Light of the Seven - Sacha

Sacha lui confirma qu’elle avait prié pour des hommes au front, dont Daven Lannister et Lord Tywin. «J’imagine que vous avez prié pour votre père, et de mémoire votre frère n’est-ce pas ? », lui demanda-t-elle ensuite.

Il acquiesça. « Mais, c’était pour mon frère que je m’inquiétais le plus et que je m’inquiète encore, à vrai dire... », confia Lancel. Il avait en effet prié pour son père, malgré sa colère à son encontre, ainsi que pour son oncle et seigneur, Lord Tywin, le grand homme de la famille Lannister, celui qui inspirait à tous le respect et qui avait redoré le blason des lions. Il n’avait pas oublié les Swyft non plus, eux qui vivaient le deuil d’un seigneur, son propre grand-père. « Martyn n’a que quinze ans. », expliqua-t-il. « Je ne peux que remercier le Guerrier d’avoir veillé sur lui mais je prie pour qu’il n’ait pas été gravement blessé, ce que nous ignorons encore pour l’instant...», poursuivit-il. S’il était arrivé quelque chose à Martyn, sa mère aurait été dévastée. Et que dire de Willem. Martyn et lui partagaient un lien très fort, propre aux jumeaux. Un lien dont Lancel aurait pu être jaloux s’il n’avait pas été finalement heureux de remplir celui de grand frère, et donc de modèle.

La foi, et le sujet sérieux de la guerre semblaient avoir permis à Sacha et Lancel de se parler d’une manière différente de celle dont ils avaient l’habitude…et qui consistait surtout à ne pas vraiment se parler, en réalité.

La jeune conflanaise offrit ensuite une pièce à un pauvre garçon. Il était mince et semblait aux aguets. Ayant davantage grandit en apprenant à protéger ses biens plutôt qu’à lorgner sur ceux des autres, Lancel était attentif, lui aussi, sachant que les rues de Port-Réal ne manquaient pas de voleurs.

« On dirait moi. Il y a longtemps. », commenta-t-elle.
« Tu penses que c’était une fille ? », s’étonna Lancel, qui pour sa part, n’avait pas remarqué la supercherie. Il lui posa ensuite une question plus personnelle qui lui avait bien sûr déjà traversé l’esprit mais qu’il n’avait jamais posée, n’ayant jamais éprouvé suffisamment d’intérêt pour Sacha que pour le faire. Ils semblaient en terrain neutre, cependant, aujourd’hui. Apaisés par les Septs et par de plus grandes préoccupations que leurs propres préjugés…
« Tes parents...Que leur est-il arrivé ? », demanda-t-il. Elle était sans doute orpheline, de cela il s’en doutait. Mais, il n’en savait pas plus. Il ignorait comment elle s’était retrouvée à devoir faire cavalier seul dans la vie. A moins qu'elle n'ait jamais connu ses parents et ait été abandonné sur le pas d'une porte, comme cela arrivait parfois...

« J’aurais aimé y aller, Lady Cersei a refusé que j’y aille. J’aurais pu le surveiller et m’assurer qu’il rentre à la maison. », avait répondu Sacha. Lancel fronça les sourcils, outré. Il n’avait pas besoin d’elle pour veiller à la protection de son frère. D’ailleurs, son frère n’avait nullement besoin d’être protégé par une femme. Se prenait-elle pour la plus fine lame du continent ?

« C’est une plaisanterie ? Penses-tu peut-être que mon frère est une dame, tant que tu y es ? », s’exclama-t-il avant d’émettre un rictus un peu moqueur. «Mon frère est loin, très loin, d’avoir besoin de ta protection. Il est encore un peu jeune certes, mais il est formé aux armes depuis son plus jeune âge, comme je l'ai été moi aussi. C’est plutôt toi qui pourrait avoir besoin de lui pour surveiller tes arrières, tiens. », répliqua Lancel. D’ailleurs, quel âge avait-elle ? Elle ne devait pas être bien plus agée que Martyn. Et elle se croyait prête à faire la guerre…Naive jeune fille, pensa Lancel. « Tu devrais réfléchir avant de parler, je suis sûr que Cersei te l’a déjà conseillé. Cela t’éviterait de dire des choses aussi idiotes qu’arrogantes. », conclut-il, pensant que la jeune protégée de Cersei était décidement bien imbue de sa personne et bien confiante en ses talents pour se croire plus arrogante pour se croire plus habile, une arme en main, que pouvait l’être l’un des fils de Ser Kevan.

Lancel aurait pu répondre qu’il aurait bien évidemment veillé sur son frère lui-même s’il était arrivé à temps depuis Volantis, mais cela ne se serait pas passé ainsi, il le savait bien. Martyn était avec les Valois. Ils auraient sans doute été à des lieues de pouvoir se croiser. Et puis, la guerre, ce n’était pas de protéger les siens, mais bien d’attaquer son ennemi. Martyn aurait eu à se battre avec son chevalier et lui-même aurait eu à le faire dans les rangs Lannister, voilà tout.

Une fois cette maladresse de la part de Sacha derrière eux, la conversation redevint plus posée et Lancel interrogea la jeune fille sur ses parents.

« Eh bien… On m’a dit que ma mère avait été violée, mais une autre version dit que mon père est mort à la guerre. Après, on m’a dit que ma mère m’avait viré de chez elle et qu’elle était morte peu de temps après. Mais on m’a aussi dit aussi qu’elle était morte quand j’devais avoir trois ans. Je n’ai aucun souvenir d’eux si c’est ta question. J’avais mes… frères adoptifs, si on peut dire, c’était ma famille pendant un p’tit moment. », expliqua-t-elle.

Il acquiesa sans poser plus de questions au sujet de ses parents. Elle n'avait de toute évidence pas commencé sa vie de la plus simple des manières. « Où sont-ils, maintenant ? », demanda-t-il simplement au sujet de ces « frères » dont elle avait parlé.

Alors qu’ils s’enfonçaient à nouveau dans les rues de Port-Réal pour retourner au Donjon Rouge, Sacha trébucha à nouveau et aurait très bien pu s’étaler sur le sol si Lancel n’avait pas été là. Elle s’était accrochée à son bras et Lancel l’avait retenue. Mais, le jeune homme ne put s’empêcher de se demander comment était-il possible pour une jeune femme d’être aussi maladroite ? Il ne pouvait cependant nier que cette fois, les pavés vieillis par le temps de Port-Réal y étaient aussi pour quelque chose.

Il s’abstint cependant de commentaires cependant et attendit que Sacha soit prête à se remettre en marche.
« Félicité n’aimerait pas que je les abîme. Et moi j’aimerais pas devoir retourner dans les boutiques. »

« Beaucoup de jeunes filles aimeraient pouvoir se rendre dans des boutiques», dit-il, même s'il avait bien compris que les intérêts de Sacha n'était pas ceux de la plupart des jeunes filles. « Cela me rappelle qu'il me faut trouver quel présent envoyer à ma soeur pour son anniversaire... », pensa-t-il tout haut. Janei allait avoir six ans dans deux lunes. Elle était la seule fille de la fratrie. Sacha avait déjà eu l'occasion de la voir à Castral-Roc, c'était certain, que cela soit en compagnie de Dorna et de Kevan ou même de Lancel. Le jeune homme aimait beaucoup sa petite-soeur, même si de par son écuyage à Champmoisson, il ne l'avait que peu cotoyée.« Elle va avoir six ans dans deux lunes», ajouta-t-il avec un léger sourire. Mais, il fallait s'y prendre à l'avance. Les biens mettaient du temps à circuler, tout comme les gens...

Heureusement, la conflanaise n’avait pas répliqué davantage au sujet du jeune frère de Lancel et de la guerre. La conversation avait donc repris son cours, apaisée par la sérénité des Dieux. Le chevalier ouestien interrogea Sacha sur le destin de ses frères de cœurs. « Morts. Pour la plupart. Les Grands sont morts il y a des années d’une maladie, les petits, des dernières nouvelles que j’ai eus, étaient vivants. Mais c’est clairement pas eux qui m’écriraient. Avec l’hiver, j’ai pas beaucoup d’espoirs pour eux, même si… Ils sont plus que débrouillards. », expliqua-t-elle.
Lancel ne put qu’acquieser en silence. Sa propre fratrie n’avait jamais eu à craindre de perdre la vie en raison de l’Hiver et du froid que cette saison amenait avec elle. Et cela n'était pas prêt d'arriver...
« Que les Dieux veillent sur eux. », se contenta-t-il de répondre poliment. « C’est avec eux que tu as appris les chants que nous avons chantés au septuaire ? »

« Beaucoup de jeunes filles voudraient juste marcher dans les rues sans craindre de se faire violer. », avait répondu Sacha lorsque Lancel lui avait dit que nombreuses étaient les jeunes filles qui aimeraient pouvoir flâner dans les boutiques. A cela, il ne put rien répondre. Evidemment, elle avait raison.

« Une nouvelle poupée pourrait lui faire plaisir, je pense. », répondit Lancel après que Sacha ait listé quelques idées de cadeaux pour Janei. La fille de Kevan avait déjà des poupées, bien sûr. Mais, les enfants nobles n’avaient jamais assez de jouets, après tout. Et cette poupée la viendrait de Port-Réal et lui serait envoyée de son grand-frère, alors sans doute aurait-elle une valeur toute particulière ? « Et des figurines d’éléphants, peut-être. J’aimerais bien lui trouver cela. », déclara-t-il, pensif. Pourquoi un éléphant devait sans doute se demander Sacha ? Et bien, car de son tour prévu des neufs cités libres, Lancel n’avait eu l’occasion que de séjourner à Volantis, où l’on se déplaçait en hathay, soit en carrioles tirées par des éléphants nains. Il parlerait de Volantis à sa petite sœur, lorsqu’il la reverrait, et illustrerait son récit à l’aide des figurines qui lui auraient offert au préalable. Il pourrait également lui parler de l’éléphante de la ménagerie de Port-Lannis. Il ne l’avait jamais vue de ses yeux, car l’animal était décédé avant sa naissance. Mais, ce genre d’ancedotes plairaient à Janei, il en était certain.

« Si vous v’lez vous t’entraîner avant l’grand-soir mon beau seigneur blond, passez m’voir ! », lança une voix séductrice. Lancel leva les yeux, comme Sacha, vers une prostituée visiblement postée à la fenêtre de la maison close dans laquelle elle travaillait. La jeune conflanaise avait éclaté de rire à l’idée qu’on l’ait prise pour la fiancée du fils de Kevan. Quelle drôle d’idée, en effet… Comment si Lancel épouserait une jeune femme comme celle-là !

Le jeune homme préféra tout simplement ignorer la prostituée, secouant la tête pour signaler son refus. Non, il n’était pas intéressé. Pas du tout. « Allez, avançons. », dit le jeune homme à Sacha, alors qu’elle tentait de se reprendre. « Et regarde où tu marches au lieu de rire. », ajouta-t-il. Un conseil dont elle semblait avoir besoin, au vu de sa difficulté à se déplacer dans cette ville...

Trouver de quoi se nourrir, voilà bien une chose dont Lancel n’avait jamais eu à s’inquiéter. Entendre Sacha parler de son existence dans la rue le mettait quelque peu mal à l’aise, finalement. Tout simplement car il ne savait pas vraiment que répondre.

« Pas sans la permission de Cersei », lui rappela-t-il quand Sacha partagea son intention de se rendre au Port.

Lancel émit un léger rire en entendant les mots que Lady Cersei avait employé pour décrire la démarche de Sacha. « Aussi gracieuse qu’une vache », voilà une comparaison bien choisie.

« Si Lady Cersei dit que je suis aussi gracieuse qu’une vache c’est qu’il y a une raison. Et puis, allez pas me dire que vous n’avez jamais trébuché sur ces pavés ! Ils sont tous à moitié descellés ! Et je maintiens que marcher en pantalon est plus confortable et plus pratique qu’en robe ! Qu’importe que cela soit totalement indécent pour vous. », avait-elle dit.
« Je sais marcher, moi », lui répondit Lancel. « Mais peut-être devrais-tu envoyer une requête à sa Majesté, pour te plaindre de l’état de sa cité ? », plaisanta-t-il. Une roturière comme Sacha allant se plaindre au roi Rhaegar de l’état de Port-Réal, voilà une image aussi incongrue qu’amusante.

Bientôt, Lancel et Sacha arrivèrent au pied du Donjon Rouge. Le jeune lion commençait à avoir faim et se réjouissait de rentrer profiter d’un bon repas. En cette matinée de la treizième lune, c’était la première fois que Lancel avait vraiment discuté avec Sacha. Les deux jeunes gens s’étaient jusque-là contentés de quelques paroles et regards qui témoignaient malgré tout de ce qu’ils pensaient l’un de l’autre. Cette visite au septuaire avait été moins pénible que Lancel l’aurait imaginé, cependant. Les Dieux avaient aussi ce pouvoir, sans doute, de rapprocher un tant soit peu les gens, aussi différents puissent-ils être…