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La vérité est parfois nécessaire. | Maege & Alysane
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La vérité est parfois nécessaire
An 300 Lune 7 Semaine 3 Jour 7
Maege & Alysane
Alysane quittait Winterfell pour se rendre à Harrenhal à l’occasion du tournoi. C’était la première fois qu’elle quittait le Nord dans ses souvenirs. Elle n’avait jamais vu autre chose que son île et, parfois, les terres austères souvent enneigées du Nord. Elle aime sa terre natale et ne la changerait pour rien au monde. Elle y a grandit, elle y a vu grandir ses sœurs, puis sa fille et maintenant son fils. Elle y a perdu beaucoup également. Des amis, des amants, des enfants. Le Nord n’est pas le Royaume où il fait bon vivre pour quelqu’un qui n’est pas habitué, et même pour quelqu’un qui n’a connu que le Nord, ce n’est pas toujours évident. Mais ses habitants sont attachés à ces terres, Alysane n’est pas un cas isolé. Donc, en quittant Winterfell, elle laissait derrière elle sa sœur aînée, Dacey, ainsi que son fils, Jeor. C’était la première fois qu’elle le laissait et partait aussi loin de lui. Même si elle ne lui avait pas porté tout l’amour qu’elle aurait dû lui porter durant les derniers mois, elle se rendait compte que rien ne pourrait l’empêcher d’aimer son fils, sa propre chair. Elle comprenait parfaitement pourquoi sa mère avait toujours été aussi protectrice à l’égard de ses filles, et elle l’est toujours.
Sur la route d’Harrenhal, Maege ainsi que Lyra, sa sœur cadette, la troisième de la fratrie. Cela faisait près d’un mois qu’elle ne les avait pas vues, elle avait donc ressenti le besoin de faire le chemin avec elles plutôt qu’être aux côtés de Jon et Sansa Stark. Elle les appréciait, mais sa sœur et sa mère passaient avant tout. Il faut dire que les derniers mois qu’elle avait passés sur son île, elle ne les avait pas réellement consacré à sa famille. Elle s’en voulait énormément pour cela. Même si elles comprenaient qu’elle soit dans un tel état, elle se sentait coupable de ne pas avoir été présente ni pour son fils, ni pour ses sœurs. Lyanna était encore jeune, presque du même âge que sa fille, Marthe. Elle a besoin de la présence d’Alysane tout comme Lyra et Jorelle en avaient besoin lorsqu’elles avaient le même âge. Puis Lyra qui elle aussi a vécu des choses difficiles. Alysane avait énormément prié pour le retour de sa sœur et, alors qu’elle était de retour, elle n’avait même pas pu l’accueillir comme il se devait tant elle était anéantie par sa perte.
Il aura fallu un peu moins de deux semaines aux Mormont pour atteindre Harrenhal à partir de Winterfell. Alysane avait eu de nombreuses nuits et journées passées en leur compagnie, elle aurait pu leur parler et leur faire part de tout ce qu’elle avait gardé pour elle depuis tous ces mois. Mais elle se contentait d’écouter ce qu’elles avaient à dire et de poser des questions, sans jamais donner le moindre détail sur son ressenti après la mort de Marthe et sur son choix de laisser Jeor à Winterfell. Ce n’était pas faute d’avoir été questionnée, mais elle avait fait le choix de rester silencieuse et prétextait presque à chaque fois avoir envie de dormir. Elle fuyait ses responsabilités, elle le savait et n’en était pas fière. C’est pour cette raison que la nuit précédant leur arrivée à Harrenhal, Alysane décida de parler à sa mère, à part. Il était encore trop tôt pour affronter sa petite sœur. Elle s’en voulait davantage de l’avoir délaissée que de n’avoir rien dit à sa propre mère. Elle lui fit donc signe de la suivre, une fois le dîner terminé et Lyra partie se coucher. Elle n’était pas sereine. Maege n’avait pas toujours été le genre de mère à qui elle se confiait, bien qu’elle soit protectrice au possible. Ce n’était pas souvent de l’affection et de la tendresse pour Alysane. Elle ne s’en plaignait pas, mais appréhendait cette discussion avec cette femme qui l’a mise au monde.
Une fois seule, le feu encore allumé pour leur procurer de la chaleur par ces nuits de début d’hiver, Alysane décida enfin à se lancer. Elle avait tant à dire, tant sur le cœur. Elle avait attendu beaucoup trop longtemps et elle avait des questions. Car depuis peu, elle commençait à se poser des questions quant à ses origines. Elle n’avait jamais été curieuse à ce sujet-là puisque ça ne l’intéressait pas particulièrement. Mais, sachant que Jeor ne connaîtrait jamais son père, elle se mit à penser à qui pouvait bien être son grand-père. Elle avait donc en tête de lui poser la question, une fois qu’elle aurait mis au clair les mystères qui planent autour de sa petite personne. « Mère… Je voulais vous parler car… je n’ai pas encore pris le temps de vous expliquer mes agissements de ces derniers mois. » Elle avait à peine commencé qu’elle commençait déjà à avoir du mal, mais elle se devait d’être forte. Elle s’était toujours interdit d’être faible devant sa mère, en toutes circonstances. « Vous vous posez probablement des questions quant à ma cicatrice mais également quant à mon isolement pendant plusieurs mois, sans manger et presque sans boire. Je présume que vous vous interrogez également sur le départ de Jeor à mes côtés et pour quelle raison il n’est pas à mes côtés aujourd’hui. » C’était principalement les seules questions auxquelles Alysane répondrait ce soir-là.
Elle commença donc par l’histoire de sa cicatrice. Elle n’avait jamais fait mention de Touffu à sa mère et elle avait peur que Guerrier soit blâmé à tort alors qu’il n’y était pour rien. « Il y a de cela quelques années. Plutôt nombreuses, en réalité. J’ai trouvé un petit ourson dans la forêt et j’ai décidé de l’adopter. A compter de ce jour, je me suis comportée comme une mère avec lui. Je ne vous en ai pas parlé, parce que je savais que vous trouveriez ça dangereux et je ne voulais pas avoir à me séparer de lui. Il s’appelle Touffu. Il a grandi avec moi et il n’y a jamais eu le moindre incident. Il a toujours su se cacher et éviter l’Homme. Il sortait discrètement et se montrait vraiment que lorsque j’étais là et qu’il se sentait en sécurité. » Il était dur d’avouer un secret gardé pendant presque quinze années. Surtout lorsqu’il s’agit de l’avouer à sa propre mère, d’avouer qu’on lui a délibérément menti pendant plusieurs années. « Il est en partie responsable de cette cicatrice. » Seulement en partie. Il n’aurait jamais fait de mal délibérément. « Lors de l’attaque le jour du décès de Marthe, les sauvageons l’ont attaqué. Je pense qu’il a senti que j’étais en danger et c’est pour cette raison qu’il est sorti et a commis cette imprudence. J’ai tenté en vain de le calmer, et vous pouvez voir le résultat. » Mais elle n’arrivait pas à lui en vouloir, elle n’en voulait qu’à ces êtres infâmes que sont les sauvageons. « J’ai toujours été consciente du danger qu’un ours représente et j’assume, aujourd’hui, les conséquences. Vous avez toujours eu raison, je n’ai jamais douté de cela. Je suis sincèrement désolée de vous avoir caché tout cela durant tout ce temps. » Elle se cacha de préciser que ses sœurs et Elyane avaient eu l’occasion de se retrouver face à Touffu. Elle pourrait la blâmer d’être inconsciente face à sa propre personne, mais elle redoutait sa réaction si elle savait qu’elle avait mis en danger le reste de sa fratrie et d’autres enfants extérieurs à l’île. « C’est un secret qui, je pense, me pèse lourd depuis tout ce temps. J’avais besoin de vous l’avouer. »
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An 300, lune 7, semaine 3 jour 7
Maege & Alysanne
Dans le regard gris, la silhouette des gigantesques tours se reflétait, dansant comme un souvenir aux côtés de l'éclat rougeoyant du feu qui brûlait non loin, et ce malgré l'obscurité oppressante de la nuit. Harrenhal. Plus austère que jamais, la forteresse se dressait devant la Mormont par delà l'orée de la forêt, et crevait même la frondaison des arbres. Enveloppée du brouillard glacé qui surplombait le bois comme une chape, on eut dit une demeure maudite. Mais ne l'était-elle pas, après tout? Il n'en demeurait pas moins que le spectacle était saisissant. Des tombes. Pensa Maege. Des tombes pour un festin. Sur la route elle les avait reconnu, ces chemins, ces arbres, qui l'avaient accompagnée vers la guerre. Dix-sept ans s'étaient enfuis, happés par la vie, mais le temps n'avait pas effacé la mémoire de l'Ourse. Elle aurait pu désigner qui, à ce recoin de rivière avait fait tombé son heaume dans les eaux turbulentes et claires. De mémoire, elle pouvait redessiner le campement qu'ils avaient construit un peu plus loin sur la route, de mémoire elle aurait même pu réciter quel blason avait dormi où. Elle les voyait encore ces ombres qui dansaient sous les arbres gris, les sourires sur les visages perdus dans les nimbes du passé lorsqu'ils s'asseyaient au coin du feu, juste comme elle le faisait à présent. Mais ces ombres n'étaient plus que des ombres.
Tous ses compagnons étaient morts. Et plus personne dans leur escorte spartiate ne pouvait se rappeler avec elle. Ne pas pouvoir partager ses souvenirs avec quelqu'un était un poids, comme une bulle de verre qui empêcherait quiconque l'entendrait parler de cette époque de jamais comprendre vraiment comment c'était d'être jeune en ce temps là et de se battre pour une juste cause. Et tout, ou presque, était parti de cette forteresse maudite. Tout était né entre ses murs tachés de sang, et il n'avait fallu que quelques fleurs couleur de givre pour enclencher la plus grande rébellion qu'ait connu Westeros depuis la vague de rébellion Feunoyr. Revenir sur ces lieux avait, pour les nordiens, le goût amer de la défaite. Le roi et la reine tenaient-ils donc à célébrer la paix en rappelant ce que l'Hiver pouvait amener avec lui? Mais aujourd'hui, point de printemps trompeur. La saison blanche était bel et bien là, souriante comme la lune pâle qui se reflétait dans les eaux sombres du lac.
Dans les braises, un éclat d'écorce de pin encore sali de sève pétarada soudain. Une gerbe d'étincelles jaillit des flammes avant de disparaître dans l'air figé par le froid. La doyenne de l'île aux Ours regardait par dessus le feu la silhouette endormie, roulée dans une épaisse couverture rêche. Le nez enfoui sous le tissu, Lyra dormait profondément. Malgré le froid qui rosissait ses pommettes la pâleur de sa peau abîmée par le froid semblait un éclat de glace contre sa chevelure corbeau. Elle s'était endormie seule, en silence. Même lorsqu'elles étaient toutes petites, pas plus grosses que des chats, Maege n'avait jamais chanté de berceuse pour ses filles; maintenant qu'elles étaient presque toutes des femmes faites elle ne dérogerait pas à cette règle. Les chansonnettes étaient pour les hommes du sud, qui avaient le droit de s'endormir en imaginant que, la nuit suivante, leur mère reviendrait pour chanter pour eux. Les Mormont n'avaient pas besoin de cela. La foret chantait pour elles. Pourtant, quelques fois, une voix grave avait susurré un air mélancolique à l'oreille de ses filles, déjà assoupies. Sans s'en rendre compte, Maege avait commencé à marmonner cet air lorsque la main blanche d'Alysanne attira son attention et lui fit signe de la suivre. Un léger sourire grave flottait sur les lèvres barrées d'une cicatrice de la lady. Enfin, pensa-t-elle.
Les Mormont étaient de féroces guerriers, mais exprimer leurs sentiments ou leur peine était un art qui leur échappait bien souvent. Alysanne plus encore que ses autres filles avait toujours eu cette capacité à encaisser et à retenir, à supporter, à garder pour elle plutôt que de s’épancher. Une fois éloignées de quelques pas du feu, elle ne fut donc guère surprise d'entendre la brune lui avouer pourquoi elle la prenait ainsi à part. Maege l'écoutait, silencieuse. Ses bras étaient croisés sur sa poitrine et ses épaules qui se soulevaient au rythme de sa respiration étaient recouvertes d'une épaisse fourrure qui avalait les reflets dorés des flammes.
Muette, la brune laissa sa fille s'exprimer sans lui imposer la moindre coupure, ayant conscience de se trouver face à un caractère farouche dont le courage menaçait de s'éteindre à la moindre opposition de sa part, comme une biche qui trouve la volonté de se montrer plutôt que de sa cacher. Mais de la biche, sa fille n'avait que les grands yeux ténébreux et brillants. Quelques instants de silence suivirent l'écoute attentive de la mère. Cette dernière ne bougeait pas, comme prostrée par ce qu'elle venait d'entendre. La Lady de la maison Mormont avait attendu longtemps que sa fille se décida enfin à lui révéler l'origine de sa cicatrice et de son mal-être, quitte à patienter pendant des années, quitte à mourir sans le savoir, peut-être. Jamais elle ne l'aurait forcé à le lui avouer. Ce n'était pas dans sa nature, tout simplement. Les choses étaient telles qu'elles étaient et si elle était condamnée à rester dans l'ignorance, elle l'aurait accepté sans en tenir rigueur à Alysanne. Cela aurait été son choix, comme elle venait de faire le choix de lui dire la vérité.
Après presque une minute entière d'un silence pesant, la voix sévère de Maege perça soudain l'obscurité.
"J'imagine qu'on peut dire que l'ours t'a déjà donné la claque que tu mérites, Alysanne."Son ton était implacable, et vibrant. On pouvait voir distinctement ses bras puissants se crisper contre son torse, et ses larges mains se refermer en deux poings serrés.
"Un ours..."marmonna-t-elle dans sa barbe."Par les anciens dieux, Alysanne, un ours!" Elle jeta un regard vers la couche de Lyra. Elle se retenait bien de parler trop fort mais malgré sa voix basse, elle n'en était pas moins impressionnante de colère. Ses yeux étaient fichés dans ceux de sa fille. "Les lions dévorent aussi les Lannister, et le feu des dragons a déjà emporté plus de Targaryen qu'on n'veut le faire croire! Pourquoi crois-tu que l'on choisisse de telles bêtes pour emblême? C'est un avertissement! Pour nos ennemis, comme pour nous même! Un ours, Alysanne, à quoi pensais-tu donc?!" Furibonde, sa respiration s'était faite plus profonde et sa voix devenait rauque. Serrant et déserrant ses doigts calleux elle chercha à se calmer en regardant autour d'elle plutôt que sa fille qu'elle aurait voulu secouer comme un pommier jusqu'à...Mais Alysanne avait déjà compris son erreur, lui sembla-t-il alors. Entendre prononcer le nom de sa petite fille avait serré son coeur, et alimenté sa colère. D'humeur toujours grommelante elle lacha d'un ton plus sec qu'elle ne l'aurait voulu, mais où une pointe de chaleur transparaissait:"Tu n'as pas à t'excuser. Tu savais ce que tu faisais. Je le sais, je te connais, enfin..." L'assurra-t-elle, terminant sa phrase sur une note qui oscillait entre le cynisme et la sévérité. Alysanne était tout comme Dacey une jeune fille qui avait très tôt su se montrer responsable et adulte, parfois bien plus que leur propre mère, elle le savait. Mais comme elle venait de l'apprendre, personne n'était parfait! "Tu ne dois pas t'excuser pour avoir suivi ton coeur et ton instinct. Jamais. En revanche, tu as le droit d'être désolée des conséquences! Encore heureux qu'il ne t'ait pas arraché la tête! " Maege gronda, grommelant quelques jurons en faisant quelques pas dans les broussailles, ses bottes faisant croustiller l'herbe givrée sous ses pas. "Je ne t'y ferais pas renoncer. Mais à l'avenir, souviens toi de ta balafre, chaque jour, chaque nuit! Souviens toi de ce qu'un ours peut faire." Elle lui tournait alors le dos, lui présentant son incroyable carrure et masquant l'éclat étrange qui avait lui au fond de ses prunelles. Ces mots, elle les avait déjà prononcé, plus de vingt ans auparavant.
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An 300 Lune 7 Semaine 3 Jour 7
Maege & Alysane
La froideur de la nuit était quelque part agréable pour Alysane. Il ne faisait pas aussi froid qu’à Winterfell ou sur l’Île aux Ours, mais l’hiver était malgré tout présent aux abords d’Harrenhal. C’était une grande première pour Alysane, quitter son Nord natal. Il fallait qu’elle ait réellement envie de se retrouver pour quitter sa région. Bien sûr, elle l’aurait probablement fait pour suivre sa sœur et sa mère, même si Maeve était toujours en vie. Mais elle ne l’aurait pas fait dans le même état d’esprit. Elle aurait passé son temps à ses plaindre pendant le voyage, crachant sur les conflanais qui auraient été trop faibles à ses yeux face à l’hiver. Mais là, c’était différent. Elle avait cette envie d’aller au tournoi parce que pour elle, c’était une manière de réfléchir à qui elle était, qui elle allait pouvoir devenir. Le sens de sa vie n’était plus le même. Elle porte toujours un amour infini pour ses terres, pour son Île, malgré tout, plus elle pense à son futur et à celui de son fils, plus elle se dit qu’elle ne pourra pas retourner en arrière. Elle sent que cet hiver va être rude, elle sent qu’un danger les guette. Avant l’accident, elle aurait été prête à tout pour faire face à ce danger et pour former ses enfants à être résistants. Mais elle ne se sentait plus capable, il fallait qu’elle sache ce qu’elle allait devenir. Elle n’était plus fait pour juste être une mère, ni pour se marier, plus jamais de sa vie. Alors quoi ? L’idée de devenir encore plus forte et plus puissante qu’elle ne l’avait été dans le passé trottait dans sa tête. Mais par quel moyen ? Plus elle y pensait, plus l’idée de sa petite Jorelle voulant rejoindre la Garde de Nuit ou créer une Garde de Nuit pour femme prenait du sens. Elle aurait probablement voulu rejoindre cette Garde si elle avait existé, elle aurait probablement suivi les pas de sa sœur. Ce voyage au Conflans puis dans le Val allait probablement donner des réponses à sa questions : et après ?
Mais ce soir-là, il y avait une question beaucoup plus importante qui méritait d’obtenir une réponse. Il y avait également de nombreuses choses qu’elle voulait confier à sa mère. Même si elle n’avait jamais été le genre de personne à qui elle se confiait, elle se disait qu’elle n’aurait probablement pas d’autres occasions d’être seule avec elle. Mais ça paraissait important, là. Elle avait réfléchi pendant tout le chemin entre Winterfell et Harrenhal, elle ne pouvait plus retenir ses mots et ses pensées. Être honnête avec Maege était la meilleure des choses qu’elle pouvait faire là, afin d’espérer que sa mère elle-même soit honnête quant à l’identité de son père. Ça ne changerait probablement rien à la vie de l’oursonne, mais elle méritait de savoir. Elle s’était donc lancée dans des aveux, impossible de faire demi-tour maintenant qu’elle avait commencé. Elle redoutait les paroles de Maege qu’elle saurait justes et dures à la fois. Mais elle avait réussi à encaisser ses remarques toute sa vie et elle avait épuisé tellement de larme et tellement de colère ces derniers mois, qu’elle saurait encaisser à nouveau sans que ce soit blessant, mais plutôt constructif. Sa mère n’a jamais été tendre, mais c’était pour le bien de ses filles, Alysane le sait bien.
Après avoir avoué les origines de sa cicatrice et l’existence de son ami, Touffu, elle écouta ce que sa mère avait à dire. Comme prévu, ses mots étaient justes. De son point de vue, tout paraissait clair finalement. Pour Alysane, il lui avait paru logique plus jeune qu’un ours soit forcément ami des Mormont puisqu’il s’agissait de leur emblème. Mais ses arguments étaient justes et droits. Les Lannisters ne s’amusent pas avec les lions tout comme les dragons n’ont jamais été des agneaux avec les Targaryen. Mais voir les Stark proches de ces sombre-loups, ça avait toujours forgé dans l’esprit d’Alysane qu’elle aussi pouvait continuer à être amie avec son petit ours. Pour elle, ce qu’avait fait Touffu ce jour-là, c’est ce que n’importe quel humain pourrait faire à un autre dans un état de stupeur. Mais Maege avait raison, ce n’était pas le genre de bête avec qui l’on pouvait se lier d’amitié, malgré toutes ces années sans incident. Il n’était pas nécessaire qu’Alysane s’excuse à nouveau, elle se contentait de hocher la tête, approuvant le sermon de sa mère. Elle écouta même son conseil de ne jamais oublier ce qu’elle a sur le visage, de jamais oublier la leçon qui lui a été donnée. De toute manière, elle s’était éloignée de Touffu depuis l’accident. Elle n’avait même pas songé à retourner le voir, même si elle se demandait s’il s’en sortait seul, s’il allait bien, s’il était toujours en vie… Alysane se souviendrait, forcément, elle ne manquera pas à ce devoir, même si encore aujourd’hui elle a du mal à assumer de se montrer avec cette balafre.
« Je vous remercie pour ces paroles, mère. Sachez que je n’oublierai jamais cette leçon. » Elle n’avait rien d’autre à dire, elle n’avait aucune raison d’aller à l’encontre de ses paroles. Mais il y avait d’autres choses à lui dire. D’autres choses qui méritaient d’être mises au clair. Elle se racla la gorge, ne voulant pas perdre le goût à avouer ses maux. « Je suppose que vous avez remarqué que Jeor est resté à Winterfell. Je compte l’y laisser un moment. Le temps que je retrouve mon assurance, le temps que je me sente capable de le revoir à mes côtés et quand il ne sera plus effrayé par sa propre mère. Je pense que Dacey sera, pour le moment, une meilleure mère pour lui. C’est pourquoi il est resté là-bas. » Elle ne l’aurait de toute manière pas amené à Harrenhal, ce n’était pas vraiment la place d’un enfant. Alysane redoutait également qu’il arrive quoique ce soit à son fils, qu’on tente de lui faire du mal. « Je ne suis plus tout à fait celle que j’étais avant, et j’espère que ça va changer. Je ne sais pas ce que vous pensez de moi, mère, mais j’ai l’impression d’avoir échoué. Je n’ai pas été capable de suivre votre chemin. Je n’ai pas été capable de protéger ma fille. Comment pourrais-je protéger mon fils ? » C’était dur. C’était vraiment dur de prononcer ces paroles à sa propre mère, d’avouer ses faiblesses alors que les Mormont étaient des femmes fortes. Il était difficile de se confronter à une telle femme, celle à laquelle Alysane aurait aimé être la copie conforme. Mais elle avait échoué. Elle aurait pu fondre en larme quelques semaines auparavant tant il était difficile d’assumer ces paroles. Mais elle n’en avait plus, de larmes. Elle avait tout épuisé. Elle tentait de chasser ces idées de sa tête, plus que jamais déterminée à redevenir l’Alysane forte que tout le monde connaissait. « Je redeviendrai une fille digne de vous, mère. »
Restait alors un problème non résolu dans l’histoire. Son père, qui était-il ? Elle voulait attendre encore un peu avant de poser la question à Maege, ne sachant pas comment elle réagirait, mais c’était beaucoup trop difficile de garder ça pour ça, après vingt-quatre années dans l’ignorance, la question échappa des lèvres de la jeune ourse. « Et mon père ? Vous ne m’avez jamais parlé de mon père. Je sais que ça ne changera rien à ma vie, mais je me posais la question. C’est quelque chose qui est souvent revenu dans mon esprit lorsque je m’isolais sur l’île. Savez-vous qui il est ? » Elle allait peut-être obtenir une réponse, enfin, ou alors rester dans l’ignorance à jamais.
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An 300, lune 7, semaine 3 jour 7
Maege & Alysanne
Sous ses bottes, l'herbe figée par le givre crissait et brillait comme mille diamants étalés à même la terre qui était saisie par le froid, comme surprise par cet Hiver qu'elle n'attendait plus. L'air était si froid que, lorsque la buée de son souffle lui était rendu par la brise, Maege pouvait la sentir retomber en brume fine sur ses joues rosies et ses lèvres gercées. Son pied fouillait pensivement le sol, retournant les feuilles mortes et blanchies par le vent glacial du bout de sa botte. Le menton baissé, Maege ne semblait guère à l'aise dans cet environnement intimiste qu'elle n'avait jamais partagé avec une de ses filles. La vérité était qu'elle était et serait toujours un roc pour ses enfants, quand bien même la terrible guerrière pouvait se révéler intimidée par l'exercice délicat des confidences. Plus que tout, la Lady chérissait sa liberté et elle la défendait farouchement du poids des secrets, préférant à tout la vie de solitaire, au risque de paraître souvent inaccessible, voire hautaine pour certains. "Maege? Une véritable huitre! Le genre d'huitre sur laquelle on se fend le pouce avec son propre couteau en essayant de l'ouvrir!" disait souvent son ainé lorsqu'il vivait encore à ses côtés. Seulement, elle ne voulait pas renvoyer ce sentiment à Alysane, qu'elle regardait du coin de l'oeil, aussi se retourna-t-elle pour faire face à sa fille. Droite et haute comme une montagne, les bras toujours croisés sur sa large poitrine, l'Ourse regardait son petit d'un regard que certains auraient jugé trop dur pour la circonstance.
La brune dont la cicatrice n'avait pas faussé le regard sombre et profond choisit de s'expliquer sur sa décision de laisser Jeor auprès de Dacey. Une explication qui sonnait comme une excuse aux oreilles de Maege qui n'en demandait pourtant aucune. Jeor n'était pas son fils, et quel que fut le choix d'Alysane, elle l'aurait respecté bien qu'elle ne pouvait cacher la moue boudeuse qui froissa ses lèvres ceintes d'une cicatrice. La Mormont n'en demeurait pas moins une grand-mère qui espérait que son petit-fils ne résiderait pas trop longtemps si loin de ses terres qu'il était appelé à gouverner un jour aux côtés de ses potentiels cousins. Winterfell avait des allures d'enfer de glace pour les sudistes, mais il n'était en rien comparable à la vie rude et intraitable que devait connaitre quiconque entendait vivre sur l'île-aux-Ours. Ses lèvres se délièrent, lui assénant simplement d'une voix sombre et douce: "Tu es sa mère. Tu es la seule à pouvoir savoir ce qui est mieux pour lui." Ici s'arreterait ce simple conseil. Une leçon bien courte comparé au trouble qu'elle ressentait chez sa fille, mais Maege n'avait rien à ajouter à cette loi de la nature. Même si Alysane en doutait visiblement, l'Ourse avait confiance en sa fille.
Soudain la gorge de Maege se resserra à l'aveu lourd de l'echec dont sa fille se pensait coupable. Mais son trouble demeura invisible, caché sous la silhouette inébranlable et forte de la lady. Seul ses cils bruns et éparses frissonnèrent. Entourées de neige naissante à la lumière de la lune, les deux Mormont se détachaient, aussi noires que les troncs dénudés qui les encerclaient. Devenir une fille digne d'elle. Cette phrase seule arracha un rire de gorge grave et lugubre la brune. C'était un rire sombre, et déplacé-elle le savait- dans cette entrevue où sa fille pouvait si facilement interprété ce son comme une moquerie de sa part. Son rire se calma aussi rapidement qu'il était né. Dénouant ses bras musculeux elle porta sa main calleuse jusqu'à la joue meurtrie de sa cadette, dont elle effleura la cicatrice du bout de son pouce calleux.
" Ne le sois pas, Alysane." chuchota-t-elle presque.
" Je ne suis pas ton avenir, et si je serais toujours derrière toi et tes soeurs, tu ne dois pas me regarder. Regarde ton fils! C'est de lui dont tu dois te montrer digne! C'est le petit Jeor qui a besoin de toi. Pas une vieille femme comme moi! " A nouveau, un petit rire piteux lui échappa."Toi et les filles feriez mieux de comprendre cela: je vous interdis de vous retourner, tu m'entends?" Sa grande main reposant toujours contre le visage doux de sa fille, Maege sentait ses doigts effleurer les sensations à jamais enfouies dans son âme de mère. Celles qui lui rappelaient que ces terribles guerrières avaient un jour été dans ses bras, aussi douces et pâles que la neige. Mais qu'elles étaient têtues à chercher sa reconnaissance! Elle savait les troubles de Jorelle qui doutait de son avis sur ses choix, elle savait le mal que Lyra s'était toujours donné pour vaincre sa douceur, tout ça pour lui ressembler. Un sourire amer se dessina sur ses lèvres gercées alors qu'elle posait un regard à la fois dur et tendre dans les yeux d'Alysane. Elle ne pouvait s'en prendre qu'à elle même qui cachait si bien ses sentiments dans son coeur sauvage de voir ses petites ainsi perdues. Mais elles comprendraient. Un jour, elles comprendraient, elle le savait, du plus profond de son âme. Elles comprendraient que cette reconnaissance qu'elles cherchaient si désespérément leur était déjà acquise. Mais, surtout, elles comprendraient alors qu'elles n'avaient pas eu besoin de cela pour avancer.
A l'évocation soudaine de son père, les yeux de Maege s'agrandirent. Elle déglutit difficilement. Si elle le connaissait? Evidemment, et pas qu'un peu. Sa main glissa de la joue de sa fille pour venir, comme par reflexe, se loger sur le pommeau de la masse qui pendait à sa ceinture."Ton père..." Commença-t-elle d'un ton ténébreux et pensif."Oui, je sais qui il est." Ses doigts se refermèrent sur l'arme, se resserrant doucement autour du bois. Elle le voyait encore, cet homme droit et féroce, aussi glorieux que terrible. Que ne pouvait-elle culpabiliser d'avoir aimé l'homme, mais aussi le monstre. Malgré la haine farouche qu'il lui inspirait désormais, elle n'y parvenait pas."Et ce qu'il est pourrait bien te blesser. " Elle baissa un moment le regard, réfléchissant. Non, le poids de cette ascendance incongrue pourrait faire tant de mal à sa fille qu'elle ne pouvait se permettre de lui révéler l'identité de son père sans lui laisser une dernière chance de poursuivre sa vie ainsi qu'elle l'avait toujours fait. Maege avait toujours mis un point d'honneur à masquer l'identité de leurs pères à ses filles. Puisque être femme sur l'île ne pouvait se faire dans l'ombre d'un homme, mais seule, à la lumière blanche et cruelle de l'hiver.Elle releva ses yeux gris."Es-tu sûre de vouloir connaitre son nom?"
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