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Le Portrait de l'Arrogance.

Viserys Targaryen
Le Dragon de l'Est

Viserys Targaryen

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L'incarnation


   
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Cela avait été une journée ordinaire ; les coups aigus de son marteau sur le burin emplissaient l'atelier du sculpteur tandis qu’il cherchait à transcrire sa vision. La statue venait doucement à la vie. La silhouette en armure prenait forme dans le marbre à mesure qu’il faisait sauter tout ce qui n’appartenait pas aux contours qu’il avait à l’esprit.

Ses mains argentées domptaient la pierre : son expertise au bout de ses doigts la lisaient pour en déceler les lignes de faille et les défauts cachés à l’intérieur de sa masse.

Chaque incision du burin était finement mesurée, délivrée avec une connaissance instinctive de la forme qu’il créait, et avec amour et respect pour sa matière. Après des débuts lents, où la colère avait motivé ses coups de marteau, un calme retrouvé avait adouci ses attaques contre la pierre, et il goûtait à la sérénité qui accompagnait la satisfaction de voir émerger quelque chose de beau.

En faisant un pas en arrière, il avait pris conscience d’une présence dans son atelier en désordre. Il s’était tourné pour découvrir un chevalier en armure de plaques noiratre, armée d’une épée.

Le sculpteur avait retiré son masque anti-poussière alors que cinq autres homme d'arme pénétraient dans son atelier extérieur, suivis par une charette  chargé  où des objets des formes irrégulière étaient drapés de voiles blancs. Le Sculpteur avait alors reconnu les guerriers comme faisant partie des gens logeant au donjon rouge, les gardes d'élite de…

Viserys s’était avancé dans l’atelier, et le Sculpteur avait été figé par la présence du frère du roi. Le Dragon de l'Est portait une simple robe du rouge le plus profond, brodée de motifs subtils violets et argentés. Ses traits pâles étaient poudrés, le pourtour de ses yeux souligné à l’encre de cuivre, et ses cheveux argentés ramenés en arrière par un tressage plat très élaboré.

L'artiste était tombé à genoux et s’était incliné. Se trouver aussi près d’un être d’une beauté valyrienne aussi parfaite ne ressemblait à aucune expérience qu’il avait pu connaître. Certes, il avait déjà vu le prince auparavant, mais se retrouver avec lui dans un espace confiné, fixé par ces yeux sombres, l’avait hébété en l’espace d’un instant.

— Monseigneur, je…

— Je vous en prie, relevez-vous, maître Vrynn, lui avait dit Viserys en avançant vers  lui, et le sculpteur avait senti l’arôme des huiles essentielles dont sa peau était ointe. Un génie tel que le vôtre n’a pas à s’agenouiller.

L'Artiste s’était lentement remis debout, en essayant de relever la tête pour regarder le prince dans les yeux, mais son cou avait refusé de lui obéir.

Vous pouvez lever les yeux, mon ami, je ne vais pas vous manger. Le sculpteur avait soudain eu l’impression que ses muscles étaient sous le contrôle du prince, et sa tête s’était redressée sans que son cerveau ne l’eût apparemment commandé. La voix de Viserys était comme une mélodie, où chaque syllabe était prononcée avec un timbre parfait, comme si aucun autre son n’aurait pu emplir l’air de manière plus appropriée.

Je vois que votre travail progresse, avait continué Viserys en commençant à faire le tour du bloc de marbre taillé et en l’admirant. J’ai hâte de le voir achevé. Dites-moi, cela doit-il devenir la représentation d’un homme en particulier ?

Le sculpteur avait hoché la tête, en essayant, et en ne parvenant pas à trouver les mots qui auraient convenu pour exprimer ses pensées au prince qui était son mecène depuis des lustres.

— Qui ? s’était enquis Viserys.

— Ce sera le roi, aimé de tous, avait dit l'artiste.

— Le Roi. Un sujet digne.


— Je le trouvais approprié, étant donné la perfection de ce marbre.

Viserys avait acquiescé, et avait continué son tour de la statue les yeux fermés, les doigts courant sur le marbre presque comme l'Artiste l’avait fait quelques instants auparavant.

— Vous avez un don rare, maître Vrynn. Vous donnez tant de vie à la pierre. J’aimerais pouvoir en faire de même.

— Je me suis laissé dire que vous aviez vous-même un talent pour la sculpture, monseigneur.

Le Prince avait souri, en protestant à peine de la tête.

— J’arrive à modeler quelques formes plaisantes, il est vrai, mais pas à leur donner vie… Cela me frustre et j’aimerais vous demander votre aide.

— Mon aide ? s’était étranglé le roturier. Je ne comprends pas…

Viserys avait fait signe vers la charette, et l’un des pages avait retiré les draps qui couvraient les objets de la palette, pour révéler trois statues taillées dans un marbre blanc.

Le prince l’avait pris par les épaules pour le guider vers elles. Toutes représentaient des hommes  en armure, et d’après les marquages sculptés sur leurs plastrons, chacun d’eux était un membre de la famille royale.

Je comptais sculpter les effigies de chacun des membre male de ma famille, avait expliqué le Prince, mais quand j’ai achevé celui d'Aegon, j’ai commencé à sentir que quelque chose n’allait pas, comme si j’étais passé à côté d’une vérité essentielle.

L'Artiste avait alors considéré les sculptures, leurs lignes nettes et leurs détails précis, jusque dans la capture des expressions faciales. Et il ne restait sur le marbre pas une seule griffure du burin, comme si chaque effigie avait été moulée sur le modèle.

Mais cependant qu’il appréciait la perfection des statues, le sculpteur ne sentit pas la passion s’éveiller en lui comme il s’y serait attendu devant de grandes œuvres d’art. Oui, ces sculptures étaient parfaites, mais en cela résidait leur défaut, car des œuvres d’une telle splendeur technique ne portaient pas la marque de leur créateur, cette trace d’humanité qui parlait au spectateur et le laissait entrevoir l’âme de l’artiste.

— Elles sont merveilleuses, avait-il fini par dire.

Ne me mentez pas, avait répliqué le Dragon de L'Est, et le sculpteur avait senti dans ces mots une certaine brusquerie qui l’avait fait relever les yeux vers les traits glacés du Dragon de L'Est. Le prince le fixait, et l’expression que le sculpteur avait lue dans ses yeux l’avait glacé jusqu’à la moelle.

— Que voulez-vous m’entendre dire d’autre, monseigneur ? Elles sont parfaites.

— Je souhaiterais entendre la vérité. La vérité est comme la chirurgie, elle peut faire mal, mais elle soigne.

Il s’était démené pour trouver des paroles qui n’offenseraient pas le prince, car cela lui aurait paru être le comportement le plus indigne. Qui aurait pu songer à insulter quelqu’un d’une telle prestance ?

Constatant son dilemme, Viserys lui avait posé une main rassurante sur l’épaule.

— Un ami qui vous signale vos erreurs et vos imperfections doit être respecté, comme s’il vous révélait le secret d’un trésor caché. Je vous donne toute licence de parler librement.

Le prince avait prononcé ces mots sur un ton doux. Ils agirent comme une clé sur une pièce fermée dans l’esprit de maître Vrynn, et ouvrirent la porte à des pensées auxquelles il n’aurait pas osé donner voix.

— C’est comme si vos statues étaient trop parfaites. Comme si vous les aviez sculptées avec votre tête plutôt que votre cœur.

— Est-il seulement possible que quelque chose soit trop parfait ? avait demandé Viserys. Dans une certaine mesure, tout ce qui est beau et noble est le produit de la raison et de la réflexion.


L’art n’est pas fait de raison, il nous vient du cœur, l’avait contredit le sculpteur. Sans passion, vous pourriez travailler avec toute la perfection technique de Westeros et vous ne feriez que gâcher vos efforts.

— La perfection absolue existe, avait rétorqué Viserys. Le but de nos existences est de trouver cette perfection en nous et de la faire valoir, en mettant de côté tout ce qui nous limite.

Vrynn avait secoué la tête, trop emporté par son propos pour voir monter le courroux du prince.

— Non, monseigneur. Car l’artiste qui rechercherait la perfection en toute chose ne produirait plus rien. L’essence de l’être humain est de ne pas chercher la perfection.

— Et qu’en est-il de vos propres créations ? l’avait questionné Viserys. Ne cherchez-vous pas à ce qu’elles soient parfaites ?

— Les gens sacrifient ce qu’ils pourraient avoir en cherchant la perfection qu’ils n’obtiendront jamais et en la cherchant là où ils ne peuvent pas la trouver, avait répliqué Vrynn. Si j’attendais de trouver la perfection, je n’en aurais jamais terminé.


— Très bien. C’est vous qui êtes l’expert, avait fulminé le prince.

Vrynn s’était soudain rendu compte avec horreur du déplaisir qu’il lui avait causé. Une colère réprimée battait dans les veines de ses joues et les yeux de Viserys étaient devenus comme deux perles menaçante violacée. L'artiste avait été empli de terreur par les abîmes de convoitise qu’il y avait vus.

Au-delà du désir qu’avait le prince de transcrire la beauté par la peinture ou la sculpture, Vrynn avait vu la compulsion obsessive d’atteindre une impossible perfection, un désir qui ne laisserait aucun obstacle se dresser devant lui. Trop tard, l'artiste avait compris que malgré sa demande, Viserys n’était pas venu chercher de réponse honnête, mais avait sollicité une validation de son travail, et des mensonges doucereux qui auraient conforté son ego.

— Monseigneur… murmura-t-il.

— Ça n’a pas d’importance, avait dit Viserys sur un ton acerbe. Je vois que j’ai eu raison de venir vous parler. Plus jamais je ne manierai le burin, car cela me fait clairement perdre mon temps.

— Non, monseigneur, ça n’est pas…
Viserys avait levé la main pour lui épargner de voir répondre.

— Je vous remercie pour le temps que vous m’avez accordé, maître Vrynn, et je vous laisse poursuivre votre travail imparfait.

Entouré de sa garde en armure noire, le prince avait quitté l’atelier, en laissant Vrynn tout tremblant d’avoir pénétré l’esprit du Dragon de L'Est.