Le Deal du moment : -39%
Ordinateur portable ASUS Chromebook Vibe CX34 Flip
Voir le deal
399 €


Revealing the unseen.

2 participants
Gerold Grafton
Staff

Gerold Grafton

Informations
Revealing the unseen. Tumblr_n3z9pivxjx1qej1qro2_250
Ft : Blake Ritson
Messages : 1189
Date d'inscription : 03/03/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
1000 messages
L'incarnation
100e RP
Time Traveler


   
online
# 
La vie avait pris une texture bien différente, récemment. Il s’était surpris à user d’une énergie considérable pour se comporter selon son usage. De plus en plus, il lâchait de petits ricanements complaisants lorsque la situation le demandait, souriant méchamment d’un air de complice intéressé aux critiques sous-entendues et aux préjugés acerbes. Il n’avait aucun mal à non plus à revêtir des expressions cruellement sarcastiques pour mettre en exergue son indifférence, voir son sadisme latent, en voyant que sa jeune collaboratrice recevait le seul traitement qu’elle méritait, évidemment. Le manque de professionnalisme, qui l’irritait quelque peu en général, paraissait lui être une attitude naturelle et à sa surprise, il pardonnait aisément aux contempteurs de ce monde toutes leurs remarques désobligeantes sur l’apparence ou l’origine de leurs collègues braaviens. Dans un monde idéal, peut-être auraient-ils mis leurs sentiments de côté pour servir non une cause ni une opinion, mais un métier ; toutefois l’utopie n’était pas de mise depuis très longtemps. Et s’il en avait éprouvé du dégoût au début, Gerold s’était depuis quelques temps rallié à cette opinion qui consistait à dénigrer l’étrangère qui avait pris tant de place au sein d’un conseil qu’elle n’avait pas mérité, aux côtés d’un Roi qu’elle avait soutenu uniquement sur la fin, une fois la victoire acquise. Les détracteurs des Antaryon n’étaient pas déçus, ayant trouvé dans la Main du Roi un allié occasionnel qui, depuis quelques semaines, paraissait rester indifférent aux malheurs et déconvenues de Vaeranah au sein du conseil restreint. Leur incapacité à s’adapter proprement, puis cette enfant qui partageait leurs traits communs, furent suffisants pour les laisser en marge de certains évènements. Une opposition latente qui émanait d’une médiocre fange de la société que Gerold avait jadis eu en aversion, puis qu’il avait doucement et discrètement épousée. Pénétrant et charmant, ses commentaires avaient été emprunts d’une subtilité suffisante pour ne pas être outrecuidants, tout en stipulant à qui voulait bien l’entendre son opinion sur sa collègue. A chaque fois, il relevait avec une douloureuse satisfaction l’effet que produisaient ses critiques chez l’Argentière. La plupart du temps, aucun. Mais il connaissait suffisamment sa contenance pour reconnaître la plissure du désarroi aux coins de sa bouche, et avait déjà bien assez usé de la surprise hébétée d’être la source de ses nouveaux soucis. Pourtant, ils avaient depuis le début été amis…
Elle avait posé sa main sur la sienne. Une seule fois. Assez pour l’électriser. Il s’était immobilisé alors, focalisé sur ce geste anodin et qui avait dû exister moins d’une minute. Son coeur s’était mis à battre un rythme incompatible avec la vie, mais il n’avait pas bougé, tétanisé par cette caresse sans importance. Dès lors, il s’était senti, plus ou moins consciemment, obligé de la repousser. Et il y était parvenu. Ce frisson qui balayait par torrents le sang du cœur vers les joues l’avait effrayé ; assez pour devenir cruel. Il savait leur destin intriqué de gré ou de force par la naissance d’une nouvelle dynastie royale et malgré la distance qui s’était creusée, Gerold la savait assez proche et son comportement assez ambigu pour pouvoir lui murmurer des horreurs à l’oreille.  
« J’ai entendu le Lord assis à côté de moi pendant le conseil supposer que vous étiez de nouveau dans vos états , lui avait-il dit subitement et sans raison, avant de prolonger un silence étouffé, mais je me suis souvenu que votre frère n’est pas encore assez mature pour produire du sperme. »
Il prononçait ses sarcasmes d’une manière tellement particulière ! C’était ironique, c’était pour faire de l’humour, mais comme le sujet était intime et qu’il venait de franchir une limite, qu’il était encore un peu vexé des sous-entendus du Lord et qu’il essayait de ne pas laisser transparaître sa frustration, il l’avait dit avec un ton légèrement dédaigneux. Immédiatement pourtant, il avait compris sa faute et s’était détournée d’elle pour ne pas avoir à affronter son regard, n’osant la contempler plus longtemps.
Il haïssait cette rumeur et n’avait jamais su qu’en faire. Entre les lignes de leurs confidences, Vaeranah lui avait fait comprendre que ces médisances étaient fondées et il avait depuis lors entendu que l’utiliser contre elle allait irrévocablement briser leur confiance. Gerold s’était levé et était parti sans attendre une quelconque riposte, l’abandonnant à son travail quotidien. Il ne savait pas pourquoi il avait dit ça. Pour la blesser sans doute. Pour se prouver que cette main posée sur la sienne n’avait aucune importance, ni hier, ni aujourd’hui, ni demain. Pourtant, toute cette hostilité latente lui demandait une énergie disproportionnée. Il n’avait jamais voulu que les choses deviennent ainsi entre eux. Elle lui avait frôlé la main et il l’avait ressenti comme une agression, puis tout avait dégénéré avec une étrange souplesse.
Il avait commencé par la moquer gentiment sur ce qu’elle détestait pendant les réunions du conseil restreint : « Mais elle n’est pas d’ici… elle ne connaît pas ces coutumes… » s’enfonçant dans de banals reproches sans fondement, mais qui faisaient tant plaisir à ses opposants. Parce qu’elle ne disait rien et qu’elle résistait avec son stoïcisme habituel, ou qu’elle se défendait sans fléchir avec davantage de mordant encore, les blâmes étaient devenus plus personnels. Ca le sauvait et il se laissait volontiers emporter dans cette figuration superficielle. A chaque fois, à la satisfaction venait se mêler la honte et la conscience que ce qu’avait dit sa bouche était né dans son esprit tels des montres contre-nature. Souvent, il suffisait d’un regard pour que son rictus s’évanouisse, pour qu’il comprenne que bientôt, ni sa position ni son pouvoir ne seraient en mesure de compenser la blessure faite à leur amitié s’il continuait à flirter avec la limite de sa patience. Alors, il l’affrontait et se redressait, prenant de l’importance sur la petite taille de l’Argentière, mais ne renchérissait jamais. Il la regardait seulement et après le plaisir du coup naissait la grimace vindicative du remord. Attitude interdite, impersonnelle, qui creusait en lui un fossé vertigineux d’impuissance et de colère envers lui-même.
« Contentez-vous des calculs Madame et laissez la diplomatie aux hommes… Votre entrée dans la pièce emmène avec vous un vent glacé, Madame… Ce n’est pas grave si vous ne comprenez pas cela, Madame. »
Il était parvenu à l’éviter, piteusement. Seul, il s’était laissé emporter par l’agitation qui s’était accumulée en lui durant ces quelques jours et qui lui avaient paru être une éternité. Toute la fatigue, la frustration, la colère, l’envie s’étaient manifestés sous un unique geste brutal et impétueux. L’inquiétude et l’impatience avaient rendu le mouvement sec, rude, à l’image de sa déception qui s’était faite agressive. Du mobilier s’était brisé ; il s’était vaguement blessé, ne s’en sentant que plus pitoyable encore. Il n’avait jamais voulu se comporter ainsi et compromettre cette étrange amitié qu’ils partageaient, et il ne comprenait pas comment il avait pu résumer son profond respect et admiration à cette antipathie. Pourtant, lorsqu’il la voyait, il avait envie de la blesser.
Comme toujours, elle était dans le petit bureau attenant à la salle des archives, plongée dans ses calculs, tortillant sa plume sur un tas de parchemins. Gerold la regardait dans l’ombre, profitant de son ignorance pour la contempler. Elle traçait d’un geste délicat ses chiffres et dans l’extase de la concentration, la pointe de sa langue se retroussait sur la commissure de ses lèvres et, sous le soleil, sa laiteuse chevelure semblait, à son tour, mimer le blanc reflet du papier. Sombre et incertain, il l’admirait admirer son humide chef-d’œuvre mathématique, ou écarter du revers du poignet une mèche glissée sur sa tempe, ou simplement se redresser en remuant ses graciles omoplates. La regarder était la sensation la plus douce, la plus puissante, la plus mystérieuse qu’il eût jamais éprouvé. Il aurait voulu s’attarder indéfiniment sur son portrait, sans regards désapprobateurs ou envenimés, qui étaient devenus leur lot quotidien, devenue cire immobile, dans un doucereux abandon, mais l’intense empourprement d’une oreille visible et la torpeur progressive qui s’emparait de l’agile plume indiquèrent seuls que Vaeranah percevait enfin l’insistance croissante de sa présence muette. Surpris, Gerold s’avança alors et baissa la tête en guise de salutations à l’instant où elle lui décochait un regard humide. De moins en moins, il s’accommodait de l’ignominie et de l’ambiguïté de sa conduite et avait besoin de savoir si malgré tout, il pouvait encore revenir dans ses grâces sans le concours d’un jeu de pouvoir entre Main du Roi et Argentière. Fier, il rechignait à s’excuser ou à reconnaître son tort, qu’il connaissait pourtant for bien, préférant se draper d’une suffisance sordide, comme si tout lui était dû. Cette fois pourtant, il affichait une mine réservée et hésitante tant son jugement était incertain.
« Lady Antaryon... »

Vaeranah Antaryon
L'étoile de l'Est

Vaeranah Antaryon

Informations
Revealing the unseen. 23b20d1207906254df529b403c226302646c332e
Ft : Emma d'Arcy
Multi-Compte : m. targaryen, a. caron, t. greyjoy, r. royce, b. nerbosc, d. pommingham, r. baratheon, h. swyft & h. karstark
Messages : 514
Date d'inscription : 24/01/2023
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
Multicompte
25e RP


   
# 
Revealing the unseen
Vaeranah & @Gerold Grafton

I stand in front of my window and imagine myself a fearless knight, imagine myself a witch who hid her heart in her finger and then chopped her finger off.



Il n'y avait rien de pire que le sentiment de trahison et Vaeranah avait la désagréable impression qu'elle n'aurait pas pu en prendre conscience plus durement qu'elle ne le faisait depuis quelques semaines. Elle qui avait toujours été prompte au travail, à se perdre corps et âme dans ce qui donnait du sens à son existence, peinait à se lever le matin, toujours au lit lorsqu'une servante venait l'aider à se préparer pour la journée. Quoi qu'éveillée aux mêmes heures, elle tentait de se noyer dans son oreiller, espérant qu'elle parviendrait, un jour, à en finir en s'étouffant seule dans sa rage autant que dans les plumes qui le composait. S'en suivait de longues et interminables journées où elle en serait presque venue à regretter d'avoir quitté Braavos avant qu'enfin elle ne puisse disparaitre dans les appartements qui lui avait été donné, échappant au monde, aux bruits de couloir et aux langues acérées. Serrant Visenya contre elle, elle s'évadait loin de ses pensées en lui tressant les cheveux ou en la regardant babiller des mots tantôt en langue commune, tantôt dans un braavien maladroit. Ce n'était qu'une fois la petite endormie, seule avec Vaeron qu'elle laissait éclater sa rage et sa frustration, brisant son masque d'indifférence en face de la seule personne qui, jamais, ne la jugerait, du seul être capable de la comprendre. Nombreux étaient ceux dont les oreilles devaient siffler une fois la nuit tombée mais nul ne devait autant en souffrir que le seigneur des lieux, suzerain du Val et Main du Roi. Elle se moquait bien que les lavandières se gaussent de sa situation peu commune, que les domestiques s'interrogent sur la paternité de sa fille, ou même que quelques membres de la nouvelle cour du Val braquent sur elle un regard aussi puritain qu'hypocrite. En les regardant, Vaeranah avait au moins autant de méprit pour eux qu'ils lui en témoignaient : il était bien facile de rire, de murmurer et de se fondre dans la masse, mais la plupart étaient pétris de vices bien plus condamnables que les siens. Combien avaient des bâtards dont ils ignoraient tout ? Combien payaient pour taire leurs vilains petits secrets, leurs préférences inavouables ou le simple besoin de fuir ce que la vie leur avait donné ?

Non, Vaeranah ne souffrait pas des chuchotements, sauf quand ils venaient de Lui. En trois années, il n'avait jamais donné l'impression d'appartenir à la masse ignare qui gravitait dans la cité et elle avait eut la sottise de penser que les longues heures passer à travailler ensemble, à parler et à oeuvrer de concert les avaient assez rapproché pour qu'elle puisse le qualifier d'ami. Elle repassait souvent dans sa tête la manière dont les choses s'étaient déroulés entre eux, cherchant le moment où elle s'était fourvoyée ou celui où elle aurait mérité sa soudaine cruauté. Mais il lui semblait que cela était venu sans prévenir, comme ces artistes de théâtre qui, une fois la représentation terminée, quittaient perruques, costumes et personnages pour retrouver leurs véritables personnalité. De toute évidence, être un sale con était la véritable personnalité de Gerold Grafton, et elle s'en voulait de ne pas l'avoir comprit plus tôt. Pourquoi s'était-elle autant méfiée de son prédécesseur, désormais Maître des Chuchoteurs, et de l'influence qu'il pouvait chercher à gagner auprès de la jeune reine et pas de l'hôte aux paroles mielleuses qui cherchait visiblement comme tout un chacun à tirer au mieux son épingle du jeu. Elle l'avait, de toute évidence, sur-estimé, bercée d'illusion lorsqu'il lui avait été d'une aide plus secourable en lui apprenant ce qu'elle ignorait ou en acceptant de se faire le messager d'un billet pour Vaeron en pleine conquête du Val.  Comment avait-elle pu rire de leurs yeux de jeunes parents fatigués ?  Comment avait-elle pu s'intéresser à sa personne autrement que comme le simple collègue qu'il était ? Comment avait-elle pu l'autoriser à en apprendre assez sur elle pour déverser, aujourd'hui, son venin comme le commun de courtisans à l'humour douteux ? Par chance, et sans doute l'unique raison pour laquelle elle tolérait ce genre de comportement, la tête couronnée qu'elle servait ne semblait que peu s'intéresser aux petites chamailleries des membre de son conseil. Mais si elle avait rapidement comprit que sa présence permettait d'équilibrer les pouvoirs entre les deux plus proches conseillers du Targaryen, elle ne s'était pas attendue à ce que ce soit elle et celui qui avait été son plus proche allié qui animent les conseils de leurs désaccord perpétuels. Si Vaeranah se permettait de répliquer, elle tachait de se maitriser autant que possible, se rappelant que contrairement aux hommes autour de la table, elle était l'étrangère, la personne la plus simple à renvoyer de cette pièce. Alors elle se contentait de braquer sur lui son regard hétérochrome, gardant la froideur qui la caractérisait tant ne s'esquiver que pour répliquer avec plus ou moins de cynisme.

Son sang bouillonnait toujours lorsque la séance du conseil avait prit fin ce jour là, son esprit ressassant la remarque graveleuse dont il l'avait gratifié un peu plus tôt. Remarque qui prenait ses sources dans les demi-confidences qu'elle avait pu lui faire un soir lointain, des sous-entendu qu'il avait visiblement bien comprit et qu'il retournait contre elle. Aussi décevant que cela devenait lassant, elle entendait encore sa voix lui siffler le vilain petit secret qui lui rappelait combien la conception de Visenya était inavouable en ces lieux, en cette époque, auprès de ces gens. Mais elle avait laisse l'attaque glissé sur elle, du moins en apparence, tandis que commençait la séance. Elle aurait voulu répondre. Elle aurai voulu lui dire qu'il savait manifestement de quoi il parlait puisque de toute évidence Lady Catelyn n'avait donné naissance à d'autres enfants depuis la petite Joane Grafton. Mais elle s'était tue, trouvant bien cruel de plaisanter sur la douleur d'une mère endeuillée pour se venger des mesquinerie de son mari et ne pouvant se résoudre à se rabaisser à de telles moqueries. Aussi se contenta-t-elle, une fois Viserys parti et la salle du conseil de vidant, de se retourner vers lui avant de quitter la pièce à son tour. « J'espère que votre femme vous ouvrira sa porte ce soir, Lord Gerold. » lui avait-elle dit avec un sourire qui portait en lui tout son sarcasme. « Pour que vous en soyez réduit à commenter ce qui pourrait se passer entre mes draps, c'est que vous en avez bien besoin. » Elle était restée une demi-seconde, admirant son oeuvre avant de rejoindre ses appartement, jugeant que la meilleure des défenses, dans ce cas précis, était la fuite.

Finalement, il n'y avait pas d'endroit où elle se sentait plus à l'aise que dans la solitude de son travail, lorsque ses pensées se mettaient au service de quelque chose de plus grand qu'elle, de plus utilise que de ruminer les injustices des relations sociales. Que ce soit son père, Vaeron ou même Gerold Grafton, laisser quelqu'un s'approcher, c'était lui donner la possibilité de la blesser à l'envie et si elle ne pouvait se soustraire aux plans de son géniteur, elle pouvait échapper à la mauvaise humeur du seigneur de Goëville s'il lui plaisait. Dans ses calculs, dans ses projections, nul ne pouvait l'atteindre, la laissant maitresse absolue d'un environnement dont elle contrôlait les lois et les variables. Les chiffres ne mentaient pas, ils ne la décevaient jamais. Grattant le parchemin du bout de sa plume, elle s'était plongée dans des statistiques quant aux richesses qu'ils pourraient tirer de l'accord de Repose, signé quelques lunes auparavant. Puisqu'il fallait mettre en place une administration spécifique, il fallait envisager de nouvelles sources de financement, le tout sans toucher aux taxes et impôts déjà en vigueur mais sans dépendre totalement des fonds alloués par la Banque. Vaeranah eut un sourire en coin, quelle ironie d'avoir tant travaillé à enrichir la banque de Braavos pour finalement oeuvrer à s'en échapper aussi vite que possible. Elle manqua de sursauter lorsque la voix de son visiteur plus que malvenu l'arracha à son évaluation d'un juste prix pour les services de la nouvelle administration. « Lord Grafton. » dit-elle sans même lever les yeux de son parchemin. Le voir risquait de raviver la hargne qu'elle avait contre lui, ou bien au contraire de réveiller ce qu'elle s'efforçait d'enfouir depuis qu'elle avait constaté combien ses paroles, en particulier, la blessait. En outre, elle n'était pas certaine de s'habituer un jour aux Lords et Ladies, aux titres honorifiques qui semblait être la base de tout langage sur ce continent. Elle en appréciait la politesse, l'inhérent respect et la dignité attendue, mais encore aux prises de sa propres images, elle peinait à se sentir en adéquation avec l'appellation. Si Braavos avait eut un système hiérarchique semblable, on lui aurait sans doute donné du Lady depuis sa naissance, si ce n'était plus depuis que son père était devenu de plus éminent braavien de la cité. Mais sans titre, ni terre, elle ne valait pas mieux qu'une bourgeoise ici bas et elle n'avait pas besoin que l'on ajoute cette tare à la longue liste des qualificatifs peu valorisants qui la concernait. Après un instant, elle songea qu'elle ne pouvait pas éternellement rester les yeux rivés sur l'encre qui parsemait le papier. Le regard du valois pesait sur son être et elle ne parvenait plus à formuler quoi que ce soit de tangible dans son esprit. Elle reposa alors la plume pour se tourner légèrement vers lui. « En quoi puis-je vous aider, mon seigneur Main ? Mais je vous en prie, parlez avec des mots simples, je ne suis qu'une femme après tout, mon esprit est très ... Limité. » Le reproche était audible et bien qu'elle tentait de garder, autant que possible, contenance, la simple idée qu'il ait pu mettre en doute ses capacités suffisait à raviver la blessure tant dans l'égo que dans la confiance qu'elle avait pu lui donner. Et pourtant, il était là et elle ne parvenait à comprendre pourquoi. Pourquoi se priver de son public si enthousiaste face à tant d'humour ? Pourquoi venir la voir alors qu'il avait sans doute un milliard de choses incroyables et importantes à faire et un milliard de personnes pour l'encenser ? Blessure et colère brillaient dans le regard bleu et violet de la jeune femme, attendant de savoir si la visible détestation qu'elle lui inspirait allait franchir un nouveau stade.

:copyright:️crack in time



┗ DAUGHTER OF THE SEA ┛
People think that intimacy is about sex. But intimacy is about truth. When you realize you can tell someone your truth, when you can show yourself to them, when you stand in front of them bare and their response is 'you're safe with me'- that's intimacy..
Gerold Grafton
Staff

Gerold Grafton

Informations
Revealing the unseen. Tumblr_n3z9pivxjx1qej1qro2_250
Ft : Blake Ritson
Messages : 1189
Date d'inscription : 03/03/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
1000 messages
L'incarnation
100e RP
Time Traveler


   
online
# 
Depuis la caresse aussi fatidique que fugitive, il leur suffisait de se regarder pour immédiatement dégainer, se tenant toujours prêts à se battre. L’air s’électrisait, se chargeait en énergie venimeuse et picotait les lèvres. La pression épaissie bourdonnait aux oreilles tel un essaim, les laissant nager dans cet aquarium de purée de pois. Même lorsque Gerold n’y songeait pas, il y songeait quand même. C’était toujours la même chose : pour ne pas y songer, il fallait songer à ne pas songer, ce qui était une boucle infernale vouée à la frustration. Quel que fut le sujet, la kyrielle de pensées qui se pressaient à la porte de son esprit, ce vagabondage revenait inexorablement à Elle. Et pourtant, il lui suffisait de se trouver dans la même pièce qu’elle pour transpirer le mépris. Le fourmillement se propageait jusqu’à la pulpe de ses doigts où il pouvait sentir battre son cœur.
Dans sa vindicative beauté, elle balayait toujours d’une parole sèche tous ses remords et faisait bouillir en lui l’esprit de la provocation. Plus il la voyait se décomposer, lutter contre ses coups de chaleur, plus il jubilait de pouvoir autant l’atteindre. Un pouvoir qu’il regrettait presque instantanément, et toujours trop tard, sans avoir appris la leçon de cette déconvenue. Gerold savait qu’elle ne méritait pas son venin et qu’il détruisait méthodiquement plusieurs années d’une sympathie commune sans cesse réinventée. Il avait atteint avec elle un degré d’intimité que seul Marq était parvenu à égaler. Mais lui, il ne l’avait jamais torturé de la sorte.
Son ton, plus froid que la glace elle-même, tranchait avec la pâleur chatoyante aux mille nuances qu’offrait sa chevelue, dans laquelle s’amusaient les rayons du soleil. Le contraste était saisissant. Ses yeux vairons d’une clarté sans égale lui envoyaient de redoutables éclairs, et stupidement, il s’en sentit blessé à son tour, ne souhaitant rien lui concéder. Les convenances demeuraient, épuisantes et hypocrites alors qu’ils se déchiraient derrière un écran de politesse depuis des semaines. Et tout était une bonne raison de s’offusquer. Entre le titre de « Seigneur Main » inutilement pompeux entre eux, et qui creusait cette insupportable distance dont Gerold était le premier et seul instigateur, le miroir de ses propos quant à la simplicité de son esprit féminin, alors qu’il n’en pensait pas un seul mot, puis le ton doucement narquois. Ses yeux sombres se mirent à vibrer et sa bouche se serra : au fond de lui, malgré la blessure, il adorait cette estocade qui lui prouvait qu’elle ne lui était pas indifférente malgré toutes ses navrantes cruautés. Mais parce qu’elle répondait, Gerold se sentait légitime de frapper plus fort dans une escalade qui n’avait de fin que leur orgueil. Ostensiblement, il s’avança, souverain dans sa demeure jusqu’à ce bureau où elle avait l’habitude de travailler et prit place de l’autre côté de la table avec une lenteur étudiée et une voix doucereuse qui ne lui ressemblait guère.  
« Vous comprendre moi, si moi parler doucement ? Articula-t-il après un regard circonspect. Moi garder pronoms et verbes, comme ça vous pouvoir comprendre sans problèmes. »
Imperceptible, la commissure ses lèvres s’étira en un sourire moqueur. Il n’avait jamais craint ni l’escalade, ni l’absurde et l'angoisse de l’offense ne faisait concurrence qu’à son désir d’avoir le dernier mot. Ce n’était presque pas méchant : elle avait toujours eu toute son estime et il s’était déjà surpris à penser qu’elle était l’une des femmes les plus intelligentes de son entourage, si ce n’est l’une des personnes les plus intelligentes, genres confondus. La plupart du temps, ses doucereuses insultes se bornaient à la banalité d’a priori insipides, mais pour leur donner de la substance et dans un trait d’esprit, il y cousait une remarque profondément personnelle pour l'atteindre lorsqu'elle ne s'y attendait plus. Comme toute femme à l’éclatante beauté, refusant de se faire réduire à la fonction de selon sexe, Vaeranah craignait de n’être toujours considérée que pour ses qualités physiques et Gerold savait user de cette appréhension parfaitement réelle.  
« Sa seigneurie la Main, reprit-il avec nonchalance, ayant considéré que moquer son intelligence avait suffi, est venue vous demander si vous aviez terminé le budget prévisionnel pour l’année prochaine ? »  
Un fieffé mensonge qu’il avait inventé à l’instant, parce qu’il n’était venu pour rien, pour aucune autre raison que de l’affronter encore jusqu’à sa propre défaite. Gerold se laissa aller contre le dossier de son fauteuil, contemplant avec un courage renouvelé la fatigue fougueuse des yeux hétérogènes. Aujourd’hui, il se rattachait à ces sarcasmes à défaut de mieux, à défaut de rien. Il préférait s’épuiser en injures et blessures plutôt que de ne pas lui parler du tout. Il ne savait plus comment faire marche arrière, et n’était pas certain de le pouvoir. Son orgueil avait en horreur cette amitié trop confiante, dans laquelle il avait eu peur de s’abîmer à force de confidences, alors que le mépris était un feu sans fin qui ne laissait pas dormir. Et dès que les braises cessaient de crépiter, il se sentait obligé de souffler dessus pour raviver la flemme de leur colère mutuelle qui leur allait si bien. Vaeranah lui avait révélé des supplices que son amour-propre et son égocentrisme ne lui avaient jamais laissé prévoir dans son passé d’impassibilité. Si elle l’avait vraiment détesté, envers et contre tout, elle ne serait pas là, elle ne lui répondrait pas, ne le gratifiant que de son ignorance. Or, elle le brûlait de son regard, le foudroyait, mais continuait à le regarder néanmoins et c'était tout ce qu'il espérait.
« Mais bon, vous êtes peut-être trop occupée ...à courber votre arbre généalogique jusqu'à ce qu'il ressemble à un cercle, à fantasmer sur ma vie conjugale ? »  Susurra-t-il, l'œil gélatineux.
Il eut l'impression de donner le bâton pour se faire battre, mais peut-être le faisait-il exprès au fond, donnant des cartouches à l'Argentière pour que jamais ne cesse le combat, sans se soucier de le voir aller trop loin car rien ne semblait être jamais assez. Inconsciemment, il voulait qu'elle lui parle de son frère par mimétisme pour le renier plutôt que de concrétiser cette rumeur avec laquelle aucun homme ne pourrait jamais rivaliser.  
« Je suis navré que ce but vous soit si inatteignable qu'il vous faille vous venger sur le mien » dit-il sur le ton du regret compatissant.

Jamais aucune justification, que des attaques. Il paraissait calme et contenu mais déjà, ses narines palpitaient. Il voyait rouge. Va savoir si cela se remarquait bien tant ses yeux étaient deux trous noirs sans fond ni lumière. Si elle était encore éprise de son frère, un mariage d'amour leur était impossible et les condamnait soit au suspicieux célibat, soit à une union arrangée. Si elle en souffrait, cette vérité-là était peut-être définitive et irrévocable. Si c'était le cas, pourquoi cette amitié, cette profonde confiance ? Gerold se crispa légèrement sur son fauteuil, appréhendant la rengaine, et pourtant, il demeura poliment intéressé, comme si ce destin lui importait véritablement et que tout cela n'était rien d'autre qu'une considération amicale.
Vaeranah Antaryon
L'étoile de l'Est

Vaeranah Antaryon

Informations
Revealing the unseen. 23b20d1207906254df529b403c226302646c332e
Ft : Emma d'Arcy
Multi-Compte : m. targaryen, a. caron, t. greyjoy, r. royce, b. nerbosc, d. pommingham, r. baratheon, h. swyft & h. karstark
Messages : 514
Date d'inscription : 24/01/2023
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
Multicompte
25e RP


   
# 
Revealing the unseen
Vaeranah & @Gerold Grafton

I stand in front of my window and imagine myself a fearless knight, imagine myself a witch who hid her heart in her finger and then chopped her finger off.



Un sourcil blanc se leva face à la piètre moquerie qu'il lui servait. Il n'y avait plus rien de la charmante personne qui avait devancé son arrivée ou de l'homme brillant qu'elle avait longuement observé lors de leurs sessions de travail. Face à une telle prestation, la colère laissa place à une lassitude ennuyée et ce fut non sans audace qu'elle se permit un soupire plein de déception. « Félicitation, Lord Gerold, vous venez de réussir à me prouver que passé un certain âge l'intellect des hommes régresse ... » répliqua-t-elle d'un ton placide, considérant qu'il se ridiculisait tout seul avec cette attitude qui ne parvenait, en rien à la toucher. Libre à lui de passer pour un idiot, elle n'allait pas exprimer de compassion alors qu'elle le savait bien en dessous de ses capacités. Il du s'en rendre compte de lui même, changeant soudainement d'attitude. Les yeux de la trentenaire se plissèrent en le voyant prendre ses aises, s'étonnant presque du possible sérieux de la requête avant qu'immanquablement il ne relance les hostilités. « Me venger ? »  répéta-t-elle incrédule, l'ombre d'un rire sombre dans la gorge. De quoi pourrait-elle bien vouloir se venger ? Du fait qu'il soit marié et elle non ? Cela lui semblait-il si improbable qu'une femme aspire à d'autres choses qu'à devenir le faire-valoir de son mari et à lui pondre une ribambelle d'héritier qu'il imaginait qu'elle jalouse toutes les femmes de cette cité ? Néanmoins son coeur se serra tandis qu'il relevait, sans le vouloir, un complexe enfoui si profondément ans son âme qu'elle l'avait oublié : elle était ce que ses parents, ce que l'entièreté de sa famille avait fait d'elle, l'isolant involontairement dans sa forteresse intérieure sans imaginer qu'elle puisse un jour en souffrir. A plusieurs reprises son père avait refusé des propositions de mariage, l'encourageant dans la voie de la carrière économique, sous-entendant que le simple rôle de tenue d'une maison n'était pas assez bien pour elle afin de mieux profiter de ses talents. Elle ne l'avait compris que trop tard : elle serait fille, soeur, banquière, prodige ou membre d'un conseil, mais elle ne serait jamais l'épouse. Trop indépendante pour être obéissante, trop intelligente pour être soumise, mère célibataire et sans doute désormais trop âgée pour éveiller l'intérêt de veuf prompt à se remarier. Ses amours s'accompagneraient à jamais d'une clandestinité pudique, sa solitude serait la seule compagne sur laquelle compter et elle n'était pas assez folle pour ignorer que cela finirait par la faire souffrir. « Vous dites toujours des choses si désagréables ... » souffla-t-elle en s'enfonçant un peu plus dans sa chaise dans un geste inconscient de replis. Trois années auparavant, la pique aurait sans doute raté sa cible face à une Vaeranah qui ne connaissait rien que la logique implacable des mathématiques. Mais sortir de sa prison dorée avait été comme ouvrir une fenêtre fermée depuis trop longtemps, une fenêtre sur la vie et ses plaisirs, les amitiés et les amours, sur les déceptions et les coup de couteau dans le dos. Trois ans plus tôt, il n'aurait reçu aucune réaction, et à présent, elle se voyait tourmentée par une vérité bien plus cruelle qu'il ne pourrait jamais l'être : il n'y avait jamais eut que deux hommes qui étaient parvenus à susciter son intérêt et c'était deux hommes qu'elle ne pourrait jamais avoir. L'un partageait son sang et l'autre se trouvait face à elle, profitant de la brèche qu'elle avait ouvert dans son armure d'indifférence pour s'insinuer dans son esprit et la tourmenter depuis des semaines.

Après la stupeur et les premières traces de la tristesse revint la colère. C'était la seule arme qu'elle avait en ce bas monde, la flamme qui l'alimentait, lui donnait la possibilité de se défendre à défaut de pouvoir renvoyer au fond de son esprit, ce qu'elle avait si durement cherché à garder loin de toute compréhension. Tout était de sa faute, elle s'en sortait parfaitement bien avant qu'il décide de se comporter comme le dernier des imbéciles, crachant sur un partenariat des plus profitables pour eux deux, et dont elle aurait su se satisfaire, pour soudainement rallier le camp des moralisateurs. Et ils en étaient arrivés là. Les agréables pensées parasites qui la surprenaient à apprécier l'élégance de son écriture, le choix de ses mots ou la simple beauté de ses mains s'étaient muée en une détestation progressive tandis que, malgré toutes les horreurs dont il la gratifiait à longueur de journée, elle continuait de se sentir aussi incroyablement sensible à sa présence. « Lorsque le trop plein de virilité mal placée qui vous étouffe et vous empêche de réfléchir sera retourné là où il doit être ... Peut être pourrons nous alors avoir une véritable discussion sur les budgets. » siffla-t-elle avec agacement. Sans le quitter des yeux, la braaviene tira abruptement un tiroir, sortant un porte document qu'elle jeta sans grand ménagement sur le bureau. S'attaquer personnellement était une chose mais il était des sujets avec lesquels elle n'avaient aucune patience et la légitimité de sa place, le sérieux de son travail en était une. « Que vous l'acceptiez ou non, je connais ma propre valeur et je sais que je suis douée mais je ne fais pas de miracle. L'année vient de commencer, toutes les projections que je pourrais vous soumettre seront égales aux dernières que j'ai présenté au Conseil et elles ne peuvent inclurent les facteurs sur lesquels je n'ai pas la main : la météo se moque bien des estimations, si les récoltes sont mauvaises, cela fera moins d'argent et moins d'argent nécessitera de resserrer les cordons de la bourse. » Et comme à chaque fois qu'elle parlait travail, sa voix s'apaisait. Qu'il était bon de savoir que seul les faits comptaient et que, qu'importe ce qu'il pourrait avoir à répliquer, aucun calcul à l'heure actuelle ne saurait changer les prévisions stupides qu'il lui demandait. Elle aurait pu parler de ce qui avait accaparé son esprit avant son intrusion dans cet espace où, jusqu'à récemment, elle se sentait en sécurité. Il y a quelques semaines, elle l'aurait fait, guettant son avis, écoutant ses arguments afin de présenter la meilleure version de son idées au conseil. A présent, elle ne pouvait se reposer que sur elle même. « Bien sur, la Banque pourrait proposer un nouvel apport mais il me plairait de nous éloigner autant que possible de l'idée d'accroitre notre dette ... » Ses yeux sur le papier, Vaeranah en avait presque oublié à qui elle parlait et pourquoi. Son esprit fourmillait des arguments la poussant à vouloir se détacher du prêt de la banque, indépendamment de son interlocuteur. Les vieilles habitudes ... songea-t-elle tandis que, remontant le regard sur lui, elle en prit conscience.

L'orgueil piqué au vif s'était apaisé mais les blessures de l'égo étaient toujours présentes. Bien qu'un peu plus calme, Vaeranah tapota les papiers étalés devant elle, appuyant son menton contre la paume de sa main libre. « Voyez ? J'ai le temps de faire mon travail et plus encore car je n'en perds pas à médire sur mes voisins comme une vieille commère de fond de taverne. » Peut être mettait-elle encore de l'huile sur le feu mais cela n'avait pas d'importance. Il y avait bien des manières de briser une relation et si tel était son projet, elle voulait lui faire entendre qu'elle l'avait bien comprit et qu'il pouvait cesser de la chercher perpétuellement. Ce n'était pas une attitude surprenante, si l'on omettait qu'en en devenant la cible elle en constatait les effets sur ses sentiments, mais c'était sans doute la meilleure façon de repousser quelqu'un. La question était pourquoi. Pourquoi avait-il besoin de se montrer aussi odieux alors qu'il lui suffisait juste de l'ignorer ? Elle soupira tout en reposant son dos contre le dossier de sa chaise. « Puisque, de toute évidence, je vous révolte, puis-je vous conseiller de vous concentrer sur ce merveilleux mariage dont vous me rabattez les oreilles et de me laisser faire mon travail en paix ? » Qu'il le veuille ou non, elle resterait ici car si elle avait finit par rejoindre la cause, elle était d'abord, et avant tout, venue pour représenter la banque. Sans la banque, le jeune royaume se retrouverait en grande difficulté. Sans la banque, il serait difficile de riposter à d'éventuelles attaques. Sans la banque, elle ne donnait pas cher de l'avenir. « Que vous vous sentiez en danger est une chose, mais je vous rassure, Lord Gerold, mais je n'ai jamais été votre ennemie ... » Les rivalités au sein des proches du roi étaient choses communes mais plus son coeur se délitait face à ses attaques et plus elle s'interrogeait sur son avenir. C'était Vaeron qu'on avait chargé de fonder une branche en Westeros après tout, si elle parvenait à amener Viserys Targaryen sur le trône de fer, elle recevrait sans doute un siège parmi les pontes de la Banque et l'assurance d'une belle vie à Braavos. « Maintenant, si vous craignez pour votre vertu ... Je vous rassure, j'ai assez de contrôle sur moi même pour savoir me contenir. » Elle aurait voulu y mettre plus de cynisme et de moquerie, poser sur lui la même mine pleine de dédain et arborer un sourire provocateur, mais elle commençait à être fatigué de leurs petites joutes stériles.


:copyright:️crack in time



┗ DAUGHTER OF THE SEA ┛
People think that intimacy is about sex. But intimacy is about truth. When you realize you can tell someone your truth, when you can show yourself to them, when you stand in front of them bare and their response is 'you're safe with me'- that's intimacy..
Gerold Grafton
Staff

Gerold Grafton

Informations
Revealing the unseen. Tumblr_n3z9pivxjx1qej1qro2_250
Ft : Blake Ritson
Messages : 1189
Date d'inscription : 03/03/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
1000 messages
L'incarnation
100e RP
Time Traveler


   
online
# 
Elle l'insultait, et il s'en vexait avec un plaisir féroce. Sous un frisson d'orgueil et de haine, Gerold goûtait à la doucereuse provocation comme à une louange, négligeant que l'objet de sa délectation était un mal. Fallait-il donc être désespéré ou passablement cruel pour espérer retenir une affection en tentant sa patience jusqu'à la déchirure ? Il évoluait avec une prudence vaguement maladroite, souffrant sans cesse de perdre son vindicatif intérêt ou d'émousser définitivement sa patience. Toutes ces éventualités étaient insupportables et pourtant, un tel ballottement ne pouvait qu'avoir une fin tragique. La seule chose en son pouvoir était la texture du temps, qu'il déployait jusqu'à voir au travers. Peut-être allait-elle avoir assez de constance pour supporter tout cela. Etrangement, il ne se sentait que vaguement concerné par son langage, voyant dans ses offenses ennuyées le fil rouge de sa considération. Il préférait souffrir de sa cruauté, et de la sienne, que de n'avoir rien du tout.
Au fond de lui, il avait toujours su qu'aucune femme élevée selon les coutumes de son temps ne serait en mesure de lui convenir. Cela n'avait pas tant à voir avec les minauderies engoncées et le charme fardé de leurs visages, mais avec une intelligence sans cesse muselée par les impératifs du mariage. Gerold avait de l'orgueil, bien assez pour désirer avoir raison en dépit du sexe faible, mais il lui fallait, comme à tout objet en mouvement, une résistance contraire égale à la sienne. Un tempérament de feu et de flammes capable de soumettre le sien. Mais le prix à payer pour une telle égalité paraissait soudain trop élevé. Un prix qu'il avait déjà payé une fois et refusait d'en réitérer le tribut : celui de sa vulnérabilité.  
« Vous dites toujours des choses si désagréables ... » 
Bien plus que ses mots, ce fut son attitude qui le mit en garde. A patte de velours, il tint silence sans respirer, attendant de voir si les lacérations de ses griffes allaient faire fendre le tissu de sa contenance. Et après ? Il n'avait jamais songé à la fin logique d'une telle escalade qui, heureusement, avait trouvé son équilibre précaire entre moqueries et obligations. Néanmoins comme toute corde, celle de leur endurance allait un jour s'user jusqu'au dernier fil. Gerold avait l'impression trompeuse de pouvoir continuer cette valse épuisante indéfiniment, tant il chérissait aveuglément cette fervente aversion. Et parce que le but n'était pas tant d'achever que de continuer à courir en haletant, il cessait toujours son acharnement en sentant le rempart sur le point de céder. Et en même temps, il souffrait de la voir ainsi, défaite, désabusée et épuisée et aurait faibli bien avant s'il n'y avait pas eu ce regard pénétrant de femme pour le tenir en respect. Ses joues hautes, pâles et saillantes, scintillant d'argent, veloutées d'un duvet ras d'une suavité végétale, avaient tristement rougi, de même que sa bouche fraîche, toujours un peu fendillée par l'anxiété, comme un fruit mordu par l'ardeur du jour. Ils éprouvaient probablement un amer et identique contentement à distancier, dès les premiers mots de leurs entretiens, le lieu commun de la dispute et du mensonge. A nouveau, Vaeranah engageait sa foncière brutalité féminine, soulevée par la colère froide, et qui offensait tant le maître des lieux.  
Ses lèvres se serrèrent, sans la regarder, et tout son corps exprima, dans un mouvement léger, l'ironie et l'indépendance. Elle l'éblouit pourtant, un lui jetant au visage le rayon clair de ses yeux grand ouverts, dans un brusque et ferme regard. Elle ne possédait que son intelligence dans un monde qui la rabaissait pour sa beauté ou son sexe et Gerold savait à chaque fois qu'à interroger sa compétence, il faisait trembler la seule certitude en sa possession. De son travail pourtant, il n'avait cure. Il se vexait seulement de lui avoir laissé l'occasion de le trouver stupide. D'abord cynique, puis doucement renfrogné, il l'écouta lui faire la leçon sur ce qu'il savait déjà. Son ton apaisé par l'évidence l'irritait passablement ; non pas parce qu'elle avait raison, mais parce qu'elle était à nouveau calme et infranchissable d'avoir ainsi triomphé. Il détestait ces trêves, lorsqu'elle montrait un sang-froid supérieur. Les yeux du Grafton se plissèrent sous la menace, alors qu'elle mêlait dangereusement leurs disputes à la politique. Non, le Val n'allait pas commettre une erreur déjà commise par la Couronne en s'endettant davantage.  
« Voyez ? J'ai le temps de faire mon travail et plus encore car je n'en perds pas à médire sur mes voisins comme une vieille commère de fond de taverne.  
- Non bien sûr, vous êtes au-dessus de ça. Rien ne vous intéresse à part votre nombril et quelques muqueuses aux alentours, dit-il avec une nonchalance tout étudiée, singeant sa tranquillité acquise par le travail. Vous, votre affaire, ce n'est pas tant de relayer les ragots que de les créer. » 
Il ne savait pas pourquoi il avait dit cela. En d'autres circonstances, c'aurait été un compliment : l'Argentière était une femme extrêmement minutieuse, concentrée à sa tâche et inébranlable au labeur. Lui non plus, ne s'intéressait à l'accoutumée pas vraiment aux médisances, ou seulement pour s'en tenir informé, mais sans en faire sa lie. L'origine et la relation des Antaryon était un sujet encore plus banal que le passé judiciaire du Roi et pourtant, cette rumeur l'exaspérait terriblement.  
« Vous êtes une femme brillante dont le talent est sans cesse compromis par un douteux scandale » avait-il soudain sifflé en détournant les yeux, contrarié.   
Evidemment, il y avait toujours une tourbe sociétale pour s'attacher à autre chose que la compétence pure : au physique, à la beauté, la morale ou simplement le goût. C'était le refuge des gens niais, idéologues ou simplement manipulateurs. Dans une certaine mesure, tout dirigeant devait prêter oreille à ces voix faussement vertueuses, mais parfois véridiques, ne serait-ce que pour se prémunir d'excès dans son gouvernement. Des voix s'élevaient contre Vaeranah ; des voix s'élevaient contre chaque membre du conseil, chaque garde d'Emeraude, chaque servante et page. Viserys était assez sage pour ne pas y prêter attention tant que rien n'entamait ses affaires, et en temps normal, jusqu'à il y a peu, Gerold non plus n'en aurait pas fait grand cas. Encore, il voulait la blesser en se blessant soi-même, en lui reprochant par la réputation cet acte qui n'avait rien avoir avec leur travail commun. L'excuse était mince et même lui savait à quel point elle était précaire, mais Vaeranah, elle, à l'esprit par moment si incertain, ne pouvait pas le savoir. Elle ne pouvait pas savoir que la Main s'en inquiétait pour des raisons personnelles. Par son statut, l'Argentière avait déjà été suffisamment rejetée par la vie et ne pouvait décemment pas rationaliser un reproche supplémentaire.  
Lorsqu'elle baissa les bras et conclut enfin à son antipathie évidente, qu'il avait si soigneusement illustrée plusieurs semaines durant, Gerold la dévisagea brusquement avec ce malaise de l'Etrange, que les élucubrations du délire ou de l'ébriété inspirent à qui les écoute. Mais elle était parfaitement sérieuse. Gerold avait arrêté son écoute à la première partie de sa déclaration, laissant la suite s'oublier dans les méandres de sa confusion. Le révolter ?
« Vous ne me révoltez pas. » répondit-il avec une précipitation réservée, alors que la pudeur nerveuse blanchissait ses lèvres étroites.
Cette vérité là, franche de spontanéité, paraissait être plus importante que n’importe quel élan d’orgueil, mais immédiatement Gerold regretta de l’avoir dit à cause de ce que cela impliquait pour son honneur, sa droiture et son impartialité. Mais surtout, cela rendait complètement absurde ses incessantes attaques. Malgré sa confusion, ses pensées se mirent à errer sans but au milieu d’un dédale obscure, ne parvenant à s’attacher à rien d’autre que cette aveu murmuré du bout des lèvres dans un silence complaisant. Pendant un moment, l’univers lui parut bourdonner à ses oreilles tel un gigantesque et chaotique essaim : le chant des oiseaux derrière la fenêtre était si riche, si sonore ! Le sifflement du vent dans la vieille pierre si flûté et le craquement du parquet sous leurs pieds intolérablement ample. Mais bien vite, le silence revint, sourd et abrutissant. Il ne la regardait plus après l’avoir fixée si intensément, et de toute façon, l’Argentière n’était pas disposée à lui laisser la bénédiction ou la condamnation d’une longue pause – ou peut-être n’avait-elle simplement rien entendu ? – et s’attacha à le brusquer davantage, car sa confession abrupte avait laissé une fêlure suffisante en son âme pour le rendre vulnérable. Il s’effeuilla de son audace comme un arbre d’automne et resta d’abord penaud, sentant une légère rougeur lui monter au front, jusqu’à sa dernière attaque qui l’empourpra pour de bon.
Par instinct, il voulut protester de tout son être, mais n’y parvint pas malgré ses frémissement tendus. Davantage encore parce qu’elle l’avait dit avec tant de désinvolture ! Plus elle se moquait de lui, plus il se sentait mortifié. Il tenta de la considérer avec la même indifférence lasse, mais n’y parvint pas et se haït pour cette faiblesse facile. Très lentement et avec une lucidité étrange, Gerold songea qu’il se sentait en danger pour des raisons peu avouables et que son alliée était tout autant son ennemie, car à chaque instant, elle mettait en péril son intégrité si difficilement acquise. Puis, il réintégra doucement, âme et corps, la fureur lente à se calmer qui le secouait par soubresauts depuis longtemps. Sourcils froncés, une tempête au fond du regard, il considéra Vaeranah de ses yeux sombres et la bouche entrouverte avec, sur le bout de la langue, des mots qui ne voulaient pas être dits. Il n’avait plus la force de nier ce qui s’était abruptement dévoilé à son esprit, seulement pour qu’il constate déjà tout savoir de ses propres mystères.
« Me sentir en danger ? S’offusqua-t-il sans conviction, mais avec un sursaut d’énergie. Ce n’est pas… ce n’est  pas... » bredouilla-t-il, incapable de poursuivre tant ce qu’il avait commencé était terrible.
Soudain, il se leva pour d’un seul mouvement couper ses hésitations, mais surtout, décharger l’excédent de nervosité qui tendait ses muscles comme un arc de chasse. Saisi d’horreur et de honte, Gerold fit quelques pas qui le menèrent nulle part, et certainement pas en direction de la porte. Puis, aussi brusquement qu’il s’était levé, il se retourna vers Vaeranah avec une étrange expression de défiance désemparée et lui demanda avec un élan de provocation :
« En quel honneur devrais-je me sentir en danger ou craindre pour ma vertu ? » se défendit-il, renonçant à justifier son comportement et ses espérances, et remettant plutôt en cause les intentions de l’Argentière.
Penché sur le bureau, les mains en étoile sur les dossiers éparpillés, ses narines frémissaient d’une colère impatiente. A ce sujet, il n’avait aucun espoir, et se défaire de ses illusions promettait d’être plus simple de la sorte, même si infiniment injuste. Si elle lui riait au visage, si elle se moquait définitivement de lui, peut-être que cesserait enfin cette insupportable et épuisante provocation. Peut-être qu’il arrêterait enfin de souffrir et reprendrait le cours tranquille de leur tranquille amitié.
Vaeranah Antaryon
L'étoile de l'Est

Vaeranah Antaryon

Informations
Revealing the unseen. 23b20d1207906254df529b403c226302646c332e
Ft : Emma d'Arcy
Multi-Compte : m. targaryen, a. caron, t. greyjoy, r. royce, b. nerbosc, d. pommingham, r. baratheon, h. swyft & h. karstark
Messages : 514
Date d'inscription : 24/01/2023
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
Multicompte
25e RP


   
# 
Revealing the unseen
Vaeranah & @Gerold Grafton

I stand in front of my window and imagine myself a fearless knight, imagine myself a witch who hid her heart in her finger and then chopped her finger off.



Qu'il devait être bon d'avoir l'ascendant sur tout le monde, songea Vaeranah. De part sa position d'homme, d'aîné et de seigneur, il n'avait certainement pas l'habitude de se remettre en question, siffla une petite voix à son oreille ou alors les prémices de la sénilité se faisait déjà sentir puisqu'il semblait oublier qu'il était à l'initiative de tout ceci. Elle soupira. « S'il vous plait de le penser. Il n'en demeure pas moins que vous êtes celui qui me poursuit à longueur de journée et vous avez l'audace de venir vous plaindre lorsqu'on vous oppose un peu de répondant. » Reprenant sa place, la braavienne se demandait si sa valeur en tant que Grande Argentière, représentante de la Banque de Fer et fille unique du Seigneur de la Mer, laquelle lui avait déjà permis d'étouffer une partie des questions sur la naissance de Visenya, la sauverait d'une éventuelle tentative de meurtre sur la personne de Gerold Grafton. Qu'il était agaçant avec ses accusations qui arrivaient trop tardivement pour qu'elles soient réellement l'objet de leur discorde. Qu'il était frustrant dans son absence de dialogue paradoxalement bavarde qui la poussait à toujours surenchérir. Ses yeux se plissèrent tandis qu'au compliment -le premier depuis bien longtemps- se substituait l'inévitable rappel à ses affections interdites. Qui de Vaeron ou de Visenya était le plus visé par la critique incessante, elle aurait bien été en peine de le savoir : la naissance d'un enfant étant l'évidente preuve que les deux Antaryon avaient partagé plus que des souvenirs d'enfance la veille du départ des hommes pour la conquête. Preuve dont il était le seul, à l'exception des concernés, à avoir la certitude puisqu'elle avait, bêtement, laissé sous-entendre que Vaeron était bien le père de sa fille. Elle n'avait attendu ni bénédiction, ni indignation, le jour où elle s'était laissé allée à cette pseudo-confidence. Elle était simplement épuisée. Tant par l'attention que demandait un nouveau-né que par le poids de ce secret qu'elle était la seule à assumer. Vaeranah savait que si elle avait partagé ses tourments avec son aîné, il y aurait trouvé une solution. Contre l'avis de tous, sans doute aurait-il proposé de l'épouser, rappelant de vieilles coutumes aujourd'hui oubliées de presque tous. Mais elle le connaissait assez pour savoir qu'il agissait bien trop souvent avant de réfléchir et que les conséquences d'un tel mariage aurait peut être apaisé les rumeurs sur leurs moeurs légères mais certainement pas sur tout le reste. En outre, un mariage demeurait, aux yeux de la jeune femme, le meilleur moyen de se voir supplantée par un homme et elle ne laisserait personne, pas même son propre frère, prendre sa place. « Mon douteux scandale ne semblait pas vous poser problème jusqu'à récemment. » rappela-t-elle avec cynisme, songeant aux lunes qui s'étaient déroulées sans que cela ne semble avoir d'incidence sur leur entente.  Elle ne doutait pas que son aveu ait suscité une forme de répulsion, d'indignation ou quoi que ce soit à son endroit mais au moins avait-il eut la présence d'esprit, ou la bienveillance, de ne rien lui en dire quoi qu'elle ignorait ce qu'elle pouvait considérer le concernant. Ses certitudes volaient en éclats et leur présent échange n'était pas pour corriger cette impression.

Aussi engagée qu'elle eut pu être dans leurs joutes verbales, Vaeranah arrivait à court de patience. Les piques se faisaient plus virulentes et plus douloureuses à mesure qu'elle prenait conscience de l'importance que son avis avait gagné dans ses préoccupations. Plus elle constatait qu'elle était sensible à ses remarques et plus ses dernières devenaient blessantes. Finalement, elle sentait qu'elle approchait son point de non retour, celui où elle devrait faire le choix entre sa fierté et ce qui bouillonnait en elle. Que ce soit par des larmes ou des mots qu'elle ne pourrait contrôler, elle savait que l'instant approchait : elle en voyait déjà les signes. Que pouvait-elle obtenir à se battre ainsi contre lui ? Et alors qu'elle laissait entrapercevoir les fissures qu'il avait infligé à son armure d'indifférence et de répartie -parfois douteuse elle le reconnaissait sans peine- elle remarqua que sa soudaine fragilité apparente ne semblait pas l'enchanter autant qu'elle l'aurait pensé. Pendant un instant, elle eut l'impression de voir le mépris déserter son regard et d'y retrouver celui à qui elle avait pu faire des confidences. Il n'y avait ni sourire victorieux, ni intonation provocante. Et alors que Vaeranah avait pensé que la colère et la peine teintant leur complicité passée, il n'y aurait rien pour réparer ce qui avait été brisé par des semaines de lutte acharnée et de mots malheureux, ces cinq mots parvenaient presque à lui faire oublier qu'elle avait eut envie de l'étouffer un peu plus tôt. Cependant, la confiance trahie qu'elle avait donné pour voir ses états d'âme ainsi jeter en pâture à la moquerie des autres, la déception d'avoir déjà été prise pour une idiote et l'épuisement avaient raison de ce qu'elle pensait voir. Il y avait trop de colère, trop de frustration, trop de choses qui pesait sur son coeur pour qu'elle s'arrête en si bon chemin.

Et, dans son emportement, il y eut le mot de trop.

Le mot qui lui rappelait qu'elle n'était pas la jeune femme qui était arrivée à Goëville quelques années plus tôt, imperméable à toute chose et à tout le monde. Sans doute un nouvel aveu, subtilement amené, que si contrôle il y avait besoin d'avoir, c'était sans doute parce que quelque chose nécessitait d'être refoulé. Que la faiblesse de ses désirs ne se limitaient pas aux cheveux blonds argentés comme il avait tant aimé l'en railler plus tôt dans la journée. Mortifiée par ses propres paroles, elle en venait presque à espérer le voir jouer l'incompréhension et en profiter pour lui rappeler le peu de morale qu'elle avait eut par le passé. Elle n'entendit par réellement ce qu'il lui répondit, sans doute trop surprise de le voir bondir à demi, s'appuyant sur le bureau pour se grandir, la forçant à lever les yeux pour garder le contact visuel tandis qu'il la dominait de toute sa taille. Quelque fut la technique d'intimidation, elle ne fit que s'ajouter à la propre honte qu'elle avait d'elle même. Et pourtant, même s'il était certain qu'il ne pourrait que se gargariser de la nouvelle carte qu'elle lui avait plus ou moins offert, elle ne parvenait à lâcher entièrement les armes, se révoltant encore et toujours du traitement qu'elle recevait quand on en laissait d'autre faire ce qui leur plaisait. « Vous ne semblez pas vous intéresser aux relations que tout ce brave petit monde semble avoir de ça, de là et pourtant, l'idée même que je puisse entretenir quelques rendez-vous secrets attire toute votre attention. » siffla-t-elle, comme si l'évidence de son constat suffisait à faire oublier la confession à demi-mot qu'elle avait manqué de faire. Car après tout n'était-ce pas le Maitre des Chuchoteurs qui avait été à la tête d'un vaste réseau de prostituées avant que les humeurs instables de Rhaegar Targaryen ne le pousse à chercher un employeur plus stable ? Pensait-il réellement qu'elle était naïve au point d'imaginer que chaque personne qui prenait place au sein du conseil avait été chaste jusqu'au jour de son mariage et n'entretenaient de relation charnelles qu'avec leurs épouses respectives ? Elle avait vu assez de dignitaire westerosi comme originaire d'Essos pour savoir qu'une fois le dos des épouses tourné, les maris s'empressaient de dilapider fortunes et honneur dans les maisons closes. Peut être que ce n'était pas son cas à lui mais elle n'était sans doute pas la plus grande débauchée de Goëville, de cela elle était certaine. « Je refuse de croire à votre petit numéro d'idiot puritain ce qui ne me laisse que peu d'explications possibles sur ce soudain revirement de comportement. » Ce fut à ce moment qu'elle remarqua qu'elle avait sans doute été trop loin pour faire marche arrière, qu'elle avait emmagasiné trop de colère pour simplement se permettre de se lever et de quitter la pièce avec le peu de dignité qu'il lui restait. Si elle ne voulait pas se risquer en conjecture et s'humilier davantage -après tout elle n'était pas une experte dans les relations humaines- elle jeta sur la table la pensée qui la tourmentait le plus, celle ne qui ne parvenait à trouver de réponse cohérente à ses yeux. « Je ne sais pas ce que vous aviez à gagner à faire alliance avec moi à mon arrivée pour finalement décider de faire cavalier seul mais soit, vous avez gagné, félicitations. » Sa voix partait dangereusement dans les aigües tandis que la trentaine d'années d'émotions refoulées décidait de se déverser d'un coup d'un seul sur lui. Ses propre mains claquèrent sur le bois du bureau tandis qu'elle rendait les armes d'un combat qu'elle ne gagnerait jamais, ne lui laissant qu'une seule chance de sauver ce qui pouvait l'être : le peu de crédibilité professionnelle qu'il lui restait. « Maintenant, comprenez une chose : je ne quitterai pas Westeros tant que Viserys Targaryen ne sera pas installé sur ce foutu siège de métal et que mon frère n'aura pas obtenu ce qu'il était venu chercher au nom d'une alliance qui nous unis tous. D'ici là, je resterai au poste qui m'a été assigné car c'est mon travail. » Dans son monologue, Vaenraha avait repoussé la chaise pour se lever à son tour, les mains toujours fermement posée sur la table qui les séparait. Il avait peut être gagné sur le plan personnel, mais elle demeurait un membre important de ce petit royaume : le troisième pouvoir, lui avait un jour glissé le roi, la balance qui assurait la stabilité entre deux forces d'importance de son conseil. Elle ne pouvait se permettre de perdre cela, elle ne pouvait se permettre de le laisser la prendre de haut. « Alors si tout ceci a pour but de me faire prendre le premier bateau pour Braavos, prenez votre mal en patience et oeuvrez pour que notre objectif commun se réalise le plus vite possible : arrêtez de me mettre des bâtons dans les roues. » C'était tout ce à quoi elle pouvait aspirer, songea-t-elle. Jamais elle ne pourrait espérer plus de la part de Westeros ou de Viserys. Comme il le lui répétait si bien, elle s'était sabordée toute seule en donnant naissance à Visenya. Quel homme s'intéresserait à elle maintenant que le fantôme de sa soit disant immoralité flottait au dessus de son existence ? Certainement pas un qui parviendrait à attirer son attention, songea-t-elle, amère et s'il voulait la faire partir, alors que pouvait-elle faire de plus ? Au moins proposait-elle une certaine temporalité, une finalité après laquelle ils n'auraient plus à se battre comme ils le faisaient. Et se battre pour quoi après tout ? Elle ne désirait pas être plus que la Grande Argentière, elle n'aspirait pas à un titre ou une richesse, rien au sujet duquel la Main du Roi aurait eut à se sentir lésée. Elle ne se mêlait pas d'avantage de l'alliance entre Braavos et le tout jeune royaume : c'était à Vaeron de s'intégrer et d'obtenir ce qu'il désirait. Alors pourquoi ? Pourquoi la poursuivre de tant de détestation et d'attention ? Et elle se tut, son regard le quittant pour fixer le bureau dans un silence qui bourdonna à ses oreilles. « S'il s'agit d'autre chose ... » Un instant, elle songea que la même honte qui la rongeait pouvait possiblement expliquer les mots durs dont il l'affligeait. Mais elle revint sur sa décision alors même qu'elle commençait à aborder la chose. Ce n'était parce qu'elle même avait songé à lui de cette manière que lui même avait été, ne serait-ce qu'un instant, effleuré par cette idée. Elle secoua la tête avec un soupire. « Oubliez cela ... » finit-elle par dire, fermant les yeux tandis que ses doigts venaient frotter l'une des arcades sourcilières pour glisser lentement sur sa paupière close. Pour la première fois depuis qu'il était entré dans la pièce, elle voulait qu'il la fasse taire, qu'il se drape dans son intégrité et l'abandonne non sans une nouvelle réplique cinglante contre laquelle elle pesterait toute la soirée. A cet instant, Vaeranah redouta ce silence car pire que la guerre sans merci qu'il lui vouait, existait l'indifférence totale qu'il pourrait lui témoigner. Un indifférence qui, loin d'être aussi incisive, n'en demeurerait pas moins violente, la réduisant à un être négligeable ce qui était sans doute bien pire, à cet instant, que d'être attaquée sur une nuit d'étreinte interdite. Et pourtant, cela aurait sans doute été le plus sage pour eux deux, songea-t-elle, car l'indifférence demeurait la voie la plus raisonnable pour mettre un terme à ce qui naissait en elle, pour préserver leurs fiertés respectives et leur permettre d'atteindre l'objectif commun pour le bien du royaume. L'indifférence comme moindre mal. L'indifférence pour tourner définitivement la page. Et pourtant, si toute sa raison lui hurlait que c'était son unique moyen de salvation, elle aspirait à tout sauf à le voir tourner le talons et détourner le regard pour ne plus jamais le poser sur elle.


:copyright:️crack in time



┗ DAUGHTER OF THE SEA ┛
People think that intimacy is about sex. But intimacy is about truth. When you realize you can tell someone your truth, when you can show yourself to them, when you stand in front of them bare and their response is 'you're safe with me'- that's intimacy..
Gerold Grafton
Staff

Gerold Grafton

Informations
Revealing the unseen. Tumblr_n3z9pivxjx1qej1qro2_250
Ft : Blake Ritson
Messages : 1189
Date d'inscription : 03/03/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
1000 messages
L'incarnation
100e RP
Time Traveler


   
online
# 
Tout compte fait, il n'était pas certain de vouloir entendre la réponse. Mais comme tout homme attaché à ne commettre aucune erreur dans son jugement pour empêcher la provocation, le doute resta sur le bord de sa langue sans jamais franchir la prison de ses dents. Prenant conscience de ce qu'il pouvait perdre, quand bien même y retrouverait-il sa liberté, Gerold hésita soudain à abandonner tout espoir. Il souffrait d'incohérences ; elle le lui avait déjà dit, et à juste titre. Détruire demandait moins d'efforts que de construire et il pouvait se féliciter d'avoir saboté leur amitié avec autant de talent et en si peu de temps ; assez pour éviter tout sous-entendu d'affection. Une grande réussite, vraiment ! A se demander pourquoi il se fatiguait à poser des questions, car nul fait n'avait brillé d'une telle évidence que leur antipathie mutuelle. Pour la clarté des intentions ? Pour un homme pétri de certitudes, il s'était largement délecté de leur querelle implicité : seule une grande sympathie pouvait provoquer une terrible dispute et là résidait son malveillant réconfort, car ils étaient comme deux cerfs dont les bois se seraient coincés durant la bataille, et qui étaient condamnés à se détester en face. La délivrance d'un refus définitif promettait de soulager son malheur et sa nécessite à la persécuter pour la garder à ses côtés, à défaut de pouvoir parfaitement assumer son estime. Car elle aurait pu ainsi rester pour toujours son amie et sa confidente s'il ne s'était pas senti offensé par sa propre faiblesse. Seuls les lâches suppliciaient la source de leur malheur, mais la jeune femme se défendait si bien que cela suffisait à le convaincre de son droit à être cruel. Pourtant, à chaque fois, il écoutait, la bouche entrouverte, en retenant son souffle. Seulement pour devoir s'avouer qu'il ne comprenait plus rien à l'expression de ses yeux, aux traits de son visage, à la tension de sa bouche. Elle était devenue un mystère pour son esprit qui refusait à tirer la moindre conclusion, préférant l'incertitude à la résolution, pour ne pas avoir à signer l'insupportable et définitive aversion. Il ne distinguait plus la vérité du sous-entendu, l'ironie de la haine et la révérence de la moquerie. Plus rien n'était évident et tout semblait cruel, surtout lorsqu'on refusait de lire ce qu'on ne voulait pas comprendre. Mais il n'avait pas le temps de prendre la moindre résolution : les paroles et gestes se dévoilaient sous une pensée brutale et l'on se toisait d'une manière errante et comme quelqu'un que l'on allait attaquer.  
Sous sa honte, Gerold ne vit que la répulsion et maudit son orgueil qui avait préféré s'offusquer de sa plaisanterie plutôt que de la dénigrer davantage. S'énerver d'un sous-entendu était déjà avouer y être sensible. Quelque part, il savait qu'en la menaçant d'immoralité et d'atteinte, il faisait l'aveu qu'une telle flèche était capable de l'atteindre. Tel, cependant, n'était pas le but finalement ? Continuer à s'inventer des souffrances et s'en délecter comme d'une bonne raison pour répondre une horreur encore pire ? Mais il n'admettait pas cette activité d'écorché, cette rudesse expéditive. Plus il éprouvait la honte de ne pas être raisonnable, plus il tentait de s'en dissimuler la cause.
Etrangement, alors que glisser le couteau du sarcasme entre ses côtes pour blesser son être paraissait si simple, Vaeranah n'en fit rien et pendant un instant, Gerold cligna des yeux, incrédule de l'estocade qu'elle venait de lui donner. D'abord, il ne trouva pas les mots et perdit brièvement du peu de triomphe qu'il aurait pu avoir, avant de se reprendre d'une étrange vérité qu'il concéda à avouer pour la seule raison qu'il n'y perçut aucun danger personnel. Tel un serpent, les yeux plissés, il s'insurgea d'un ton acariâtre :  
« Le brave petit monde ne m'intéresse guère, mais je m'estime avoir le droit d'être exigeant envers ceux qui prétendent à ma considération. »
Dissimuler la flatterie derrière l'insulte avait, depuis longtemps, été pour lui une façon de ne pas tout à fait refouler ses sentiments véritables. Cette conversation était comme un océan : une goutte d'eau douce était incapable de diluer tout son sel. Il y avait sa considération, précieuse et difficile à véritablement conquérir, mas il y avait surtout les prétentions de l'Argentière, dont l'ambition était tout aussi connue que celle de son frère. Dans tous les sens du terme, elle ne pouvait se targuer d'être n'importe qui et, satisfait, Gerold y fit allusion avec une amertume bien réelle, ouvrant la voie à une nouvelle négation, à une nouvelle moquerie, autant espérée que redoutée. Etrangère dans le Val, elle voulait devenir "quelqu'un" et si elle était parvenue à séduire le Roi, il lui fallait encore, minutieusement, prouver sa valeur auprès des nobles de ce modeste Royaume. Davantage encore parce que le sang ne lui avait donné aucun avantage sur ce continent, et seul son savoir, sa diplomatie et sa conduite pouvaient lui donner une place de favorite.
Gerold savoura la façon dont son explication était parvenue à se diluer dans les intérêts communs. S'extraire de l'équation, voilà ce qu'il tentait de faire ; se cacher derrière une cause plus grande que les aléas de sa propre âme. Rien de tout cela ne le concernait et sa rancœur n'était rien d'autre qu'un critère de satisfaction à assouvir pour pouvoir aller plus loin. Et Vaeranah, elle avait tout à prouver, plus que tous ces Lords à l'embonpoint d'eunuque corseté, pour lesquels on avait coutume à dire qu'ils dépassaient les bornes sans préciser de quelles bornes il s'agissait. Elle était tellement plus que ces hommes larges à la figure pataude, aux vastes yeux vides et aux mentons effacés et faibles...
Parce qu'il avait trouvé une si bonne excuse, entendre dire que son attitude était celle d'un "idiot puritain" le fit se redresser avec force, envoyant quelques papiers voler par terre, avant que sa perspicacité ne le glace subitement. Son revirement ne laissait que peu d'explications possibles ? Soudain, Gerold devint très silencieux et attentif, comme un condamné attendant son jugement. Avait-elle deviné ce que même lui n'avait osé penser tout bas ? La crainte de cette supposition lui révéla brutalement à quel point cette vérité lui crevait les yeux, tant il y revenait sans cesse avec stupeur et tremblement. Et alors, la férocité se tarissait face à celle qui était sur le point de lui révéler ses terribles désirs inavoués. Il n'y avait finalement en ce monde que deux formes de libertés : celle qui nous délivrait de nos désirs, et celle qui les rendait manifestes.
Mais la réalité était, évidemment, toute autre. En l'entendant, Gerold compris soudain qu'il avait cessé de respirer. Très brièvement, il éprouva du soulagement à ne pas être découvert, mais alors qu'elle se levait à son tour pour le dominer mieux, il la découvrit brisée, comme incapable de donner à son argument la force du mouvement. A son tour, Vaeranah s'était appuyée sur ses deux mains ouvertes, presque à quatre pattes, comme un animal. Gerold la vit soudain effrénée, empourprée d'un courroux qui ne se maîtrisait plus. Il la regarda, égal à sa défiance et désireux de jouer sans faute, mais à nouveau, il était silencieux, trahissant les instants de dispute qui attendaient seulement le moment de la réponse plutôt que celle de l'écoute. Elle avait cessé de piquer comme une guêpe et s'abandonnait à un long dénouement qui parût l'épuiser pour de bon. Gerold, pourtant, retrouvait toute son autorité et se permit le plaisir de la laisser terminer sans remontrances, égarant un peu plus celle qui lui avait laissé l'avantage. Fidèle à son caractère, rien ne serait capable de la faire fléchir tant que son but n'était pas atteint ! Un dessein aussi éloigné que l'horizon. Gerold n'eut pas la présence d'esprit de lui retorquer quelque sarcasme pour le blanchir de ces pernicieuses suspicions. Lui, l'acharnement au travail fait homme, mettre des bâtons dans les roues... ? Cela n'avait rien à voir... Pourtant, il restait debout, les mains vides, et sa bouche entrouverte et gonflée était celle d'un enfant boudeur. Une mèche noire couvrait son sourcil et l'on pouvait voir battre ses narines blanches et entendre une respiration rapide qui essayait de se discipliner. De concert, les armes furent doucement déposées ; elle, car elle n'en pouvait plus et lui, car il avait entendu la promesse d'une longue endurance. Une quiétude qui ne s'accordait pas, et tous deux se soulageaient à leurs propres dépens. Une trêve était inenvisageable : la seule chose que Gerold pouvait supporter entre eux était une animosité persévérante. Celle qui les enflammait tous les deux sans leur autoriser un semblant de fragilité.
« S'il s'agit d'autre chose... »
Un frisson de frustration le secoua, barbare, remontant du bas de son dos jusqu'à son front devenu pâle. Inévitablement, il fatiguait de s'effrayer, de se dissimuler, et de ne jamais être percé à jour. La crainte de ses propres envies ne voulait rien dévoiler, mais aspirait ardemment à se faire découvrir... Après s'être tant acharné à la perdre dans le labyrinthe de ses intentions, Gerold se déçut de la voir autant hésiter. Vaeranah s'était détournée de lui et il en profita pour ne pas satisfaire le besoin de répondre et se mura dans la continuité de son silence, s'accrochant désespérément au suspens de son hésitation. Il tremblait d'avoir été stupide et trop emporté, d'avoir été inconsidéré et injuste ; assez pour être découvert. Mais en même temps, tout son être attendait cette sentence comme un noyé sa première goulée d'air.
« Oubliez cela ... »
A l'abri de ses yeux clos, Gerold laissa une grimace haineuse monter à son visage. Son propre mutisme l'écrasait, et il dut déployer une attention harassante pour se concentrer sur l'expression de l'Argentière, et ne pas succomber à une rage mélancolique. La tension remonta et il prit le parti de ricaner avec une désinvolture qui cachait une grande souffrance. Après cette roulade pourtant, il se trouva incapable de la moquer davantage et laissa le silence tomber à nouveau entre eux, tel un rideau sur cet affront. Malgré l'exaspération, il était incapable de purger son mal par un seul geste et restait désespérément debout, immobile, à observer un détail insignifiant sur le bureau. Tout son corps tendait à partir ; à quitter cette pièce et claquer la porte. L'inertie demeurait néanmoins, mystérieuse. Il ne parvenait pas tout à fait à se dompter et s'épouvanta de sa faiblesse, car il avait failli lui adresser un regard de malheureux désespoir. Ce triomphe était de ceux qu'il ne pouvait, manifestement, pas supporter. Il s'entendit ricaner une seconde fois d'un rire sans joie. Il se rendit compte être incapable de les sortir de soi, ces mots, ni à les disposer oralement dans l'ordre requis. Seules des exclamations gorgées d'angoisse remontaient de sa bouche. L'imitant, Gerold cacha ses paupières brûlantes derrière des phalanges froides et tremblantes, avant de balbutier :
« Tout allait bien, avant toi... »
En parlant si familièrement, il accrut son mal, le changeant en un chagrin cuisant, agressif et jaloux, un chagrin bavard de jeune homme. Il sentait seulement que sa parole ne pouvait plus souffrir le "vous" impersonnel de leurs disputes. Une mèche de cheveux, roulée par la sueur, descendit sur son front tel un petit serpent sec. Tremblant d'indignation, sa voix, quoi qu'incertaine, roulait dans les profondeurs tranquilles de sa désespérance.  
« Tu m'abîmes..., dit-il en lui jetant un regard en biais, à couvert de ses cheveux noirs de jais. En voilà des manières, de sales petites injures et insinuations de bourgeois, maintenant. Et ça sort de moi, ça. Mais tu peux te vanter, dit-il avec aigreur, tu peux te vanter de m'avoir fait mener une vie... Hm, tu m'as bien empoisonné. »
Il parlait durement. Comme tant d'hommes avant lui, Gerold condamnait ce qui ne dépendait de personne, plutôt que d'incriminer sa propre faiblesse. Il avait besoin de le formuler ainsi, parce que ce qu'il ressentait n'avait rien de beau, ni de pur. Se tenant très droit à présent, il lui montrait en pleine lumière son visage défait, ciré par la fatigue ; un point invisible tirait en bas le menton et les joues, attristait les coins insatisfaits de sa bouche. Dans ce naufrage de l'orgueil, demeuraient seulement intactes les prunelles d'un noir corbeau. La petite description de leur relation le confondit, car dans sa bouche, elle tenait à bien peu. La dilatation du passé, la végétation exubérante de la mémoire avaient quotidiennement multiplié ce nombre par cent, ou davantage. Mais il avait commencé et peinait à souffrir en silence. Son amour-propre était affecté : le duelliste mourant meurt plus heureux que ne le sera jamais l'adversaire qu'il abandonne à la vie.  
« Je ne t'accuse pas, mais tu es responsable... »
Il s'arrêta, effrayé de ce qu'il avait à dire. Après le calme du constat, il commença à s'essouffler à nouveau et la rage remonta à son front, dessinant une grimace de douleur sur son visage et arquant ses sourcils dans une expression de blessure.  
« S'il s'agit d'autre chose... se moqua-t-il d'elle en imitant son intonation. Evidemment, qu'il s'agit d'autre chose ! Finit-il par s'exclamer, rejetant la tête en arrière orgueilleusement d'avoir gardé ce secret. Son regard perçant l'affronta soudain, soutenu par une certitude féroce qui ne pouvait se défiler : Je ne t'accuse pas, je te dis la raison qui fait que le désir me consume et me rend petit, minable et révoltant ! Mais tu es responsable de ça, d'avoir ouvert en moi cette fureur, une irritation insatiable et interdite. Le feu que tu as allumé... confessa-t-il, à bout de souffle, ses mains aux paumes ouvertes dans un geste d'offrande. Sans l'avoir jamais dit, il savait néanmoins que ce qu'il avouait était vrai et sa voix n'en tressaillait que davantage. Ce feu a détruit toutes mes certitudes. Il a creusé, sur le point le plus vulnérable de mon esprit et de mon corps, une empreinte intarissable. A cause de toi, je perds tout empire sur mes nerfs et plus rien n'existe que la nécessité d'épuiser cet incendie, de t'exorciser de mon esprit, aussi brutalement que nécessaire. »
Ses mains avaient lentement rejoint sa poitrine pour s'y serrer, étreignant ce qui déjà étouffait sa gorge. Il était pathétique. Parce qu'il avait si facilement trouvé les mots, il sut avoir déjà été conscient de sa faute bien avant cette soudaine expiation. Il était pathétique d'avoir agi ainsi ; plus il s'expliquait, plus il comprenait à quel point la faute était sienne. Toute cette énergie dispensée pour finir le cœur lourd. Longuement, Gerold soupira de soulagement, clignant des yeux comme si on lui soufflait sur les cils.  
« Je vois clairement maintenant que ce poids ne doit pas te poursuivre ainsi, et que tu n'as pas à subir mes plaintes offensées. Mais je suis épuisé, dit-il en se laissant tomber sur une chaise. Ce feu ne me donne aucun répit, même si je l'en implore. »
Doucement, il tremblait. Il avait parlé sur un ton de supplication précipitée qui lui avait donné l'air dur et il passa une main sur son front inquiet pour en effacer le pli. Il rit tristement et frissonna. Un espoir, imbécile, comme celui qui pouvait atteindre, pendant une chute, les gens qui tombaient, brilla dans son regard et s'évanouit aussitôt.  
« De tout ce que j'ai pu te... Vous reprocher, je m'en fiche. De là où je me trouve, si je le puis encore, je vous demanderai simplement de garder ce secret. Mais je sais déjà que votre réserve vous fait honneur et que seul un excès de confiance pourrait vous trahir. Maintenant, si vous souhaitez me persécuter, j'y reconnais votre droit et ne compte pas m'y opposer. »
Gerold se tut, mais resta assis. Trop orgueilleux pour vraiment s'excuser, il avait, dans un seul souffle, avoué sa faute avant de la conclure et il ne restait à Vaeranah plus que le loisir de le châtier en privé, avant d'y apposer un point définitif selon sa guise.
Vaeranah Antaryon
L'étoile de l'Est

Vaeranah Antaryon

Informations
Revealing the unseen. 23b20d1207906254df529b403c226302646c332e
Ft : Emma d'Arcy
Multi-Compte : m. targaryen, a. caron, t. greyjoy, r. royce, b. nerbosc, d. pommingham, r. baratheon, h. swyft & h. karstark
Messages : 514
Date d'inscription : 24/01/2023
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
Multicompte
25e RP


   
# 
Revealing the unseen
Vaeranah & @Gerold Grafton

I stand in front of my window and imagine myself a fearless knight, imagine myself a witch who hid her heart in her finger and then chopped her finger off.



Malgré les piques acerbes qui les blessaient à tour de rôle, il s'agissait sans doute de leur plus longue conversation depuis bien longtemps. Néanmoins, malgré la violence inhérente à leurs propos, les attaques personnelles qui cherchaient à heurter l'autre autant que possible, Vaeranah ne s'était certainement pas attendu à une réaction si physique. Elle ne pu retenir son sursaut tandis qu'une partie de ce qui se trouvait sur le bureau se voyait dégagé avec colère, s'écrasant sur le sol dans un son chaotique. En un sens, si elle reconnaissait qu'il avait gagné sur bien des aspects, la forçant à rendre les armes et à implorer qu'il la laisse tranquille, la part la plus rancunière de sa personne se gaussait d'avoir obtenue une telle réaction de sa part. Une petite victoire en somme, une preuve que malgré l'indifférence et le méprit de façade, sa propre voix parvenait à l'atteindre. Malgré tout, la mention de la considération qu'elle semblait attendre de sa part lui arracha un sourire sans joie, presque une grimace tandis qu'elle se demandait ce que Petyr Baelish avait pu faire pour gagner cette considération qu'il avait tant de mal à lui accorder à elle. Cela mettait cependant une chose en lumière, à ses yeux, Visenya tout comme la participation de Vaeron à son existence, n'était probablement pas le coeur du problème mais avait sa part de responsabilité dans le traitement qu'elle subissait aujourd'hui. Et il lui donna raison, de la plus douloureuse des manières. Ce fut le tutoiement soudain qui la frappa, pas tant par la familiarité que cela apportait à son discours que par l'étrangeté de l'entendre l'utiliser. C'était une habitude de langage qu'elle avait du apprendre à perdre en quittant Braavos. Au sein de sa cité natale, le tutoiement était courant, même entre membres d'importantes familles de haute naissance : il marquait l'amitié, la proximité des gens là où le vouvoiement était le langage des affaires ou de la politesse excessive que l'on offrait aux inconnus et aux étrangers. Elle ne l'avait jamais entendu tutoyer qui que ce soit, à l'exception peut être d'un de ses frères, comme si ancré en lui, ce vouvoiement se dressait tel un mur entre sa personne et le reste du monde. Elle s'était rendue compte, au fil des années mais bien plus ces dernières semaines, qu'il était bien plus facile de faire face aux attaques mais aussi d'y riposter lorsque le vouvoiement était de rigueur : cela rendait les choses plus lointaines, moins personnelles. Aussi ne put-elle que savourer cet inconscient présent qu'il lui faisait, lui offrant ce qu'il ne donnait même pas à sa propre épouse : un chemin direct à sa personne, sans mur de politesse relative, sans fossé protecteur qui distanciait ses propos, sa personne d'elle. C'était lui, tout simplement. L'homme derrière le masque, l'être qu'elle n'avait pu, qu'en de rares occasions, entrapercevoir dans un sourire ou dans une confession lorsqu'ils entraient dans cette étrange zone entre sphère privée et sphère publique, lorsque les rôles qui leur étaient attribués devenaient plus flous et qu'ils se sentaient assez à l'aise pour rire des confidences qu'ils se partageaient.  

« Réellement ? » demanda-t-elle, une fois qu'il eut fini son monologue, plus pour empêcher le rire nerveux qui menaçait de la secouer que pour réellement appuyer sur l'aveu qu'il venait de faire. Sa voix, partant vers les aigüs de manière presque hystérique, trahissait combien elle était à bout de force dans cette bataille qui les avait opposé si longtemps et combien elle craignait que cela ne soit qu'une nouvelle ruse visant à ce moquer d'elle. Et pourtant, pour autant qu'elle eut voulu hurler combien les tortures qui lui avaient infligé avaient manquer de réduire en cendre le peu de confiance qu'elle avait en sa propre personne, elle voulait rire du ridicule de leur situation, eux si fiers de leurs intellects et pourtant si incapable de partager une simple vérité ou d'étouffer les prémices d'un désir naissant sans se saborder. Etait-il possible qu'ils aient si merveilleusement contribuer à la création d'un nouveau royaume et qu'ils soient parfaitement inaptes à faire face à la tempête qui balayaient leurs certitudes et les sphères privées de leurs vies ? « Réellement ? » répéta-t-elle, ses paroles la percutant à nouveau dans l'écho de son esprit. Ils lui apparaissaient à présent tels deux astres se pourchassant inlassablement sans jamais se rencontrer totalement. Depuis quand frôlaient-ils la limite de l'acceptable ? Depuis combien de temps jouaient-ils avec les frontières de l'amitié, de la complicité professionnelle et d'une forme de charme inattendu ? A présent tous les indices, tous les signes lui apparaissaient clairement et l'hypothèse qu'elle n'avait su se permettre d'envisager se révélait la seule et unique motivation du valois.

Le noeud dans sa gorge semblait se faire plus gros à mesure qu'un mélange de soulagement, de surprise et de sa propre souffrance se faisait plus présent en elle. Elle lui en voulait pour l'avoir maltraité ainsi plutôt que d'assumer ses propres pensées. Et de la même manière, elle sentait sa rancune envers lui fondre lentement pour se concentrer sur elle même et sur les battements chaotique de son coeur tandis qu'elle peinait à contrôler l'immense vague de contentement qui la submergeait à l'idée que son enfer quotidien soit partagé. Elle n'était plus seule dans les affres de ses fantasmes les plus secrets, plus la seule à désirer l'indésirable. « Crois-tu avoir le monopole de l'auto-flagellation ? » lui dit-elle d'une voix bien plus rauque qu'elle ne l'aurait pensé, usant de cette même familiarité de langage qu'il avait employé juste avant. Retrouver ce tutoiement auquel elle était, de fait, plus accoutumée eut pour effet de ramener dans son sillage le léger accent braavien qu'elle avait toujours réussi à contrôler jusque là. Les doigts de sa main droite se crispèrent tandis que ce dernier lui paraissait ô combien disgracieux à ses oreilles, la ramenant éternellement à son statut d'étrangère. Les yeux fermés, Vaeranah se reconcentra sur ce qu'elle voulait dire, et inspirant profondément, tenta autant que possible d'éloigner les rondeurs du timbre braavien qui transparaissait à travers elle. « Que voir le travail et les efforts des dernières semaines, lunes, années, se voir éclipser par ... Ma scandaleuse affaire, ne m'a fait fait comprendre comment fonctionnaient les choses ici ? » A Braavos, les moeurs étaient plus libres et si sa relation avec Vaeron aurait sans doute fait autant scandale, la naissance de Visenya n'aurait probablement pas été aussi compliquée qu'elle avait pu l'être ici. Ils étaient parvenus à garder la paternité de Vaeron secrète, mais en contrepartie, c'était elle qui portait la responsabilité de leurs actes. Son statut d'étrangère était sans doute la seule chose qui avait épargné à Visenya le sobriquet des bâtards, lui permettant de figurer sous le nom d'Antaryon et non de Stone ou elle ne savait quel autre patronyme qui rappelait au monde la concupiscence de ses parents. Vaeranah adorait sa fille. Si ses premiers pas de mère avait été compliqués, la réalisation que, pour Visenya, elle était le centre du monde, la personne la plus importante, celle dont elle avait besoin par dessus tout, l'avait réellement transformé. Pour autant, la braavienne ignorait si, avec ce qu'elle savait aujourd'hui, elle aurait refait les mêmes choix. Bien qu'elle se moquait des réputations ou des dames qui s'en souciaient plus que de leurs vies entières, elle reconnaissait que la présence de sa fille avait été un frein à bien des choses, l'obligeant à se donner bien plus dans son travail pour compenser la tendance à tout ramener à sa soit disant petite vertu. « Et pourtant ... » reprit-elle, peinant à supporter la myriades d'émotion contraires qui la submergeait. Elle qui avait toujours été si froide envers ces choses, si distante avec le contact humain, elle n'avait jamais songé que l'on pouvait ressentir autant de chose à la fois. La colère, toujours, vestige de leur dispute et alimentée par l'injustice qu'il venait de lui révéler en admettant qu'il la punissait pour ses propres démons. La frustration, ensuite, de ne pas savoir mettre de mot sur tout ce qui lui passait en tête, pour conserver une part de retenue alors même qu'elle se trouvait au bord du précipice. La culpabilité, de toute évidence partagée, de ressentir toutes ces choses pour lui, lui qui avait une femme, lui qui avait une position, lui qu'elle ne pouvait avoir. Et au milieu de tout cela, la chaleur de son propre désir et l'insupportable espoir. « Pourtant ... » répéta-t-elle d'un ton si bas que cela devenait un murmure. Que pouvait-elle dire à tout cela ? Aucun mot ne pourrait se montrer à la hauteur de ce qu'il venait de lui avouer, tout ce qu'elle pourrait avoir à dire ne serait qu'une pâle copie face à ce discours qui l'avait si profondément chamboulé qu'elle avait l'impression que son estomac s'était retourné. Elle avait l'impression d'avoir la nausée, de se sentir suffoquer face au poids que l'écho de sa souffrance trouvait en elle. « Je me maudis tous les jours pour désirer l'homme d'une autre. » Il n'aurait pas été bien sage de le séduire même s'il n'avait pas été engagé auprès d'une autre, mais cela lui semblait malgré tout moins répréhensible. Il était dangereux de jouer avec les hommes puissants, il l'était encore plus lorsqu'on semblait y perdre un peu de soit et que l'homme en question avait une épouse. D'autant que Catelyn n'apparaissait pas être une femme à se moquer de l'homme auquel on l'avait donné : elle n'avait rien d'une victime subissant un mariage tout en aspirant à être ailleurs. La braavienne l'avait vu, le regard que Catelyn Grafton posait sur son mari et qui portait bien plus de choses que le simple accord qui unissait deux familles. Pire, au delà du mariage des deux westerosi, Vaeranah en était venue à l'apprécier. Son entente naturelle avec Gerold avait offert à son épouse une certaine sympathie de la part de l'étrangère et si on ne pouvait réellement parler d'amitié, elle était sans doute l'une des femmes dont Vaeranah était le plus proche à Goëville. Ironie du destin, avait-elle pensé un soir, qu'alors qu'elle se détachait des certitudes que sa mère lui avait rentré dans le crâne, ce ne fut que pour jeter son dévolu sur un homme qu'elle ne pouvait avoir. Alors il sortit enfin, le rire nerveux qui ressemblait presque à un sanglot, la marque cynique du drame et du chaos qui ressortaient des choix que son coeur faisait pour elle, la laissant regretter la faiblesse de ses affections et maudire le jour où elle s'était ouverte aux sentiments humains. « Car en définitive, il semble que je n'apprenne pas de mes propres erreurs. Peut être que tu avais raison depuis le début, je suis sans doute trop préoccupée par ta propre existence pour bien faire mon travail. Trop aux prises avec moi-même, à me rappeler constamment que tout ça ... Me conduira inévitablement à ma chute. » Car, en l'état, il n'y avait pas de manière que cela se termine bien. Si elle avait été raisonnable, intelligente et tout ce qu'elle prétendait être, elle aurait quitté ce bureau dès le monologue de Gerold terminé. Si elle avait été maline, elle n'aurait sans doute pas ajouter une carte supplémentaire au jeu qu'il avait déjà entre les mains, offrant une énième possibilité pour lui de la blesser ou de la sortir de l'équation à la première occasion. Car tout comme viendrait le jour où elle ne serait plus indispensable à Viserys, viendrait celui où si ce qu'il disait était vrai, il ne manquerait pas de s'en lasser. Une victoire totale pour eux, une défaite absolue pour elle qui n'aurait sans doute plus qu'à trouver un nouvel acquéreur à ses idées, sans doute du côté de la baie des serfs où l'ombre de ses amours et de ses victoires ne viendrait pas la hanter. Et ce n'était que le plus optimiste des scenario, tellement ridicule que cela en devenait risible. « Et tous les jours, j'en reviens aux mêmes questions, pourquoi toi ? Pourquoi de tous les hommes de cette foutue ville, il faut que ce soit toi ! » Les choses auraient peut être été plus simples si son intérêt s'était porté sur quelqu'un d'autre : quitte à détruire ce qu'il restait de sa réputation, pourquoi cela n'avait pas été pour les faveurs du roi ? Son père en aurait surement été ravi et elle aurait pu mettre tout ce qui la tracassait, tout ce qu'elle ne pouvait expliquer, sur le compte de l'ambition. Au lieu de cela, elle avait jeté son dévolu bien malgré elle sur son hôte de toujours, un collègue qu'elle respectait et dont la position lui assurait que se jeter du haut de ce château serait toujours moins douloureux que la chute sociale qu'il pouvait lui faire vivre. Car elle ne doutait pas qu'un jour arrive ce moment où Viserys Targaryen n'aurait plus rien à gagner à la conserver auprès de lui, un jour où le soutien de la Banque ou du Seigneur de la Mer ne lui serait plus aussi important. Mais malgré la menace qu'il représentait, sans doute bien malgré lui au vu du mal-être perceptible que ses propres désirs lui infligeaient, elle ne pouvait s'en empêcher. Elle se sentait tel un papillon de nuit attiré par la lueur d'une bougie, et malgré tout ce qu'il y avait de mal à désirer Gerold Grafton, savoir que ses propres démons le hantaient également l'empêchait de refouler entièrement cela comme elle avait pris l'habitude de le faire.  « Un secret pour un secret, nous voilà quitte. » finit-elle par dire. Elle n'avait plus à se sentir redevable de rien et étrangement, elle sentait le poids des dernières semaines, des dernières lunes, glisser sur sa personne, comme si elle se voyait libérer de ce qu'il créait chez elle.

Après un silence, elle se redressa, ses doigts glissant sur le bois, donnant l'impulsion nécessaire pour qu'elle retrouve sa posture. Elle toussota, cherchant à faire disparaitre ce qu'il restait d'émotion, coincées dans sa gorge, et replaça une mèche blanche derrière son oreille. « Contrairement à moi, votre réputation est intacte, Lord Gerold et je n'ai aucune intention de vous nuire. Mais ... S'il s'agit d'autre chose ... » Revenant à la distance qu'il avait ramener à la fin de son propre discours, elle garda cependant l'écho de la phrase qu'elle n'avait jamais terminé s'inviter de nouveau. La limite à franchir lui apparaissait maintenant clairement, et si elle s'était arrêtée net quelques minutes plus tôt, ses dernières réserves venaient de sauter. Il pensait lui donner les armes pour en finir et assouvir sa vengeance, et elle n'avait fait que remettre les compteur à zéro, annonçant clairement qu'elle n'utiliserait jamais son aveu contre lui. Le choix changeait de camp, inlassablement, passant de l'un à l'autre : celui de continuer la bataille ou d'abandonner, celui de résister encore et toujours ou de s'abandonner à d'autre chose. « Je n'ai absolument rien à perdre et ... Je ne suis pas ... Insensible à vous. » Elle aurait sans doute être choquée de l'indécence de sa demi-invitation, honteuse du sous-entendu qui se cachait derrière ses mots. Elle aurait du penser à ce que cela pourrait changer à leurs rapports futurs, à ceux qui pourraient s'en voir blesser et à toutes les raisons qui faisaient que cela était une mauvaise idée. Mais elle ne pensait à rien. Elle n'était ni lié par un voeu, ni promise à qui que ce soit, ce n'était donc pas à elle de faire le choix de franchir cette ligne, elle se trouvait déjà de l'autre côté.


:copyright:️crack in time



┗ DAUGHTER OF THE SEA ┛
People think that intimacy is about sex. But intimacy is about truth. When you realize you can tell someone your truth, when you can show yourself to them, when you stand in front of them bare and their response is 'you're safe with me'- that's intimacy..
Gerold Grafton
Staff

Gerold Grafton

Informations
Revealing the unseen. Tumblr_n3z9pivxjx1qej1qro2_250
Ft : Blake Ritson
Messages : 1189
Date d'inscription : 03/03/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
1000 messages
L'incarnation
100e RP
Time Traveler


   
online
# 
Ainsi s’achevait une longue souffrance.
La possibilité, éphémère, avait eu l’existence éblouissante d’un astre nébuleux. Il avait traversé le ciel de leur réalité en lançant sa chevelure de feux derrière soi pour disparaître aussitôt, sur un seul souffle ; en une seule phrase. La vague ronfla, dessina sa cime à l’horizon, avant de s’écraser contre le rigide pragmatisme du réel et disparaître à jamais. Une torture protéiforme, lancinante et prédatrice venait de prendre fin en un seul clin. Gerold, de fait, n’avait entretenu aucun espoir. Pour une fois, l’orgueil avait laissé place à l’incertitude, sans envisager un seul instant une fin heureuse, car dans leur univers féroce, cette fin se résumait à cesser de la vouloir dans l'ignorance la plus totale. Mais déjà, le désir avait défiguré son âme et seule une désillusion parfaite était en mesure de lui rendre sa dignité. Et plutôt que d'affronter son propre sort, il préférait le sceller lui-même, car l'on souffrait moins de sa propre décision que lorsqu'elle nous était imposée et Gerold rechignait absolument à se faire refuser. Car elle devait le refuser. Leur crédibilité en éprouverait de conséquences trop grandes ; la fiabilité de leur jugement serait sans cesse remise en question pour une affaire de concupiscence. Vaeranah avait bien trop à perdre pour ne serait-ce considérer un tel risque pour son indépendance. Au fond, et malgré son désir, Gerold l'avait toujours su. Il ne sacrifiait que sa bienséance masculine, oubliable dans une série de conquêtes et de succès politiques, qui lui avaient apportés une gloire extraordinaire. Mais l'Antaryon ne se cherchait pas un parti, ni un mari à la hauteur de ses ambitions ; elle avait creusé le lit de sa propre rivière et aujourd'hui, sa compétence pouvait être remise en question pour une erreur banale mais fatale. Elle l'était déjà à cause de la complaisance du Roi, de la naissance de sa fille, de ses origines lointaines. Dans le monde qui était le leur, un Gerold Grafton n'avait rien à proposer à une Vaeranah Antaryon. Rien qu'elle ne possédât pas déjà.
Certains se trompaient encore lourdement en s'imaginant que la force de Vaeron était le vecteur de leur duo fraternel. Son sexe lui donnait un avantage de naissance dans une contrée où rares étaient les femmes atteignant un statut convoité par les hommes. Mais ceux qui prêtaient attention à la dynamique du pouvoir des Antaryon pouvaient aisément remarquer qui dirigeait véritablement le couple. Vaeranah était forte, indépendante, calculatrice et intrépide et Gerold n'avait, très objectivement, rien à lui offrir. Probablement, l'un ou l'autre finirait brisé si une telle relation devait avoir lieu. L'on négligeait aisément les catins de maisons rouges à l'avenir prévisible, qui s'oubliaient dans les bras de la noblesse pour finir encore plus pitoyables qu'avant, là où ni Vaeranah, ni Gerold n'auraient le loisir de l'évanouissement. Leur position respective les empêchait de vivre dans la dissimulation d'un exil luxueux. Peut-être que Gerold envisageait leur avenir un peu trop durement, mais au-delà de leur réputation, une autre difficulté bien plus prosaïque l'empêchait de caresser cet espoir davantage : la source de sa souffrance et de son désir lui semblait tout bonnement inatteignable. A bien des égards, elle était une femme qui incarnait dans son esprit toutes les femmes ; un idéal rarement égalé et encore moins autant convoité. Pourtant, contrairement à tant de jouvenceaux prêts à flatter leur muse de compliments fleuris et de propositions pleines de mièvrerie, Gerold s'était protégé d'un bouclier acerbe de sagacité et de pragmatisme. Le charme de la poésie avait été ébloui par l'implacable lumière de la lucidité.
Epuisé, il gisait sur cette chaise un peu trop dure, esquinté par la pénible réalité, qui venait, comme une fleur nocturne, d'ouvrir et refermer ses pétales bien avant l'avenue du soleil. L'adultère. N'importe quelle petite bourgeoise, peut-être, mais pas elle. A bien des égards, Vaeranah lui était supérieure et il n'avait consenti un seul instant à s'imaginer pouvoir la posséder. Dans le monde prolifique des fantasmes, peut-être, et seulement. Là était contraint de s'achever son ambition.
Déjà, son intelligence le maudissait d'avoir ainsi avoué être un homme, un mâle qui n'était pas parvenu à simplement respecter son esprit, et avait fini par désirer sa féminité. Il avait cru être au-dessus de ces instincts-là, que sa volonté était la plus tenace entre l'intuition et la culture. Mais il n'était, tout compte fait, qu'un corps avant d'être une âme. La défaite était totale : ses sens avaient refusé de se soumettre à la pression de l'honneur, de la bienséance, d'un inévitable rejet et de son propre entendement. Défait, il gisait et attendait que le courage lui revienne pour songer à battre en retraite.
« Réellement ? »
L'imagination était rarement aussi succincte. Le ton, plus que la brièveté de l'interjection, soulevèrent ses sourcils dans une vague expression d'étonnement. Il était surtout confus, car l'exclamation fut répétée deux fois. Était-elle déçue ? En tout cas, il l'était. La conclusion avait été si rapide à écrire que ces lunes de tourmente paraissaient ridicules. La souffrance imposée, davantage encore parce qu’elle était du fait d’un homme de pouvoir, devenait de plus en plus injuste et cruelle, et Gerold, de plus en plus lâche. Malgré tout, il avait consenti à subir et attendait, quoi que fébrilement, une explication supplémentaire.
Son tutoiement le surpris comme un coup de fouet, creusant une fente sinueuse dans ses défenses. Il était clairement plus à l’aise de tonner du « tu » qu’à l’entendre lui-même, et Gerold sentit la lente et pénible intrusion comme une blessure. Instinctivement, il éprouva le besoin de se défendre et se crispa sur sa chaise, renfrogné mais silencieux. Il se sentait stupide et ne comprenait pas ce qu’elle disait, ce qu’elle lui reprochait. Doucement, le couteau de l’accent était venu hacher ses mots dans un cri d’oiseau irrité, perçant, imprévu, dont Gerold tressaillit. Elle fit un effort physique pour réprimer ce qui était une rage naturelle prenant racine dans le passé. Le Grafton se laissait hypnotiser par ses yeux d’une couleur de flamme glacée. Bientôt, le trouble déposa un voile froissé sur son visage ; elle avait beau mettre en exergue son phrasé, il ne comprenait pas. L’insulte, la rancœur, la brutalité, la tristesse ou la déception, il pouvait l’envisager avec aise, mais Vaeranah paraissait reprendre le fil d’une conversation qui avait déjà commencé dans sa tête bien avant. Encore, elle se battait avec une foule de passions sans s’arrêter sur aucune et cette agitation, Gerold s’en méfiait et ne quittait pas de l’oeil ses mouvements exaltés. La couleur rayonnante de son teint, de ses yeux, la précision de sa forme mince, le pli tendu de sa robe sur ses longues jambes, reléguaient à un plan lointain la souffrance presque suave qui l’avait couché, immobile, sur le fauteuil. Elle était si différente, comme battue par la tempête, à l’aise dans cette indignation comme elle pouvait l’être dans le calme de son impassibilité. Mais il ne comprenait pas s’il se faisait battre, réprimander ou moquer, jusqu’au murmure qui le laissa interdit. Son esprit, tantôt si mobile et enclin à l’interprétation, cessa de se débattre, préférant flotter à la surface, sans mouvements.
L’homme d’une autre ? Par torrents, le traître espoir revint à son cœur jusqu’à l’étouffer. Il la regardait, déconcerté, l’oeil brillant et la bouche entrouverte, exprimant toute sa confusion dans une paire de sourcils noués à la racine de son nez. Brièvement, son intelligence avait feint l’ignorance en cherchant ce mari dont elle parlait, mais Vaeranah acheva sa stupide errance en quelques affirmations. Affirmations qu’il ne parvenait pas à croire et qui pourtant rejoignaient si bien ses propres conclusions. Cette observation lui rendit un peu de sa lucidité et il se rattacha à cet épilogue comme au seul envisageable, alors qu’elle l’assaillait de la seule question à laquelle il n’avait pas de réponse. Face à l’injustice, Gerold lui rendit seulement une expression de parfait égarement. Mais soudain, alors qu’elle revenait au confort du vouvoiement pratique, il fut accablé par une vague de chagrin. Cette fin aurait été plus simple si la réponse avait été plus catégorique d’un côté que de l’autre et si leurs rapports avaient témoigné d’un déséquilibre évident. Ce que Vaeranah lui confiait à bout de souffle était une histoire bien plus triste : celle d’un désir condamné à souffrir et à n’apporter qu’un malheur latent. Bien au-delà de sa stupéfaction de sentiments partagés, Gerold contemplait surtout cette mort imminente, cette vie qui était condamnée à disparaître avant d’avoir pu exister. Ici, sous la lumière rasante d’un soleil maintenant couchant, leur aveu allait s’effacer pour de bon.
« Je n'ai absolument rien à perdre et ... Je ne suis pas ... Insensible à vous. »
Un frisson le parcourut, alors qu’adoucie par son épuisement, elle lui livrait un étrange éclat d’espoir perdu parmi les décombres. Elle avait cela de plus que lui : l’audace de l’exception.
Gerold soupira, habité par un étrange sentiment d’éloignement. S’il n’avait eu d’autre souci que de soulager, n’importe la façon, ses ardeurs masculines, si, et d’autres termes, les sentiments n’eussent-été pour rien dans l’affaire, Gerold se serait sans doute accommodé, pour un temps qui passait, de l’indignité et de l’ambiguïté de cette perspective. Mais Gerold respectait Vaeranah. Cet assouvissement infidèle ne pouvait le satisfaire, ou plutôt il l’aurait satisfait comme n’importe quelle putain, lorsque seul le désir était partagé, enveloppé dans un anonymat et une indifférence sordide, ne parvenant jamais à se fondre par la suite dans toutes autres délices qui, tels une cime embrumée au-delà d’un col menaçant, promettaient d’être un jour le sommet réel d’un périlleuse aventure amoureuse. Il fallait dire que Gerold éprouvait encore beaucoup de difficultés à décrire et analyser sa propre passion pour cette étrangère aux cheveux de lait. Quand il se remémorait, caresse par caresse, sa vie sentimentale, ou ses visites plus anciennes dans des bordels flottants des rivières du Val, force lui était de reconnaître que le tremblement engendrées par la seule idée de Vaeranah étaient sans commune mesure, puisqu’elle avait déjà, par le plus léger contact de sa main, prodigué un trouble non seulement plus intense mais encore essentiellement autre que la plus longue étreinte. Il serait suffisant de dire qu’en découvrant son désir pour Vaeranah, Gerold avait découvert l’angoisse, l’agonie de la « réalité ». Une réalité qui se dépouillait alors des guillemets qu’elle portait comme des griffes.
Doucement, il secoua la tête sans la regarder, avant de se lever tout aussi lentement. Son précieux aveu l’avait laissé sans forces, ni hargne, ni exaltation. Une certitude tranquille mais douloureuse demeurait seulement, et qu’il confia sur un ton résigné :
« Tu as tout à perdre. Je l’ai déjà vu, avec ton frère, dit-il doucement et sans reproche. Le poids du secret, ou de son indiscrétion, te rendront malheureuse ; et si tu es malheureuse, je serai misérable. »
Sans croiser son regard, Gerold se retourna et, saisi d’horreur et de honte, il quitta la pièce, conservant à jamais l’image composite et atrocement nette d’elle, restée assise, à la place où il l’avait quittée. Cette image, qui avait pénétré en lui par une vision périphérique et qu’il ne pourrait jamais, jamais oublier, car elle lui avait fait sentir la douleur intolérable du remords. Leurs querelles de convoitise avaient été suffisamment nombreuses pour former une indestructible mosaïque de souffrance qu’il ne comptait pas réitérer.

-Fin-
Contenu sponsorisé


Informations
Personnage
Badges


   
#