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Men fight wars. Women win them | ft. Ysolde Qorgyle

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An 303, Lune 1, semaine 3



Ysolde Qorgyle & Wayra Noirmont

Le bateau tanguait mollement sur la Torrentine. Il avait plu ces derniers jours et le fleuve avait enflé, sans pourtant perdre de sa nonchalance habituelle. A la différence de la Wyl, souvent tourmentée et capricieuse, le bras d’eau qui reliait Noirmont aux Météores était d’un calme plat. Autour d’eux, le paysage délavé des Montagnes Rouges brillait légèrement sous le soleil timide qui semblait enfin s’être décidé à sortir des nuages. La terre, rouge d’ordinaire, apparaissait brune. Sur les berges, des coulées de boue se mêlaient à l’eau claire de la rivière. Des amoncellements de roches, au pied des hauteurs témoignaient des nombreux éboulements entraînés par les averses. La nature se réveillait, comme émergeant d’une courte léthargie, et s’auréolait de cette cape nébuleuse de mystère qu’avait l’horizon après l’orage.

Le bateau des Noirmont filait sur les flots. Le bois de cèdre, léger, à bordage cousu, glissait avec sérénité, fendant silencieusement la surface. La grande toile carrée et blanche claquait dans le vent frais, sans être froid, entraînant plus au sud l’équipée. En raison du courant et de la brise, les rameurs étaient au repos. La remontée à Noirmont serait moins paisible pour eux, cependant.

Distraite, Wayra observait tantôt les rebords feuillus de la Torrentine qui, gorgés de limons, abritaient une faune et une flore aussi luxuriante que la Wyl – si ce n’était plus ? - , tantôt les peintures vives qui ornaient les flancs du voilier.
Albin et Larra s’étaient retranchés dans une des deux cabines à la poupe et n’étaient pas décidés à en sortir. La née Wyl ne supportait pas de rester enfermée et préférait de loin profiter du grand air. Malgré son état, les mouvements lancinants du bateau n’éprouvaient ni son cœur ni son estomac. En revanche, la conversation tenue par le frère et la sœur l’inquiétait. Ils n’étaient pas du même avis qu’elle. C’était une chose à laquelle elle n’avait guère été confrontée, au sein de sa maisonnée de naissance. Les Wyl se tenaient toujours unis et affirmaient sans crainte leurs idées et leurs opinions. Si Wasen tendait à faire cavalier seul avec ses habitudes extravagantes, il était néanmoins d’accord avec sa fratrie pour affirmer que dans le conflit se profilant entre les frères Targaryen, mieux valait rester neutre. Les Noirmont eux, ne partageaient pas vraiment cela.
La future mère savait son mari plutôt arrêté sur sa décision. Il fallait aider le Roi Rhaegar. Pourquoi donc ? Oh, il avait ses arguments, mais Wayra ne les entendaient pas vraiment. Elle aussi était arrêtée sur sa décision. Pourquoi risqueraient-ils donc leur vie pour des dragons qui n’avaient cessé de les insulter ? D’abord, la Princesse Elia, bafouée et humiliée par Rhaegar, ensuite le Prince Viserys, un affront envers les Martell et donc envers Dorne et enfin les côtes ravagées par les fer-nés qui n’avaient reçu aucune aide si ce n’était celle des dorniens. Pourquoi donc alors se battre aux côtés du fils aîné d’Aerys le Fol ? Les dorniens ne s’abaisseraient pas à tendre la main à quelqu’un qui leur crachait au visage. Ce n’était plus de la fierté – combien de fois avait-elle entendu son père lui répéter de ne pas mourir par fierté ? -, mais du bon sens.
Quant à lady Noirmont, si elle penchait du côté de son cadet, son plus proche conseiller, elle restait indécise. Il était encore temps de la faire changer d’avis… Et Wayra comptait bien sur le conciliabule ayant lieu à Haut-Hermitage pour faire peser son opinion. Elle ne connaissait pas encore vers quel bord penchait son cousin, tout comme les Qorgyle qui étaient également invités.

« Je n’arrive pas à croire que je me mêle de tout ça, » grogna-t-elle intérieurement. « Depuis quand suis-je si impliquée ? » Elle savait pourtant que Dorne se trouvait à un tournant. Et elle était loyale à ce qui importait.

*

La soirée s’était terminée sur de nombreuses questions en suspens. Cependant, les esprits fatigués par le voyage et la réflexion avaient préféré battre en retraite pour la nuit pour revenir plus reposés le lendemain. Larra était restée silencieuse tout le long de la conversation, à écouter les pours et les contres de chaque camp avec une patience de religieuse. Elle n’était visiblement pas prête à prendre sa décision.

Wayra avait très clairement exprimé son opinion sur la question et avait récolté un froncement de sourcils de son époux. Quant à son cousin, il lui faudrait échanger en privé avec lui.
Des Qorgyle, il semblait que la lady, Ysolde, partageait ses idées. Elle ne la connaissait que peu, mais elle l’avait déjà vue à Lancehélion. Comment ne pas la remarquer d’ailleurs ? Toujours étincelante, parées de bijoux et de soie luisantes, elle attirait bien des regards. Naturellement, la taciturne Wyl s’en tenait éloignée. Les deux femmes n’avaient donc rien en commun et la blonde avait éveillé chez la brune un profond sentiment d’agacement lorsqu’elle avait entendu, par plus d’une fois, ses grands éclats de rire superficiels au dernier mariage de la princesse Arianne. « J’ai du mal à croire que nous soyons d’accord sur quelque chose, » pensa la vipère. L’idée lui paraissait même saugrenue. Elles étaient si différentes.

Un froissement de tissu lui fit lever le nez. Lady Qorgyle n’avait pas suivi les autres en sortant de la pièce. Visiblement, elle avait envie de poursuivre la conversation avortée.

« Pourquoi, lorsqu’il est question de guerre, s’agit-il toujours de cette foutue engeance ? » siffla la fille du Roi Sauvage entre ses dents serrées.

Un rictus sarcastique déforma la courbe de ses lèvres pleines.  




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Le voyage était resté étrangement calme. À l'image de chaque départ, il était source de moult préparatifs, moult précautions pour s'assurer que se déplacer ne représentait aucun risque pour la famille Qorgyle. Quitter le Grès, quitter l'aridité du désert pour une région parfois plus hospitalière, parfois pas, en l’occurrence, cela ne serait pas. Haut Hermitage, les montagnes rouges, la demeure des Dayne. Ysolde ne serait accompagnée de personne d'autre que son mari cette fois-ci. Il ne s'agissait pas là d'une visite de courtoisie, ni même d'un voyage diplomatique, il s'agissait bien plus d'une réunion entre seigneurs et dames d'une même région s'interrogeant sur le devenir de leur principauté et sur l'attitude à observer face aux royaux dragons de Port-Réal. Évidemment, ils n’étaient pas dupe, la question ne serait pas tranchée à leur échelle, c'était les Martell qui imposeraient leurs souhaits face à la guerre qui s'annonçait… Ysolde ne réfléchissait pas, bien entendu, à ces vampires venus du Nord, à ces marcheurs qui pouvaient bien être blancs ou noirs, mais qui ne toucheraient pas un seul Dornien à moins qu'ils n'eurent franchit Winterfell puis les Jumeaux… Dorne aurait été la dernière touchée en cas de défaite, et donc la mieux préparer à une alternative, ou alors, la dernière au courant en cas de défaite. La seconde option s'était imposée. La vie s'était démontrée vainqueur sur la mort. Maintenant, un tout autre affrontement s'annonçait, celle des dragons, une guerre interne, fratricide, dévoreuse de chair et carbonisant la terre. Que ferait Dorne ? Que feraient les Martell ? Qu'adviendrait-il de la position des seigneurs des Montagnes Rouges et du désert de Dorne ? L'occasion était donnée de s’exprimer, puis de se positionner. Quentyn avait pris place à ses côtés en cette occasion, silencieux tous deux, mais tacitement d'accord sur la position que les Qorgyle et le Grès devraient adopter… Au risque d'aller au-devant de graves conséquences.

Écoutant les prises de position des uns et des autres, Ysolde n'était pas vraiment à l'échange, ni même au débat, après tout, le voyage avait été pénible, poussiéreux et elle était fatiguée, intellectuellement absente et physiquement en manque d'éclat. Tous les bijoux du monde, toutes les couleurs vives de la terre, tous les fards et les coiffures extravagantes ne pouvaient dissimuler la fatigue d'un voyage. Quentyn avait parlé pour eux, échauffé par le vin, la haine des rois de la Couronne et par la fatigue. Une seule voix pour une seule maisonnée. Un exemple qui n'avait pas été suivi par la maison Noirmont qui, au vu des regards échangés, n'était pas réellement sur le même credo. Wayra partageait cependant leur opinion sur cette attitude à adopter. Un silence mit fin au tumulte d'une conversation qui ne trouverait pas d'issue ce soir. Quentyn se leva avant de venir près de son épouse pour s'enquérir de son souhait : le suivre ou demeurer à table. Baisant la main de son époux en silence, le message passa et Quentyn s'éclipsa, un verre à la main. Ysolde épousseta sa robe avant de jeter un regard curieux à l'égard de lady Noirmont. La née Wyl n'avait pas vraiment d'éclat, ni même de grâce, elle était terne et fade, à l'image d'un vautour ayant mal nettoyé ses plumes. Puissante pourtant, toutes deux, elles devaient s'entendre, pour le bien de tous, pour le bien commun, pour Dorne, et ce, même si elles divergeaient en de nombreux points. Esquissant un sourire malicieux à la remarque de lady Noirmont, Ysolde fit tourner son vin dans le verre qu'elle tenait en main avant de répondre. « Il me semble que votre époux ne serait pas de votre avis concernant la qualification que vous venez d'utiliser pour désigner ces rois-dragons. » Avec des mots que Ysolde n'aurait certainement pas utilisés. Un langage fort peu approprié pour une dame de sa naissance, et de son rang. « Je ne peux que m'accorder avec vous. Ils ne réfléchissent que par le feu et le sang. Ils n'ont pas eu à aller chercher très loin leurs devises si explicitement enfantines. » Ysolde bu une gorgée. « Ils ont par plusieurs fois déchiré Westeros par leurs affrontements fratricides. Ils sont comme des bêtes, incapables de se souvenir et d'apprendre. Dorne prendra peut-être position pour être spectateur de ce conflit, mais quand sera-t-il des autres couronnes ? Simples moutons reniflant le cul de leur berger. » Oups.

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An 303, Lune 1, semaine 3



Ysolde Qorgyle & Wayra Noirmont

Le vin roula gentiment dans le verre tenu par lady Qorgyle. Le soleil vint éclairer sa robe carmine et colorer l’intérieur de la main blanche de la dornienne d’une jolie couleur rouge. « Un peu comme si elle avait tenu une flamme, » pensa la brune. Maintenant qu’elle y faisait attention, la jeune femme aurait pu ressembler à une Targaryen avec ses cheveux pâles et ses yeux clairs. « Dans quelle maison est-elle née ? » se demanda-t-elle, comme si cette question lui eut apporté quoique ce soit. « À Dorne, bien sûr… Dans les Montagnes Rouges, sûrement ? » Car il n’y avait bien qu’au coeur de leur nature sauvage et impitoyable que naissaient des hommes et des femmes dont le sang venait des Premiers Hommes. Ces origines, ils les portaient sur leur peau claire, leurs yeux bleus et leurs cheveux aux reflets de soleil. Wayra, elle, tenait plus des Wyl avec sa peau olivâtre et ses cheveux noirs. Auparavant, sa maisonnée devait ressembler à la blonde Ysolde, mais un ancêtre des côtes s’était décidé à colorer durablement leurs gênes. Il avait fallu attendre l’arrivée d’Amarei Dayne pour remettre un peu d’ordre.
Dorne était fait ainsi. De différence de physique, de culture, de moeurs, de pensée… Il faudrait beaucoup d’énergie au Prince Doran pour aligner tous les avis derrière le sien. En particulier lorsqu’elle se remémorait ce conseil mi-figue, mi-raisin où personne n’était d’accord. Et il ne s’agissait-là que de trois maisons. Dont une au sein de laquelle, les pensées divergeaient même. Mais enfin, la vipère pouvait-elle vraiment se considérée comme membre à part entière des Noirmont ?

Wayra détourna le regard du vin avec un soupir. Soupir qui se transforma bientôt en ricanement à la remarque de la Qorgyle.

« Mon époux n’est jamais de mon avis. » Elle haussa les épaules. « Je me demande bien pourquoi. »

Son ton sardonique ne trompait pas. Bien sûr qu’elle savait pourquoi. Il la trouvait trop belliqueuse, peu réfléchie… limitée. Comme la plupart des gens. Il était vrai que la vipère n’était pas connue pour sa vaste intelligence. Elle était manipulable et c’était peut-être ce que son époux regardait avec le plus de dédain. Elle voyait bien qu’il se méfiait de son père comme de la peste - dans les Montagnes, sa réputation n’était plus à refaire - et par conséquent, il se méfiait d’elle. L’influence du Roi Sauvage sur sa fille était indéniable. Même encore aujourd’hui après son mariage. Même lorsque toute la raison serait perdue et que la vérité se muerait en mensonge, elle se tiendrait à ses côtés. Car sa loyauté était à la fois son élévation et sa malédiction.
Était-ce seulement son propre avis que de défendre l’indépendance ? N’était-ce pas l’extension des désirs de son géniteur ? Mais il y avait longtemps que la chienne des Wyl ne réfléchissait plus en ses termes. Son avis, elle l’avait abandonné depuis bien longtemps entre les mains de Warden. Ainsi, les choses qu’elle faisait pour lui étaient excusables. Elle les faisait pour sa famille. Pour quelque chose de plus grand qu’elle.

Les mots de lady Qorgyle sur la devise des Targaryen lui fit lâcher une bref expiration par le nez, simulacre d’un rire étouffé. Elle finit pourtant par s’esclaffer à sa dernière remarque.

« Je n’aurais pas dit mieux, » avoua-t-elle en levant les mains. « Je suis ravie que nous partagions cette opinion… Je me sens moins seule. Ça montre peut-être que je ne suis pas aussi bête que mon mari souhaite le faire croire. »

Ses doigts tapotèrent sur l’imposante table de granit. Elle était d’humeur à boire - comme souvent - mais s’abstenait suite aux remontrances de sa tête. Résultat, elle ne savait pas quoi faire de ses mains. Un tic de Wasen lui revint en tête. Il tripotait toujours ses bracelets pour occuper ses doigts. Durant un instant, elle fut tentée de l’imiter. Elle se réfréna.

Albin n’était pas décidé à changer d’avis. De cela, elle en était certaine. En revanche, Larra pouvait encore basculer… et du bon côté. « Je m’enfonce, » pensa-t-elle. « Je déteste ces choses-là. Les manigances et les messes-basses… Ce n’est pas fait pour moi. » Si elle avait voulu demander à Ysolde son aide pour aider sa belle-soeur à se ranger derrière elles, elle s’abstint. Elle ne savait pas vraiment comment s’y prendre. Parler n’était pas son fort.

« Avez-vous entendu d’autres avis ? »
demanda-t-elle en appuyant son menton contre sa paume. « Pensez-vous que nous représentons la majorité ? » 




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Ysolde ne pouvait que convenir que tout parti n'était pas nécessairement bon à prendre. Elle ne connaissait que très peu la née Wyl, mais visiblement, elles avaient un caractère toutes deux assez emporté. Ysolde comprenait ainsi qu'il ne devait pas être toujours facile de vivre aux côtés d'une femme avec un tempérament de feu, et donc, a fortiori, d'être régulièrement d'accord avec des prises de position qui venaient du cœur. Ysolde ne connaissait pas ce dilemme. Quentyn était régulièrement d'accord avec elle, du moins, sur les sujets politiques, car pour ce qui était du reste. Il savait, et c'était tacite, que Ysolde dirigeait à la maison et que lui, dirigeait en public. Ysolde gagnait régulièrement sauf sur ce qui avait trait à la guerre. Un sujet d'homme. Un sujet qui ne pouvait induire de contradiction féminine. Elle avait été la première à se réjouir que Quentyn ne quitta pas sa patrie natale pour le grand Nord et ses froides contrées. Elle avait été la première à se satisfaire de ne pas le voir revenir blessé ou pire, entre quatre planches. Il restait la question de leur fils, Gulian. Houleuse confrontation. Tempétueux affrontement. Ysolde avait souhaité obtenir son retour de la capitale, qu'il quitta sa fonction d'écuyer auprès d'Oberyn et qu'il revienne sain et sauf auprès des siens. Quentyn s'y était opposé. Il avait toute confiance en Oberyn. Ysolde n'avait jamais évoqué la confiance, mais le danger. Elle avait écrit au prince, court-circuitant son époux. Impossible de tolérer cela. Rien n'avait jamais changé, et Gulian n'était pas revenu. Ysolde allait bien garder secret cette divergence. « Hommes et femmes sont si dissemblables. Impossible de s'accorder sur un simple angle de vue. »

Ysolde esquissa un sourire lorsque Wayra qualifia sa propre intelligence. La Qorgyle n'irait pas jusqu'à porter un jugement sur ce sujet-là, mais qu'il était prompt pourtant de faire des amalgames et des raccourcis. Les femmes étaient certes moins instruites que les hommes mais elles avaient leur propre manière de voir, de ressentir, d'analyser et d’interpréter les événements et les sentiments. Il ne fallait donc ni parler d'intelligence, ni de bêtise. Néanmoins, elle ne put que déplorer la maigre entente qui semblait exister entre les deux Noirmont. Triste histoire que ce mariage, semblait-il. Un remariage. Stérile. Une idiotie pour une si prestigieuse maison. Un mauvais calcul, comme il en advenait tant. Ysolde se racla la gorge avant de répondre. « Je ne peux que me perdre en tergiversations, mais je ne peux que mal imaginer les membres de la famille Martell prendre notre parti alors que Oberyn demeure à Port-Réal. Je ne peux que supposer, également, que les Uller prendront position en opposition à notre avis. » Ysolde s'arrêta un instant. Proposer un avis n'était pas aisé. Ysolde ne connaissait pas suffisamment les positions des Dorniens vis-à-vis des Targaryen pour se prononcer globalement. Elle savait désormais ce qu'il en était dans les Montagnes rouges, mais pour le reste. « Je ne saurai dire. » Ysolde se décida à se développer. « Nous pourrions être majoritaire que la tâche de porter notre voix auprès de Doran ne saurait guère plus aisé. Il n'est pas esprit à être si aisément influencer, néanmoins, je crois, sincèrement, au fond de moi-même, qu'il est partisan de la paix. Rhaegar ne l’interprétera pas ainsi car son âme est malade et son corps agonise. » Ysolde posa sa coupe avant de la remplir. « Nous ne trahissons pas. Nous sommes droits et loyaux contrairement à tant d'autres peuples. Je ne peux qu'être assurée que quoiqu'il sera décidé par notre prince, toutes les grandes maisons se rangeront à son avis… Bon grès ou mal grès. » Ysolde bu une nouvelle gorgée. « Agissons pour que cela soit dans notre sens. » Arquant un sourcil. « Avez-vous de bonnes relations avec Lancéhélion, lady Noirmont ? »

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An 303, Lune 1, semaine 3



Ysolde Qorgyle & Wayra Noirmont

La lumière mourante vint enflammer de ses derniers éclats rougeâtres l’imposante table de marbre. Les veines bleutées devinrent rouge vif. La blancheur de la pierre se colora d’un orange chaleureux, bien loin de la froideur minérale que dégageait le meuble, et l’espace d’un instant, on l’aurait cru prendre vie, ondoyante et légère comme un voile de soie porté par les vents brûlants du désert. Si Wayra n’y avait pas posé sa main gauche, elle aurait pu croire la table tiédie par le soleil. Elle demeurait toutefois glaciale.

Les pions abandonnés là, sur la carte de Dorne gravée en son centre, dessinaient de grandes ombres tremblotantes. La brune n’eut aucun mal à repérer la vipère mordant un talon. Les Wyl. « Des pions ? » s’interrogea-t-elle. « Impossible de se résumer à ça. » Car entre la théorie et la pratique, il y avait un monde. Il serait idiot de se comparer à des palets de cyvosse. Doran connaîtrait bien mal son peuple s’il pensait pouvoir les placer au gré de ses stratégies et patiemment attendre que ses sujets lui obéissent. A la différence des pions, ils étaient dotés d’émotions, d’objectifs et d’ambition. Oui, en théorie, les Wyl soutenaient le Prince et l’indépendance. Mais en pratique ? Warden – car il s’agissait bien de Warden qui dirigeait la maison, non pas Whissan qui n’était qu’un épouvantail – pourrait être tenté par une opportunité surprise. Un revirement de situation. Wayra elle-même ignorait les plans de son géniteur. Et si Doran ne devait pas compter sur quelque chose, c’était bien la loyauté des Wyl.

Peut-être Wayra oubliait-elle - toute perdue dans ses réflexions qu'elle était - que le pion, c'était bien elle. Et que le joueur n'était personne d'autre que son père.
 
L’épouse Noirmont leva un sourcil circonspect à la remarque d’Ysolde. C’était faux. Bien sûr qu’homme et femme parvenaient à s’accorder. Elle s’accordait bien avec son père, elle. A moins qu’il ne s’agisse d’une citation philosophique ? Un vers qu’aurait prononcé un mestre et qu’elle ignorerait ? Peut-être la Qorgyle avait-elle tenté un trait d’esprit ? Mais la brune était bien incapable de rebondir dessus.
 
« Vous y arrivez bien vous, avec votre époux, » rétorqua-t-elle en haussant les épaules.
 
Elle se rendit compte que sa phrase avait des allures d’envies. Elle se rembrunit. Souhaitait-elle vraiment s’entendre avec Albin ? Non, ce qu’elle cherchait, c’était parvenir à convaincre Larra que l’indépendance était pour le mieux. Que cette idée de suivre les Targaryen n’était qu’un ramassis d’âneries. Voilà son unique objectif.

Son interlocutrice prit son temps pour répondre. Visiblement, elle choisissait ses mots avec précaution. Un sourire moqueur fleurit sur les lèvres pleines de la chienne des Wyl. Tergiversations, en voilà un autre mot compliqué pour dire des choses simples.
 
« Vous ne vous perdez pas, » asséna-t-elle en se calant au fond de son siège. « On ne fait que deviner. Essayer, en tout cas. »

Son sourire narquois se mua en une vilaine grimace à la mention du prince Oberyn. Elle avait eu l’occasion de lui parler, peu avant son retour vers la capitale. Un retour controversé. Interdit, même. Enfin, Wayra n’était personne pour juger les hommes et les femmes qui décidaient de ne pas respecter les règles du jeu, mais enfin, cette fois, la décision du frère de Doran l’étonnait. Qu’avait-il donc à gagner à se pavaner comme un paon à Port-Réal ? De bonnes relations diplomatiques ? Il fallait vraiment être naïf comme un lapin de trois semaines pour y croire encore. Même elle avait remarqué que s’entêter de la sorte pour un mirage était non plus inutile, mais dangereux.

« Vraiment ? » s’étonna-t-elle. « Vous pensez que Doran se pliera aux Targaryen uniquement parce que son frère est à la capitale ? Frère a qui il a déjà demandé plusieurs fois de rentrer à Dorne ? Le Prince Doran est beaucoup de choses, mais certainement pas un sentimental. »

S’il l’était, il aurait déjà tenté de venger sa soeur et sa fille bafouée. Elle croisa ses mains sur son ventre déjà proéminent sous sa robe de satin noir.

« L’égoïsme et les humeurs de ce prince capricieux ne décideront pas pour nous. Pas pour moi, en tout cas. C’est un idiot et son frère serait plus bête encore s’il décidait de nous entraîner dans sa chute. »

Étonnamment, le prince Oberyn lui avait fait bonne impression, lors de leur dernière rencontre. Mais il avait fait une erreur et il lui faudrait assumer, le moment venu.

« Et pour les Uller… Je me demande si leur affection pour Oberyn surpassera leur haine envers les Targaryen. On verra bien. »

Lord Uller était un proche d’Oberyn. Whissan le lui avait dit, une fois. Mais si Doran se détournait de son frère, qu’allaient donc faire les hommes de Denfert ?

« Vous pouvez le dire, » l’encouragea-t-elle avec un hochement de tête. « Rhaegar est fou. Comme son père. »

Elle fit tourner son index près de sa tempe.

Les dernières phrases la laissèrent pantoise. Droit et loyaux ? Oh, elle faisait des généralités… Cette guerre risquait fort de la décevoir. Les Wyl se rangeraient-ils derrière Doran s’il décidait de prendre parti pour Rhaegar ? Certainement. En revanche - et cela Wayra en était persuadée - ils ne risquaient pas de bouger le petit doigt pour leur venir en aide.

« Et alors, que devons-nous faire pour que ça soit dans notre sens ? » lui demanda-t-elle.

Ysolde l’avait probablement vu lors de l’entretien précédent, la née-wal n’était pas née oratrice. Elle ne faisait que s’entêter en lançant des regards noirs comme un chien défendrait son bout de gras.

Une nouvelle fois, elle ricana.

« Pas de carton d’invitation aux Jardins Aquatiques quand nous étions jeunes, » commença-t-elle à énumérer sur ses doigts. « Une réputation houleuse, un château tapi au fin fond des Montagnes Rouges… À votre avis ? »

Elle se rendit compte qu’elle parlait des Wyl et non pas des Noirmont, comme elle aurait dû le faire. Elle soupira.

« Ah, mais oui… Les Noirmont ont leurs petites invitations. »



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Ysolde n'aimait pas la tournure que prenait cette conversation. Wayra était à la hauteur de sa réputation. Elle aboyait et elle mordait, mais saurait-elle faire plus ? Ysolde n'accordait que peu d'importance aux jappements bruyants des animaux, aux cris stridents que faisaient certaines bêtes pour apeurer l'ennemi : le véritable danger était sourd et muet. Un scorpion. Une piqûre et la victime n'était plus. Serpent et scorpion ne faisaient pas bon ménage, et Ysolde se rendit compte que malgré ses noces avec le lord Noirmont, Wayra n'était pas aigle, mais bel et bien vilaine vipère des sables prête à surgir de son trou. Elle était malheureusement à découvert ici. Ysolde la voyait. Elle observait la véritable facette de cette femme au caractère volcanique. « Tout le monde n'est pas nous. » Asséna-t-elle pour conclure cette conversation. Elle retint de commenter plus amplement la relation qui liait Albin et Wayra. Tout ceci ne valait pas la peine. À l'évidence.

Elle était agressive tout en étant sur la retenue. Ysolde savait pourtant qu'entrer dans son jeu ne ferait que tendre des relations déjà lointaines entre maisons des Montagnes rouges. Noirmont et Qorgyle ne possédaient pas de liens familiaux, ni d'affinités, pas plus que les Qorgyle et les Wyll. Ysolde et Quentin, cependant, entretenaient des relations très intimes avec de nombreuses maisons de Dorne ainsi qu'avec la maison royale. Gulian était l'écuyer d'Oberyn, après tout. « Oberyn croit à la paix. Il sait les ravages qu'une guerre ouverte avec les Targaryen pourrait causer. Nous le savons tous. Être partisan de notre indépendance n'est pas aux antipodes de souhaits pacifistes. Je suppose que vous ne souhaitez pas que votre enfant à naître vienne au monde sur une terre ravagée par les flammes et imbibée du sang de son peuple… Lady Noirmont. » Le ton était moins cordial, plus sec. Ysolde ne voulait pas de la guerre, et elle ne voulait pas non plus de la soumission aux rois de Port-Réal. Doran et Oberyn étaient deux aspects d'une même pièce. Doran était partisan de la paix. Tout comme Oberyn. Mais ils s'opposaient quant à leurs méthodes. Un optimiste jusqu'à l'os pour le prince émissaire, tandis que son frère régnant était bien plus terre-à-terre. « Il serait dommage qu'en souhaitant ne pas prendre part à une guerre fratricide, l'étincelle belliqueuse implose en notre propre province. Laisser la haine nous dévorer serait une piètre solution. Cette cause que nous défendons est celle de la raison. » Ysolde passerait certainement pour une idéaliste, elle aussi… Mais elle refusait de voir mourir ses fils et son époux parce que quelques maisons mal torchées de Dorne avaient décidé que la guerre aurait lieu coûte que coûte.

« Je pense que nous sommes justement là pour échanger sur ce sujet. Comment porter notre voix jusqu'à Lancéhélion, et qu'elle soit entendue ? » Ysolde esquissa un sourire en coin. « Force est de constater que nous ne nous mettrons pas d'accord ce soir. Néanmoins, je pense que si tout à chacun nous envoyons des corbeaux sur la question à nos relatifs. Nous serons rapidement arrêtés sur le sort de notre nation. Également, connaître les positions du Sénéchal Ricasso et de mestre Caleotte seraient des éléments venant étayer ou non notre réflexion. » Analyser, connaître les forces en présence, ce que tout bon stratège devrait savoir faire pour monter un plan de bataille. Étais-ce vraiment ce que les partisans d'une indépendance allaient mener ? Une croisade pour convaincre le prince de se retirer de toute relation avec Port-Réal ? « Vous jouissez ainsi d'une seconde chance de briller à Lancéhélion. Toute cause n'est jamais perdue finalement… » Bah voyons. Wayra ruinerait toute possibilité de bien se faire voir avec un tel comportement. Ysolde elle-même commençait à avoir une opinion de plus en plus trancher au fil de leur conversation. Gage d'une relation plus claire dans un futur proche.

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Ysolde Qorgyle & Wayra Noirmont

Le regard de la blonde changea. Elle ne regardait plus la brune. Elle la toisait. À travers ses cils presque blancs, Wayra pouvait sentir tout le poids de la condescendance qui pesait sur ses iris bleues. « J’ai dit quelque chose ? » se demanda-t-elle en haussant les sourcils. Après tout, elle n’était pas connue pour ses qualités d’oratrices. Qu’avait-elle fait de travers ? Enfin, elle ne se tracassa guère plus. Ce mépris affiché de la Qorgyle lui rappela qu’elles avaient beau être du même avis, elles n’étaient pas alliées. La née-Wyl n’aimaient pas son air.

Avec cette même suffisance qui avait transformé son visage en masque, Ysolde finit de se gargariser de son couple, visiblement satisfaite. La vipère manqua de rouler des yeux. « Encore heureux. » Les mots menaçaient, mais ne tombèrent pas. Elle avait l’habitude d’être sous-estimée.

« Vous vous prenez très au sérieux, hein, » lâcha-t-elle en levant les mains, paumes tournées vers la blonde en guise de cessez-le-feu.

Wayra ouvrit grand les yeux à sa remarque sur la paix et l’indépendance. Avait-elle bien entendu ? Croyait-elle vraiment que les deux étaient conciliables ? La brune se savait un peu longue à la détente, mais au moins avait-elle les pieds sur terre. Il n’était plus question de guerre ou de paix, de vie ou de mort. Désormais, il fallait choisir pourquoi on allait mourir. Pour les Targaryen ou pour l’indépendance de Dorne.

« Attendez… Que je comprenne bien… Vous êtes pour l’indépendance et pour la paix, c’est ça ? »

Elle marqua une petite pause, admirant l’absurdité d’une telle phrase.

« N’est pas aux antipodes… ? » souffla-t-elle pour elle-même, comme pour bien comprendre. « Vous croyez qu’en déclarant l’indépendance de Dorne, le Prince Doran n’entrera pas en conflit avec le Roi Rhaegar ? Qu’il haussera les épaules et passera à autre chose ? S’il gagne contre Viserys, Rhaegar tombera sur Dorne après avoir pansé ses plaies. Et si Viserys gagne, vous pensez qu’il va nous ficher la paix ? »

Elle lâcha un petit rire surpris, un peu abasourdie.

« Si c’est ce que vous pensez, il va falloir m’expliquer... Oh, ou alors, peut-être espérez-vous qu'ils meurent tous les deux ? Je ne parierai pas là-dessus. »

Vraiment, peut-être y avait-il quelque chose qu’elle ne saisissait pas. Après tout, lady Qorgyle avait l’air si sûre d’elle.

« La paix est morte, il va falloir se faire une raison. Que Doran décide de suivre le Targaryen ou déclare la neutralité, des hommes et des femmes mourront. Pour les Targaryen ou pour Dorne. Le Prince Oberyn en sera sûrement la première victime. »

Il ne faisait aucun doute que s’il s’obstinait à demeurer à Port-Réal et que Doran répondait négativement à la demande d’aide du Roi… Eh bien, le dragon n’allait pas aider le dornien à faire ses valises pour le renvoyer tranquillement à Dorne. Même s’il l’utilisait comme otage, le Prince ne se laisserait pas aller aux élans sentimentaux. Du moins, l’espérait-elle. D’ailleurs, la blonde n’avait pas répondu à sa précédente question. Pensait-elle que Doran puisse se laisser influencer par la présence de son frère à Port-Réal ?

« Alors, ne vous tracassez plus en suppositions sur ce que je souhaite pour mon enfant. »

Mestre Caleotte ? Sénéchal Ricasso ? Wayra n’avait aucune idée de qui il s’agissait. Probablement des proches des Martell ? Aussi se contenta-t-elle d’acquiescer.

« Mon père voudra l’indépendance, » affirma-t-elle. « Whissan suivra. »

Lorsqu’il s’agissait de prendre des décisions, sa cousine s’effaçait comme les nuages après un orage d’été. Aujourd’hui ne serait pas le jour où elle changera. Et quand bien même se déciderait-elle de suivre Rhaegar, il ne faisait aucun doute qu’aucun homme et qu’aucune femme à Wyl ne la suivrait.

« Indépendance ou pas, soyez certaine que les montagnes prépareront leurs hommes. »

« Et que tout Dorne sera bien content de nous trouver là, » siffla-t-elle mentalement.
Elle ne répondit rien à l’ironie trainante de la blonde, se contentant de hausser les sourcils et de croiser les mains sur son ventre. Comme si briller aux yeux des Martell était ce qui lui importait.



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Men fight wars. Women win them.

Et elle donc. Ysolde appréciait de moins en moins cette née Wyl. Détestable créature. Ysolde se contenta de boire une gorgée de vin tandis qu'elle s'égosillait en tergiversations. Ainsi, elle se pensait fine penseuse, mais qu'en était-il ? Avait-elle seulement appris le déroulement de la dernière Danse de Dragons ? Pensait-elle sincèrement que cela différait aujourd'hui au vu de tous les protagonistes qui s'avançaient déjà en pleine lumière et qui demeuraient dans l'ombre… Ysolde tentait d'englober l'ensemble de cette situation particulièrement complexe. Wayra, quant à elle, ne regardait pas au-delà des limites Dorniennes, après ces montagnes rouges qui barraient le passage aux armées de Port-Réal… Ysolde esquissa un sourire discret. Évidemment qu'elle était pour la paix. Évidemment qu'elle était pour l'indépendance. Paradoxalement. Aux antipodes si elle le désirait, mais elle était femme, dans toute sa complexité. Dorne devait briller à nouveau comme une puissance à part entière, elle devait redevenir ce qu'elle était : un royaume étincelant et formidablement riche. Mais jamais Ysolde ne serait une fervente partisane de la guerre. Jamais elle ne consentirait à voir l'un de ses enfants, son époux, partir pour mourir dans un combat qui serait de toute façon perdue d'avance… Dorne avait tenu par le passé, avait repoussé l'inévitable, mais que pouvaient-ils face au désavantage des hommes ? Que pouvaient-ils face à leur mortalité ? Les dragons eux, ne s'éteignaient pas aussi aisément. Les dragonniers se succéderaient mais les bêtes ailées, elles, ne faibliront jamais. Wayra avait-elle envisagé cela ? Dorne avait repoussé l'invasion, elle n'avait pas pu l'empêcher complètement. À moins qu'aucun dragon ne se relève, cette fois-ci.

« Le passé est riche d'enseignements, et nous ne pouvons que nous remémorer le bain de sang que fut la Danse des Dragons. Combien de prétendants au trône étreints par la mort ? Combien de dragons privés de leur éternité ? Il faudra laisser les Targaryen s'entre-tuer en priant pour qu'aucun d'eux ne trouve le salut dans cette lutte. » Ysolde avala une nouvelle gorgée du nectar rougeoyant qui tournoyait au fond de son vere. « Rhaegar ne combattra pas sur deux fronts. Il ne pourra affronter les armées de Dorne et les partisans de Viserys sous peine de voir, finalement, ses deux ennemis s'allier. Viserys est une affaire bien plus pressent, car hautement plus dangereuse. Le prince est pernicieux, dissimulé par les ombres et il enjoint ses partisans de le rejoindre. Rhaegar avance sur des sables mouvants. Il ne prendra pas le risque de se couper une jambe. » Trêve de métaphores, Wayra les comprendraient-elles seulement ? « Le vainqueur nous importe peu. » Se redressant dans son siège, Ysolde plongea son regard dans celui de son interlocutrice. « Imaginez que tous deux tombent. Alyria envisagera-t-elle une nouvelle guerre alors que la précédente lui aura arraché son époux ? Elle est reine mais trop douce pour envisager de mener de front une guerre dans un pays fracturé pleurant son roi. Aura-t-elle seulement la légitimité de demeurer sur le trône ? Connaissons-nous seulement les ambitions cachées des enfants de Rhaegar ? Impossible à dires, mais nous ne pouvons qu'affirmer que la folie et la trahison coulent dans les veines de cette maison comme le sang sur leur blason. » Ysolde posa sa coupe avant de joindre les mains pour les poser sur la table massive. « Autre cas de figure : Viserys gagne et tue Rhaegar. Pensez-vous, à nouveau, que les partisans de Rhaegar s’inclineront sans appeler à la justice ? Pensez-vous que Rhaenys ou Aegon se satisferont de couronner leur oncle ? » Ysolde ricana. « Viserys sera peut-être roi, mais le jeu des trônes sera relancé de plus bel… Tyrell, Lannister, Baratheon, Stark… Je gagerai sur une nouvelle rébellion. » Ysolde se leva pour faire quelques pas pour feindre de réfléchir. « Enfin, envisageons le pire… Viserys perd. Rhaegar vainc. Supposons qu'il ait assez des vivres, d'hommes et de finance pour attaquer immédiatement Dorne. Quelles options s'offriraient à nous ? Aux Martell ? Ou pire encore, Viserys fédère finalement tout le continent contre la folie de son frère, et se retrouve érigé en héros. Galvanisé, il décide de pourfendre la nation traitresse... Que ferait Dorne alors ? » Ysolde se figea quelques instants. « Trancher la tête du serpent. » Déclama-t-elle sans ciller. « Renvoyer à la cendre ce qui est né de la cendre, et à la terre ce qui est né de la terre… puisque nous sommes poussière et nous redeviendrons tous poussière. » Ainsi était la solution énoncée par la Qorgyle. Attendre l'issue de la guerre entre Targaryen puis saigner un homme victorieux, abattre une bête pour sauver tout un peuple, un royaume, un continent.

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An 303, Lune 1, semaine 3



Ysolde Qorgyle & Wayra Noirmont

La nuit était tombée aussi sûrement qu’une hache sur la nuque d’un condamné. Avalé entre deux crêtes osseuses des montagnes, le soleil était mort. Et l’espace d’un instant, les falaises découpées ressemblèrent à une gueule hérissées de dents. Mais les rayons agonisaient emportèrent dans leur cape d’obscurité la triste image.
Plongée dans la noirceur bleutée, la nature hostile s’était éveillée. Au loin, à travers la fenêtre, on entendit vaguement un brouhaha et personne n’aurait su dire s’il s’agissait d’humains ou d’animaux.

En observant sans ciller la femme en face d’elle, Wayra se demanda alors ce qu’elle pouvait bien faire ici et s’étonna que la question ne lui soit pas venue avant. Les Qorgyle, ici ? Pourquoi donc son cousin les avaient-ils conviés ? Ils n’appartenaient pas aux montagnes et ne comprenaient rien à leur mentalité. Et pourtant, elle était là, lady Qorgyle, toute bouffie de confiance et de condescendance.

La Danse des Dragons ? Mais enfin, de quoi parlait-elle ? Bien sûr, la brune savait de quoi il s’agissait… dans les grandes lignes. D’ailleurs, les situations n’étaient pas vraiment comparables, si ? Lors de la Danse des Dragons, les Targaryen avaient plusieurs dragons adultes. Aujourd’hui, n’y en avait-il pas que trois ? Et de petite taille ?
Enfin, s’il fallait chercher des ressemblances entre la situation aujourd’hui et déterrer des événements passés, tout le monde en était capable. Cela ne signifiait pas que les choses se dérouleraient de la même manière. Du discours d’Ysolde, Wayra ne retint qu’une chose. Elle priait pour leur mort.

« Et bien pendant que vous priez, nous nous préparerons, » répéta-t-elle. « Nous verrons lesquelles seront les plus efficaces lorsque les Targaryen nous tomberont dessus : vos prières ou nos osts. »

Elle se tassa à nouveau dans son siège en laissa sa tempe tomber entre son index et son majeur. Bien sûr que Rhaegar ne les attaquera pas de suite. Cela, tout le monde le savait. À moins qu’il ne soit totalement atteint… Ce qui, finalement, était tout à fait possible.

« Ah ça, je suis bien d’accord, » affirma-t-elle. Le vainqueur n’avait aucune importance. « Je pars du principe que quelqu’il soit, nous seront attaqués pour nous faire rentrer dans le rang. »

L’épouse d’Albin l’écouta sagement, sans l’interrompre. Puis elle laissa flotter le silence quelques instants. Cette Qorgyle parlait énormément.

« Ça en fait des questions… Vous avez l’air d’aimer le son de votre voix, » soupira-t-elle.

Elle gesticula un peu pour se redresser. Elle n’était pas habituée à parler autant. D’ordinaire, avec elle, les conversations se terminaient très vite. Et surtout, elles ne portaient pas sur la politique actuelle.

« Trancher la tête du serpent… » ricana-t-elle. « Vous dites ça comme si ce n’était rien. Pour la trancher, cette tête, il va bien falloir s’armer et se salir les mains. Car votre serpent, il ne va pas se laisser faire. À moins que vos prières ne foudroient le vainqueur sur place ? »

Les jambes gonflées d’eau par la grossesse, Wayra se releva difficilement et en grimaçant. Elle avait la désagréable impression de peser le poids de huit chevaux et que l’intégralité de son sang avait trouvé refuge dans ses orteils gourds.

« Soyez sûre que la guerre est inévitable, » répéta-t-elle. « Elle n’arrivera peut-être pas demain, ni durant la prochaine lune. Et je ne sais pas de quelle bouche elle sera proclamée. Mais elle arrivera. C’est ce que nous choisissons en choisissant l’indépendance. »

Elle fit de premiers pas laborieux, clopinante et grinçante comme une aïeule. En passant près du fauteuil de la Qorgyle, elle laissa tomber sa main sur l’accoudoir et se pencha vers elle.

« Pensez-y. »

Ses pas la portèrent hors de la petite pièce tombée dans la pénombre. Lorsqu’elle ouvrit la porte vers le couloir, la lumière des torches se répandit, tremblante et orangée dans l’embrasure. L’ombre de Wayra s’englua sur les dalles, jetant une grande ombre sur la table où étaient encore positionnés les emblèmes gravés. Elle eut un dernier regard pour Ysolde avant de refermer la porte, la laissant à ses illusions et à ses rêves de paix.  



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