Behind the cruel man, there is a proud father - ft. Alyx & Daven

À chaque tournoi, c’était la même histoire. Leo Lefford s’y présentait simplement pour montrer son joli minois, faire acte de présence, retrouver des connaissances, observer les nouvelles têtes, juger les prestations sans participer, s’ennuyer à mourir. Il se souvenait de chaque tournoi auquel il assista et aucun n’a encore su lui plaire. Il trouvait cela ennuyeux et ennuyant. Pourtant, il venait. À chaque tournoi, il venait. Celui serait peut-être différent. À l’instar de celui de Lestival, celui-là s’annonçait grandiose pour les dix ans du roi et les cinq ans de règne qui venait déjà de s’écouler. Il s’en était passé des choses. La vie avait repris son cours en bien comme en mal. Victorieux au siège de la maison Ferren, Leo était revenu à la Dent d’Or dans de bonnes conditions, oubliant presque la menace qu’il avait proféré à sa fille qui n’arrivait pas à lui donner de petit-fils. Une tragédie, pire même, une malédiction aux yeux de Leo Lefford, seigneur de la Dent d’Or, qui croyait être puni de ses actes passés. De toutes ses grossesses, Alyx n’avait eu que des filles ou bien des garçons mort-nés. Deux. Deux garçons auraient pu voir le jour au sein de la famille, brisant alors cette soi-disante malédiction. Mais aucun n’arriva et cela avait fait perdre le peu de patience dont Leo était capable. Il l’avait donc mise en garde. Il lui restait une dernière chance alors que la guerre s’installait doucement dans les royaumes. Une dernière chance qui s’avéra être un énième échec. Mais la guerre étant la guerre, le cruel paternel ne put mettre à exécution sa menace, celle de se remarier, celle de tourner complètement la page d’Orélia Fléaufort pour en ouvrir une nouvelle. Cette nouvelle page, il avait commencé à y réfléchir, dressant la liste des familles qui l’intéressait. Se remarier signifiait également ouvrir la possibilité d’avoir un fils et donc de détrôner Alyx de son statut presque éternel d’héritière de la Dent d’Or.

- Regarde, Damon, regarde. Voici Port-Réal, la capitale du royaume des Sep… Six Couronnes.

Fier sur sa monture, accompagné d’un tout jeune enfant, Leo pointait du doigt les remparts de la ville qui s’étendait au loin alors que le convoi Ouestien arrivait à Port-Réal pour les festivités du tournoi. Sa langue avait fourché, comme de nombreuses fois et il ne devait pas être le seul, mentionnant alors le royaume des Sept Couronnes. C’était autrefois le nom du royaume sur lequel régnait les Targaryen depuis des décennies. Mais aujourd’hui, le Val n’en fait plus parti. La défaite cuisante des Valois sur terre et des Orageois accompagnés de Couronniens sur mer avait permis à Viserys de prendre le contrôle sur les montagnes et la région au nord de la Couronne. L’enfant assis sur le trône de fer régnait désormais sur six couronnes. Mais Leo ne s’attarda pas sur ce point. L’enfant qu’il avait avec lui n’était guère intéressé par ces histoires géopolitiques. Il semblait même fatigué du long voyage qu’il venait de faire depuis la Dent d’Or ainsi que des nombreuses histoires que son grand-père lui racontait depuis plusieurs jours déjà. L’enfant de deux ans ne se souvenait déjà plus de tous ces récits et pour certain, heureusement pour lui sans doute. Leo Lefford était si fier d’avoir enfin un petit-fils qu’il en faisait parfois trop.

- Tu verras, la ville est bien moins reluisante qu’il n’y parait et, bien sûr, n’égale pas notre château. Ne l’oublie jamais, Damon. Sois fier de ta maison. Sois fier de ton fief. Sois fier de ton pouvoir.

Ces derniers mots, il les avait murmurés pour que les personnes chevauchant à ses côtés ne les entendent pas. Il ne souhaitait pas qu’Alyx soit au courant de tout ce que son père pouvait dire à son enfant. La route se poursuivit sur le même ton, Leo décrivant les paysages de la capitale, racontant que leur suzerain, lord Tywin, était le détenteur du pouvoir royal tant que le roi sera mineur, lui rappelant au passage que le Régent était son arrière-grand-cousin. Entre deux remarques typiques d’un Leo Lefford, fier seigneur, il lui glissait des petits mots gentils, à l’abri des oreilles indiscrètes. Après tout, il s’agissait de son seul petit-fils. Il était donc normal qu’il le gâte et le choie. Plusieurs heures s’écoulèrent entre le moment où ils apercevaient les remparts de Port-Réal et le moment où ils s’installèrent dans des appartements qui leur furent préparés. Il y avait là un avantage non négligeable à être de la famille du Régent. Cela ne valait sans doute pas les appartements du Donjon Rouge mais cela ferait l’affaire durant le laps du temps qu’ils resteraient à Port-Réal pour le tournoi. L’heure avançait à grand pas et il était donc temps de rendre le jeune garçon à ses parents, lui qui avait passé toute la dernière journée de voyage avec son grand-père. Cela tombait bien puisqu’ils se retrouvaient pour dîner. Le petit Damon marchait d’un pas peu assuré aux côtés de son grand-père qui lui tenait la main. L’image de Leo Lefford accompagné d’un petit enfant valait probablement le coup et c’est ce que purent constater Alyx et Daven qui étaient déjà présents dans la pièce où un modeste repas les attendait.

C’était la première fois qu’Alyx mettait les pieds dans la capitale de Westeros. Elle avait durant longtemps était bercé par les récits de la ville habitant un château rouge bâti par Aegon le Conquérant. Si de loin, le spectacle était fidèle au récit et que l’ensemble semblait impressionnant, une fois dans les rues de la cité, la Lefford avait quelque peu déchanté. La ville grouillait dans tous les sens, la propreté était toute relative et pourtant la famille ne s’aventura pas dans le Culpucier. Mais Alyx n’osait imaginer l’état des rues. L’héritière de la Dent d’Or resta enfermée dans le carrosse qui les amener à destination, refermant les rideaux de l’habitacle pour cacher l’extérieur aux yeux de ses filles. Elle leur ferait découvrir la plus grande place de Westeros plus tard et dans des quartiers où la richesse permettrait de circuler en sécurité et dans des endroits où l’hygiène ne laissait pas à désirer.

Ils arrivèrent à destination et la petite famille alla apprivoiser ses quartiers. Ils avaient privatisé une villa proche du Donjon Rouge. Cela ne valait pas la Dent d’Or mais cela ferait l’affaire pour l’espace d’une dizaine de jour. Alyx nota que son père continuait de s’accaparer Damon, cela ferait probablement râler Daven. Pour occuper son époux, elle poussa Erena vers son paternel afin qu’il l’aide à s’installer. Et elle se chargea malgré elle de la plus terrible : Joanna. Le voyage avait épuisée sa cadette, cela la rendait grognon et moins sujette à des caprices ou des colères mais Alyx devrait probablement levé le ton tôt où tard. Elle installa l’enfant dans ce qui serait sa chambre pour le séjour et ordonna à une nourrice de changer l’enfant pour qu’elle soit débarrasser de ses habits de voyage. La Lefford quitta la chambre, abandonnant Joanna et sa nourice pour aller elle-même se changer et se rafraîchir un peu après des jours à voyager.

Elle humidifia un linge propre qu’elle passa dans sa nuque et son cou. Elle poussa léger soupire de soulagement à la sensation de frais et de propre sur sa peau. Elle demanda à Otto de lui sortir un tenu adéquat pour le diner du soir avant de se glisser derrière un paravent pour se changer. Elle enfila une chemise longue à manche courte blanche avant d’enfiler jupon, jupe et un corset qui se fermer devant. Une tenue légère, adapté à la chaleur étouffante de la capitale malgré la nuit tombante. Elle retrouva Daven et Erena, le lion avait toujours autant d’étoiles dans les yeux quand il regardait leur aînée.

Le couple alla chercher Joanna et comme Alyx s’en doutait, la nourrice était exaspérée par le comportement de l’enfant. Mais dès que la Lefford pénétra dans la pièce, la fillette se figea et se laissa faire. Elle savait parfaitement que face à sa mère, la mission était bien plus périlleuse et elle était trop fatiguée pour se battre et espérer l’emporter. L’héritière attrapa donc la main dans l’enfant et l’entraîna à la suite de Daven pour rejoindre la salle à manger où le dîner allait être servi. Le couple et leurs deux filles attendirent que le chef de la famille et son petit fils n’arrive. La vision de Leo Lefford tenant la main du petit garçon qui marchait avec un équilibre précaire était absurde. Jamais Alyx aurait penser voir ce genre de chose un jour.
« Comptez vous séparer de ce pauvre enfant un jour père ? Afin qu’il puisse se reposer ? Il n’a que deux ans je vous rappelle. »

Le petit garçon avait de tout petits yeux et luttait contre le sommeil. Le voyage avait été bien loin pour lui, et si ses deux sœurs étaient fatiguées du voyage, Alyx n’osait imaginer l’état de fatigue de son fils.

La famille se mit à table et même Joanna ne sembla pas sourciller. L’enfant était bien trop calme, Alyx trouvait cela bien suspicieux. Mais dès que l’attention de la jeune femme se détourna de sa fille pour participer aux discussions du repas, Joanna en profita pour quitter sa chaise sans rien demander.