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The worst anger of a father against his son is more tender than the most tender love of a son for his father.

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Jorah Mormont
An 302, lune 12, semaine 2



La bataille avait cessé comme elle avait débuté : dans la confusion la plus totale. Jorah avait cru voir sa dernière heure arrivée. Il s’était battu auprès de sa famille mais encerclé, submergé, il commençait à se résigner à les voir tous mourir comme lui-même périrait sous les coups d’un ennemi plus morts que vivants. Il n’en fût rien. Les spectres étaient tombés, d’un seul bloc, sitôt que leur créateur avait périt. Il ignorait bien sous les coups de qui mais la seule chose qui importait était qu’ils avaient survécu à cette légendaire bataille. On en parlerait encore probablement dans mille ans, toutefois, le Chevalier ne réalisait pas encore totalement ce qu’il venait de vivre. Il était en vie, aussi en forme qu’il pouvait l’être après une nuit de lutte acharnée, soulagé. Les Anciens ne l’avaient pas encore arraché à cette vie, et il ignorait bien pourquoi ils s’acharnaient à le maintenir en vie ainsi, après toute les fautes qu’il avait commise. Néanmoins, sa première pensée avait été pour sa jeune protégée, la Princesse Daenerys. Peut-être était-ce sa destinée ? Protéger la jeune Targaryen, la raison de sa survie. Il l’ignorait bien mais il accueillait avec soulagement la pensée qu’il avait au moins participé à sa protection en menant cette bataille, quant bien même il l’avait fait contre son grès.

Son premier geste, sitôt la stupéfaction passée, avait été envers le jeune Brandon Norroit, tandis que retentissait les cris de victoire des soldats partout autour d’eux. Contre toute attente, les deux hommes s’étaient battu côte à côte au plus fort de la bataille, malgré les réticences du Norroit à son égard, mais il n’avait pu lui empêcher la blessure. Touché au flanc, il lui avait semblé prêt de s’effondrer et il s’était décidé à le conduire au sein du château, le soutenant jusqu’à atteindre l’enceinte effondrée des Loups. Quelqu’un dont les connaissances médicales sauraient lui venir en aide avait prit le relais et il l’avait quitté non sans une dernière tape amicale sur l’épaule. Le Norroit était costaud, il survivrait. Ils se reverraient plus tard, à n’en pas douter, car ils étaient désormais unis par un lien qui ne pourrait se tisser qu’entre deux hommes ayant vaillamment survécus ensembles sur un champ de bataille. Il s’était également enquit de l’état de sa cousine Alysane, prise en charge à son tour, croisant son regard tandis qu’elle recevait les premiers soins. A son image, elle ne semblait pas plus prête à rendre l’âme qu’elle n’avait eut l’intention de déposer les armes durant la bataille. De plus, Edrick la veillait, aussi prit-il la direction de la sortie, laissant derrière lui les tumultes de cette infirmerie improvisée dans laquelle il ne se sentait pas plus utile qu’une jouvencelle sur un champ de bataille.

L’état de désolation de la bâtisse ancestrale des Stark le laissa un moment songeur alors qu’il débouchait à nouveau dans la cour intérieure. Partout, les blessés affluaient, soutenus par d’autres, tantôt gémissants tantôt mugissants de douleur. Certains terminaient d’éteindre le brasier qui s’était allumé au milieu des débris et qui dégageaient une affreuse fumée âcre. L’Ours déchu se couvrit le nez pour se protéger de ces effluves toxiques et s’en éloigna en direction du champ de bataille. Il hésita un instant sur la marche à suivre. Ne devrait-il pas rejoindre l’OST conflanais et tenter de retrouver Lord Brynden ? Un regard alentour l’en dissuada. Là, partout, des soldats étaient étendus de la neige jusqu’à perte de vue. La plupart étaient morts, mais d’autres étaient peut-être encore en vie. Cette pensée le poussa à rejoindre les courageux qui commençaient déjà à faire le tour des cadavres. Il serait encore temps de rejoindre sa région d’adoption plus tard.

Le soleil s’était levé à nouveau tandis que défilaient les heures suivants la bataille, éclairant d’une clarté sinistre l’état de désolation des lieux. Chez l’ancien exilé, la fatigue commençait à se faire sérieusement sentir, mais il aurait été impensable que de songer au repos dans une situation pareille. Plusieurs heures durant, il s’attela, en compagnie d’autres survivants miraculeux de cette bataille comme lui, à repérer et rapatrier les blessés quant ils étaient encore en état de l’être. Une fois en sécurité à l’intérieur du château, il s’agissait alors plus d’identifier les cadavres, leur Maison ou leur région d’appartenance quand ils en portaient les couleurs, et de les rassembler afin de permettre leur crémation par la suite. A plusieurs reprises, il avait identifié quelques connaissances. Soit des hommes de l’Île qui avaient nombres fois combattus sous ses ordres, autrefois, ou des alliés nordiens d’une autre vie. La vision du cadavre de Lord Galbart Glover, dont il avait recroisé la route à son retour au Nord, et qui avait longtemps été de sa famille de part son mariage avec lady Melara, lui arracha un pincement au cœur. Ses bras, tremblants sous l’effort, ne s’arrêtèrent pourtant pas dans sa besogne alors qu’il tira un énième corps à côté de ce dernier, aligné avec les autres le long des remparts.

Les mains sur les hanches, il s’arrêta quelques secondes et reprit quelque peu son souffle, observant quelques corbeaux de la Garde de Nuit rassembler leurs frères tombés au combat à une vingtaine de mètre. Un petit attroupement s’était formé, attirant son regard et il s’attarda sur eux, les sourcils froncés. L’agitation qui perturbait le groupe, et l’étrange désordre qui en ressortait, suscita sa curiosité, et la gravité de leur trait plus encore. Un affreux pressentiment le prit et l’incita à s’approcher, une étrange boule au fond de l’estomac. L’un d’eux le vit venir, leur regard se croisèrent et la lumière sembla se faire dans l’esprit du jeune frère juré. Il donna un coup de coude à son voisin qui leva également les yeux vers lui, affichant rapidement la même expression que son compagnon. Un murmure sembla se propager parmi eux et progressivement, tous se retournèrent, s’écartant les uns des autres. De dos, l’un d’eux était penché au dessus de quelque chose et il se releva à son tour, s’écartant de l’objet de son attention, le révélant à la vue de l’Ours Déchu.  

Comme s’il avait reçu un coup de poing en plein estomac, Jorah s’arrêta soudainement de marcher. Ses yeux -ignorant des regards posés sur lui- restèrent fixés au centre de l’attroupement. Là, semblant dormir dans la neige, reposait le corps d’un vieil homme. Les traits de son visage semblaient paisibles, et seul les coulures de sang s’échappant de ses lèvre pour se perdre dans sa barbe ainsi que l’état de ses vêtements, laissaient deviner de la réalité des faits. La vision de son crâne dégarni et parsemés de cheveux, celui-là même dont il avait plaisanté avec Lyra à Corneilla, aussi blancs que la neige sur laquelle il reposait, suffit à faire monter un flot d’émotions en son cœur. Bloqué au fond de sa gorge, un cri de rage manqua de s’échapper mais resta coincé en une boule douloureuse. NON ! Non, ce ne pouvait pas être vrai. Pas lui aussi. Pas maintenant ! Un nouveau coup d’œil aux frères jurés lui apprit tout ce qu’il avait encore besoin de savoir. L’irrémédiable reposait bien sous ses yeux. En lui, une brèche était en train de se déchirer, résultat d'une perte qu'aucun mot ne pouvait décrire. Ses jambes se mirent à trembler et il crut un instant tomber. La vision de son visage paisible, parfois tant haï et pourtant tant aimé, devint quelque peu flou. Il déglutit difficilement, ravalant son émotion et s’efforça de maintenir contenance, le visage soudain fermé. Le regard des frères jurés pesa sur lui tandis qu’il s’approcha solennellement.

Oui. En ce jour de victoire de l'an de grâce 302, l’Humanité avait triomphé des ténèbres. Mais le Vieil Ours -sa mission accomplie- s’en était allé.




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