Le Deal du moment : -28%
Précommande : Smartphone Google Pixel 8a 5G ...
Voir le deal
389 €


Flowers season.

2 participants
Gerold Grafton
Staff

Gerold Grafton

Informations
Flowers season. Tumblr_n3z9pivxjx1qej1qro2_250
Ft : Blake Ritson
Messages : 1189
Date d'inscription : 03/03/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
1000 messages
L'incarnation
100e RP
Time Traveler


   
# 
Debout dans son Cabinet du Conseil, attenant au salon dit dornien, poudré de soleil, Gerold penchait la tête vers son intendant dont la voix bourdonnait sans interruptions chiffres et données à son oreille. Le regard dans le vide, le Seigneur de Goëville feuilletait vaguement le lourd livre des comptes sans vraiment en percevoir le contenu, entièrement absorbé dans le flot qui le nimbait d’un murmure presque onctueux. Ses cheveux étaient comme ceux d’un corbeau, ses yeux étaient sombres et humides, son visage tranchant, même dans le songe. Les affaires n’étaient pas aussi bonnes qu’on aurait pu l’espérer et pourtant, malgré le sifflement de son intendant, Gerold contemplait rêveusement dans l’antichambre de son imagination celui qu’il avait élu comme Roi faire rougeoyer l’horizon d’un lever de soleil carmin en plein milieu de la nuit. Petite fournaise surplombée par les étoiles…
Cela faisait plusieurs nuits déjà que Viserys traçait parmi les bateaux Velaryon les sillons de sa colère. Dans son for intérieur, il caressait l’espoir de n’avoir pas recours à des ajustements drastiques, mais le commerce ayant été sérieusement endommagé, il ne pouvait que continuer à se projeter dans un futur aussi lointain et sombre que possible. Comme le disait l’adage usé jusqu’à la corde : prudence était mère de sûreté. Dès le siège maritime entamé, Gerold avait fait cesser tous les fastes inutiles, distribuant avec la parcimonie la plus mathématique tous les moyens de subsistance de la cité. Goëville, avec la mer en face d’elle et la ceinture de montagne dans son dos, n’en était pas à son premier risque de disette et le rationnement avait été accepté sans grande protestation. Ceux ayant connu le besoin avaient accepté ces restriction comme une nécessité, contrairement à certains nobles spirituellement mal préparés à devoir manquer de biens sans manquer d’argent. Tragiquement, les exceptions ne s’appliquaient pas au sang bleu, mais au sang noble dans son sens le plus littéral : l’armée put bénéficier d’une abondance relative dans ses besoins. Et bien évidemment, le Roi.
Il y avait quelque chose d’incongru à se soumettre au besoin lorsqu’on habitait dans des appartements aussi lourdement décorés. C’était comme si la flemme des dragons avait sculpté cette flamboyante architecture, toute nouée en de rutilantes arabesques. Même du plus petit salon du château émanait une grandeur saturée et prodigieuse, évoluant en ornements exubérants ; l’élan vertical était couplé à une structure uniforme, où tout se fondait en courbes semblables à des flammes. Cette demeure était surtout là pour témoigner du savoir-faire qui transitait à travers ces murs, les artisans ayant chacun abandonné ici la part la plus exquise et exubérante de leur âme.
Avec une lenteur annonciatrice, Gerold avait fini par se lever de sa chaise pour échapper au roucoulement funeste de son intendant, ce qui n’y mit pourtant pas fin.
« Donnez-moi une date. 
- ...Une date, votre seigneurie ? Hésita l’intentant.
- Cessez de m’expliquer les aléas, et dites-moi simplement jusqu’à quand la ville pourra tenir, compte tenu de notre récente réorganisation » trancha Gerold.
L’intendant se figea, gobant l’air comme un poisson tout juste pêché, visiblement troublé d’avoir été arrêté dans sa chronophage chronologie des incertitudes et inconvénients, mais son Seigneur ne le regardait déjà plus. Le vieux bougre était méticuleux, mais diablement généreux en détails  que le Grafton supportait selon ses humeurs. La requête ne pouvant manifestement pas être satisfaite dans l’instant, et d’un geste élégant mais définitif de la main, un congé lui fut donné. Gerold soupira lourdement, comme un pouf sur lequel on se serait un peu trop assis. Un bon maître devait toujours s’accommoder d’un peu de radotage.
Lentement, sa tête roula contre ses épaules, soulageant vertèbres et muscles endoloris par une position sans cesse semblable. Dans un sens, puis dans l’autre, comme un bateau. Depuis quelques jours, les entretiens n’en finissaient pas entre les différents corps de métier laissés dépourvus par le blocus. Malgré tout, le moral était demeuré stable grâce à la victoire, et cette auréole rouge qui rayonnait comme une éclipse ; les flammes de Némésys faisaient flamboyer le ciel.
A peine le nuage d’on ne savait quel onguent malodorant se fut dissipé dans le sillon de son intendant, on vint lui annoncer une autre visite. Gerold se massa le front, les tempes et les paupières, se rendant enfin compte de toute la tension qui s’y était accumulée, puis autorisa la rencontre. Un chevalier errant lui avait-on dit, engagé à servir dans son armée avant la bataille – bataille durant laquelle il s’était dûment illustré. Un exemple d’ascension fulgurante que la population appréciait, car le jeune jouvenceau s’était vu offrir une place dans la garde Royale. De la boue, il avait fait de l’or. Cela dit, même si on rentrait dans un palais après avoir marché sous la pluie, il y avait toujours de la crasse sur les chaussures ; le nom de famille ne trompait pas et c’était probablement ce qui charmait le plus dans ce genre d’histoires.
« Ser Flowers, annonca-t-il d’une voix chantante l’arrivée du chevalier dans son cabinet.
C’était une ruse, car le Cabinet du Conseil se tenait dans l’aile la plus éloignée du manoir et il fallait se laisser écraser par sa monumentale architecture avant d’atteindre son centre névralgique, dans lequel on pénétrait souvent un peu essoufflé et hébété, comme si on venait d’échapper à une forêt magique dont les branches se referment sur ses visiteurs. La richesse était un poids lourd à porter ; le sublime, plus encore.
« Je vous félicite pour votre avancement et la précocité de votre courage. C’est rare, surtout lorsque ce courage vient de si loin pour s’illustrer. J’espère que tout est à votre guise et que Goëville vous accueille convenablement ? »
Debout au milieu de cette pièce sculptée et verte comme l’émeraude, Gerold toisait le jeune homme d’un éclat malicieux dans le regard. Peu étaient capables de maintenir la constante d’une promotion aussi fulgurante. Souvent, ils s’emplissaient de vanité et trébuchaient sur de petits cailloux, ou pire, mourraient. De leur propre main ou de la main de leur maître mécontent et celui-là, qu’est-ce qu’il était jeune… Manfred Flowers...
« Pour quelle raison un garde de sa Majesté désire me faire honneur ? »


@Manfred Flowers est-ce que je suis fier de mon titre ? Oui, très.
Manfred Flowers
L'intranquille

Manfred Flowers

Informations
Flowers season. Tumblr_oj64d9pjH41twemn9o3_r5_540
Ft : Lorenzo Richelmy
Multi-Compte : Lowell Blount ; Clifford Swann
Messages : 282
Date d'inscription : 04/09/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
Multicompte


   
# 

Liliyana & Manfred
Flowers Season
304, lune 10, semaine 1

Goëville est une grande fourmilière et le manoir Grafton, un peu à son image. À vrai dire, à l’intérieur de la ville, Manfred se sent plutôt à l’aise. Quoique Mielbois et Charmchamp aient été indubitablement des résidences campagnardes, il est plutôt un citadin qu’autre chose, à l’aise dans les dédales de ruelles de grandes cités. Villevieille et Port-Lannis, plus que Port-Réal, lui manquent un peu, d’ailleurs. Non que Goëville soit désagréable. Au cœur de la ville, où il a passé la journée pour superviser diverses opérations de sécurisations des points d’eaux et des granges, on en oublierait presque le siège en cours, pourtant si difficile à ignorer. Au manoir, où il reste le plus clair du temps, suivant le roi comme une ombre, ou au port, il est plus difficile de couper à la vue de ces saletés de voiles pleines d’hippocampes, symbole de leur enfermement. C’est d’ailleurs au manoir que Manfred retourne, après ces quelques heures de liberté offertes par cette mission pour laquelle il s’est porté volontaire de très bonne grâce. Flowers est du genre à ne jamais s’arrêter, toujours en mouvement. L’inactivité lui fait du mal ; il a l’impression de rouiller sur place : quitte à tenter le tout pour le tout, il serait bien du genre à tenter une percée, si on l’y autorisait…mais pour l’instant, il faut patienter. Un rugissement provenant du ciel lui parvient et lui fait lever les yeux vers les nuages : en parlant de percée, voilà donc le roi qui revient. Un moment plus tard, le temps de faire son rapport à celui-ci, le voilà chargé d’une nouvelle mission : rendre compte à lord Grafton des récents événements. Il n’est pas mauvais de vous connaitre auprès de lui plus en détail, a signalé Viserys.

Évidemment, Manfred comprend ce que le roi veut dire. Il ne joue pas précisément au jeu des trônes, lui ou du moins il y tient une part mineure - là où Viserys va, il va – mais il n’est jamais inutile de tisser des liens et des relations, ne serait-ce que pour survivre. Pour le reste, Manfred est assez intelligent pour comprendre qu’il est le dernier arrivé dans la Garde Royale et que son passif d’épée louée ne joue pas – contrairement à son statut de vétéran de Winterfell – exactement pour lui. S’il s’est illustré et a été récompensé à la bataille de Goëville, il a encore des preuves à faire : nul doute que l’opinion de Gerold Grafton, Main du Roi, à son égard, aura son importance dans cette entreprise.

De Grafton lui-même, Manny ne sait pas grand-chose. C’est un bon archer, il le sait depuis Lestival, et un homme qu’il tient pour brave. Rare sont les généraux qui commandent leur armée en étant réellement à leur tête et en allant combattre. On ne verrait jamais un Tywin Lannister sur le champ de bataille, par exemple, et ça lui inspire un certain mépris. Qui sont ces gens qui regardent de l’arrière pendant que d’autres gagnent les guerres qu’ils déclenchent à leur place ? Des lâches ou des méprisants qui considèrent leur armée comme un troupeau qu’on peut mener à l’abattoir, pions sur des cartes, guère plus, noble de cours qui viennent pleurer après la protection de chevaliers comme lui, en armure, pour les renvoyer au placard dès qu’il s’agit d’honneur – il ne faudrait tout de même pas chanter les louanges d’un bâtard ! Il ne nie pas leur talent de stratège, mais il a plus de respect et plus envie de suivre quelqu’un qui est capable de mouiller la chemise, fût-elle en maille, et à ce titre, son a priori concernant Grafton est favorable. Et puis à vrai dire, Manfred est intrigué. Il se souvient bien de Corcolline et d’avoir attendu des heures avec un des gardes de la suite Grafton, alors qu’ils s’emmerdaient comme des rats morts pendant que les seigneurs de ce monde décidaient de leur révolte, ce qu’il ne savait pas à l’époque. A la réflexion, ce type là avait posé beaucoup de questions – plus que lui, et plus qu’il n’avait donné de réponses. Était-il commandité par son maitre, alors, qui l’aurait chargé de se renseigner sur lui ? L’idée fait un peu sourire Manfred. Non qu’elle soit ridicule, mais elle témoigne d’un besoin de savoir et de contrôler son environnement pour en garder la maitrise. Lui n’a rien à cacher, à vrai dire, alors il s’en moque un peu.

C’est peut-être qu’il n’a pas conscience du danger ou de l’importance qu’il pourrait avoir, en réalité. Manfred n’est pas encore tout à fait habitué à être un acteur de cette guerre, ou de quoique ce soit d’ailleurs, ni à l’idée d’avoir potentiellement un destin qui s’offre à lui. Il n’est guère impressionné par les dorures et la splendeur du lieu, précisément parce qu’il a connu le fort de Bataille-Isle, le phare de Villevieille, Castral-Roc et Port-Lannis, et puis le Donjon Rouge et Port-Réal. Mais cela doit faire son effet lorsqu’on n’a rien connu d’autres, songe-t-il, lucide quant à la technique employée, alors qu’il traverse l’aile du manoir Grafton pour aller à la rencontre du maitre des lieux, sa cape battant derrière lui. Non, ce qui impressionne Manfred, c’est ce titre par lequel on l’annonce – chevalier, Garde Royal – lorsqu’il entre, comme s’il peinait encore à réaliser l’honneur improbable qu’on lui a fait.

Mais pas le temps de s’attarder là-dessus. Déjà, le voilà rendu devant le maitre des lieux. « Lord Grafton. » Il s’incline en retour, guère plus, attendant la suite – ici c’est son interlocuteur qui donne le tempo. « Je vous remercie, monseigneur…j’ai fait ce qui devait être, c’est tout. Et c’est bien peu de choses par rapport à vous. Je suis heureux de voir que vous vous êtes bien remis de vos blessures. » Lui, ne pas avoir fait grand-chose ? Ça se discute, diraient ceux qui ont vu la charge infernale et désespérée qu’il a mené seul à coup de masses. Mais pour Manfred, ce n’est pas de la fausse modestie, d’autant que Flowers a tendance à être un infernal vantard doublé d’un provocateur. D’abord il n’a fait que ce qu’il sait faire et ce pour quoi il a été recruté : se battre, comme de cette affaire d'abordage et de cabotage d'il y a trois lunes. Ensuite sa conception de la loyauté est telle qu’elle prend le pas : Viserys lui a sauvé la vie, il lui devait bien cette charge hallucinante et halluciné, qui lui ressemble par l’inconscience qu’elle démontre. Et surtout, Manfred n’a pas failli perdre la vie, même s’il n’est pas passé loin d’une blessure importante contrairement à Gerold, si bien que ses paroles témoignent d’un respect sincère. C’est aussi là que se niche la différence : personne n’aurait blâmé le sire de Goeville de ne pas venir se battre en première ligne, alors que c’était quelque chose d’attendu pour Manfred. Pourtant la Main du Roi l’a fait. C’est ce qui fait de lui un noble à part, et peut-être ce qui lui vaut, aussi, une certaine honnêteté de la part du chevalier : « Et quant à Goëville…au vu de la situation, je dirais que je ne me trouve pas trop mal traité. Je suis venu dans le Val pour voir du pays, je peux dire pour sûr que tout ceci est…dépaysant. »

Il ne peut résister au plaisir d’un bon mot, accompagné d’un mince sourire, sans trop élaborer cependant : ce n’est pas le sujet. Tous les deux savent ce qu’il en est en réalité de la situation de la cité. Ce n’est pas encore désespéré, mais cela viendra peut-être. Tout dépend de ce qu’ils décideront, mais c’est trop tard pour reculer, et quant à lui, il s’est résolu à accepter son destin. Et justement, voilà le temps d’agir, et Manfred va cette fois droit au but : « Je venais procéder à un rapide compte-rendu, sur demande du roi, de la mise en place que sa majesté et vous avez ordonné sur le plan militaire. En ce qui concerne le siège en lui-même, les points d’eau sont recensés et gardés…et des hommes ont été affectés à la garde des réserves et à leur distribution. Mais je suppose que votre intendant vous a déjà assommé avec assez de chiffres relatifs aux blés et aux granges pour aujourd’hui et je risquerai de m’endormir moi-même en me lançant dans un tel exposé. » Sa franchise qui flirte en permanence avec l’insolence, sans pour autant qu’il souhaite se montrer irrespectueux, est celle du gamin de vingt ans qu’il est, sans filtre, va-t-en-guerre et sans aucun gout pour l’intendance. « Plus précisément, sa Majesté m’a chargé de vous faire un compte-rendu de sa dernière sortie en mer dont il vient de revenir. Il estime avoir pu endommager une dizaine de navires et en avoir coulé cinq ou peut-être six.  Et pour terminer, il m’a ordonné de me tenir à votre disposition si jamais vous trouviez utilement à m’employer, que ce soit pour la défense de la cité ou pour la préparation des négociations avec la délégation. Plutôt militairement, bien entendu, mais je ne vous surprendrai guère en le disant. »

AVENGEDINCHAINS


@Gerold Grafton en espérant que ça t'aille et m'excusant pour mon retard abominable !

#01796F : Manfred Flowers


Fou du Roi, Chien du Heaume

by zuz'
Gerold Grafton
Staff

Gerold Grafton

Informations
Flowers season. Tumblr_n3z9pivxjx1qej1qro2_250
Ft : Blake Ritson
Messages : 1189
Date d'inscription : 03/03/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
1000 messages
L'incarnation
100e RP
Time Traveler


   
# 
Très peu étaient destinés à devenir quelqu'un. Et encore moins le supportaient-ils lorsque cela leur arrivait par inadvertance. Gerold en avait vu, des comètes traverser l'atmosphère de l'ambition dans un éclatant brasier avant de disparaître dans l'inconnu l'instant d'après, se désintégrant parfaitement sur une trajectoire trop difficile à maintenir. La noblesse avait cela de remarquable qu'elle préparait l'esprit à briller d'un certain lustre tout au long de son existence ; raison pour laquelle les familles aristocratiques étaient des constellations figées dans le ciel là où tant de petits bourgeois et de chevaliers se réduisaient bien souvent à une griffure éphémère sur la surface du firmament. Il y avait la qualité du sang, bien sûr, mais Gerold était bien placé pour savoir qu'un tel atout devenait inutile à qui ne savait pas l'exploiter. Le sang n'était rien sans un peu d'esprit et le pouvoir montait à n'importe quelle tête de la même façon. Quelqu'un de peu préparé, le pouvoir rendait impudent et rustre, ou vaniteux, puis narcissique. Et celui qui ne rougissait de rien voyait le destin cesser de lui sourire.
Cassandre, cette esclave devenue Capitaine, était une merveilleuse exception qui n'avait cessé de fasciner le maître des lieux. Sa fulgurante acensions n'était sauvée que par sa parfaite dévotion à une cause ne lui appartenant pas. Pour perdurer, il fallait se réduire à la plus parfaite humilité. Un point qui n'était franchement pas le fort de Gerold, quoi qu'il s'en fut globalement prémuni - mais la fierté avait toujours été son premier et avilissant reflexe. Cependant, on ne laissait pas un écho de son nom dans l'histoire en restant toujours dans l'ombre des autres. Le pouvoir était donc un savant mariage entre humilité et conviction. Dès que l'on franchissait la première marche de cette échelle, l'on se confrontait à une kyrielle de regards, tous prêts à contempler votre élévation ou votre perte et à chaque pas, il y avait toujours quelqu'un pour vous y aider ou vous poignarder dans le dos. Gerold était un homme pratique : il poignardait ceux qui ne se destinaient à rien d'autre qu'à chuter. Que ce fut plus tard ou maintenant...
« Je vous remercie, monseigneur…j’ai fait ce qui devait être, c’est tout. Et c’est bien peu de choses par rapport à vous. Je suis heureux de voir que vous vous êtes bien remis de vos blessures. »
Gerold expira doucement, longuement. Comme c'était charmant de sa part de lui rappeler ses blessures. Le sourire du Seigneur se serra en une ligne étroite, comme un cheveu sur la soupe. Même lorsque le Roi lui manifestait ce genre de politesse, Gerold avait l'impression d'y voir un reproche. Malgré ses efforts, son tempérament tendait à vouloir éluder ses vulnérabilités passagères. Ca le rendait cinglant et désagréable, typiquement parce que son propre usage de la politesse était majoritairement dédié à badigeonner ses interlocuteurs du pinceau de son indifférence.  
« La flatterie est un commerce qui n'est utile qu'au flatteur, dit-il d'un ton facétieux. Mais je l'accepte... pour cette fois. »
Quant à ses propres félicitations, elles avaient été dites comme une mise en garde, car ce pourquoi on avait été plébiscité devait être sans cesse répété pour demeurer à la hauteur ; l'ambition était une promesse qui était difficile à tenir. Le jeune Flowers allait bien vite le découvrir. Etre un chevalier pour l'argent n'était pas du tout la même chose qu'être un chevalier au service d'une maison. Il allait devoir rapidement changer d'attitude quant à ses motivations, car "voir du pays" n'allait bientôt plus être une réponse acceptable aux yeux de ceux qu'il était parvenu à surpasser. Et comme le disait l'adage : la tête qui dépasse de la foule est la première à se faire trancher. Ce Flowers avait beaucoup d'envieux, à n'en point douter. Parce qu'il était jeune, puis parce qu'il n'avait pas de nom, contrairement aux autres jeunes Ser de Machin et Sir de Chose, qui se faisaient dangereusement talonner par un bâtard. Gerold en savait quelque chose...
Il écouta son compte-rendu avec l'intérêt que l'on pouvait accorder à ce genre de travail, dissimulant effectivement qu'il avait été mis au courant ; le savoir n'autorisait pas à négliger les répétitions, mais surtout le travail accompli. Comme à chaque fois qu'il butait sur un détail, Gerold fixa le chevalier avec un sourire lunaire aux lèvres, patient et amusé par ce mélange inégal entre courtoisie et simplicité. Cette même maladresse s'observait en permanence chez Ser Cassandre, lui conférant l'assurance de la franchise, à défaut de lui prêter un peu de subtilité. Mais c'était une guerrière, et l'incapacité à dissimuler ses pensées au profit du combat était tout ce qu'on pouvait espérer d'elle. Le Flowers en revanche jouait encore sur les deux tableaux, entre civilité et excès de confiance : une attitude qu'il fallait être en mesure d'assumer.  
« Si vous vous endormez devant de tels comptes-rendus, c'est soit que vous ignorez comment tenir un domaine, soit que vous manquez de considération pour ledit intendant, ou que l'issue du blocus vous est indifférente... dit-il d'un ton mielleux, avec une expression dissipée entre sérieux et espièglerie. Mais ce n'est évidemment pas votre cas, n'est-ce pas ? » conclut-il d'un air entendu.
Gerold se retourna et se pencha brièvement sur l'un des nombreux livres ramenés par son intendant. Son doigt glissa longuement sur le parchemin, se remémorant quelques chiffres que le Flowers n'avait pas daigné lui spécifier.  
Ce n'était pas méchant ; un rappel que dans un monde d'allégeances, tout ce qui était dit avait un poids différent en fonction des circonstances – plus encore lorsque l'on portait une cape pareille. Gerold ne savait pas exactement pourquoi il ne s'était pas contenté de le renvoyer dans le plasma existentiel duquel il était sorti au lieu de gentiment le cadrer. Il griffonna une marque par-ci, par-là, sur le côté d'interminables colonnes, choisissant de faire confiance aux dires de Ser Flowers, quand bien même avait-il cruellement manqué de précisions. Si tous les points d'eau étaient gardés, c'est qu'ils étaient gardés.  
Alors que le jeune homme continuait dans son récit, consciencieusement, Gerold feuilletait quelques pages avant de tomber sur une carte maritime accompagnée de tableaux. Là encore, il laissa ses annotations en fonction de ce qui était dit. Les succès de son Roi n'étaient pas ceux qu'il avait espéré, mais la mer et les vents étaient capricieux ces derniers jours.  
« Il faudra envoyer des éclaireurs pour savoir si c'est cinq ou six... » marmonna-t-il pour lui-même, avant de se redresser, légèrement intrigué.  
La formulation était particulière. Viserys laissait-il son nouveau garde entre les griffes de sa Main à titre intentionnel ? Ou n'était-ce que par commodité administrative ? Les deux étaient amplement possibles et en se retournant, Gerold toisa le chevalier d'un regard particulier.  
« De vous tenir à ma disposition... » répéta-t-il d'un air songeur, le regard perdu dans le vague.
Il resta un moment comme tel, prenant appui sur son bureau, se mordant la lèvre et l'air douteux. Vraiment, laisser quelqu'un à sa disposition n'était pas une chose à faire. Il y avait moult façons "d'employer" un chevalier et Gerold manquait de distractions, ce qui décuplait considérablement son imagination. Finalement, le Grafton abandonna la plume à écrire, qui avait laissé trois traces noires caractéristiques sur ses phalanges, et se rapprocha du chevalier d'un pas flottant.  
« Et qu'est-ce que vous savez donc faire à part balayer l'horizon de votre étoile du matin, Ser Flowers ? Demanda-t-il en esquissant un sourire un peu sournois. Je n'aimerai surtout pas vous ennuyer ou vous endormir, susurra-t-il d'un ton doucereux, avant de contempler son armure finement ciselée. D'où venez-vous, dites-moi ? »

Spoiler:
Manfred Flowers
L'intranquille

Manfred Flowers

Informations
Flowers season. Tumblr_oj64d9pjH41twemn9o3_r5_540
Ft : Lorenzo Richelmy
Multi-Compte : Lowell Blount ; Clifford Swann
Messages : 282
Date d'inscription : 04/09/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
Multicompte


   
# 

Liliyana & Manfred
Flowers Season
304, lune 10, semaine 1

Il faudra bien que tu apprennes un jour à fermer ta grand gueule et à ne pas l’ouvrir à tout bout de champ, lui assénait souvent Martyn, sans quoi, tu vas finir par avoir des problèmes. Dans le monde de Manfred, il pouvait encore se permettre ses insolences et on le mouchait rarement. Mais dans la chaine alimentaire, à Goeville, il n’était plus personne. Ou plutôt il était déjà quelqu’un et il n’était pas habitué. Surveiller son langage, mélange d’arrogance et de sincérité emprunte de son éducation de quasi noble, était une tâche étrangère à la vie de Manfred. Ainsi, il ne comprit pas vraiment en quoi il avait été vexant, quoiqu’il perçut que Grafton ait mal pris son compliment. Pourtant, il n’était pas flatteur et seulement sincère. Non que Manfred ne soit pas ambitieux, mais qu’aurait-il eu à y gagner ? Le concept de manœuvre ne lui était pas étranger ; simplement il le méprisait pour ce qu’il était, n’ayant aucun dans la politique et ayant déjà obtenu plus que ce qu’il pensait pouvoir un jour atteindre. Car il ne pourrait devenir plus que Garde Royal. Si bien qu’en réalité – et trop honnête pour son bien qu’il se trouvait être – le compliment adressé à Gerold était tout simplement vrai. Tywin Lannister n’aurait pas fait ça, il dirigeait toujours de l’arrière, et pour l’Intranquille, cela voulait dire beaucoup quand à Grafton.

Se taire, il aurait du le faire une deuxième fois lorsqu’il eut le malheur de rire. Car là non plus, ce n’était rien de plus. Mortifié, Manfred perdit instantanément son sourire. Un peu honteux, il répondit sans morgue, cette fois : « Non, monseigneur. Je ne suis pas de ce genre là. Mes excuses si j’ai pu laissé penser que c’était le cas. » Il n’avait pas encore conscience qu’on pourrait retenir contre lui ses paroles ou s’en servir, parce que le concept de cour et de courtisans lui était un monde connu, mais tout de même relativement inaccessible. Surtout, Manfred n’avait absolument pas conscience qu’on pouvait envier sa place, encore trop habitué à son statut de bâtard et de chevalier errant. « Je crois simplement qu’aucune guerre ne peut être gagnée lorsque des intendants se prennent pour des chevaliers ou des chevaliers pour des intendants. » Cela dit, on ne survivait pas dans un monde hostile sans un peu d’instinct de survie, et il eut conscience qu’il fallait ici faire une réponse courte et qu’aucune autre attitude que la contrition ne serait acceptée. Impulsif et blagueur, il savait tout de même reconnaitre lorsqu’on lui donnait une leçon, et n’en conçut que plus de respect pour la Main du Roi. Gerold aurait pu le punir ; il l’avait averti, et il le prit avec reconnaissance.

Cependant, le reste de l’attitude du seigneur de Goeville le déstabilisa un peu. Manfred était habitué aux règles du champ de bataille apprises son mentor, Martyn Tournebaie. Fais cours, répétait le chevalier. Ton interlocuteur a besoin d’une synthèse et d’une vision d’ensemble. S’il souhaite approfondir, il posera des questions, auxquelles tu dois avoir la réponse par avance. L’absence d’interrogations sur ce qu’il aurait pu avoir de plus et le seul marmonnement de Gerold étonnèrent donc Flowers. Cela lui confirma également qu’il était tombé sur un homme habitué à tout contrôler et tout vérifier lui-même. Déléguer, là encore, lui semblait pourtant essentiel, mais ce n’était pas à lui de juger le commandement, sinon pour glisser, de façon aimable, une précision utile, sans avoir l’air de corriger ou en tout cas de trop contredire directement le seigneur de Goeville : « Je doute qu’ils y parviennent. Il faudrait traverser leurs lignes jusqu’à l’arrière du blocus. L’incertitude vient du fait que le dernier vaisseau est une de leur grande galéasse d’approvisionnement. Le feu a pris par les voiles et ils n’ont pas encore réussi à arrêter l’incendie. Regardez, vous le verrez d’ici. Deux mats sont touchés. Personnellement, je ne crois pas qu’elle coulera entièrement, sauf à la viser directement. Mais je ne pense pas qu’ils puissent encore la manœuvrer. En revanche, s’il s’agit de l’identifier, je suis moins sûr. Je miserais sur la Conque ou l'Anémone. »

Mais c’était là un point presque accessoire. Rapidement, on en vint au cœur du sujet, le fait que le roi ait donné l’ordre au chevalier de servir directement sa main. Manfred faillit ouvrir la bouche pour répondre à la première question de Gerold, voulant expliquer à quoi il était bon – après tout la question ne manquait pas de pertinence, tous les chevaliers ne se ressemblant pas – et peut-être s’excuser de nouveau, piqué au vif d’être pris pour un tire au flan par sa propre faute et d’avoir définitivement fait mauvaise impression. Mais il s’arrêta in extremis devant la seconde question. En fait, celle-ci le surprit. Habitué à vivre dans le Bief et dans l’Ouest, où son histoire était connue, Manny n’était plus habitué à devoir réexpliquer cette dernière. C’était oublier un peu vite que dans le Val, si loin de chez lui, il n’était personne, et que même aujourd’hui, paré de ce manteau vert, il lui restait tout à prouver, surtout à quelqu’un d’aussi placé, qui commandait des centaines de chevaliers et pour qui il n’était sans doute qu’un nom parmi d’autres. Néanmoins, la question lui parut être l’occasion de se présenter un peu mieux et une ouverture relativement bienveillante malgré tout, ce qui le poussa à répondre avec sincérité : « De Mielbois. Je suis le fils de Malora des Essaims…je suis le petit-cousin de lord Warryn. Quant à mon père, c’est l’ancien seigneur de Kayce, Terrence Kenning. Mon demi-frère, Darren, l’a forcé à prendre le noir après un certain nombre de malversation à Kayce. »

Pas noble donc, mais pas tout à fait n’importe qui non plus. Même s’il restait un enfant sans père, celui-ci n’ayant pas voulu le reconnaitre. Même s’il restait l’enfant d’une relation malsaine dont Malora restait nostalgique. Même s’il ne valait pas beaucoup mieux qu’un enfant du commun ou sans nom. Manfred le savait et il l’assumait. Son nom était un affront, sans doute ; mais c’était aussi le sien, et il avait décidé que puisque c’était la seule chose en sa possession, il se l’approprierait et s’en ferait une armure. Surtout, Manny ne s’était jamais réduit à cela, comme il entreprit de le préciser, à travers son parcours : « J’ai été l’écuyer de ser Martyn Tournebaie, qui fut un temps émissaire de Charmchamp. C’est lui qui m’a offert cette étoile du matin et c’est aussi lui qui m’a adoubé, sur le champ de bataille, après Winterfell. Après cela j’ai été le maitre d’armes de lord Florent pendant huit mois. J’étais avec lui à Corcolline, où je crois que vous étiez aussi. » C’était là l’autre raison de son étonnement quant aux questions de Gerold à propos de son parcours, car l’Intranquille se rappelait bien les questions de son garde. Peut-être la Main du Roi souhaitait-il vérifier qu’il ne lui servait pas un récit différent. Il était vrai aussi qu’il avait moins parlé, cette fois là, mais parce que le garde ne lui avait pas posé de question sur son enfance… « Ensuite j’ai voyagé entre l’Ouest, le Conflans et le Bief soit comme garde du corps soit pour escorter certains convois de marchands. Pour la grande majorité de mes contrats, lord Florent avait eu la bonté de me recommander, ce qui m’a aidé. Si vous demandez leur opinion à lord Lychester, lord Jast ou lord Caswell, ils se souviendront sans doute de moi. C’était avant d’arriver ici et la bataille, et avant que le roi ne me sauve la vie. » Manfred ne se donna pas la peine de préciser quand ou comment. Il était évident que c’était à la bataille qui avait eu lieu quelques mois plus tôt. Mais un tel éclair de reconnaissance et d’admiration brilla dans son regard qu’il était impossible d’ignorer à quel point sa il s’en était trouvé et à quel point sa loyauté était profonde.

Pour le reste, que dire de lui ? Il ne savait pas trop. Martyn lui avait appris beaucoup de chose, mais pas à vraiment à se vendre. Auprès des filles, c’était facile, mais face à un supérieur ? Manfred ne savait pas trop. Il restait un jeune homme de vingt ans, peu sûr de lui, dont l’arrogance et l’impétuosité compensaient une assurance qu’il ne possédait pas. Ayant été souvent rejeté de ce qu’il considérait comme un foyer, il était encore à la recherche de sa place exacte dans le monde, et dans ce cas précis, comme chevalier et comme garde. Alors il opta pour une honnêteté sans fioritures, peut être un peu hésitante. « Je crois me défendre comme instructeur et comme protecteur. Je ne suis pas mauvais à l’épée et comme vous l’avez dit, à la masse. Je sais correctement lire et écrire et manier les cartes terrestres et navales, même si je ne suis pas vraiment un marin, du moins en mer. Sur les fleuves, je me débrouille. Je n’ai pas les connaissances d’un mestre, ce que je regrette, mais les livres ne me font pas peur. Ser Martyn a tenté de m’apprendre la diplomatie, je ne suis pas sûr qu’il ait réussi, mais à défaut d’être un ambassadeur parfait, je connais les exigences du rôle d’émissaire. » Peu à peu, le ton s’affermit et Manfred se fit plus sûr de lui : « Je suis avant tout un chevalier. Mon rôle premier est de combattre. S’il faut mourir pour cela, je le ferai aussi. Et s’il s’agit d’autre chose, je l’apprendrai, que cela m’ennuie ou pas. » Dans ses yeux clairs brillait une étincelle de fierté déterminée. Quoique Gerold l’ordonne, il le ferait. Et s’il fallait encore le convaincre de lui laisser sa chance, Manfred le ferait aussi. C’est ce qui le conduisit à devancer une ce qu’il crut être une question : « Le roi m’a dit de me tenir à votre disposition. Vous êtes sa Main. Lorsque vous parlez, c’est lui qui parle. Et j’obéis. » Pour lui, c’était aussi simple que ça. Quelques soient ses défauts, on ne pourrait pas lui reprocher de ne pas connaitre le sens du mot loyauté.

AVENGEDINCHAINS


@Gerold Grafton

#01796F : Manfred Flowers


Fou du Roi, Chien du Heaume

by zuz'
Gerold Grafton
Staff

Gerold Grafton

Informations
Flowers season. Tumblr_n3z9pivxjx1qej1qro2_250
Ft : Blake Ritson
Messages : 1189
Date d'inscription : 03/03/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
1000 messages
L'incarnation
100e RP
Time Traveler


   
# 
Après toutes ces années, il s'en délectait encore. Les visages qui rougissaient, les sourires qui s'évanouissaient, les organes qui se liquéfiaient. Ser Flowers était parfait dans le rôle du mec qui se tétanisait lorsqu'il réalisait sa méprise. Son titre y était pour quelque chose, lui prêtant des facilités pour entourlouper les gens, crédules et souvent si simples à confondre. Enfin, parlant de fondre, c'était ce qui devait certainement arriver en ce moment même. La fierté soufflée, le jeune chevalier avait adopté un ton plat pour défroisser les fronts, clairement en train de se dissoudre de l'intérieur. Ca ne devait pas être tous les jours facile, d'être un plébéien.
Les excuses et les explications n'y changèrent rien ; Gerold ne l'avait pas dit pour le fond, mais uniquement pour la forme, et savait déjà que ce qui avait été le fruit d'une maladresse un peu désinvolte n'allait pas être réitéré. Rien que pour éviter ce genre de sentiments, ce torrent de honte et d'impuissance que vos erreurs ramenaient par rafales à vos joues. Les intendants avaient beau être de piètres chevaliers et les chevaliers de piètres intendants, il n'en allait pas moins qu'aucun n'appréciait de se faire réduire à sa seule fonction, qu'elle fut musculaire ou intellectuelle. Un sot avait beau être un imbécile dont on voyait l'orgueil à travers les trous de son intelligence, la cruauté en devenait le remède lorsque cet orgueil se retrouvait blessé. Gerold l'avait appris à ses dépens, ce qui ironiquement avait éveillé sa propre cruauté à travers une vanité offensée. Ses éducateurs n'avaient jamais été tendres ; encore moins lorsqu'il avait tenté d'être plus malin qu'eux.
Mais revenons à nos moutons dont les petites pattes tremblaient de tout leur long. Gerold dut faire ce qu'il n'aimait pas particulièrement : corriger. Il ratura avec une légère contrariété ce qu'il avait écrit dans le carnet et fit une soustraction. C'était donc cinq. Chacun avait son style, entre le général à qui il fallait tout expliquer et l'intendant dont la capacité d'écoute ne dépassait pas tout ce qui allait au-delà des trois mots. Quant au Lord Grafton, il préférait le style compliqué de la synthèse se satisfaisant à elle-même. Naviguer dans les détails demandait à ne pas se tromper dans ses questions et s'avérait parfois être une perte de temps. Il ne faisait simplement pas confiance en la capacité de certain de ses subordonnés à délivrer les informations véritablement utiles pour se permettre d'être concis sans perte de données.  
« Dites-moi la prochaine fois tout ce que vous pensez que j'ai besoin de savoir » sans que je n'aie à vous le demander, songea-t-il sans reproche.

Dans la même perspective de mieux se connaitre, le Ser Flowers parût d'abord surpris. Gerod l'examina, se demandant si cette latence était due au sincère étonnement de devoir parler de soi ou parce qu'au contraire, le Lord Grafton aurait dû d'emblée le connaitre. L'éventualité de la seconde supposition poussa Gerold à se renfrogner légèrement, lui qui n'aimait pas être pris en faute, quelle qu'elle fut, surtout par un subordonné. Mais le chevalier finit par lui livrer malgré tout un récit plutôt long et honnête sur ses origines, et Gerold l'écouta très attentivement, sans sembler juger ou s'ennuyer d'une telle profusion de détails.  
Il fallait dire que certains évènements s'étant produit chez les Kenning avaient éclipsé tout le ciel du Bief. Difficile de dire ce qui était pire : se faire destituer par sa population ou par ses propres enfants ? Le Grafton éprouvait une sorte d'admiration pour la poésie du geste, mais en termes de réputation, ça ne passait pas toujours, quand bien même les intentions avaient été nobles à l'origine. Manfred venait donc s'ajouter aux multiples vices d'un ancien Seigneur définitivement excommunié au Nord. Quant aux des Essaim, la présence de Manfred démultipliait certainement leur position, au moins nominativement. Le Flowers venait de loin... ce qui était la marque de bâtards soit désireux de trouver leur propre gloire, soit chassés de leur maison d'origine. Les héritiers étaient jaloux et protecteurs, tandis que les mères n'avaient parfois rien à offrir, surtout à un degré aussi éloigné de la succession familiale.
Les yeux de Gerold s'ouvrirent légèrement avant de se plisser lorsque Manfred lui rappela sa présence à Corcolline. Il hocha de la tête, puis sourit. Ce qu'on lui avait rapporté à l'époque ne s'était avéré guère intéressant ; il n'avait rien appris de plus que les rumeurs, et il fallait croire que le chevalier n'avait pas été au service du Florent assez longtemps pour révéler l'inoubliable. Le reste, Gerold le connaissait plus ou moins et était satisfait de constater les allégeances que Viserys était capable de créer dans l'esprit des gens malgré l'ordalie. La reconnaissance était une force en mouvement perpétuel.  
Bien avant que Manfred n'ait fait état de ses talents, Gerold avait déjà trouvé quelque utilité au jeune chevalier, tant de façon générale que spécifique, mais il l'écouta se distinguer d'une énumération hasardeuse, avant de s'enhardir et de conclure sur une note fort honorable et pleine de dévotion. Tous les chevaliers juraient ainsi, avec plus ou moins de panache et de conviction, mais la jeunesse avait un enthousiasme particulier, par moment un peu crédule. La passion s'étiolait avec les guerres et les injustices, et s'il en demeurait quelque chose, là résidait la véritable loyauté, celle qui était davantage de raison que de cœur, en dehors des affres de l'amour.
« Vos parents vous ont donc donné une bonne éducation...? » finit-il par dire, à mi-chemin entre le constat et la question.
Il pouvait se tromper, évidemment, mais plus un bâtard démultipliait les qualités, plus il était le gage d'une famille ayant à cœur son avenir ainsi que sa progression dans l'existence. Plus rares étaient ceux qui avaient décidé de devenir plus que ce que leur condition leur permettait à l'origine, alors cette dualité d'éloignement et de savoir-faire intrigua le Seigneur de Goëville. Et parce que le Flowers lui était redevable de par sa position, il lui posa la question sans détours, après l'avoir balayé du regard de la tête aux pieds, comme pour mesurer sa position sociale à sa stature, alors que certains jugeaient d'un artisan selon la qualité de ses œuvres.  
« Vous êtes bien loin de chez vous, ser Flowers  » dit-il d'un ton qui n'interrogeait pas, mais demandait clairement une explication.  
Gerold savait bien qu'à supposer les réponses, on finissait par la donner, car les individus se rabattaient souvent sur ce qui était énuméré, plutôt que de trouver leurs propres mots. Aussi, il en resta là, laissant au chevalier le soin de prolonger son honnêteté, ou de gagner en pudeur. Néanmoins, ses propres projets se dessinaient dans le passé du Flowers.  
« Que penseraient-ils, en vous sachant ici ? »
Doucement, de question en question, il cheminait pour donner à Manfred la piste de ce qu'il voulait entendre. Autant, les Des Essaim était une affaire plus ou moins conclue – cependant, le serait-elle un jour lorsque l'allégeance était prise de force ? –, tandis que les Kenning étaient encore à conquérir et comme avec l'ensemencement, il fallait tâter la terre d'abord. Ils étaient certes des alliés historiques des Lannister, mais l'opportunisme était une maîtresse parfois bien plus tentante. Et s'il y avait bien quelqu'un avec qui il ne fallait jamais rompre le contact, c'était l'ennemi. Ne serait-ce que pour s'assurer que la voie n'était pas close, et qu'ils parlaient un langage semblable...
« Et que diriez-vous si je vous demandais d'écrire au Lord Kenning ? »
Manfred Flowers
L'intranquille

Manfred Flowers

Informations
Flowers season. Tumblr_oj64d9pjH41twemn9o3_r5_540
Ft : Lorenzo Richelmy
Multi-Compte : Lowell Blount ; Clifford Swann
Messages : 282
Date d'inscription : 04/09/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
Multicompte


   
# 

Liliyana & Manfred
Flowers Season
304, lune 10, semaine 1

« Oui, messire. » Manfred inclina légèrement la tête, signe qu’il avait compris et qu’il se le tiendrait pour dit. Gerold n’aurait pas à lui donner cette instruction deux fois. L’Intranquille était jeune et encore en phase d’apprentissage. Mais qu’on lui donne sa chance – il ne demandait que ça – et il apprendrait, justement, et plutôt vite. Il avait tant et tant à prouver, par gratitude et loyauté, que le jeune chevalier était près à beaucoup de chose pour le montrer, voulant absolument bien faire et se montrer digne du manteau qu’on lui avait accordé.

Les questions s’enchainèrent ensuite. D’aucuns les auraient mal pris, estimant qu’on aurait du les connaitre, ou soucieux de conserver intimité et part de mystère. Pour être parfaitement honnête, ça ne dérangeait pas vraiment Flowers. A vrai dire, des informations que lui demandait la Main du Roi, il était presque sûr qu’elles pourraient être fournies par d’autres. Mais Grafton se souciait – par intérêt réel ou tactique, ou peut être les deux – assez de lui pour lui demander sa version et lui offrir la possibilité de raconter les choses de son point de vue. De se vendre, finalement. C’était une chose assez rare pour qu’il la reconnaisse à sa juste valeur. Personne ne vous tendait la main ou ne vous donnait une chance, dans ce monde, lorsque vous étiez un bâtard. Et pourtant, Gerold le faisait, alors ça intriguait Manfred, et ça forçait son respect, si bien qu’il croit devoir, que ça le serve, ou non, quelque chose d’important : de l’honnêteté. « Je le pense, même si je crois plus devoir à ser Martyn et à mon grand-père, ser Rupert, qu’à lord Kenning sur ce plan là. Quoiqu’il se soit assez soucié de moi pour négocier un écuyage, ce souci ne s’étendait pas à l’idée de me reconnaitre. » Il n’était pas amer, simplement un peu triste, et ce qu’il disait tenait de l’ordre du constat. A force, Manny était habitué.

La seconde fut elle un peu plus déstabilisante. « Chez moi ? » Il y a de l’incrédulité dans la voix de Manfred en disant cela. Un instant, il ne sait même pas vraiment quoi répondre, parce qu’il est étonné qu’on puisse l’associer au mot « foyer ». Lui-même aurait eu du mal à le faire. Est-ce que Kayce était son foyer ? Sûrement pas. Charmchamp ? Non plus. Mielbois, alors ? Peut-être était-ce effectivement ce qui s’en approchait le plus. Mais au final, il n’y avait passé que huit ans de sa vie. Et après il était par monts et par vaux avec ser Martyn, et ça n’avait pas aidé. « Pardonnez-moi, messire. Mon incrédulité doit paraitre incompréhensible. C’est simplement que chez moi…je ne sais pas vraiment où c’est. » Ce n’était qu’un gosse à la recherche de lui-même, il ne fallait pas l’oublier. « Version courte : les bâtards n’appartiennent à nulle part. Même lorsque nous avons une famille et que nos parents nous reconnaissent. Ser Martyn disait que comme toute liberté, c’était à la fois une malédiction et une bénédiction. C’est assez vrai. » A force, on s’y habituait, ou du moins, on prétendait s’y être habitué, et on se faisait de cet état de fait une armure.  « Version longue ou disons, version pragmatique. Si vous parlez de l’Ouest ou du Bief, Lord Tournebaie ne souhaitait pas me conserver à son service après la mort de ser Martyn. » Le ton restait distant et mesuré, mais Manfred n’en pensait pas moins. Un jour, Tournebaie lui paierait cette humiliation, il se l’était promis, il trouverait un moyen. A l’époque, il avait du faire bonne figure. Souvent, il n’y avait pas d’autres moyens et il restait difficile de répliquer face aux puissants. Mais un jour, qui savait… « Je ne souhaitais quant à moi rien devoir à lord Terrence. Lord Darren n’avait, ensuite, aucune place à m’offrir, quoiqu’il n’ait lui-même rien contre moi, je pense. D’après ce qu’il m’a dit, ni sa sœur ni sa femme n’auraient bien pris que j’entre à son service. Et je ne voulais pas être source de conflit avec sa femme ou sa sœur, ni être une charge pour lui. Donc je n’ai pas insisté. Je ne voulais pas l’être non plus pour lord Ben ou lord Warryn, à Mielbois. Aucun des deux ne m’a chassé mais…ils n’ont jamais trop su quoi faire de moi. Donc je me suis dit que je pourvoirais moi-même à me trouver une place. Le reste, vous le savez déjà. Finalement lord Florent et le roi sont les seuls à m’avoir vraiment donné une chance. »

Les questions de Gerold continuèrent. La suivante fut plus difficile. Il y vit un test, une manière de le jauger et de voir si ce qu’il disait était vrai, si les liens qu’il avait avec le camp loyaliste par sa famille paternelle l’affecteraient un jour ou non. « Version courte ou longue de nouveau, eh ? Version courte. Ils me trouveraient sans doute décevant. Sauf si cela venait à servir leurs intérêts. » C’est le destin de tous les bâtards, une sorte de signe des temps, peu importe qu’il y ait ou non une guerre. Manfred était lucide sur ce point. Presque blasé. Bien sûr, il y avait une partie de lui qui était ennuyée, quoiqu’il en dise. Parce que si toute sa loyauté allait au roi, il était loin d’être insensible et il n’avait pas envie de se retrouver face à des gens qu’il connaissait au combat. Il faudrait le faire, mort dans l’âme ou pas, il le savait, mais il avait vingt ans. Et c’est dur d’être totalement indifférent, à vingt ans. Alors évidemment, apprendre que sa famille maternelle les avait rejoint avait été un soulagement. « Version longue. Je suppose que c’est à présent particulièrement le cas pour les Des Essaims, avec qui je m’entends bien, depuis qu’ils ont ployé le genou et rejoint notre cause. Quant aux Kenning, il ne vous aura pas échappé que je n’en suis pas vraiment un. Ma naissance était une déception pour eux de toute façon, je suppose qu’ils prendront cela comme une trahison digne d’un bâtard. En tout cas, tant que Tywin Lannister tient les rênes dans l’Ouest. Si ça n’est plus le cas, je redeviendrai intéressant, je suppose, surtout s’il s’agit de redéfinir la suzeraineté de l’Ouest... » Entre sa femme, son fief, et lui, son demi-frère, qu’il ne nommait jamais ainsi, parce que ça lui semblait incongru d’appeler lord Kenning son frère, choisirait les premiers. Ca n’en rendait pas les choses plus agréable, il n’aurait pas le loisir de se poser la question. Tout ce qu’il pouvait faire, c’était prier pour que les Kenning aient l’intelligence de choisir, in fine, la cause de Viserys.

A ce titre, Manfred commençait à voir où Gerold voulait l’emmener. C’est un autre test, en somme, où il n’y a qu’une réponse possible – l’alternative, c’est la corde. « Je le ferai. » Il ne serait pas dit qu’il n’aura pas été honnête jusqu’au bout. « Mais je ne peux vous promettre que la réponse soit positive, ni même qu’il y en ait une. Vous aurez compris que je ne peux pas me dire proche de lord Darren et qu’il est, lui, proche de Tywin Lannister. » A présent, Manfred voyait où Gerold voulait en venir.  Il devenait un pion comme les autres sur le jeu de la Main du Roi, sort commun et attendu comme Garde Royal. Surtout, il avait appris assez avec Martyn Tournebaie pour comprendre qu’en matière de diplomatie, on jouait des coups à deux ou trois bandes et qu’il n’était pour l’instant pas très important que Darren réponde positivement ou non. « Mais je suppose que vous vous en doutiez déjà et que cela est indifférent à vos plans ? »  


AVENGEDINCHAINS


@Gerold Grafton avec toutes mes excuses pour ce retard monstrueux  Flowers season. 3663664295

#01796F : Manfred Flowers


Fou du Roi, Chien du Heaume

by zuz'
Gerold Grafton
Staff

Gerold Grafton

Informations
Flowers season. Tumblr_n3z9pivxjx1qej1qro2_250
Ft : Blake Ritson
Messages : 1189
Date d'inscription : 03/03/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
1000 messages
L'incarnation
100e RP
Time Traveler


   
# 
Gerold avait un véritable souci d'objectivité. Son père avait eu des bâtards et jamais l’aîné n'aurait songé à leur porter un tel égard, ni à concéder un quelconque intérêt à leur existence. Ils étaient là, quelque part dans l'antichambre de sa vie et étaient voués à ne jamais le croiser si les Dieux le voulaient bien. Enfin, les Dieux ou les portes de cette demeure, restées indéfiniment closes aux revendications des deux illégitimes. Sa courtoisie envers le Flowers n'avait pas tant avoir avec la volonté de Viserys ou à son éventuelle valeur politique, mais plutôt avec leur propre absence de liens familiaux et de griefs personnels. Quoi que, les corniauds de son père ne lui avaient à priori porté aucun tort personnellement... mais leur seule existence était une insulte à l'honneur de sa mère, Sharra, et une continuité à tout ce que Gerold avait toujours détesté chez son géniteur. Du reste, ce n'était pas leur faute et l'héritier légitime n'avait gardé aucune animosité à l'égard de ces deux branches mortes, il les avait simplement ignorés. Veillant à ne pas s'en faire des ennemis jurés, Gerold ne les avait pas destitués de leurs places ni privé d'éducation, leur concédant une vie éloignée de la misère dans laquelle ils auraient pu finir. Simplement, il s'était attaché à ce qu'ils n'aient aucune réalité dans son quotidien. Accepter la présence du Flowers et lui prêter autant de curiosité devait paraître injuste, voire très calculé. Mais il s'agissait d'autre chose, de beaucoup plus banal : Gerold était incapable de pardonner son père.  
En écoutant Manfred, il songea à ces destins manqués, à cette négligence causée par excès de luxure. Des enfants qui n'avaient rien demandé à personne et qui pourtant, par la faute de leur parent, se retrouvaient déchirés entre deux mondes auxquels ils ne pouvaient pas appartenir pleinement. Celui-là avait eu de la chance ; d'autres en avaient moins. Malgré tout, on s'était occupé de Manfred, tant du côté paternel que maternel, tout en l'abandonnant dans les limbes des liens de parenté. Ni un fils dont on pouvait être fier, ni un héritier que l'on pouvait proclamer, mais pas un inconnu non plus. Seulement une douloureuse incertitude.    
Cette pensée sembla trouver une conclusion dans la confusion du jeune chevalier. Des parents, mais pas de famille, une maison, mais pas de foyer. Ceux-là devenaient des chiens fous, ou se blottissaient contre la première cuisse qui faisait montre d'un peu de gratitude. Sa réponse fut crue ; un naturel qui n'était pas pour déplaire au maître des lieux. Il avait beau être grossier, au moins ne se faisait-il pas d'illusions. Sans cesse orphelin, il avait même fini par perdre son guide. Tour à tour rejeté, avec amertume peut-être, mais surtout une grande résignation, Manfred avait fini par atterrir ici, sur des terres en train de vivre leur propre révolution. Appuyé sur le bureau, Gerold l'avait écouté sans l'interrompre, en silence et avec ce regard particulier qui enveloppait et voulait plonger au plus profond de la pensée et du cœur. Plus que ce que Manfred disait, il lisait sur les traits juvéniles du jeune homme toute une histoire de secrètes douleurs écrites dans chacune de ses expressions venues avec le temps. A la façon dont il parlait, Gerold devinait ses inclinaisons et ses regrets, son respect et sa résignation. A travers ses explications se dessinait le récit d'un enfant dont on voulait s'occuper, mais à travers autrui ; et même les efforts de ceux-là n'étaient pas toujours respectés. Etrangement, il était plus succinct et amer envers le seigneur de la maison aux fraises qu'envers son propre demi-frère. On disait que plus l'affection et le respect étaient grands, plus la trahison était douloureuse. Ironiquement, personne n'ayant essayé de le retenir, l'intranquile Manfred Flowers avait atterri dans la gueule de l'ennemi.    
« C'est tout à votre honneur de ne vouloir dépendre de personne et de vous faire votre propre réputation » commenta-t-il seulement lorsqu'il eut terminé.  
Gerold sourit à l'impertinence familière qui semblait être le propre du chevalier et parce que c'était dit avec spontanéité et sans arrière-pensée, il ne s'en offusqua pas, ni ne lui demanda davantage de droiture, cultivant chez lui une confiance en la liberté qu'il pouvait goûter en sa présence. Gerold avait tenté de ne pas décourager ce trait de caractère chez ses subordonnés en leur évitant les répercussions de l'orgueil, mais il y avait toujours quelqu'un pour en profiter et dissimuler l'insulte sous les traits de la vérité. Ce n’était pas le genre de Manfred.  
On ne le remarquait que lorsqu'il devenait gênant. Et aujourd'hui, il l'était. Une petite faille dans toutes ces nobles et droites familles du continent. Quel pouvoir ! Manfred ne se doutait pas de l’influence qu'il avait sur la réputation de ses proches, qui avaient fait l'erreur de le lasser vadrouiller à travers monts et vallées pour se trouver des loyautés plus généreuses. Si cette capacité lui échappait encore un peu, le chevalier était lucide quant à la situation politique de ses terres d'origine ; cela dit, ce n'était pas très compliqué : Tywin tenait les familles de l'Ouest par la gorge en passant par leur trou du cul. Malgré tout, le Flowers était malin et comprenait où il était et pourquoi.    
« Mais je suppose que vous vous en doutiez déjà et que cela est indifférent à vos plans ? »  
Les yeux de la Main du Roi s'étaient mis à pétiller de malice, mais il n'y répondit rien d'abord, mesurant Manfred selon la profondeur de ses explications, comme s’il reconsidérait tout son être à la lumière de son passé.  
« Vous n'avez pas de famille, et je n'ai jamais eu l'impression d'appartenir à celle que j'ai, dit-il d’une voix sans reliefs, écho semblable aux constats blancs du jeune homme. Alors, je ne sais pas vraiment si on peut parler de liberté, ou simplement de solitude. Et la solitude est toujours une malédiction. »
Aveu sincère, mais soigneusement prémédité. Gerold savait qu'à trop prendre, l'on dépouillait, et qu'il fallait toujours céder quelque chose de soi en échange. Manfred avait été particulièrement généreux ; il devait l'être aussi, au moins un peu. Entre tous les détails de son récit qui auraient pu les rapprocher ou les dissocier complètement, Gerold avait retenu cette étrange sensation de similitude dans la dissemblance. Ils avaient en commun la distance ; une distance involontaire qu’ils avaient fait leur, transformant l’absence en un choix délibéré. La tête inclinée, il observait son chevalier immobile d’un regard noir et brusque, attendant que cette parenthèse énigmatique ne se referme naturellement dans un silence contemplatif.  
« Mais vous avez raison. J’aimerai que Lord Derren sache simplement que s’il le désire, il a en sa possession une issue qui lui est familière. Faites-le alors. » répondit-il finalement.
Le plus important, c’était surtout de se faire connaître. Lord Kenning pouvait ne pas en avoir besoin aujourd’hui, ni demain, mais un jour, son coeur risquait de chavirer et Gerold voulait s’assurer que ce soit tout contre sa rive. Si sa proximité avec les Lannister était une tare pour le moment, elle pouvait rapidement devenir un atout en de bonnes circonstances et donc, parler avec ses ennemis n’était jamais une perte de temps.  
« Et si votre trahison est digne d’un bâtard, alors nous le sommes tous à Goëville. Elle aura toujours une place pour des gens comme vous. Donc, bienvenue parmi les vôtres et tâchons de faire en sorte qu’enfin, vous vous sentiez quelque part à votre place, chez vous. »
Comme toute compassion ou louange chez Gerold, elle fut dite avec une bienveillance qui se dissimulait derrière l’autorité et le calcul. Une parfaite aisance dans l’intention, débarrassée de sa douceur, et qui faisait comprendre par quelle main on était étreint, et que l’étreinte n’en pouvait être facilement brisée. Il n’y avait en ce caractère aucune obligeance publique, ni de bonté, ou même délicatesse ; tout n’était qu’imperturbable sang-froid et mesure, élaboré dans un dessein que son esprit gardait toujours pour soi. La gentillesse… elle tuait des royaumes, détruisait des familles. La gentillesse était souvent confondue avec la faiblesse. Alors Gerold avait appris à ne pas être gentil, seulement magnanime.  
« Comment envisagez-vous votre avenir ? » lui demanda-t-il après avoir pris une gorgée de vin dans un verre bien trop lourdement ouvragé.
Simple curiosité ou manœuvre secrète, à cause de ce fil qui paraissait lier tout ce qu’il disait, le Grafton donnait l’impression de servir une intention plus grande, même lorsque ce n’était pas du tout le cas. Il cultivait ce subtile mystère cependant, toujours utile à ce vernis protecteur qu’était le sien.  
« Vous êtes jeune, je le sais, mais vous avez bien une idée de ce qui ne vous conviendrait pas ? Vie de famille ou errance trépidante ? Gloire et richesse, ou simplicité et anonymat ? Guerre, commerce, arts… dites, que je sache quand songer à vous. »

Spoiler:
Manfred Flowers
L'intranquille

Manfred Flowers

Informations
Flowers season. Tumblr_oj64d9pjH41twemn9o3_r5_540
Ft : Lorenzo Richelmy
Multi-Compte : Lowell Blount ; Clifford Swann
Messages : 282
Date d'inscription : 04/09/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
Multicompte


   
# 

Liliyana & Manfred
Flowers Season
304, lune 10, semaine 1

Ser Martyn, le mentor de Manfred, aimait parler par maximes et asséner ses leçons ainsi. Manny en avait retenu deux, pour l’essentiel. La première, c’est qu’on ne pouvait pas juger les hommes à ce qu’ils faisaient lorsqu’ils enlevaient leurs chausses et que pour les vraies saloperies qu’ils commettaient, en général, ils s’habillaient. En général, à l’exception notable de son père, cela s’était révélé vrai. La seconde leçon, c’est que chacun jouait un rôle, et qu’il n’y en avait que peu de disponibles. Pour l’essentiel, cela se résumait à commander ou être commandé. La raison pour laquelle certains commandaient, elle, pouvait être variable. Par la peur qu’ils inspiraient, ce qui avait été le cas de nombreux tyrans de Westeros, pour la simple raison qu’ils étaient dotés de dragons, et souvent cela concernait les mêmes, ou par l’affection, comme Aegon l’Improbable. Parfois, c’était simplement par la loi et le droit. En ce qui concernait Manfred, il obéissait à Viserys par reconnaissance et peut-être un brin d’affection – sans être aveugle, il le trouvait plus attachant que Rhaegar. Quant à Gerold Grafton, c’était encore différent. En réalité, Gerold l’impressionnait. Il est, conclu Manfred en l’écoutant parler de son frère, tout simplement plus intelligent que moi. Plus, en fait, que la plupart des gens que Manfred avait jamais rencontré. D’une certaine manière, et en faisant abstraction de cette différence consistant à se battre lui-même, il lui faisait penser à Tywin Lannister – mais à un Tywin Lannister suffisamment humain pour se soucier des hommes et de leurs passions. Sans doute pas gratuitement. Mais assez pour comprendre qu’elles aussi, comme le pouvoir, et peut être même plus que lui, gouvernaient le monde.

Alors, pour la seconde fois, il inclina la tête positivement : « C’est compris. Ce sera fait. » Darren dirait oui ou non, et le prendrait plus ou moins mal. Cela, Manny ne le maitrisait pas. En soi, il n’avait rien contre le seigneur Kenning, qui était peut être celui, qui, en lui donnant sa part de l’héritage, avait été le plus proche de lui accorder une forme de reconnaissance. Mais Flowers n’était pas dupe : c’était aussi un moyen de solder les comptes et de faire en sorte de clore leur histoire commune. Ce qui était certain, c’est qu’il n’était pas un Kenning et qu’il travaillait pour Viserys – et en l’occurrence, pour sa Main. C’était seulement son ascendance qui pouvait jouer un rôle, ici, pas sa place actuelle. C’était une arme comme une autre. Il fallait l’utiliser.

Quant au reste, il lui sembla distinguer, dans le reste du discours de Grafton, plus de connivence que de réelle gentillesse ou même de magnanimité. Manfred ne connaissait rien de l’histoire de cette famille et il avait appris que parmi les secrets pouvant exister, mieux valait ne pas toucher à ceux-là. Mais il savait aussi qu’un nom ne valait parfois pas grand-chose et qu’il ne signifiait pas forcément non plus qu’on se trouvait par son seul truchement à sa place. Peut-être Manny en aurait-il pensé autrement s’il avait su la manière dont Gerold Grafton traitait ses frères et sœurs bâtards. Ou peut être pas. Darren en voulait à son père plus qu’à lui ; il était difficile de lui en vouloir. Alors Flowers aurait-il raisonné de même pour Gerold.

Au final, tout revenait toujours à la paternité. Rien de plus difficile qu’elle : héros, le père écrase de sa gloire ; salaud, de son infamie ; ordinaire, de sa médiocrité. Il peut être aussi un héros médiocre, un salaud touchant. Quoiqu'il fasse, il a tort : c'est trop ou pas assez. Les pères brutaux ou indifférents avaient au moins un avantage :  ils ne vous engourdissaient pas avec leur douceur, leur mièvrerie, ne cherchaient pas à jouer les grands frères ou les copains. Ils vous réveillaient comme un coup de poignard, faisaient de vous un éternel combattant ou un éternel opprimé. Terrence lui avait communiqué une forme de rage de vivre : de cela Manfred lui était reconnaissant. La haine qu’il lui avait inculquée l’avait sauvé. Il n'était pas un opprimé, jamais il ne s'était laissé faire. Quel genre de parents avait eu Gerold Grafton, se demanda l’Intranquille de par lui-même. Quel genre de père ? Il n’obtiendrait pas la réponse aujourd’hui. Peut être un autre jour. On verrait.

Aujourd’hui, il fallait de prendre ce que la Main du Roi lui donnait. Un signe de tête de connivence ; un éclair de compréhension dans le regard qu’ils échangèrent, malgré la différence d’âge et de situation. Personne n’avait jamais dit, de plus, à Manfred, cette phrase si simple : vous êtes des nôtres. Il inclina la tête en signe de reconnaissance. « Merci, lord Gerold. » Et aussi simplement que cela, s’il y avait encore un doute, en disant cela, Gerold Grafton s’attacha sa loyauté. Par quelques mots honnêtes. Par reconnaissance pour ceux-ci.

La question suivant le déstabilisa un peu – pas assez pour que Manfred n’y réponde pas du tout cependant. « A Port-Réal, je l’espère, pardi ! » Si le ton était plaisant et plein de défi envers leurs ennemis, ce n’était pas une plaisanterie, et au contraire, Manfred le souhaitait vraiment. L’avenir logique de leur conquête n’était-il pas de prendre, à terme, le Trône de Fer ? Il espérait bien qu’ils seraient bientôt sortis du Val en levant ce putain de blocus pour passer de l’autre côté de la baie des Crabes et qu’ils débarqueraient triomphants du côté de Pince-Isle pour prendre ensuite Port-Réal. Là, Viserys auraient droit à un vrai couronnement, et la Garde Emeraude prendrait son rôle de garde officiel. Il troquerait le manteau vert pour le blanc. C’était sans doute très romantique, Manfred ayant la fougue et l’imagination de sa jeunesse, mais après tout, il fallait bien y croire – ils ne faisaient tout de même pas ça pour rien et sûrement pas pour se contenter du Val – et c’était après tout crédible. Après tout, Aegon avait conquis Westeros en deux ans. Mais évidemment, ce n’était pas exactement la question que lui posait Gerold.

Ce bon mot, de la part de Manfred, était aussi un moyen de gagner du temps et de trouver une réponse cohérente. Car d’abord, contrairement à ce que pensait le seigneur de Goeville, il ignorait – ou plutôt n’avait jamais vraiment réfléchi – à ce qu’il voulait pour lui-même. A vrai dire, c’était bien la première fois qu’on se souciait assez de lui, même à une fin tactique. Assez lucide pour s’en rendre compte,  Manny n’en voulut cependant pas à Gerold. Au contraire, il en conçut d’autant plus de respect pour la Main du Roi. N’était-ce pas une preuve d’intelligence, une preuve que le seigneur valois était un bon stratège, que de se soucier de ses hommes, d’écouter ce qu’ils avaient à dire, de les affecter là où ils seraient le plus utile en déterminant leurs affinités et leurs talents sur la base de leur expérience ?

Que voulait-il, vraiment ? Une petite voix en lui, qu’il écrasa, verrouilla au plus profond de lui-même, parce que cela attirerait des ennuis à tout le monde et que rien ne serait possible, lui souffla : écrire à Liliyana et la revoir. Ce plan là n’avait pas d’avenir – il n’en avait jamais eu – et les condamnerait tous les deux. De toute façon, Gerold ne lui demandait pas d’évoquer les plans sur la comète qu’il avait pu se faire, ni de parler de promesses que Manny n’avait pas pu tenir. Encore qu’il n’avait promis que de survivre et d’essayer d’écrire : il avait réussi l’un, mais ce n’était pas exactement sa faute pour l’autre.

De toute façon, Grafton pensait à quelque chose de plus pragmatique et de plus immédiat.  Si on parlait d’avenir, Manfred ne savait pas. Il était devenu Garde Royal, destin assez inespéré, quoique pas improbable au regard de l’histoire de Westeros. Que pouvait-il demander de mieux, d’autre ? D’en devenir le lord commandant ? Mais c’était là un rêve lointain et très improbable : lui-même, ayant vu Cassandre au combat, ne s’imaginait pas pouvoir la supplanter.  Alors, on en revenait à la question initiale : que voulait-il, et surtout, que pouvait-il faire d’utile pour le roi ?

Lentement, Flowers annonça : « Ma mère, lady Malora, voulait que je devienne mestre. Elle espérait ainsi me protéger, je le suppose. Il ne lui reste plus que moi. » Le sourire qu’il eut se fit un instant triste et pensif. C’était sans doute là le second souhait que Manfred aurait voulu, mais ne pouvait formuler, parce qu’il ne se l’avouait pas plus à lui-même qu’il ne pouvait le verbaliser. Il était Garde Royal et il avait renoncé à cette seule famille, la seule qui ne l’ait jamais jugé, parce qu’elle aussi était dans le camp des bannis, des marginaux, et des dépossédés. Mais il aurait voulu, oui, revoir Malora. Ne serait-ce que pour lui dire que son fils n’était pas mort, et qu’il ne s’en sortait pas si mal, même s’il n’était pas devenu l’un des archimestres de la Citadelle. Elle ne l’aurait pas jugé pour sa trahison, elle. Elle aurait compris. Mais il ne pouvait pas dire cela. Il avait laissé cela derrière lui. Peut-être le hasard, le destin, ou les dieux, se mêleraient-t-ils de les réunir. Mais il ne pouvait provoquer, ou même demander, une telle réunion.

Alors Manfred répondit de façon plus concrète, plus amusée, plus lucide, aussi, partant de ce qu’il était, et de son désir de faire tout, sauf rouiller sur place, montrant à quel point il s’était éloigné de ce destin envisagé pour lui par Malora : « Je crois pouvoir affirmer avec certitude que je ne suis pas fait pour ça, ni pour l’immobilité, globalement. Donnez moi toute mission d’escorte, messire, si vous envoyez un ambassadeur à l’étranger, donnez moi toute mission où il faut se battre, et je le ferai. Même s'il ne s'agit pas toujours de défoncer le crâne des gens avec une étoile du matin... Là où il y a du mouvement, je suis. » Cela aurait fait une bonne devise, mais les bâtards n’avaient pas de devise, pas plus que les Gardes Royaux. Au moins, Gerold comprendrait pourquoi on le surnommait l’Intranquille ; à lui de décider ce qu’il ferait de cela. Flowers avait au moins le mérite de la constance. N’avait-il pas dit dès le début qu’il ne voulait pas se mêler du travail d’un Intendant ?

Spoiler:

#01796F : Manfred Flowers

AVENGEDINCHAINS


Fou du Roi, Chien du Heaume

by zuz'
Gerold Grafton
Staff

Gerold Grafton

Informations
Flowers season. Tumblr_n3z9pivxjx1qej1qro2_250
Ft : Blake Ritson
Messages : 1189
Date d'inscription : 03/03/2022
Présence : Présent
Personnage
Badges
Dracanniversaire
1000 messages
L'incarnation
100e RP
Time Traveler


   
# 
Gerold cherchait des subordonnés. Prétendre le contraire aurait été hypocrite ; la paix et la loyauté étaient les deux seuls vecteurs capables d’assurer un avenir pérenne au royaume, quel qu’il fut. Craint par ses ennemis, mais aimé de ses citoyens, voilà les conditions élémentaires. Certains préféraient être craints de tous, se condamnant à l’épuisant exercice d’être toujours au-dessus des autres, en s’abstrayant du moindre faux pas. Le Lannister allait vieillir et un jour, ses chiens dévoreraient son propre visage. Mais il avait néanmoins raison en prétendant que la couronne ne donnait pas de pouvoir. La couronne se contentait de le condenser.
Manfred Flowers n’était donc pas un ami, ni même un allié à proprement parler. Mais Gerold tentait de se l’attacher tout de même. Il avait toujours eu en horreur les mièvres et unilatérales amitiés de son père, tout en étant convaincu que la terreur seule n’était en rien une conclusion. Peut-être avait-il tort de s’accorder la sympathie de la masse, car elle possédait une multitude de visages, et donc aucun en finalité. L’on pouvait passer une vie à gargariser les foules sans aucune contrepartie ; la foule était un amas aussi puissant que passif. Comme un brasier, elle s’énervait de peu et brûlait tout sur son passage, tant que le souci était le sien. Les têtes couronnées, il y en avait plein : elles vivaient et mourraient dans de hauts châteaux éloignés de tout et on ne les voyait souvent pour la première fois que lorsqu’il était question de la décapiter. Aussi, Gerold s’était attaché à faire connaître son visage auprès de chaque habitant de la cité, ancrant tant son pouvoir que sa personnalité dans leur mémoire. Lentement, il s’était humanisé aux yeux de tous ceux qu’il gouvernait, se rendant par là aussi invincible que vulnérable, car l’on éprouvait plus d’empathie pour celui que l’on connaissait, mais on lui pardonnait difficilement ses trahisons. Pour l’instant, les sacrifices avaient été acceptés pour leur charitable contrepartie. Et Manfred Flowers paraissait être enclin à lui aussi, reconnaître en lui non pas un pouvoir, mais une personne, et Gerold savait qu’en cela déjà, son épée tremblerait à l’esquinter.
Il était un jeune homme plein de fougue et d’ivresse, se projetant aussi loin que son imagination fertile était capable de le faire voyager. Et cet enthousiasme là était comme un champ qu’il fallait cultiver pour que jamais ne s’essouffle la généreuse récolte. De l’encouragement et des bonnes dispositions naissaient les esprits les plus hardis ; Gerold le savait pour ne pas en avoir bénéficié. Sa première réponse, quoi que pleine de convoitise, était ce qu’on voulait entendre de tous les soldats rattachés à la grande cause. Un raccourci facile, mais dit avec tant d’entrain et de facilité que Gerold en fut convaincu. Tel était l’Intranquille.
Dans son aspiration militaire, il s’était condamné dès son plus jeune âge à une vie de dévotion en devenant membre de la Garde Emeraude. Ceux-là avaient en apparence une vie aux désirs bien limités, mais il allait rapidement apprendre qu’avec un peu de discrétion, l’on pouvait quand même tout avoir. Gerold n’était pas dupe. Certaines promesses étaient bonnes pour l’apparat et pour la gloire du titre, mais ceux qui ne s’y pliaient pas n’étaient pas nécessairement des individus sans honneur. La seule règle à respecter était la prudence. Et parfois, la prudence mêlée à la gloire dissimulait bien des horreurs… Gerold couva d’un regard particulier ce timide souhait indicible, cri d’une enfance que personne n’achevait jamais vraiment. Et malgré le changement de ton, le Grafton resta sur cette impression de tristesse et de regret, comme sur la marque secrète qui définissait l’âme du très jeune chevalier.
« Les mères veulent que leurs fils grandissent et s’épanouissent. Je gage qu’elle sera heureuse de la place que vous aurez trouvée, quelle qu’elle soit, tant qu’elle est la vôtre, répondit-il doucement avant de reprendre d’un ton plus cérémonieux : Vos souhaits ont été entendus, Chevalier. Mais souvenez vous que peu importe qui vous gouverne ou vous guide, que ce soit un roi, un commandant ou un parent, votre âme vous appartient à vous seul et lorsque vous ferez face aux Sept, vous serez seul à répondre de vos actes. Faites votre devoir, non pas parce que c’est expédient, mais parque c’est juste. »
Sur ses paroles le Seigneur de Goëville acheva leur audience. Il baissa brièvement la tête et congédia le Flowers d’un mouvement souple de la main, retourna presque immédiatement à ses affaires. Seuls les hommes libres pouvaient être fidèles.


--FIN--
Contenu sponsorisé


Informations
Personnage
Badges


   
#