[EVENT] Tournoi de Port Réal : Tir à l'arc

Alors qu’Alyn détendait les muscles de ses bras, les résultats de la première manche tombèrent. Il se retrouvait troisième ex aequo avec un jeune compatriote bieffois. Le jeune homme venait de faire sensation et il devrait être très prometteur dans les prochaines années, bien plus qu’en joute. Alyn se souvenait de l’avoir vu lourdement chuter dès le premier tour, l’empêchant de participer au tableau des perdants. Mais au moins il pouvait briller dans le tournoi de tir à l’arc. Alors en attendant que les cibles soient éloignées, le des Essaims alla féliciter le jeune homme pour sa belle performance. Tout comme ser Pynède. Alyn trouvait que le chevalier fanfaronnait beaucoup trop, il était certes second avec une très jolie performance mais son attitude agaça le bieffois. Alyn l’ignora, ne faisait nulle remarque, et une fois Hereward félicitait, il retourna à sa place. Le reste du classement était à la fois logique et surprenant. Logique car, Lord Mallister prit la première place, surprenant car le cerf chuta à la dernière place devancée par le benjamin de la compétition. Probablement était-il fatigué des joutes ? Il n’en savait rien et il n’allait clairement pas chercher plus d’explication que cela.

Profitant pour boire un coup et finir de détendre ses muscles. Il continuait de bouger ses épaules afin de ne pas se refroidir et rester bien souple pour la suite. Les cibles furent placées à trente mètre du pas de tir. Les choses sérieuses allaient commencer et les écarts allaient probablement se creuser. Les visages se reconcentrèrent. Chacun se préparant à sa façon. Pour Alyn tout se jouait sur son rythme cardiaque en travaillant sa respiration afin de ralentir le tour pour avoir le moins de mouvement parasite. Il n’était pas sur un champ de bataille, il pouvait prendre ce petit luxe de temps afin de se mettre dans des conditions optimales.

Une fois qu’il se sentait dans un état parfaitement calme et apaisé, il s’autorisa à river les yeux sur la cible. Il écouta et laissa ses sens sentir son environnement, jaugeant la potentielle brise qui pouvait venir faire dévier les flèches. Il n’y avait rien de plus frustrant de ne pas avoir prévu une rafale et voir sa flèche être dévié par le pouvoir de la nature. Et sans se poser plus de question, quand ils eurent l’autorisation de tirer, Alyn encocha et tira, sans jamais quitter la cible du regard. Un premier tir. Puis un second et une dernière flèche. Une fois cette dernière plantée, il laissa le monde autour de lui l’atteindre légèrement. Plus qu’une manche désormais.


tir de dés : 6, 2, 7

Comme il s’y attendait à cause de sa deuxième flèche, Alaric n’était pas très bien classé. L’orageois se retrouvait en sixième position à l’issu de la première manche. Il était déçu, il ne pouvait pas le nié, ni le cacher. Son visage restait fermé, il n’entendit presque pas les applaudissements du publique qui saluait la performance de Patrek Mallister qui prenait la tête du classement provisoire. Le chevalier errant resta silencieux, baissant les yeux vers le sable encore humide de la pluie de la veille. Son pied tapota d’agacement les grains qui s’envolèrent lourdement pour retomber aussitôt. Il récupéra ses flèches et alla voir le tableau des scores. Il avait deux points d’avance sur le jeune couronnien et deux points de retard du un seigneur bieffois. Et sept points d’écart avec le Mallister. Impossible à rattraper à ses yeux, il n’était pas assez bon pour espérer remonter dans le classement. Le podium pouvait à la rigueur être encore accessible, s’il faisait de jolis tirs ensuite. Mais il n’avait pas le droit à l’erreur pour cela.

Les cibles furent reculées à trente mètres. Une distance ni trop dur, ni trop facile. Une distance qu’Alaric pourrait qualifier de travail. L’orageois se mit dans son coin, ne voulant pas être importuné par qui que ce soit. Il n’alla pas boire non plus, n’étant pas déshydraté après avoir seulement tiré trois flèches. De plus, il avait l’habitude de la rudesse de la vie dans son quotidien. Il se retrouvait parfois sans eau durant plusieurs heures avant de trouver un endroit où remplir sa gourde et s’abreuver. Il ne jeta pas même un regard vers les potentiels Swann présent dans les gradins. A quoi bon ? Voir leur visage déçu ? Bien sur il savait qu’il pouvait aussi voir le regard encourageant de son ancienne belle-sœur qui lui dirait de ne pas baisser les bras et que rien n’était perdu, qu’il pouvait encore s’en sortir. Lui était plus pessimiste. Peut-être n’aurait-il pas du faire mêlée et tir à l’arc ? Trop vieux pour ses bêtises ? Il était vrai que son corps commençait à le faire souffrir, du au courbature de la vieille et sa vilaine glissade dans le sable. Maudite météo qui n’avait pas aidé. Mais il était là et le résultat aussi. Il était trop fier pour abandonner cependant. Il irait jusqu’au bout malgré sa déception.

Quand on les autorisa, il retourna sur le pas de tir pour préparer sa deuxième manche. Si la distance ne lui semblait pas insurmontable, il refusait de prendre la confiance et de se dire que ça serait facile. Il avait bien vu que cela avait donné. Il se concentra. Attrapant sa flèche, il l’accrocha à la corde, la callant contre le bois de l’arbre. Il se redressa, banda l’arc et dans un souffle libéra le projectile qui alla toucher la cible. Ce n’était pas parfait, mais pas catastrophique pour autant. Il recommença l’opération. Et comme au premier tour, ce fut un échec. Comme si sa deuxième flèche se retrouvait maudite par son dieu. Il se retint une injure tempétueuse, digne de sa région natale. Il tenta de retrouver son calme pour sa dernière flèche mais il eut bien du mal à être parfaitement serein. Sa flèche fut meilleure que la première mais il ne fut pas satisfait. Il allait probablement se faire doubler et au mieux stagner.

tir de dés : 6, 1, 7

Ce n’est qu’une fois toutes ses flèches tirées que Hereward s’autorisa à regarder son résultat. Plutôt bon. Les deux premières ne se trouvaient pas si loin du centre, et la dernière, carrément au milieu de la cible. Comme quoi l’entrainement payait, malgré sa chute, ses côtes encore douloureuses et ses courbatures. Et de fait, il était troisième, ce qui l’étonna lui-même, même s’il ne l’aurait jamais avoué à Symon Pynède. Il retint aussi tant bien que mal un grognement de douleur lorsque celui-ci lui tapa sur l’épaule amicalement. Les ecchymoses, bleus, et autres contusions, malgré tout, faisaient encore mal. Mais Hery fit bonne figure et s’essaya à son tour à un sourire : « Merci, ser Symon. Je vais tâcher de m’inspirer des vôtres si je veux pouvoir continuer avec ser Alyn. Bravo, messer, d’ailleurs ! » Cette dernière remarque s’adressait au bieffois avec qui il était pour le moment ex aequo.

Il était troisième. Presque deuxième. A égalité avec un chevalier bien plus expérimenté que lui en la personne d’Alyn des Essaims. Hereward n’osa pas croiser le regard de sa mère, mais il songea que cette fois, il allait peut-être pouvoir la rendre fière. Il suffisait juste qu’il se concentre à nouveau. Qu’il fasse aussi bien, voire mieux. Qu’il fasse abstraction de la fatigue qui commençait à se faire sentir.  Qu’il se remette dans cette bulle silencieuse de concentration. L’annonce du classement et l’excitation qui avait suivi, comme ces discussions, l’avaient distrait ; c’était une mauvaise chose. Se disperser n’aiderait pas alors que rien n’était acquis et qu’il devait poursuivre ses efforts. Evidemment, il n’allait pas faire aussi bien que Mallister, du moins cela semblait à Graceford totalement irréaliste, l’écart était trop grand. Mais s’il pouvait se maintenir à ce niveau ce serait déjà bien. Ce serait honorable. Assez pour prouver à son père qu’il avait tort et que les tournois valaient quelque chose, peut-être.

Laissant donc là les autres conversations, Hereward se recula dans son coin, ignorant les manifestations de joie ou de déception des autres. Il n’eut que peu de temps pour se préparer. Déjà, les pages avaient fini d’installer les cibles. Déjà, on lui présentait de nouvelles flèches.

L’arc lui parut plus lourd et plus difficile à bander, cette fois ci. La main qui tenait la corde tremblait, sans que Hery ne parvienne à y faire quoique ce soit. C’était la fatigue qui jouait. Malgré tout, il tenta de viser le mieux possible les deux fois, prenant son temps alors qu’il éprouvait la sensation de la corde rêche contre sa joue. Aucun de ses deux premiers tirs ne fut extraordinaires, à ce qu’il lui sembla. C’était trop bête. Il fallait qu’il se ressaisisse. Ce n’est que dix pieds de plus, songea le jeune chevalier pour se rassurer, c’est-à-dire rien du tout. Tu peux le faire. Détend toi. Lentement, Hereward saisit la dernière flèche. L’encocha. Leva son arc pour le bander à fond et viser de nouveau. La douleur était toujours présente, mais cette fois, son bras tremblait moins. Il décocha le trait. Le tir lui parut meilleur, cette fois, du niveau de ses essais du tour précédent. Mais cela ne suffirait peut-être pas.

La deuxième manche de tir à l’arc venait de se clôturer. Le classement de cette deuxième manche fut rapidement affiché avec toujours en tête un Patrek Mallister (@Myrielle Lannister) plus qu’en forme qui améliora sa performance ravissant le publique conquis. Le favori était au rendez-vous et il semblait difficile de le détrôner. Le faon couronné (@Wyllam Erongué) ravala sa colère et se hissa à la seconde place rattrapant sa contreperformance du premier tour. La troisième place revint à ser Pinède (@Vaelle Velaryon) et lord Pommingham (@Delena Oldflowers) qui effectuèrent un très joli score chacun. Le reste du classement fut serré, ser des Essaims (@Naerys Des Essaims) talonna les troisièmes qui lui-même était talonné par le chevalier errant orageoise Alaric Swann (@"Bethany Swann"). Et en bon dernier, cette fois pas de surprise, les jeunes Faenor Gaunt (@Jayne Targaryen) et Hereward Graceford (@Clifford Swann) fermaient le classement.

Cependant, le classement général fut également affiché. Sans surprise, Patrek Mallister était largement en tête. Ensuite ser Pinède obtint la deuxième place mais il devait faire attention car les deux bieffois Alyn des Essaims et Triston Pommingham n’étaient pas très loin derrière lui au coude à coude. Ensuite, Alaric Swann suivit de très près par Renly Baratheon et le jeune Graceford et le benjamin de la compétition clôturait ce classement mais sans démériter.

Pour la troisième et dernière manche (sauf en cas d’égalité), les cibles furent encore éloignées et mise à plus de 50 mètres de la zone de pas de tir. Plus compliqué, il allait falloir rester concentrée et ne pas laisser ses muscles se raidir pour réussir ses trois tirs. Viser juste, chevaliers.

Une fois ses flèches tirées et le second tour passé, Hereward fila directement voir le classement alors que les nouvelles cibles étaient installées. Il en voulait encore à Pinède de l’avoir déconcentré avec ses fanfaronneries bruyantes, et de lui avoir fait mal. Le jeune chevalier comptait bien y réchapper cette fois, félicitations ou pas, même s’il doutait qu’il y en ait, au vu de ses tirs. Au moins, ser Patrek, lui, faisait preuve d’une grande élégance, en plus d’être extrêmement doué. En passant, Hery lui jeta un coup d’œil admiratif – à défaut de victoire, ce tournoi lui apportait de nouveaux modèles et lui faisait découvrir des seigneurs et des chevaliers à qui il aurait aimé ressembler.

Comme prévu, son classement n’était pas bon, ce qui lui arracha un grognement de mécontentement. Dernier pour ce tour ci, et évidemment, Graceford pouvait dire adieu à sa belle et éphémère troisième place au classement général... Cependant, au classement général provisoire, il était encore ex aequo avec Baratheon. Et pas dernier. Il fallait qu’il se reprenne. Qu’il s’applique. Tout n’était pas fichu. Il pouvait faire mieux que ça. Evidemment, il y avait une forme de fierté là-dedans. Celle de ne pas finir dernier ou même avant dernier, sans doute. De battre Baratheon – ça, ce serait glorieux ! De pouvoir montrer à son père que non, les tournois n’étaient pas une idiotie et qu’il n’était pas ridicule et bien puni d’avoir voulu se donner en spectacle. Père pouvait être dur, parfois. Mais c’était surtout une forme d’exigence envers lui-même. Se dépasser avait du sens. La vraie compétition, c’était contre soi même.

Il retourna donc au pas de tir la mine décidée, où il croisa Gaunt (@Jayne Targaryen). Quand même, il avait l’air à peine plus vieux que Arthur…Hereward lui sourit donc amicalement : « Allez, plus que trois tirs. » Et de désigner avec bonne humeur leurs ainés : « Et ils se fatiguent plus vite que nous. » Vrai, car après tout, ils restaient plus jeunes, non ? Est-ce que ça rassurerait Feanor ? Est-ce que ça compenserait la distance ? Les cibles venaient d’être reculées et le jeune homme dut plisser les yeux pour distinguer nettement les cercles peints. Ce serait compliqué malgré tout. Il avait encore mal des contusions reçues au tournoi et ses épaules s’engourdissaient. Mais Hery se reprit. Inspirant et expirant lentement, il fit craquer sa nuque en pliant la tête à gauche et à droite. Puis il tâcha de faire le vide dans son esprit et s’étira un peu, regardant la lice sans la voir.

Aurait-il pu faire mieux, s’entrainer plus longtemps, faire plus, changer la corde plus tôt pour qu’elle soit un peu moins dure à bander ? Peut-être. Il était trop tard pour les regrets, car vint de nouveau le temps de tirer. La mécanique familière reprit. Tirer la flèche, l’encocher. Lever l’arc en l’étirant d’une prise ferme. Ne pas trembler était devenu un objectif inatteignable, alors il fallait au moins trembler le moins possible. Prendre le temps de se calmer. Viser, lentement. Lâcher la corde, presque instinctivement. Et entendre dans une vibration sourde la flèche filer vers la cible.

Aucun des trois tirs ne sembla, a posteriori, très brillant à Hereward. Tant pis, il avait fait de son mieux, tous les carreaux s’étaient fichés dans la cible, c’était au moins ça. Maintenant, ça ne dépendait plus de lui mais du score des autres, qu’il ne maitrisait pas. On verrait bien, mais l’épreuve étant passée, ça faisait déjà une bonne chose de faite.

ENFIN ! Enfin le plus jeune des frères Baratheon avait fait honneur à sa réputation. Un sourire satisfait fit irradier son visage de fierté tandis qu'il observait le tableau des résultats du second tour. Toutefois, lorsqu'il se déporta sur le côté pour voir de plus près le classement - même provisoire - sa mâchoire se contracta et un sourd grognement semblable au grondement lointain du tonnerre remonta le long de sa gorge. Avant-dernier. Lui ! Renly de la Maison Baratheon était avant-dernier ! De colère, il se détourna du tableau d'affichage, donnant sans le vouloir un coup d'épaule à l'un de ses concurrents. Mais le Cerf ne se retourna pas pour s'excuser, ni pour voir qui il avait bousculé. Au contraire, il marcha d'un pas rapide jusqu'à son point de tir, symbolisé par l'emblème de la Maison Baratheon. Si celui-ci flottait fièrement au vent, Renly n'avait plus rien de fier en lui. Il n'était plus que colère contre lui-même. Pire encore, il sentait ses muscles commencer à devenir raides à force de les solliciter pour cette épreuve à laquelle il n'aurait jamais dû s'inscrire. "Les joutes auraient suffi, se morigéna-t-il en faisant les cent pas près du fanion Baratheon, mains sur les hanches, tête basse et sourcils froncés.

Quelques instants plus tard - qui semblèrent une éternité pour Renly - l'on sonna le début de la troisième et probablement dernière manche de l'épreuve. Un jeune garçon trottina vers lui, son arc dans une main et trois flèches dans l'autre. Renly agita des doigts plein d'impatience vers lui, exigeant son arc pour mettre rapidement fin à ce supplice et retourner dans ses appartements au Donjon Rouge pour y pester à sa guise contre lui-même et le monde entier avant que son épouse ne le rejoigne. Renly la voyait déjà afficher son air hautain plein de reproche et de honte dès l'instant où elle croiserait son regard. "Qu'elle pense et dise bien ce qu'elle veut" marmonna-t-il à voix basse tandis qu'il encochait sa première flèche. L'avis de son épouse, de son suzerain de frère ou même du Roi lui-même ne lui importait guère car le seul dont l'avis avait jamais eu de l'importance n'était plus de ce monde. La gorge serrée à son souvenir, Renly banda son arc et attendit le signal pour tirer, respirant à peine et aussi immobile qu'une statue.

Dé + nombre de mots:

 | dialogue : gras | pensées : italique

Après sa volée de flèche, Alyn restait dans le milieu de tableau. Il n’était pas surpris, il était là où il devait être. Il conservait sa place de façon stable et c’était tout ce qu’il voulait.  Il n’essayait pas spécialement de gagner, il n’était pas là pour gagner, juste pour prendre de l’expérience afin de la repartager avec les archers de Mielbois quand il rentrerait. Il profita de la pause pour se détendre les bras et les trapèzes qui forçaient et il encaissait encore les joutes du premier jour des festivités. Il resta concentré, se doutant que les cibles allaient encore se reculer, corsant davantage la compétition. Pouvait-il espérer monter sur la troisième marche du podium ? Il était au coude à coude avec son compatriote Triston Pommingham. Quel que soit le résultat, il n’en serait pas déçu, il avait fait ce qu’il savait faire, n’avait pas commis de grosse erreur le mettant en bas du classement. Le des Essaims était satisfait de sa compétition, le classement serait un bonus.

Il changea d’arc afin d’en prendre un avec une portée plus longue, cinquante mètres à couvrir ce n’était pas rien. Il but quelques gorgées d’eau et se repositionna sur le pas de tir. Son objectif sur cette manche était simple. Mettre ses flèches dans la cible, peu importe le nombre de point que cela allait lui rapporter, toucher sa cible était sa priorité. Il s’enferma dans sa bulle, oubliant ses concurrents, oubliant les tribunes et les spectateurs. Il encocha une flèche et ferma les yeux afin de calmer son rythme cardiaque en se concentrant sur sa respiration. Il entendit certaines flèches partirent se planter dans les cibles. Il ouvrit lentement les yeux. Sa jambe droite derrière lui, ses yeux faisant des allers retours entre la cible et sa flèche qu’il n’avait pas encore tendu. Il écouta, et chercha à ressentir le vent afin de l’estimer et ajuster sa trajectoire. Puis ce fut le moment.

Il leva ses bras, tendit la corde qu’il amena non loin de son œil directeur. Il respira lentement, levant légèrement son arc plus haut que le milieu de la cible pour faire une trajectoire légèrement en cloche afin de couvrir la distance. Puis sur une lentement expiration, ses doigts laissèrent échapper la corde et la première flèche qui vola pour venir se planter dans la cible. Il avait plutôt bien tiré, même très bien tiré. Mais il ne se déconcentra pas, ne s’attardant pas sur la flèche qui avait rejoint le centre de la cible. Il détendit rapidement son bras et sa main droite avant de prendre sa deuxième flèche et de répéter l’opération avec le même calme. Il laissa filer sa deuxième flèche, un tir identique au premier. Il en fut très étonné mais se força à rester dans sa bulle de concentration. Ce n’était pas le moment de s’exciter face à ces deux très beaux tirs.
« Reste concentré, reste concentré… » se murmura-t-il entre ses dents.

Refaire encore une fois le même procédé, vérifiant que le vent ne changeait pas de direction sans prévenir. Il avait mémorisé sa position pour répéter le même tir en espérant que cela fonctionne comme les deux premières fois. Cela devait fonctionner. Il tira et ferma les yeux attendant le bruit sourd de la flèche se plantant dans la cible. Quand il les réouvrit, un fin sourire étira ses lèvres. Il terminait sa compétition en beauté !

tir de dés : 10, 10, 10

Il manqua de lâcher un soupire de soulagement tandis que ses derniers tirs le plaçait sur la troisième marche du podium, à égalité avec le jeune Des Essaims. Il était conscient que le relâchement était, à cette heure, son pire ennemi aussi se força-t-il à s'arracher au classement pour garder autant que possible sa concentration sur les cibles. La mine grave, Triston regarda un homme compter ses pas pour marquer la nouvelle ligne de positionnement des cibles tandis que des serviteurs se hâtaient de les réculer. Cinquante mètres plus loin, cela commençait à devenir difficile, songea Triston tandis qu'il remerciait d'un signe de tête un autre serviteur venu lui apporter des flèches. Il ferma les yeux un instant, vidant son esprit et s'éloignant mentalement des conversation de la foule. Inspirant et expirant à un rythme lent, il tacha de sentir le vent qui pourrait venir jouer avec ses lèches, se représenta les cibles. Il devait oublier la pression qu'il ressentait face au classement, oublier les grognements mécontent de Renly Baratheon, oublier les cris de Claryce dans les gradins. Plus que trois flèches pour montrer de quoi il était capable, plus que trois flèches avant la fin de l'épreuve. Tout pouvait basculer maintenant.

Il était dans une foret. Celle jouxtant son château, au coeur des terres bieffoise. Il était dans sa foret, son arc à la main, cherchant les faisans qui se promenait dans le sous-bois. La foule n'était pas celle d'un tournoi mais quelques invités venus profiter d'une après-midi de chasse. Ce vent n'était pas parfumé d'embruns marins de Port-Réal mais l'odeur terreuse de Grenadier en plein été. Il rouvrit les yeux, il venait de réussir à calmer sa respiration. Ce n'était pas une cible de paille, se dit-il dans une continuité presque méditative, c'était un gibier à plume. Son oeil fixant le centre de la cible, il inspira et expira, sentant les vibrations de son souffle dans le bois de la flèche. Une fois, deux fois, juste assez pour s'y habituer. Et lorsqu'il fut sur de lui, lorsqu'il songea que le temps était peut être compté, alors il décocha. Un froncement de sourcil accompagna ce premier constat : médiocre, sans doute la pire qu'il ait fait. Il devait se ressaisir s'il ne voulait pas se laisser distancé, se dit-il alors que son regard glissa sur son compatriote qui ne cachait pas son contentement. Merde, grogna Triston entre ses dents, cela ne pouvait pas finir ainsi ! Il décocha la seconde plus vite, presque immédiatement suivie de la troisième. Un choix payant : son hésitation initiale lui avait fait oublier le plus important, il réfléchissait trop. Repliant son bras où une crampe menaçait de s'installer, il eut un soupire, les jeux étaient fait, il lui restait désormais à espérer que tous n'ait pas visé aussi  juste que le jeune Des Essaims.

tir de dés : 2, 9, 8

Le classement du second tour arracha un claquement de langue à Symon. Le faon couronné - ou plutôt le faon réveillé - semblait s’être tiré de sa léthargie pour ravir la seconde place.

“Eh bien, ser Renly, vous me troublez ! Il- ”

Mais les yeux de l’orageux lançaient des éclairs au classement provisoire. Il émettait même quelques gargouillis sonores - d’agacement, semblait-il - qui lui donnait des airs de chien enragé. Avec un mouvement d’humeur, Baratheon s’arracha à la contemplation de son avant-dernière place, bousculant Symon au passage… et sans un mot d’excuse ! Eh bien ! N'apprenait-on pas les bonnes manières dans l'Orage ? Voilà qui lui donnait envie de lui en toucher deux mots, mais l'intéressé s'était retiré à grandes enjambées sans plus de cérémonie.

“Visiblement, je le trouble aussi,” lança-t-il au jeune Hereward avec qui il lui avait semblé avoir réussi à tisser quelques liens.

Mais le jeune homme s’était discrètement éclipsé pour rejoindre sa place initiale. Symon haussa les épaules en jetant un regard dubitatif en direction de son petit protégé.

“Tu es de bien meilleure compagnie que les autres participants, Monterys !” se moqua-t-il tandis qu’il s’était rapproché du public.

L’adolescent roula - encore - des yeux avant de désigner d’un vague mouvement du menton les cibles dans le dos de son protecteur.

“Ils sont en train de préparer les prochains tirs. Vous allez être en retard, ser.”

Symon fronça les sourcils, surpris, avant de s’esclaffer.

“Allons, pas de “ser” entre nous ! Ne m’appelles-tu donc pas Symon, d’ordinaire ?”

Le fils de Monford s’empourpra, ce qui arracha un petit rire à sa mère.

“Je vous laisse, la troisième manche m’attend !” lança-t-il avant que le jeune homme ne puisse répliquer.

Sur le pas de tir, les cibles reculées à cinquante mètres finissaient d’être ajustées. Il plissa légèrement les yeux pour se protéger de la luminosité et goûta l’air sur son visage. “J’ai bien fait de prendre mon arc long au tir précédent,” se félicita-t-il. Le deuxième tour ne lui avait guère sourit, mais ainsi ses muscles s’étaient habitués à la rigidité du bois et de la corde. Cette troisième et dernière salve serait meilleure. Il le savait. Il le fallait.

Son aide depuis le début de l’épreuve lui apporta à nouveau un carquois plein de trois flèches.

“Vous êtes indétrônable, lord Mallister,” complimenta-t-il son voisin, inébranlable depuis la première manche. “Je suis jaloux !”

Il rit de bon cœur en exécutant pour la dernière fois son rituel, persuadé que si le moindre geste n’était pas parfaitement exécuté alors, il courrait à sa perte.

Au signal, les arcs furent bandés. Symon avait raison ; ses bras rechignaient moins maintenant qu’il y avait quelques minutes.
Il se souvenait de ses premiers entraînements au tir avec Vaemond. Aux défis de garçons impétueux qu’ils se lançaient de qui pouvait tirer le plus loin et le plus juste. Mais pour le futur lord Celtigar, il n’y avait rien à gagner. Rien à prouver. Alors que pour lui, le deuxième fils d’une petite maison de chevaliers fieffés…

“Respire,” s’ordonna-t-il. “Et prouve encore une fois ta valeur.”

Au clairon, dans le même mouvement, il relâcha son souffle en même temps que ses doigts gantés libéraient la flèche. Et chaque flèche accompagnait ses respirations suivantes puisque, pour lui, tirer était aussi naturel que cela. Respirer.

Faenor fut guère surpris par son résultat, il n’avait pas l’expérience des autres concurrents. Il était déjà très satisfait d’avoir réussi à toucher trois fois de suite la cible à cette distance. Il espérait pouvoir faire de même au prochain tour où elles allaient encore reculer. Il était dernier, et si certains s’engaillardissait de leur résultat, d’autres semblaient insatisfait.

La troisième et dernière manche allait débuter, et le jeune homme hésita longtemps sur son arc. Mais il préféra prendre le risque de ne pas le changer, une erreur peut-être mais il préférait continuer de tirer avec un outil qu’il connaissait et dont il avait l’habitude. Il se repositionna correctement sur le pas de tir, regardant sa cible qui se trouvait à cinquante mètres de lui. Pas facile. Avait-il déjà tiré aussi loin avec cet arc ? Il en doutait, mais il fallait bien un début à tout.

Le silence se fit doucement, laissant les tireurs se concentrer pour décocher leur flèche au plus près du centre du rond posé sur la cible. Certains étaient plus concentrés que d’autres, après tout le podium voire une victoire pouvait se jouer sur cette dernière manche. Ce n’était pas le cas du couronien, qui se montrait très discret contrairement à son paternel durant les joutes.

Il attrapa sa première flèche et l’encocha, il regarda sa cible et banda l’arc, attirant la corde à son œil directeur. Il leva son bras de quelque degré supplémentaire pour faire gagner de la hauteur à sa flèche pour qu’elle puisse aller plus loin. Il tira et il entendit avec satisfaction le bruit de l’impact. Touché ! Fier de sa réussite, il refit pareil mais leva un peu plus le bras pensant que sa flèche irait plus au centre. Il tira de nouveau mais même si cette dernière se planta, elle s’éloigna du centre. Mauvais choix. Il réfléchit aussi vite qu’il le put pour essayer d’ajuster son dernier tir. Mais il ne fit pas mieux que sa première flèche. Dommage.

tir de dés : 8, 3, 5

Sans surprise son classement de cette manche n’était pas très bon, et par conséquent son classement général non plus. Il était dans la deuxième partie du classement, à peine devant le jeune cerf couronné. Il allait falloir qu’il se ressaisisse car la partie continuait se corser vu que les cibles allaient encore être éloignées du pas de tir. Alaric profita de la petite pause pour se dégourdir les jambes et notamment sa hanche, encore douloureuse de sa double chute lors de la mêlée. Il prit également un arc plus long pour tirer, ne voulant pas prendre de risque sur la distance. Il étira plusieurs fois la corde de l’arc pour se faire à la résistance du bois et de la tension naturelle de ce dernier. Plus que trois flèches et s’était fini. Il rêvait de pouvoir aller s’allonger pour soulager son bassin tendu et douloureux et recouvert d’un beau et gros hématome.

Il se repositionna correctement et inspira profondément plusieurs fois, contrôlant ses expirations pour faire ralentir son rythme cardiaque et diminuer sa tension ainsi que son stress. Il encocha une flèche et prit son temps, regarda longuement sa cible et préférant faire un travail de visualisation de son geste pour s’économiser physiquement plutôt que de prendre le temps de viser et risquer crampes et fatigue musculaire. Une fois le geste répété plusieurs fois dans sa tête, il banda son arc, il refit le même schéma que dans sa tête, et sur son expiration laissa filer la flèche. Il sentit la caresse de la plume sur son index. Ses yeux suivirent le mouvement du projectile qui alla se loger parfaitement dans la cible. Il ne cacha pas sa surprise et son contentement. Mais il ne se précipita pas pour autant. Refaisant la même chose. Calmement. Ne laissant pas le tempérament impulsif et haut en couleur de ses terres natales prendre le dessus. La deuxième flèche fut presque aussi bonne que la première. Plus qu’une. Une dernière pour être pleinement satisfait de son tournoi. Calme. Visualisation. Armement. Viser. Tir. La flèche se logea quasiment au même endroit que la première.

Alaric s’autorisa à sourire, le tournoi était fini. Il avait plutôt bien réussi cette manche, même très bien réussi cette manche. Il espérait que cela pourrait lui permette de remonter un peu dans le classement général, et passer dans la première moitié du tableau. Il attendit les yeux rivés vers les scores.

tir de dés :10, 9, 10

Le tableau du classement dévoilé, l'Aigle venait de prendre la tête. Un léger sourire de satisfaction vint ourler ses lèvres. Bien sûr, les applaudissements ne lui étaient pas désagréables, mais ils n'étaient pas la cause première de sa fierté présente. Il retrouva la silhouette d'Agnès dans le public, les joues roses et le regard brillant, ébahie de voir son paternel se distinguer de la sorte, même si les résultats n'étaient pour le moment que temporaires. Aussi, lorsqu'il s'agit de reprendre position sur le pas de tir, la pression n'en fût que plus forte.

Les cibles n'étaient à présent plus que des points blancs et Patrek dut constater avec une pointe d'exaspération que sa vue n'était plus si acérée qu'autrefois et qu'il lui fallait maintenant plisser les yeux pour en distinguer le cœur. Une nouvelle fois, Ser Pynède (@Vaelle Velaryon) vint se hisser à ses côtés et lui adresser un petit trait de malice. Comprenant mieux à présent qui était l'homme, Mallister y répondit avec un flegme également teinté d'humour:

"Ne le soyez pas trop, l'ami, la grâce des Sept est plus versatile que le vent... Nous règlerons cette rancune autour d'une coupe de vin après, si vous le voulez bien."

S'ils n'avaient pas été en public, Patrek lui aurait répondu qu'indétrônable, seul le Roi l'était. Et que même cela n'était plus si certain depuis qu'il y en avait deux qui convoitaient le même siège... Certes, il y avait l'entraînement, l'expérience bien sûr, mais après deux séries de tirs, les muscles se faisaient plus raides et la concentration, déjà durement éprouvée, ne tenait plus -littéralement- qu'à un fil. Maintenant que l'on approchait de l'issue de la compétition, personne n'était à l'abri d'un tremblement, d'un léger spasme, d'une erreur d'appréciation qui pouvait tout remettre en cause.

Quand vint le moment de se mettre en position, l'Aigle hésita plus longtemps que les deux premières fois. Il avait beau être rompu à l'exercice, il sentait la fatigue de la joute peser sur ses épaules et crisper ses articulations. Aussi, il lâcha sa première flèche bien avant de l'avoir voulu et celle-ci fila loin du centre. Cette bévue le déstabilisa, son cœur rata un battement et s'emballa dans la foulée, aussi à son grand regret la seconde flèche ne fut guère plus fructueuse. Un claquement de langue déçu lui échappa.

Patrek considéra la dernière flèche qui reposait au fond de son étui. Il ne pouvait pas clôturer cette compétition sur une débâcle totale. Un ultime sursaut d'orgueil au moment de faire chanter la corde et la troisième flèche fendit l'air qui la séparait de la cible. Son dernier tir était réussi, l'honneur était sauf, mais un rapide coup d’œil vers les cibles adverses lui révéla des résultats dont ses concurrents n'auraient pas à rougir. Le Mallister espérait que ses points d'avance amassés lors des précédentes manches lui permettraient encore de tenir la distance, mais celle-ci s'était indéniablement réduite.

Les dernières flèches avaient été tirées venant clôturer le tournoi des dix ans du jeune roi Aerion Targaryen. Les juges commençaient à comptabiliser les points du troisième tour et deux archers venaient de se faire remarquer contre toute attente dont l’un avec une salve parfaite et le deuxième une salve quasi parfaite. Une petite déception avait saisi la foule lors des tirs du grand favoris et beaucoup espérait que cette contre-performance ne viennent pas entacher sa potentiel victoire. Ce fut donc s’en surprise que ser Alyn des Essaims (@Naerys des Essaims) prit la tête de la 3ème manche. Il fut suivi par Alaric Swann (@Bethany Selmy). La troisième place alla à Symond Pinède (@Vaelle Velaryon) qui avait montré une régularité sur les trois manches de la compétition. Vint ensuite lord Triston Pommingham (@Delena Oldflowers) qui fut également très régulier dans ses scores. Puis arriva seulement lord Patrek Mallister (@Myrielle Lannister) qui fut suivi par le benjamin de la compétition le jeune Faenor Gaunt (@Jayne Targaryen) dont le père avait fait couler beaucoup d’encre quelques jours plus tôt. Puis Renly Baratheon (@Durran Cressey) et le jeune Hereward Graceford (@Clifford Swann) clôturait la manche.

Les applaudissements furent nombreux puis on demanda à tous les archers se regrouper devant la tribune royale pour remise des prix. En dernière position Hereward Graceford fut appelé, en récompense pour sa participation il lui fut offert des plumes d’oies pour ses flèches. En avant dernière position, ser Renly Baratheon qui semblait fort mécontent de sa prestation, il lui fut offert trois pointes de flèches en acier couteux. Puis Faenor Gaunt, peu d’applaudissement retentir pour lui, beaucoup n’ayant pas digérer le comportement de son père. Il lui fut offert un nouvel arc ouvragé en bois de chêne blanc. En cinquième position, le seigneur bieffois lord Triston Pommingham qui reçut trois pointes de flèches en acier rare. Puis on annonça le podium contre toute attente. A la troisième place ex aequo, ser Symond Pynède qui avait preuve d’une belle régularité et ser Alaric Swann qui avait pu faire une belle remontée grâce à la dernière manche. Ils reçurent en cadeau un arc ouvragé en bois de chêne blanc ainsi que trois pointes de flèches en acier rare. En deuxième position, on appela ser Alyn des Essaims pour sa belle performance lors du dernier tour. Il lui fut offert un arc ouvragé en chêne blanc et trois pointes de flèches en acier valyrien. Et la première place revint à Lord Patrek Mallister, grand favori de ce tournoi pour le plus grand bonheur de la foule. Il reçut en cadeau trois pointes de flèche en acier valyrien, et un sac de 500 dragons d’or à l’effigie du jeune Roi.