pris les devants et s’était décidée à montrer son bien le plus précieux, avant que n’importe qui l’apprenne et le dévoile à son oncle Kevan et à Tyrion. Le sacrifice fut grand pour pouvoir un jour poser le regard sur ce jeune dragon, néanmoins Cersei était fière d’être l’une des rares détentrices d’un animal aussi précieux. Elle ne renoncerait en lui pour rien au monde, même si pour cela elle devait désobéir à son père. Impétueuse, elle avait attendu le retour de Tyrion de Lestival pour se présenter devant oncle et frère pour présenter Vaelarr. Le jeune dragon perché sur l’épaule de sa mère toisa les deux inconnus, montrant déjà un caractère bien affirmé et aussi arrogant que celui de celle qui lui avait permis de venir au monde. Le dragon était pour le moment une ridicule petite chose, mais sa présence créa un choc auprès des deux hommes et les mit durant de longues minutes au silence. Aucun mot fut prononcé durant cette entrevue, puis oncle Kevan se leva, certainement pour informer lord Tywin de la nouvelle, Cersei n’en attendait pas moins de lui. Elle le toisa quand il quitta la pièce, puis la blonde dirigea son regard vers son frère, qui lui demanda seulement de lui laisser du temps, avant de quitter la pièce, sans prononcer une autre parole.

Trois jours venaient de s’écouler depuis la révélation du secret de Cersei. La blonde avait pris de nouvelles dispositions et ses appartements étaient de nouveau disponibles pour tous. Néanmoins, Cersei avait fait en sorte que son dragon soit surveillé en permanence et personne ne devait l’approcher sans son approbation.
Bien entendu, comme Cersei l’avait prévu, oncle Kevan avait aussitôt envoyé un corbeau à Tywin Lannister qui n’avait pas perdu de temps pour lui en envoyer un en retour. Cela n’étonnait guère Cersei, son père n’approuvait pas ce dragon, il le trouvait dangereux et voyait en lui une menace pour les Lannister. Certes, ils n’étaient pas des dragons, mais des lions, cependant, pourquoi les lions ne pouvaient-ils pas dominer des dragons ? Son père ne pouvait pas comprendre le lien qui l’unissait à Vaelarr. Ce dragon, elle l’avait fait éclore. Ce dragon était comme un quatrième fils pour elle. Cersei ne l’abandonnerait pas et même si son père le lui demandait, elle s’opposerait à lui.
Trois jours, c’était le temps qu’il avait fallu à Tyrion pour se décider à rendre visite à sa sœur. Fidèle à lui-même il donna une touche de spectacle à son arrivée en applaudissant et en la félicitant d’avoir mis Kevan Lannister dans tous ses états. Cersei se trouvait alors installée sur un fauteuil, ses deux bébés se trouvaient à ses côtés et son dragon était sur ses genoux en train de dormir très profondément. Cersei haussa un sourcil et écouta son frère qui était en train de lui dire qu’elle avait causé un véritable tremblement de terre. Ensuite il continua en lui demandant ce que leur père pensait de tout cela. Il s’installa prenant ses aises, souhaitant connaître le fond de la pensée de sa sœur.

« Cet animal comme tu dis est bien plus que cela. L’œuf qu’il était je l’ai éclos et j’ai sacrifié beaucoup de choses pour lui. » Elle caressait tendrement la petit tête du dragon et jeta un regard tendre sur ses deux fils qui eux aussi dormaient paisiblement. « Pour père comme tu dois certainement t’en douter, il n’approuve pas et il prendra une décision plus tard. Ce dragon est beaucoup trop important pour moi et je n’ai pas l’intention de le perdre. Père pourra dire ce qu’il veut, Vaelarr est comme l’un de mes enfants et je n’y renoncerai pas. »

Révéler la vérité sur Vaelarr était une obligation pour Cersei. Un animal aussi mythique ne pouvait guère rester dans le secret trop longtemps. Ce secret était lourd à porter et désormais la blonde n’avait plus cette aiguille sous le pied et elle pouvait se promener tranquillement avec son dragon sur les épaules dans ses propres appartements, sans avoir la crainte que son secret soit découvert. Les dragons avaient besoin de liberté. En observant Vaelarr quand elle le gardait reclu, elle avait pu voir que l’animal souffrait du manque d’espace. Même s’il était petit, la blonde l’imaginait très bien dans quelques années voler tranquillement sur les hauteurs de Castral Roc et volant au-dessus de l’océan. Maintenant, même si elle avait choqué son oncle et son frère avec cette nouvelle, elle se savait tranquille, son grand secret était su par ses proches.

“ Le dragon n’est-il pas l’emblème de la maison Targaryen ? Quel affront cela serait pour lui de porter le nom d’un lion alors qu’il est un animal beaucoup plus puissant. “ Elle continuait de caresser la tête du dragon sous le regard déconcerté de son frère. Pour une fois, elle aurait pensé que son frère approuverait l’arrivée de ce petit être mythique autrefois disparu et qui renaît aujourd’hui de ses cendres. Son frère, ce puit de savoir était donc devenu un esprit fermé, tel que leur père. Décidément, avec de telles personnes à sa tête, l’Ouest courrait à sa perte.
“Tu continueras toujours à me décevoir Tyrion. Moi qui pensait qu’après toutes ces lectures tu aurais vu en ce dragon la renaissance d’une espèce disparue. Certes il représente le pouvoir, mais en l’état il n’est guère plus qu’une créature à protéger.” En effet, il était hors de question de lui ou père enferme Vaelarr. Pour la première fois, Cersei était prête à défier son père. Elle avait tout accepté de lui, son projet de fiançaille avec Rhaegar Targaryen, son retour à Castral Roc après la décision du roi Fou de faire entrer Jaime dans sa Garde, ce stupide mariage avec Loras Tyrell, mais ça c’était impossible. Jamais elle ne consentirait à se débarrasser de Vaelarr. Il était à elle. A ses yeux, c’était comme s’il avait émergé de ses entrailles et comme pour ses fils, personne ne pourrait lui arracher de son sein.
Tyrion descendit de son fauteuil et s’approcha de sa soeur et du dragon. Vaelarr ne le connaissait pas, il n’était qu’un étranger à ses yeux et se mit donc tout naturellement à grogner. Un sourire en coin apparut sur les lèvres de Cersei et elle caressa de nouveau la tête du dragon comme pour l’apaiser. Vaelarr deviendrait immense, quand il grandira il allait devenir menaçant, Cersei en avait conscience et elle n’était pas assez folle au point de ne pas voir en lui un être pouvoir être potentiellement dangereux.

“ L’hiver est là mon cher frère. Un hiver qui risque d’être long. Peut-être que notre famille sera bien heureuse d’avoir une telle créature d’ici quelques années.” Étonnement, elle tendit la créature vers son frère pour l’inciter à la prendre. Arriverait-elle à le convaincre qu’avoir ce dragon pouvait être une bonne chose pour les Lannister. “Des dragons existaient autrefois et si j’ai Vaelarr il se pourrait très bien que d’autres personnes en possèdent également. Si celui-ci est venu au monde, c’est parce que cela était écrit. Dans tes si précieux livres, il doit bien y avoir la mention des dragons, il pourrait y avoir des choses intéressantes sur eux.” Aujourd’hui, il n’y avait plus de témoins vivants des dragons, mais depuis les Premiers hommes des manuscrits regorgeaient d’écrits sur les débuts de l’humanité, les dragons ne doivent donc pas faire exception.

Cersei était ravie de l’effet de surprise qu’elle avait causé à son frère et son oncle, elle savait qu’aucun d’eux se serait doutés qu’un jour un dragon naisse dans cette maison. Pourtant, la chose s’était déroulée et personne ne pouvait faire machine arrière.
Cersei était d’ailleurs étonnée de voir son frère aussi réfractaire à l’idée de voir un dragon chez les lions. N’était-il pas celui qui baigné dans les livres au point d’accumuler les connaissances ? N’avait-il pas lu des livres sur les dragons au point de rêver d’en voir un jour un ? N’avait-il pas lu les histoires de Aegon le Conquérant et de ses soeurs chevauchant des dragons ? Le mythe était devenu réalité et pourtant Tyrion Lannister demeurait de glace face à l’animal qui était face à lui.

“ Tu es peut-être l’héritier de Castral Roc mon cher frère, mais tu n’es en rien le maître de ma destinée. Je ne peux pas dire que l’arrivée de Vaelarr était prévue depuis longtemps. J’avais en effet un oeuf de dragon, mais je n’aurai jamais imaginé qu’un jour il puisse éclore, après tout, avant que j’ai Vaelarr sous les yeux, les dragons relevaient pour moi de l’ordre du mythe. Bien entendu, sa protection est à ma charge et j’ai déjà pris mes dispositions en conséquences. “ La blonde marqua un temps d’arrêt et regarda d’un air désolé son frère. “ Il est fort regrettable que père et toi soyez aussi cartésien, certaines choses nous dépassent et Vaelarr en fait parti. “
Cersei proposa ensuite à Tyrion de prendre Vaelarr. Elle pouvait voir le doute dans le regard de son frère, mais Tyrion était prêt à relever le défi qu’elle venait de lui lancer. Il tendit le bras et attrapa le corps encore frêle du dragon, qui avait la taille d’un petit chat. Il était petit, mais il n’en restait pas moins un animal qui pouvait se montrer imprévisible et agressif. Vaelarr qui n’avait pas l’habitude des bras étrangers sembla étonné dans un premier temps, il gigota, mais Tyrion finit par trouver la bonne position pour tenir l’animal. Finalement, il finit par reposer le dragon sur les genoux de sa mère et il s’y blottit aussitôt. Cersei observait le regard de son frère, il était passé par plusieurs étapes, mais finalement, il sembla trouver quelques intérêts à Vaelarr, si bien qu’il finit par dire que sa soeur avait raison pour le moment. Il ajouta que les dragons étaient porteurs de magie et qu’il venait à la vie grâce à celle-ci. Puis, il demanda la question qui brûlait aux lèvres de beaucoup de monde, qu’est-ce que Cersei avait bien pu faire pour que l’oeuf éclos.

“ Je suis bien contente de t’entendre dire cela ! “ Elle s’arrêta et se leva avec Vaelarr dans ses bras et alla le poser dans sa cage, sans pour autant fermer la porte. Vaelarr se blottit sur un coussin et s’endormit, laissant quelques instants la pièce se bercer par ses ronflements.
“ Après toutes ces années, tu dois bien te douter que je suis incapable de faire de la magie.” Elle fit un sourire malicieux à l’intention de son frère. Ils se connaissaient depuis tellement longtemps, qu’ils étaient tout à fait à même de savoir si l’autre était doté d’un tel don. “ Si j’avais eu besoin d’un sacrifice, j’aurai peut-être dû te mettre sur un autel et planter un couteau dans ton coeur. La prochaine fois, je tâcherai de demander ton avis avant de faire éclore un oeuf de dragon. “ La blonde continuait d’utiliser le sarcasme tout en continuant d’éluder la question de son frère, avant de finalement répondre tout simplement. “ J’ai revu certaines choses qui me tenaient à coeur auparavant pour seulement penser à l’essentiel. A quoi bon se battre contre l’avis de père alors que je suis certaine de pouvoir offrir un avenir à mes fils loin de Castral Roc.” A la charge de Tyrion de comprendre ses paroles énigmatiques. Cersei n’allait tout de même pas lui retirer le doute de la pensée. Après tout, c’était ainsi qu’ils fonctionnaient depuis longtemps. Elle ne lui parlerait pas de ses rêves, ni de la peur vivace qui nourrissait son coeur, qu’un jour l’être qui lui faisait face ôte la vie de l’un de ses fils. Cersei préférait ne pas penser à cela, elle serait capable d’éliminer Tyrion sur le champ pour protéger ses enfants. Pour le moment, elle préférait entretenir une simple entente cordial, tout en gardant son frère et ses proches à l’oeil.

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La paix n’était pas encore prête à pointer le bout de son nez entre le frère et la soeur. Cersei n’était pas de celle qui pardonnait facilement et le préjudice que lui avait causé Tyrion en venant au monde était trop grand pour être excusé. Personne ne pourrait faire changer d’avis à la lady aux cheveux blonds. Il y a fort longtemps, Jaime avait tenté d’apaiser l’esprit revanchard de Cersei, surtout pour que cette dernière n’étouffe pas dans son sommeil le jeune bébé, mais rien n’y avait fait. Même si avec le temps, elle avait sû faire avec le nain, la mort de Jaime, à laquelle Cersei n’était pas préparée, avait contribué à transformer le coeur de Cersei en pierre. Aujourd’hui, elle subissait la présence de Tyrion, elle ne devait rien
“Qu’aurais-je dû souhaiter pour un tel sacrifice ? Il est bien que tu me suggères une telle idée, ainsi, si j’ai besoin de vents favorables, je te capturerai et je te sacrifierai pour ma propre cause.” Déclara Cersei tout en conservant un charmant sourire sur les lèvres. Une telle idée était très tentante, au moins elle serait débarrassée une bonne fois pour toute de celui qui avait assassiné sa mère. Cependant, Cersei ne pouvait pas utiliser une telle tromperie contre son frère. Il était après tout père de famille, le sacrifier pour sa propre cause et d’une telle façon était une chose vile à laquelle elle n’était pour le moment pas préparé. Par contre, elle n’utiliserait jamais la censure quand il s’agirait de ruiner la réputation de son frère. Il pouvait bien jouer le rôle du bon père de famille auprès de tous, Cersei savait qui il était réellement. Pendant de nombreuses années il avait bu, couru les catins et autres femmes de mauvaise vie, on ne changeait pas comme ça du jour au lendemain. D’ailleurs, ce qui était amusant avec Tyrion, c’était qu’ils pouvaient tous les deux user des armes de l’esprit, les coups étaient ainsi plus violents et néfastes.
Tyrion qui avait beaucoup lu se doutait que pour avoir eu Vaelarr, Cersei avait dû sacrifier quelque chose. La blonde ne préféra pas dévoiler directement ce qu’elle avait été contrainte de faire. Eloigner Loren pour préserver sa vie. Sonner le clairon annonçant la fin de toutes ses ambitions et donc la victoire totale de ses ennemis. Eteindre les lampes qui éclairaient ses nombreuses ambitions. La Lionne avait sacrifié de nombreuses choses, mais pas son âme combattante et encore moins ses doutes envers son nain de frère. Ce dernier semblait comprendre et il était offensé que sa soeur puisse imaginer une telle chose. Un sourire mesquin apparut sur les lèvres de Cersei. Elle caressa les gemmes se trouvant autour de son cou, symbole de la puissance et de la richesse des Lannister.
“Tu as bien assassiné notre mère en venant au monde. Une femme douce, qui voulait juste te donner la vie. Ta naissance a été frappé par la mort et tu la traînes dans ton sillage. Tout te sourit en ce moment, mais un jour tu sais très bien que le mauvais présage entourant ta naissance te rattrapera.” Elle se fit bien entendre avant que la porte se ferme. Elle savait que Tyrion avait entendu ses dernières paroles, mais il préféra ne point y répondre. Etait-ce une menace de la part de Cersei ? Oui, mais elle ne ferait jamais de mal à ses neveux et nièces. Ils étaient de jeunes femmes, comme Loren, comme Tybolt et Tywell. Elle avala sa salive et marcha vers le balcon. La mer au loin était magnifique. Les bateaux glissaient sur l’eau comme s’ils étaient sur des patins. Certains partaient avec l’or que les Lannister puisaient de leurs mines, d’autres revenaient avec épices, céramiques et étoffes précieuses. Castral Roc était la puissance de Westeros et tous pouvaient continuer de jalouser les Lannister. Derrière elle se reposait Vaelarr. Il n’était peut-être pas un lion, mais il était le symbole de sa propre puissance, elle ne renoncerait jamais à lui et celui qui tenterait de lui prendre, elle le tuerait.