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Rivage Ravagé | Harrion&Lyra

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Rivage ravagé

   
Post-tournoi

   


   
Harrion & Lyra

    Un dernier son de trompette et un dernier coup de tambour retentirent dans l’air glacial d’Harrenhal. Dans une vibration, l’ensemble des spectateurs se mirent à applaudir le vainqueur à l’unisson. Certains, fiers de voir leur région remporter les joutes, montrait plus d’engouement à le féliciter, laissant des sourires de joie fleurir sur leurs visages. D’autres, mécontents et bourrus se redressèrent rapidement pour quitter les gradins avant la cohue. En dehors d’un malheureux incident -dont l’aile nordienne des tribunes, trop éloignée, n’avait pas saisi le sens- qui s’était clos par le départ précipité d’un jeune homme balafré escorté de Gardes Royaux, les festivités s’étaient déroulées dans une ambiance bonne enfant, placée sous le signe de la paix et des retrouvailles. Flanquée de ses sœurs et le cœur rendu léger par toute cette liesse, Lyra en était peut-être le symbole le plus probant. Les seules ombres au tableau demeuraient cet étrange chevalier masqué lui ayant demandé ses faveurs et la chute du Karstark aux portes de la victoire. Troublée par ces incidents singuliers, elle décida cependant de pas se préoccuper du premier et d'aller s'enquérir de l'état de santé d'Harrion.

En jouant des pieds et des mains pour se frayer un chemin jusqu’à la sortie, longeant précautionneusement les bancs de bois serrés, la troisième fille de Maege progressait lentement derrière sa génitrice qui, de ses larges bras, dégageait le chemin, écartant les badauds et les plus téméraires à grands coups de coude. Tous très civilisés durant le spectacle, il ne restait plus rien de cet air noble lorsqu’il s’agissait de rejoindre la forteresse lugubre pour retrouver la chaleur d’un feu après toutes ces heures immobiles passées en extérieur.

Lorsqu’enfin l’archère put respirer en dehors du flot humain qui l’avait jusque là poussée, elle se rendit compte que toutes les ourses étaient dispersées. Avec un froncement de sourcils, elle se mit sur la pointe des pieds un instant, à la recherche des familières têtes brunes, sans pourtant parvenir à les retrouver. Un comble lorsque l’on savait la taille que faisait sa mère et le grabuge que devaient provoquer Aly et Jory à leur passage ! Alors que les tribunes continuaient de vomir ses spectateurs et que les moins vigilants se heurtaient contre les côtes de la jeune ourse plantée là, elle se décida enfin à se diriger vers les tentes. Maege devait probablement y récupérer ses affaires laissées là avant son combat contre l’ouestrien. Et il ne faisait aucun doute que l'héritier de Rickard y recevrait les premiers soins. Peut-être pourrait-elle aider.
En se séparant du groupe dont la plupart se dirigeait à grandes enjambées vers Harrenhal, Lyra laissa derrière elle le brouhaha ambiant qui ne devint plus qu’un écho, quelques fois encouragées par les voix proches des quelques hommes et quelques femmes occupées à ranger les chapiteaux des jouteurs. Le vent sifflait contre ses joues et relevait les pans de son manteau sombre qui trainait déjà dans la boue retournée par les sabots des chevaux. Finalement, le Conflans n’était peut-être pas si différent de l’Île aux Ours. Il y faisait peut-être un peu plus chaud, mais la terre meuble crottant les chaussures et les ourlets des robes restait la même.

Une ombre fugace, dansant entre les tentures attira sous regard un instant. Elle reconnut sans mal l’armure exotique du chevalier mystérieux qui avait combattu sous les couleurs Mormont. De dos, il lui était impossible de voir sa face. La jeune femme hésita avant d’aller vers lui, mais entreprit tout de même de faire un pas, ne serait-ce que pour le féliciter pour sa performance.
Elle s’arrêta dans son mouvement lorsque dans un cliquetis métallique, il se décida à retirer son casque souriant.
L’archère fronça les sourcils lorsqu’il secoua ses cheveux noirs, aussi fin que de la soie, et qu’il lui offrit son profil à observer.

Raedes.

Cette peau mate. Ces yeux de charbon. Ce nez fin. Cette mâchoire anguleuse et étroite. Cette silhouette qui ne rappelait en rien le Choucas et qui pourtant lui ressemblait tellement. Lyra se trouva là, hébétée, glacée jusqu’à l’os à l’observer, à demi cachée par un pan de tente, alors qu’il repartait en direction de la sienne, une des plus éloignée du groupement.
Une fois disparu, elle se remit à respirer d’un souffle rapide. Ses expirations brutales se matérialisaient dans l’air en fumées grisâtres et éphémères. Ses joues rougies blêmirent et ses doigts se crispèrent dans les plis de sa cape. Les poumons oppressés, la gorge serrée, elle étouffait presque. Incapable d’émettre le moindre son, de faire le moindre geste, elle resta immobile quelques secondes. La fantôme d’Euron Greyjoy avait ressurgi, mais il n’avait plus rien d’un mauvais rêve. Ce n’était pas l’illusion d’un cauchemar nocturne lui arrachant les larmes lorsqu’elle mordait ses lèvres pour ne pas hurler. C’était un être de chaire et d’os. Son fils bâtard. Son fils bâtard qu’elle croyait ne jamais avoir à recroiser. Et qui pourtant rôdait autour d’elle comme un vautour autour d’une carcasse.
Que faisait-il ici ? Que faisait-il ici ? Que faisait-il ici ? La question tournoyait, litanie obsédante, dans son esprit rendu brumeux. Venait-il pour la chercher ? Cette peur paralysante l’avait souvent surprise au cours de ces dernières lunes. Pour s’en débarrasser, elle s’était promise de rester le plus loin possible des côtes et de la mer qui était devenus pour elle synonyme de danger. Or, elle ne voyait ni océan ni bateau dans cette plaine boueuse et humide. Cette incohérence la laissait hagarde alors que ses jambes la guidaient d’instinct vers la tente des Mormont. Comme un animal traqué, elle retournait naturellement vers un lieu sûr : sa famille.

Mais ni Maege, ni ses sœurs ne se trouvaient dans le campement où était abandonnée l’armure usée aux lanières à moitié arrachées de l’Ourse. Trop abasourdie pour être paniquée, Lyra se laissa tomber sur une chaise dont le cuir glacé la fit frissonner. Ne courait-elle jamais assez loin ? Ne pourrait-elle jamais se soustraire à cet œil unique ?
Ses mains vinrent recueillir son visage alors qu’elle fermait les yeux. Elle sentait le tremblement de ses doigts contre sa peau et les soubresauts de ses paupières contre ses paumes gelées. Ni larmes ni sanglots ne vinrent troubler le silence pesant environnant. Simplement cette pesanteur sur sa nuque et sur sa cage thoracique qui rendait chaque inspiration difficile, malgré ses tentatives de les réguler.
Elle voulait s’enfuir, mais malheureusement, il n’y avait nulle part où aller.

Se rappelant soudain de sa mission première, elle se releva d'un sursaut brusque et abandonna derrière elle la solitude muette et angoissante du chapiteau abandonné. Se glissant comme un fantôme à travers les nuées de toiles tantôt colorées, tantôt ternes, elle ne pouvait s'empêcher de jeter des coups d'oeil anxieux par dessus son épaule. Il n'était pas là. Il avait disparu. Pourtant, l'horrible sensation d'être suivie la saisissait aux tripes et rendait chaque déglutition difficile.

Arrivée devant la tente des Karstark, elle prit le temps de longuement respirer. Son air inquiet pourrait être mis sur le compte du choc de l'hypothétique blessure de l'héritier. D'ailleurs, cela n'était pas forcément faux.
Délicatement, craignant de déranger, elle écarta les pans de toile. Harrion était assis sur la table de préparation tandis qu'un écuyer papillonnait à ses côtés, s'attelant à lui retirer son armure de tournoi.

« Décidemment, il me semble que vous vous trouvez abonné aux blessures, »
déplora-t-elle d’une voix soucieuse.

L’étrange impression d’être retournée plusieurs lunes en arrière la frappa, bien que le jeune homme se trouvait ici en meilleur forme que lors de la bataille contre les sauvageons.

« Comment allez-vous ? Est-ce grave ? »


De là où elle était, Lyra ne pouvait déceler avec précision les lésions dont souffrait le combattant. Cependant, elle n’osait approcher, son attention toujours à moitié portée sur l’extérieur et sur Raedes.



   

   
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Rivage Ravagé


« It doesn't hurt me.
Do you want to feel how it feels ?
Do you want to know that it doesn't hurt me ?
Do you want to hear about the deal that I'm making ? »

Le glas retentit, annonçant sa défaite. Harrion, d’aussi loin qu’il pouvait se souvenir, avait toujours détesté perdre, quel que fût le domaine, quelle que fût la cause et pourtant, celle-ci n’avait pour lui aucune importance. Pourquoi cette épreuve faisait-elle exception ? La colère en lui n’avait cessé de bouillir, s’alimentant du combat, de la fatigue et des douleurs pour ne jamais s’éteindre, gardant précieusement les braises rougeoyantes en son sein. Au diable les joutes. Au diable les sudiers. Au diable l’hiver.

Assis sous la tente dont le lourd tissu se fit brièvement chahuter par une bise sifflante, le lad s’évertuait à débarrasser prestement son seigneur de l’armure qui le ceignait sans le heurter davantage. La lance de l’adversaire avait ripé sur l’armure du nordien mais s’était brisée avant de se loger dans un interstice de sa braconnière sur son flanc droit, entaillant la chair. Le garçon tentait de ne pas trembler. Il savait que le Karstark était d’humeur massacrante et qu’au moindre mauvais geste, la douleur le rendrait sans nul doute encore moins chaleureux…

Les yeux pers du chevalier ne quittèrent leur absolu immobilisme que lorsqu’une silhouette féminine fit son entrée. Lyra Mormont. Il ne la regarda qu’une seconde, peut-être même moins, mais son souffle s’accéléra tandis que le lad le libérait de son plastron, révélant la gambison pâle qui l’avait protégé de l’acier de son armure. Une auréole cinabre maculait l’épaisse tunique à l’endroit où le bois s’était logé.

"Décidemment, il me semble que vous vous trouvez abonné aux blessures."

Hésitant, le palfrenier jeta un regard plein d’appréhension à Harrion. Il était tellement pris par sa tâche qu’il semblait ne pas avoir entendu la jeune femme. Le Karstark logea dans les yeux du garçon ses perles aux impitoyables lueurs glacées.

Peut-être attends-tu que je le fasse moi-même ?” Avait-il dit d’une voix égale d’où perçait pourtant une indicible rage. Lyra avait soufflé sur les braises et des flammes dansaient à nouveau dans ses yeux. S’exécutant sans mot dire, le garçon délassa le tissu matelassé sur le côté opposé à la blessure puis en dégagea son propriétaire.

"Comment allez-vous ? Est-ce grave ?"

Son torse à présent mis à nu, il était bien plus aisé de constater l’ampleur des dégâts. Autant dire que c’était bien peu comparé à ce qu’il avait déjà vu et sa peau zébrée de part et d’autres en était l’éloquent témoin. Le jeune garçon en pâli pourtant car il avait vu encore bien peu de sang couler et semblait s’inquiéter facilement. Avec un bout de tissu blanc, il banda la blessure. Et même si le résultat laissait entrevoir le manque d’expérience évident dont il faisait preuve, il avait tout de même assez bien fait les choses. La plaie était maintenant protégée.

Je vais chercher le chirurgien mon seigneur !

Fais donc cela…” Répondit-il à voix basse tandis que le lad quittait prestement la tente, n’oubliant pas de saluer Lyra au passage. Le Karstark savait qu’aucun organe n’avait été touché et même si la douleur le tiraillait terriblement, la blessure ne saignait pas tant que cela.

Harrion reporta son attention sur son invitée. Toujours assis, il la dévisagea sans la moindre indulgence, arrachant d’elle tout ce qu’elle aurait pu vouloir dissimuler… l’inquiétude… la peur… Des émotions qui ne parvinrent pourtant pas réellement à lui tant il était déchaîné.  
Il se releva de toute sa hauteur, ignorant superbement le trou qui perforait son côté. A son oeillade perçante, inquisitrice et cruelle s’ajouta l’évidente brutalité qui émanait de son être.

Il lui semblait qu’elle posait des questions sans attendre de réponses. En réalité il enrageait et son attitude, détachée, absorbée par autre chose, achevait de briser les dernières palissades de patience qui lui restaient. Le nordien se plaça devant la jeune femme. Le voyait-elle seulement ? N’était-il pas assez grand, assez large ou assez en colère pour qu’elle lui témoigne un peu plus qu’une œillade distraite ?

Un mouvement d’air fit danser les toiles à l’entrée de la tente et l’attention de Lyra s’y jeta aussitôt. Harrion céda sous la colère. Il posa l’index sur l’arête de la mâchoire de l’Ourse, la forçant à tourner la tête face à lui, légèrement penché sur elle. Malgré qu’il ne fut guidé que par l’ire, il parvint à se contenir assez pour paraître plus ferme que brutale. Il n’était pas homme à blesser les femmes -désarmée.

Vous venez vous enquérir de mes blessures… non, elles ne sont pas graves. J’ai cette agaçante habitude de me relever après chaque coup qu’on me porte. Ce qui m’intéresse en revanche, c’est de savoir ce que vous faites ici. Pourquoi venir me voir moi alors que tout votre être semble tendre vers quelqu’un d’autre ?



- Adrenalean 2016 pour Bazzart

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Harrion & Lyra

   Dans son dos, Lyra était la seule à entendre gronder le bruit d’une menace invisible et pourtant bien présente. Personne n’était au courant de la présence de Raedes à Harrenhal. Personne ne devait même savoir qui était le jeune homme. Personne ne devait d’ailleurs s’en soucier. Qui se préoccuperait d’un chevalier extravagant ayant préféré dissimuler son visage sous un masque étrange ? Il n’avait pas attiré l’attention en tirant rapidement sa révérence devant les combattants du continent. Peut-être cela avait-il été son intention. Se faire remarquer uniquement par les yeux qui l’importait, puis disparaître pour les autres. Quand bien même son identité était-elle révélée, il ne représentait aucune menace ni pour le Royaume du Sud, ni pour le Royaume du Nord. Il n’était que l’enfant sans aspiration au trône de Grès d’un suzerain déchu, oublié, disparu. Non, il n’était pas un danger pour Westeros. Il n’était un danger que pour elle-même.

Malgré sa timide entrée et les quelques mots prononcés, le Karstark ne la gratifia même pas d’un regard et encore moins d’une phrase de salut. L’archère ne s’en formalisa pas. Elle connaissait la fierté toute particulière de nordien que le visage froid d’Harrion ne laissait pas deviner au premier inconnu. Sa défaite face à un Sudier, face à un Lannister doublé de son affirmation que certains auraient pu qualifier de maladroite, il était évident qu’il rongeait son frein. La troisième ourse, sentant bien qu’elle était arrivée au mauvais moment, luttait pour ne pas prendre ses jambes à son cou. Elle n’était pas prête à faire face à une nouvelle tempête et son esprit profondément pacifique avait tendance à fuir les confrontations plutôt que d’y foncer tête baissée, à la manière de ses sœurs ou de sa mère. Et elle avait appris à assez découvrir l’héritier pour savoir que ni l’un ni l’autre ne sortirait vainqueur d’une joute verbale où l’un bouillonnait de son douloureux revers face au lion qui lui avait valu une blessure et où l’autre se souciait d’un piège extérieur qui se renfermait lentement sur elle. L’un était un animal rendu dangereux par la plaie sanglante, l’autre était une créature apeurée et acculée prête à tout pour s’échapper.

Lyra sentait les poils de ses bras se dresser sous sa lourde cape. Le pauvre écuyer devait ressentir la tension qui baignait l’atmosphère. Ses doigts tremblants avaient bien du mal à défaire l’armure du jouteur. La voix morne, mais néanmoins pleine de colère du blessé, retentit comme un coup de hache, tranchant le silence et l’air difficilement respirable de la tente.
Prête à tourner les talons avec un murmure d’excuse et la promesse de repasser plus tard, elle fut cependant interrompue par la blessure rendu enfin visible. Figée, elle observa la longue cicatrice boursouflée qui barrait l’épaule du fils de Rickard, souvenir de sa précédente bataille contre les sauvageons, puis la nouvelle entaille fraiche et sanguinolente qui fleurissait sur son côté droit. Elle était tentée de faire un pas en avant et d’aider le garçon à nettoyer la lacération, mais la panique de l’écuyer le fit agir si vite et si bien qu’elle ne put même pas esquisser un geste avant qu’il ne disparaisse, pressé de voir son seigneur soigné, mais également de fuir l’humeur noire de celui-ci.

Abandonnée avec le soleil blessé, elle lui retourna son regard sans ciller, bien que l’aplomb lui manquait. À ses yeux durs et froids, elle lui retournait une attention soucieuse. Encore une fois séduite par l’idée de s’excuser avec un hochement de tête et de prendre la poudre d’escampette, le redressement brutal d’Harrion la pétrifia. Sous le mouvement brusque, la plaie avait protesté et le tissu blanc s’était un peu plus taché de rouge.

« Vous ne devriez pas… »

… vous lever, » avait-elle commencé à murmurer avant qu’un lointain cliquetis métallique provenant de l’extérieur, signe du passage rapide d’un homme ou d’une femme en armure, n’attire sa concentration loin des préoccupations de la tente des Karstark. Raedes ? Était-ce lui ? Cachée derrières les tentures ondulantes, elle n’arrivait pourtant pas à voir plus loin que la boue retournée de l’entrée du chapiteau.

Un doigt brûlant contre son visage gelé lui fit cependant tourner la tête et ses yeux gris agrandis de surprise et de stupeur croisèrent à nouveau ceux de l’héritier. Trop abasourdie pour réagir elle ne put que le considérer, le désir de se soustraire plus fort que jamais.

« Pardon ? » fit-elle, presque éberluée devant sa dernière question.

Tous les muscles de son visage étaient tendus et ses sourcils sombres, froncés, laissaient ressortir l’éclat plein d’ire de ses iris pâles.

« Je suis venue car j’étais inquiète, » se défendit-elle. « Mais je suis rassurée de voir que vous vous portez bien. »

La troisième fille de Maege avait toujours été la plus craintive et la plus farouche, guère friande des contacts humains en dehors de sa famille, de ses plus proches amis ou lorsque ses qualités de guérisseuse étaient requises. De se trouver ainsi contrainte lui rappela les pires souvenirs. Avec un frisson, elle se substitua vivement à l’emprise d’Harrion, rejetant sa tête sur le côté et reculant d’un pas.
Son ton, mélange étrange de crainte et d’inflexibilité, sonnait étrangement dans sa gorge. Si elle était dissipée, elle avait ses raisons et l’expression furieuse dansant sur les traits du nordien ne l’encourageait absolument pas à partager ses préoccupations avec lui. Elle n’en avait d’ailleurs pas eu l’intention en posant le pied ici. Elle ne comprenait ni l’irritation ni le courroux soudain dont elle était soudain la victime. Elle pouvait saisir la déception face à la défaite et la colère suscitée par sa blessure, mais absolument pas la hargne inquiétante dont son interlocuteur semblait être la proie.

« Vous devriez vous reposer. Je ne vous dérangerais pas plus longtemps. »

Dans un geste instinctif de protection, elle referma les pans de sa cape et serra ses bras contre sa poitrine. Non sans raideur, elle le salua d’un hochement de tête avant de se retourner. Elle marqua cependant un temps d’arrêt à l’orée du chemin, la main figée sur le pan qu’elle venait de soulever. Ses yeux méfiants guettaient l’armée de tente et ses oreilles tendues tentaient de déceler le moindre son suspicieux, trahissant la présence du bâtard des Îles de Fer. Finalement, elle ne savait plus qui elle craignait le plus d’affronter.




   

   
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Lyra semblait perdue dans l’incompréhension. Sa première envie fut de tout détruire mais il n’en fit rien. Il observa la Mormont silencieusement. Il sentait son cœur pulser à ses tempes, à sa poitrine et dans la fraîche morsure du bois qui pâtissait d’un tel niveau d’agitation.
Elle ne comprenait pas. Comment était-ce possible ? C’était pourtant limpide et sa colère était justifiée ! Ca il en était certain, le seul problème était que Lyra, elle, semblait complètement perdue face aux reproches qu’il lui faisait et cela irritait le Karstark davantage.

Il n’avait plus le choix. S’il voulait se faire comprendre d’elle, -et cela il le voulait vraiment- Harrion devrait faire de très gros efforts comme par exemple garder son calme et... ce n’était pas vraiment dans ses habitudes. Tandis qu’elle faisait mine de sortir, Harrion se détourna à son tour et posa ses mains à plat contre la table devant lui. Il ferma les yeux et s’emplit d’une profonde inspiration. La douleur de la blessure le lança soudain comme si on venait d’y glisser un doigt et il dut se mordre les lèvres pour ne pas gémir de douleur. Peut-être avait-il minimisé l’étendu des dégâts… ou peut-être que son corps lui-même le punissait de son tempérament si emporté…

Par l’absence du bruit de ses pas, il devina qu’elle s’était arrêtée dans son geste et n’avait pas quitté la tente. A présent un peu plus libéré de sa colère, il pouvait constater les évidences qui lui avaient pourtant sauté aux yeux un peu plus tôt. Lyra semblait fébrile et apeurée comme une bête traquée. Elle était venue s’enquérir de sa bonne santé et s’en souciait réellement. Le Karstark n’avait jamais eu de difficulté à séduire les femmes et obtenait la plupart du temps ce qu’il désirait sans grands efforts. En revanche, il ne pouvait pas se targuer de les comprendre… il n’avait jamais essayé. Pourquoi se compliquer la vie ? Maintenant, ce savoir lui faisait sans doute un peu défaut.

Le nordien se retourna doucement vers elle, le ton plus posé. Bien qu’il ne fut calmé qu’en surface, son regard était moins féroce.

Je me suis emporté… -excuses déguisées- Quoi qu’il en soit, vous n’aurez jamais à me craindre. Jamais je ne lèverai la main sur vous et si quelqu’un vous voulait du mal, il devrait me tuer d’abord.

Il avait beau être blessé, si le mystérieux chevalier qui avait pavané avec les couleurs de Lyra se présentait sous sa tente à cet instant, ses éventuelles capacités de sprinter lui aurait sans doute sauvé la vie. Le Karstark jeta un oeil son épée qui reposait contre la table. Il n’aurait qu’à tendre le bras… et ce n’était pas l’envie qui lui manquait.

Qui fuyez-vous.

La simple idée qu’on la menace dévorait en lui toute forme de douceur et de bonté mais il s’évertua à n’en rien montrer. Il savait qu’un regard sombre de sa part risquait d’être mal perçu par celle qu’il souhaitait justement préserver.


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Harrion & Lyra

   Un pas et elle se retrouvait exposée. Tout son corps figé lui ordonnait de se replier en zone sûre et de se soustraire au vent glacé qui s’engouffrait sous les pans entrouverts. Derrière elle cependant, la présence du Karstark furieux pour des raisons qu’elle ignorait, la poussait à s’enfuir. Habituée au danger constant de l’Île aux Ours et ne reculant jamais devant les sauvageons envahissant leurs côtes ou les fer-nés menaçant l’horizon, elle se trouvait soudain fébrile et timorée devant l’ombre du Choucas et prête à déguerpir au constant de la fureur du chevalier. Le passé incarné par le visage sombre de Raedes avait fait faiblir ses jambes et écrasé la détermination qu’elle se forçait à afficher lorsqu’il était question d’oublier sa captivité à Pyke. Que craignait-elle ? Que ferait le bâtard d’Essos s’il venait à la trouver ? A Harrenhal, malgré la grandeur de l’imposante forteresse en ruines, il était impossible d’être seul. Le Roi du Nord et la Reine du Sud avaient réuni les plus grandes familles de Westeros et nobles autant que roturiers se promenaient à travers les terres si bien que la tranquillité n’existait guère en cette période festive. Voulait-il lui parler ? La mettre en garde ? Etait-il le corbeau d’Euron Greyjoy, porteur de mauvaises nouvelles pour elle ? Lyra avait du mal à comprendre sa présence et ce qu’il recherchait, lui, en tant que personne et non pas en tant qu’envoyé de son géniteur. Il n’avait jamais été ni violent ni désagréable à son encontre. Au contraire, c’était-il même montré presque prévenant et la laissant s’échapper du hall lugubre du château de Grès lors du soulèvement des capitaines et des chefs de famille contre le Borgne. Sans son intervention, elle n’aurait pas donné cher de sa peau. Quant à la colère inexpliquée d’Harrion, elle en avait connu d’autres. Leur enfance et leur adolescence avaient été ponctuées de piques acides et d’irritations dont l’un ou l’autre était la cause. Pourquoi était-ce si différent cette fois-ci ?
La troisième ourse en avait conscience, elle cherchait à se trouver des excuses et à se rassurer. Comme lorsqu’elle tentait de raisonner Lyanna quand elle n’était encore qu’une petite fille et que le grondement d’une nouvelle bataille sur les plages résonnait jusqu’au cœur de leur forteresse de rondins. Elle aurait tout fait pour la préserver alors que la même angoisse lui tenaillait l’estomac. Aujourd’hui, elle n’était plus femme à se bercer d’illusions et de contes. Elle en avait trop vu pour y croire encore.

Le bruit mat des paumes du chevalier écrasées sur la table de bois où il avait été soigné lu fit tourner la tête. Le haussement de ses épaules alors qu’il respirait profondément et les soubresauts de chacun des muscles de son dos offerts à sa vue lu indiquèrent que malgré ses grands airs, l’héritier souffrait de sa blessure. Cette constatation froissa ses sourcils en une expression presque maternelle et elle laissa retomber le tissu devant elle.
Le jouteur finit par lui aussi lui adresser un regard, bien plus long et bien moins sévère que lors de son arrivée. Ils se toisèrent ainsi, comme deux enfants, comme deux adultes qui ne se comprennent pas malgré leurs efforts.

Le visage de l’archère ne se détendit pas malgré les timides excuses du brun. Lorsqu’il disait ne jamais pouvoir lever la main sur elle, il oubliait la force de sa poigne contre son bras lorsqu’elle avait tenté de le soigner il y a avait plusieurs lunes à Winterfell. Or, elle ne lui avait jamais tenu rigueur de cet incident qu’il n’avait pu contrôler. Ses lèvres finirent par se fendre d’un sourire inquiet.

« Aye, » répondit-elle, recouvrant le laconisme gêné qui était le sien quand elle se trouvait face à des étrangers. « Je sais que je n’ai rien à craindre de vous. »

Elle desserra la pression de ses bras qu’elle avait de nouveau inconsciemment serrés contre sa poitrine.

« Ne parlez pas de meurtre de façon si légère, » dit-elle en secouant la tête.

Elle n’avait jamais pris aucun plaisir lorsque ses flèches ôtaient la vie, qu’elle soit fer-née ou sauvageonne. Malgré le caractère supposé barbare des Mormont, aucune des filles n’était bestiale et le goût du sang ne faisait aucunement parti de leurs attributs. Elles ne faisaient appel au fer qu’en cas de nécessité, pour protéger les leurs. La sensibilité et la délicatesse de Lyra avait souvent été mise à mal et longtemps, elle s’était refusée au triste office. Puis, la réalité s’était imposée à elle sans qu’elle ne puisse une fois encore lui tourner le dos et faire mine de ne pas l’avoir vue. Aujourd’hui, les choses n’étaient peut-être pas si différentes. Elle devrait confronter Raedes. Elle ne pouvait pas continuer sans lui avoir parlé et laisser tournoyer dans son esprit les pires questions sur la raison de sa présence dans le Conflans.

La question du fils de Rickard la laissa immobile, aussi raide que la femme gravée sur la porte de leur demeure de bois. Désarçonnée, elle le regardait sans vraiment le voir alors que sa gorge se nouait.

« Je ne fuis personne, » se dépêcha-t-elle de répondre. « Jamais. »

Elle croyait férocement à ses paroles. Et le regain soudain de fierté dans sa posture et dans son intonation aurait pu balayer les doutes de son comportement d’il y avait quelques minutes.

Son regard dévia du visage renfrogné d’Harrion à sa côte bandée où fleurissait sa blessure carmine. Quand bien même le jeune écuyer s’était-il appliqué, les soins apportés demeuraient sommaires et faits dans la rapidité.

« Vous devriez vous occuper de vous avant de vous préoccuper de moi, » lui dit-elle d’une voix douce. « Ce doit être douloureux. Rasseyez-vous avant que je ne vous y oblige. »

L’autorité chaleureuse de sa voix était à peine perceptible. Elle osa enfin s’approcher de lui, bien que la lenteur de ses pas témoignait pour elle de sa réserve.

« Je vais rester jusqu’à l’arrivée du chirurgien. Peut-être pourrais-je l’assister. Je vous laisserais ensuite à votre repos. »



   

   
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Harrion ne parlait jamais de meurtre à la légère, et même si tuer était monnaie courante, il n’en oubliait pourtant pas la valeur que possédait une vie. Il ne s'appesantissait pas davantage lorsqu’il faisait couler le sang car son geste était guidé par la raison… la plupart du temps. Aucune notion de plaisir, il tuait lorsqu’il n’avait pas d’autres choix. Mais comme tout humain, il était imparfait, et quelques failles couraient le long de l’acier qui servait d’armure à son âme. Il se savait capable du pire lorsqu’il était question de ceux à qui il tenait et savait également que son tempérament passionné pouvait le rendre bien moins raisonnable.

Lorsque Lyra lui affirma -avec une certaine fierté qu’il lui connaissait bien- qu’elle ne fuyait personne, il fronça subrepticement ses sourcils. Il savait que la vérité était toute autre et le fait de voir ce mystère toujours auréolé de ténèbres ne lui plaisait pas. Mais il en convenait, Harrion ne pouvait décemment pas la forcer à se livrer. Soit ! Il attendrait un moment plus opportun.

La douleur de sa blessure le rappela de nouveau à l’ordre. Pourquoi fallait-il toujours qu’elle soit là lorsqu’il était blessé… le destin semblait-il… Il observa la jeune femme un moment avant de prendre place dans le fauteuil. Ce simple geste lui rappela que la blessure n’était pas si anodine et qu’il en sentirait l’épine pendant un petit bout de temps. Malgré cela, il n’émit aucune plainte tandis qu’elle le soignait. Ce n’était pas uniquement parce qu’elle se montrait douce, mais également parce qu’il avait autre chose en tête.

J’ai fait amende honorable. A vous de me présenter vos excuses.” Dit-il soudain. Devant l’air saisi de la jeune Ourse, le Karstark ne broncha pas un instant, les iris d’acier rivés dans ceux de la jeune femme. Sous le calme apparent dont il faisait preuve brûlaient encore les cendres d’une ire incandescente.

C’est à ce moment moment que l'écuyer revint, écartant subitement les pans de la tente pour dévoiler son visage rouge, essoufflé et rincé de sueur.
Messire ! Le chir…
Harrion en grinça des dents d’agacement mais ne quitta pas l’Ourse des yeux.
Dehors !
Affolé, le jeune homme s’exécuta en disparaissant comme le vent derrière les larges tentures.

Bien décidé à ne plus se laisser distraire, il sembla oublier cette interruption la seconde qui suivit.
Je vais vous poser une question et je souhaiterais que vous me répondiez avec la plus grande sincérité.
Toujours assis face à elle, le regard du Karstark ne lui laissa pas un instant de répit.
Si j’avais porté les couleurs d’une autre femme, qu’auriez-vous ressenti ?
Devant l’air interdit de la nordienne, Il se pencha légèrement en avant, ses deux pieds prenant de solides appuis avant de se relever lentement, oubliant le feu de sa blessure.  

Avec une inusité douceur, de sa main droite encore tachetée par endroit du sang séché de son entaille, il prit la senestre de Lyra entre ses doigts, y baissant les yeux. Si la peau de la Mormont était douce et fraîche, le contraste avec celle chaude et rugueuse du chevalier était grande. Du pouce, il caressa le dos de sa main et releva les yeux sur elle. “Peut-être le saviez-vous déjà mais l’affection que je vous porte dépasse l’intérêt diplomatique.
J’éprouve pour vous de réels sentiments et ce depuis bien plus longtemps que vous ne pouvez l’imaginer.” A cet aveu était sans nul doute peu aisé à prononcer mais il était décidé. Il resserra doucement ses doigts sur ceux plus délicats de la Mormont, ses lèvres esquissant un rictus à peine perceptible. “Vous ne l’ignorez pas, je ne suis pas une personne toujours facile à vivre et je ne vais pas vous mentir dans le but de vous séduire. Je ne changerai pas. J’en suis incapable.
Détendant son bras, il relâcha la main de Lyra. “Vous voir offrir vos faveurs à un autre chevalier m’a rendu fou de rage. Alors oui, je l’avoue, j’ai eu très envie de le tuer parce que suis irascible, possessif et… sans doute bien d’autres choses mais je suis un homme honnête. Je le suis avec les autres mais aussi avec moi-même.

Et je n’en attends pas moins de la femme qui se tient face à moi en cet instant.

Il fit un autre pas vers elle, violant allègrement toutes règles de bienséances seyant à leur noble condition. Le visage habillé d’une légère barbe était maintenant si proche qu’il touchait presque celui, gracile, de la Mormont. De ses doigts, il effleura les contours du minois pâle puis son menton, caressant la peau sous sa lèvre inférieure. “Un seul mot et je vous libérerai de mes impatiences.



- Adrenalean 2016 pour Bazzart

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Rivage ravagé

   
Post-tournoi

   


   
Harrion & Lyra

   Etonnamment, Harrion lui obéit sans rechigner. Lyra lutta pour ne pas laisser la surprise transparaître sur son visage alors qu’il trouvait un fauteuil. Il écarta même le bras, l’invitant à observer de plus près sa côte fendue, bien que son visage fermé et austère témoignait qu’il ne se pliait qu’à contrecœur à sa requête. À moins que cet air revêche de dissimule la grimace de douleur qu’il s’acharnait à contenir depuis son entrée sous la tente. La troisième ourse salua pourtant d’un hochement de tête sa décision et approcha une chaise laissée là avant de s’y installer.
Avec le plus de précautions possibles, elle défit le bandage propre, mais attaché rapidement par l’écuyer. Le blanc était déjà presque noir de sang. Elle le jeta à ses pieds avant d’observer la déchirure. Celle-ci, malgré les apparences, n’était pas nette. Elle zébrait la chaire de rouge et la griffure, bien qu’elle apparaisse unique, était en réalité multiple, bien qu’une plus importante se détache des autres. Les plus petites n’étaient que des égratignures dont certaines avaient déjà commencé à sécher. En revanche, la principale l’inquiétait. Encore béante et sanguinolente, elle ne pourrait se refermer seule et en la laissant ainsi, il prenait le risque de la voir s’infecter. La jeune femme avait assisté aux joutes. Elle avait vu la lance de l’homme des Terres de l’Ouest, du Lannister, se briser avant de faire chuter le Karstark. Il ne faisait aucun doute que cela était la cause de la blessure. La pointe arrachée avait soit perforé l’armure soit été assez fourbe pour se glisser dans un interstice.

Une légère boursouflure violacée sous la peau attira son attention. Elle se pencha un peu plus vers son flanc et vit apparaître la tête d’un morceau de la lance, profondément enfoncée dans la plaie. Du bout des doigts, elle l’effleura. Sa main, réchauffée par le feu qui brûlait au centre de la tente ne devait plus être glacée. Sur la table, tout un attirail de chirurgie probablement déjà apporté par le guérisseur à l’instant même où Harrion rencontrait le sable, trônait là. Son regard de connaisseuse attrapa la petite pince de fer, probablement propre, mais qu’elle préféra réchauffer au cœur des flammes.

« Serrez les dents, » lui conseilla-t-elle en reprenant place.

Elle inspira profondément avant d’approcher le métal rouge de la plaie. Si sa main trembla légèrement, sa respiration mesurée lui fit reprendre le contrôle. D’un geste habile, elle retira l’épingle de bois et s’empressa de porter une serviette propre pour contenir le nouvel écoulement de sang. L’héritier n’émit aucune protestation et ne sursauta même pas. Il ne semblait pas y avoir d’autres éclats.

« Le chirurgien devra recoudre, » affirma-t-elle. « Il ne faudrait pas qu’elle s’infecte. »

Obnubilée par sa nouvelle mission, Lyra en avait oublié Raedes et la colère froide du fils de Rickard. Pourtant, celle-ci fut bien vite rappelée à elle.
Elle leva les yeux vers lui alors qu’elle commençait à bander la blessure. Des excuses ? Elle cligna plusieurs fois des yeux, comme pour se persuader qu’elle ne rêvait pas. Des excuses ? Mais pourquoi ? Une lueur d’incompréhension éclaira le fond de son regard gris. L’assurance et l’imperturbabilité du brun auraient pu la faire douter. Qu’avait-elle donc fait de mal ?

L’annonce de l’arrivée du chirurgien arriva presque comme une bénédiction pour l’archère. Elle s’apprêtait à se redresser pour prendre congé, mais la voix puissante d’Harrion aboya si fort que le petit page, terrifié, s’enfuit la queue entre les jambes.
Alors qu’elle s’apprêtait à protester, le Karstark reprit d’une voix plus calme. La question posée la laissa coite de surprise. S’il avait reçu ses couleurs d’une autre femme qu’elle ? Elle ne s’était jamais torturée l’esprit à ce sujet. Il était d’ailleurs de notoriété commune que le fils de Rickard avait accumulé les conquêtes féminines dans son adolescence. Il ne s’en était jamais caché. Et elle n’avait jamais été troublée par cela. Que voulait-il qu’elle lui réponde ? Qu’elle aurait été jalouse ? Elle avait vu ce qu’était la jalousie. Souvent, ce sentiment avait brillé dans le regard clair de Lynesse Hightower lorsque Jorah, quelques fois pris d’une nostalgie inhabituelle, parlait de sa première épouse à Maege. Dans ces moments là, malgré son physique avenant, ses longs cheveux blonds et sa beauté naturelle, Lyra l’avait trouvé si hideuse et arborant un air si méchant qu’elle l’avait crainte. La jeune femme était persuadée que ce monstre de sentiment d’habitait pas en elle.
Prête à répondre, en y mettant les formes, qu’elle aurait accepté l’éventualité avec une bonhommie indifférente, elle fut cependant prise d’un doute et malgré sa bouche entrouverte, les mots ne parvinrent pas à sortir. Vraiment, n’en aurait-elle eu cure ? Ils se connaissaient depuis des années et jamais elle ne s’était troublée de la sorte.

Il se redressa, ce qui ne manqua pas de faire saigner à nouveau l’entaille. Il se saisit de sa main qui, elle aussi, était tâchée de son sang. Ce geste la pétrifia tandis qu’un rouge furieux lui montait aux joues.
Muette devant les aveux d’Harrion, l’archère si elle avait rêvé dans sa jeunesse d’une telle déclaration, n’était aujourd’hui plus vraiment à l’aise face aux élans du cœur. Sa désastreuse expérience à Pyke l’avait rendu craintive sur ce terrain là, plus craintive encore qu’elle ne l’avait été.

« Je suis terriblement flattée, » admit-elle d’une voix claire.

Si le combattant la surplombait de son imposante stature elle, restée assise, n’osait lever les yeux vers lui. Il disait éprouver des sentiments à son égard depuis longtemps ? Depuis quand ? Dire qu’elle était embarrassée aurait été un euphémisme.

Toutefois, il s’approcha encore et laissa ses doigts rugueux courir le long de son visage jusqu’à son menton. La façon dont il la touchait maintenant n’avait plus rien à voir avec le geste brutal dont il lui avait fait lever la tête, quelques minutes auparavant. Imperceptiblement, elle serra les dents. Au contact du Choucas, elle l’avait pas appris les gestes tendres et l’affection. Cela la terrifiait désormais.

« Non, » avoua-t-elle autant à lui qu’à elle même. « Je n’aurais pas été ravie de vous voir décoré des mains d’une autre femme. Mais plutôt que de la tuer, disons que je sais tendre des pièges plutôt efficaces pour le gibier. »

L’humour n’était pas un trait de la personnalité de Lyra particulièrement prononcé. Elle savait faire preuve de répartie lorsque la situation lui en demandait, mais l’absence d’envie de se moquer ou de faire du mal la prévenait souvent de faire preuve d’ironie.
Un léger sourire se dessina sur ses lèvres. Était-il sérieux ? Servait-il ce numéro à toutes les jeunes courtisanes et filles de taverne du Nord ? Elle n’aurait su le dire. Mais il lui avouait être honnête. Une part d’elle, méfiante, ne savait qu’en penser tandis qu’une autre, une facette que Lyra ne connaissait pas encore, avait envie d’y croire.

« Je ne changerai pas, moi non plus, » lui dit-elle d’une voix presque sévère.

Sa main gauche vint à la rencontre de la sienne, effleurant encore son visage frissonnant.

« Raedes. »

Ses yeux rencontrèrent enfin les siens, perplexe. La prononciation de son nom froissa ses sourcils en une expression désolée, presque suppliante, tandis que sa main droite vint rejoindre sa sœur autour de la poigne du nordien.

« L’étrange chevalier des joutes. Le bâtard du Choucas. »



   

   
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Rivage Ravagé


« It doesn't hurt me.
Do you want to feel how it feels ?
Do you want to know that it doesn't hurt me ?
Do you want to hear about the deal that I'm making ? »

Un piège à gibier ? Ces paroles inattendues lui arrachèrent un sourire ténu mais amusé. Malgré l’arrogance dont il pouvait faire preuve, il n’était pas certain que la réponse de Lyra aille dans ce sens après sa déclaration. Après tout, elle pouvait parfaitement réserver ses véritables sentiments pour de multiples raisons. Si elle avait prononcé à ses doutes à voix haute, Harrion ne lui en aurait pas vraiment voulu. Sa réputation n’était plus à faire, même si ces dernières années l’avaient considérablement changé.
Il est bien difficile de se départir de ses actes passés, surtout lorsque comme lui, on les affichait fièrement. N’avoir aucun compte à rendre à personne, agir comme une tête brûlée… Rickard l’avait prévu, un jour il faudrait payer l’addition et même s’il avait toujours beaucoup respecté son père, bien du temps s’était écoulé avant qu’il ne prête l’oreille à son discours. Aujourd’hui il assumait donc parfaitement ses écarts d’hier mais appréciait qu’on ne le résume pas à si peu de choses.

Qui peut donc prétendre nous aimer à la seule condition que nous changions ?” Dit-il à voix basse avant que son regard ne s’égare un instant dans de vagues souvenirs.

Il n’aurait pas craché sur un peu d’alcool à cet instant présent. La douleur de sa blessure demeurait constante, aiguë et lancinante et même si son esprit était assez occupé pour supporter les assauts de ses nerfs à vif, cela n’allait certainement pas durer.

Au nom de Raedes, le nordien plissa le front car cela ne lui disait rien. Lorsque l’explication vint, une ombre passa sur son visage mais pas uniquement. Une vague de fureur irradia le long de son dos, remontant sa colonne à une vitesse vertigineuse pour exploser dans son crâne et se répandre dans une violence telle qu’il eu l’impression qu’on y frappait à grands coups de marteau, ravivant les pulsations perfides de sa blessure. Il serra les dents.
Comment cette immonde vermine osait mettre les pieds ici et venir les narguer de la sorte ? Il comprenait mieux à présent pourquoi Lyra avait eu cet étrange comportement.
Saisir son épée, quitter la tente, poursuivre le bâtard et le réduire en charpie pour envoyer sa tête en cadeau à sa raclure de père, voilà un désir auquel il aurait volontier cédé.

C’était sa première intention et c’est certainement ce qu’il aurait fait si quelque chose ne l’en avait pas dissuadé. S’abandonner à la colère était bien aisé, on pouvait même dire sans trop s’égarer que c’était pour lui une habitude. Pourtant à cet instant précis, un désir puissant supplantait tous les autres. Contenant l’ire fiévreuse en son for intérieur, il resta immobile et son regard acier se posa sur l’Ourse. Ses yeux brillaient de rage mêlée de douleur et ses traits se tendirent presque malgré lui.

Sans mot dire, il prit Lyra dans ses bras, l’un entoura ses épaules menues et l’autre se posa doucement sur sa tête brune, l’incitant à se reposer contre lui. Ses muscles tendus trahissaient sans doute une partie de la colère qu’il gardait sous scellé, cependant, son contact n’en restait pas moins tendre et son aura protectrice.

Vous êtes entourée des vôtres. Tenter quoi que ce soit serait clairement inconsidéré de sa part. Ici il ne peut pas vous atteindre.”  

Une violente décharge le traversa sans prévenir. La douleur était devenue si forte qu’à son front perlaient quelques gouttes de sueur et que sa tête lui tourna. Il poussa un grognement sourd tandis qu’il perdait l’équilibre, s’affaissant sur l’épaule de la Mormont. Manquant de les faire tomber tout les deux sous son poids -et il était plutôt loin de celui d’une plume- il se rattrapa à la table derrière Lyra, son autre main s’accrochant au tissu de sa robe dans son dos.

La jeune femme l’aida à se déplacer jusqu’à sa couchette et à l’y poser. Malgré la douceur de ses gestes, une certaine pâleur avait voilé son visage.

J’ai juste besoin d’un peu de repos, inutile de s’inquiéter.” Certifia-t-il lorsqu’au même instant, une silhouette faisait irruption dans la tente familiale. Eddard Karstark, son jeune frère, entra, le regard froncé et les lèvres pincées. Lorsqu’il croisa le regard de Lyra il se détendit aussitôt et offrit un large sourire.

Ma Dame.”  La salua-t-il d’un mouvement de la tête. “Je suis rassuré de voir que mon seigneur de frère -une pic et bien peu dissimulée- est en votre compagnie.

Eddard ce n’est pas le m…

Je crois que si au contraire.” Dit-il en se rapprochant, visiblement prêt à en découdre avec son aîné. Ce dernier inspira… et le regretta car la douleur lui arracha une quinte de toux qui à son tour démultiplia son martyr. “J’ai vu le pauvre Fylas qui m’a…

Yolas…” Le reprit Harrion. Eddard, s’arrêta, fronça ses sourcils et croisa ses bras sur son torse.
Cesse de me couper la parole tu veux ? Quel que soit son nom il m’a rapporté tes frasques. Laisse moi te dire que tu as la tête plus dure de la glace. Tu n’es pas immortel ! Dois-je te rappeler que si tu meurs -et d’autant plus aussi bêtement- c’est à moi que reviendra la charge d’être à la tête de la famille ? Je n’en ai pas envie ! Alors sois aimable et pense à ton petit frère au moins une fois dans ta vie !”  

Qu’il me fasse ce qu’il veut tant que tu te tais Eddard !”  Répondit Harrion, les mains plaquées sur son visage, peu d’humeur à se battre contre lui.

Le jeune frère, visiblement surpris d’une réédition si rapide ne sut d’abord quoi répondre, puis, plein de satisfaction, lança un clin d’oeil complice à la Mormont.

Je vais le chercher !”  Lança-t-il fièrement avant de disparaître, laissant de nouveau les deux nordiens seuls.

Ce cher chirurgien va certainement m’administrer des drogues qui risquent de me faire oublier mon nom. Vous devriez aller retrouver votre mère. Et vous me rendriez service en amenant Eddard avec vous. Je sens qu’il va me taper sur les nerfs et au moins je saurai qu’il se trouve en bonne compagnie.”  
Harrion savait qu’elle n’était pas dupe et qu’elle devinerait sans mal que c’était un prétexte pour qu’elle ne sorte pas seule. Eddard était un combattant exceptionnel et il n’avait confiance qu’en lui pour la protéger. Car même s’il pensait ce qu’il lui avait dit peu de temps auparavant, il n’était certainement pas prêt de risquer sa vie sur des présomptions, aussi logiques fussent-elles…

On ne refuse pas sa dernière volonté à un mourant…”  dit-il les yeux froncés d’une moue sévère exagérée.
Avant que la jeune femme ne prenne congé, il saisit sa main à la volée, sans pour autant la blesser. Malgré son état, il gardait d’excellents réflexes.
Je respecterai votre choix… mais votre mère devrait savoir pour Raedes. Parlez-lui...


- Adrenalean 2016 pour Bazzart

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