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astres et marées (Gerold)

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Vaeranah Antaryon
L'étoile de l'Est

Vaeranah Antaryon

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astres et marées
Vaeranah & @Gerold Grafton

When the sun rises in the west and sets in the east. When the seas go dry and mountains blow in the wind like leaves. Then you will return, my sun-and-stars.



"Elle resta un moment, la main sur la rambarde, le temps de rassembler son courage pour ce qui ressemblait à un plongeon."* « Muña ? » La voix fluette de Visenya la tira de sa rêverie, l'arrachant un bref instant au sentiment de vide que son esprit somnolent ressentait tandis qu'à sa lecture se pressait une fatigue infinie et un sommeil plein de promesse. La fillette était allongée contre elle, jouant avec sa poupée tandis que, de sa main libre, Vaeranah lui caressait les cheveux distraitement. Par moment, elle collait son oreille à son ventre, chuchotait mystérieusement contre le tissus de sa robe, comme si, déjà, elle partageait maints secrets avec l'enfant qui grandissait en son sein. Depuis leur arrivée à Roches-aux-Runes, l'enfant s'ouvrait au reste du château : n'ayant plus à faire montre de la discrétion que Goëville imposait par son statut de cour royale à une enfant illégitime, elle était libre d'aller et venir à sa guise, jouant avec les enfants Royce autant qu'avec les petits Stone sous le regard de la maisonnée. Vaeranah aussi s'était laissée aller à la regarder, en plein jeu dans la cour de la forteresse ou cherchant ses mots dans la langue commune pour échanger avec les autres. « Hm ? » répondit simplement la braavienne, écoutant d'une oreille mais, ses sourcils se fronçant, essayant de se reconcentrer sur la suite logique que ses yeux parcouraient avant son bref instant entre réalité et onirisme. Cela faisait maintenant une dizaine de jour qu'elle avait du consentir à se tenir tranquille et renoncer à faire plus que les quelques pas qui la séparait du bureau installé à l'autre bout de ses appartements. Par moment, et par pur esprit de contradiction, elle bravait l'interdiction, ouvrant la porte pour profitait d'un peu d'air frais sur les galeries extérieures suspendues au dessus de la cour, avant de retrouver sa prison de plumes et de couverture où elle s'ennuyait à mourir. « Tu crois qu'il y en a beaucoup des petits frères et des petites soeurs dans ton ventre ? » demanda l'enfant avec la franchise de l'innocence infantile, la tirant définitivement de ses occupations. Elle posa des yeux surpris sur la mine sérieuse de la fillette cherchant à comprendre autant la question que la manière dont elle s'était imposée à son esprit d'enfant. Visenya du le sentir et s'empressa de reprendre. « Ysaline, elle dit que son frère et sa soeur ils sont arrivés en même temps. Et même que dame Alys aussi elle a eut deux bébés en une seule fois. » Les yeux lilas de Visenya glissèrent sur la silhouette de sa mère avec un intérêt renouvelé et l'amusement de Vaeranah laissa place à une certaine tristesse à l'idée qu'elle puisse regarder avec envie les fratries des autres, son éternelle étoile solitaire. Peut être était-ce pour cela que Visenya semblait totalement sous le charme de la seconde fille de Ser Robar ? La braavienne avait du apprendre à composer avec le prénom de la petite rousse prononcé à longueur de journée : Ysaline ceci, Ysaline cela. Parfois elle parlait des enfants Royce mais la fille de Lord Andar étant bien plus âgée, les jeux des petites filles ne l'intéressait surement pas autant que les cadets du château. « Un, c'est déjà bien, ne penses-tu pas ? » finit-elle par lui demander avec un sourire, songeant au sursaut outré que ne manquerait pas de provoquer les envies de sa progéniture en matière de fratrie. Visenya sembla considérer la chose, un air pensif se dessinant sur son visage rond avant qu'elle ne finisse par hocher la tête et Vaeranah songea que l'accord de principe ne servait qu'à remettre le sujet sur le tapis plus tard. Posant ses documents de coté, l'Argentière se redressa, s'asseyant non sans un soupire d'effort avant de tapota la couverture devant elle, intimant silencieusement a sa fille de venir s'assoir devant elle. L'enfant glissa jusqu'à la place désignée commençant à bavarder gaiement des derniers jeux qu'elle avait découvert avec ses nouveaux amis tandis que sa mère refaisait les tresses qui maintenait sa chevelure d'or argenté en arrière, et facilitait considérablement son brossage le soir venu, après que quelques mèches se soient échappés. « Muñaaaaa ? » redemanda Visenya après un court silence. L'Argentière leva les yeux au ciel, songeant que tout compte fait, elle aurait probablement du laisser l'enfant à Vaeron avant d'émettre un son qui invitait à poursuivre. La fillette grimaça quand, tournant la tête pour la regarder, le mouvement tira sur la mèche que Vaeranah était en train de tresser. « Ysaline, elle a dit qu'ils devaient tous se faire beaux pour leur invité qui arrive aujourd'hui. » La braavienne s'arrêta dans son mouvement, la mains suspendue entre les cheveux blancs tandis que les mots de sa fille la frappait. Cela faisaint plus d'une lune. Et cela lui paraissait une éternité. Ses doigts fourmillaient déjà à l'idée de Le toucher de nouveau et elle sentait la régularité de son souffle lui échapper tandis que son coeur se mettait à battre à un rythme chaotique. « Ysaline a dit ça ? » dit-elle d'une voix à demi-étranglée. Visenya hocha la tête, s'éloignant maintenant que Vaeranah avait finit de rajuster sa coiffure. « Tu voudras aller jouer avec Ysaline pendant que muña est occupée ? » Et l'innocence du sourire radieux que l'enfant lui offrit, la fit presque culpabiliser.

••• 

S'il était une chose que Vaeranah devait reconnaitre comme étant particulièrement positif dans le fait d'être "alitée", c'était que nul ne s'attendait à la voir descendre de ses appartements pour saluer le dit invité des Royce. Au delà de l'évident confort que ne pas avoir à affronter toutes ces marches, cela préservait ses retrouvailles d'un public malvenu. Ce n'était pas qu'elle n'appréciait pas Lord Andar et son épouse, leurs enfants ou le reste de la famille mais elle craignait de ne pas voir, en leur visiteur, la Main du Roi, l'estimé collègue, l'hôte de longue date qu'il était censé être. Ô comme elle aurait aimé qu'il fut aussi possible qu'elle l'avait chuchoté dans les couloirs de Goëville, quelques années auparavant, de séparer sa vie privée et ce qu'elle était pour le royaume mais, par moment, cela finissait par se confondre parfois. Ainsi, entre ses humeurs changeantes, la fatigue de son terme approchant et de sa solitude pesante, elle préférait largement l'intimité des appartements d'invités que la cour intérieure de Roches-aux-Runes, le tête à tête tant attendu à la présence d'une maison entière comme témoin de leurs retrouvailles. Moins d'effort à faire pour paraitre de marbre, moins de mensonge à distiller pour cacher l'émoi qu'il provoquait en elle. Elle s'était attendue à ce que son intérêt pour lui, et le sien pour elle, s'effrite à la manière d'un feu qui finissait par s'éteindre lentement, que l'assouvissement de ses désirs lui permette de retrouver les idées claires et de passer à autre chose mais il n'en était rien. Tout comme cette région pour laquelle il s'était battu, s'imposant à un titre où personne ne l'attendait, Gerold Grafton était ancré fermement dans son coeur et cela faisait bien longtemps qu'elle avait cessé de combattre cette idée. La braavienne avait malgré tout quitté sa chambre, se trainant dans le reste des appartements sans parvenir à fixer son esprit sur quoi que ce soit. Alors qu'elle prenait garde à ne pas se prendre les pieds dans le tapis, elle avait finit par se rendre à l'évidence qu'il ne servait à rien de s'user les yeux et la patience dans quelques activités que ce soit. Elle se sentait trépigner, son esprit en ébullition divaguant, ses humeurs allant de l'excitation presque enfantine à une étrange morosité. Que le temps paraissait long lorsqu'on était hors des évènements ...

Elle avait finit par s'assoir de nouveau, jouant avec les perles qui décoraient la lourde tresse de cheveux blancs argentés, les pensées flottant de ça de là. Elle pensa à Braavos, à ses parents dans leur quotidien qui était désormais si loin du sien, dans leurs remontrances écrites qui parsemaient les quelques lettres qui lui parvenaient et regrettaient tantôt son inconvenante attitude, tantôt la distance qui les empêchaient d'en savoir plus sur son quotidien. Elle se demandait si Vaeron en recevait des similaires, si leur mère le blâmait pour avoir dévergondé son esprit et ne pas lui avoir trouvé de prétendant,  si leur père le tanait sur leur avenir encore timide au sein de ce jeune royaume. Vieux renard, songea Vaeranah avec cynisme. S'il croyait que les hommes qui avaient été envoyés depuis Goëville vers Braavos pour s'occuper de sa santé ne l'avaient été que par pure bonté d'âme, il se fourrait le doigt dans l'oeil jusqu'à un lieu où le soleil ne brillait jamais. Elle était même surprise qu'il ne s'étonne pas davantage de l'amitié que lui témoignait son allié valois, lui qui se plaisait toujours à avoir un temps d'avance et à douter de chaque acte trop généreux. A moins qu'il ait des doutes, se demanda Vaeranah qui savait qu'avec ses parents, les secrets peinaient à être conservé. La manière dont sa mère l'avait regardé, lors de son dernier séjour dans la cité cachée, en disait long sur ce qu'elle pensait savoir de la nouvelle vie de sa progéniture et elle avait montré une étrange et, avec du recul, dérangeante joie en prenant Visenya dans ses bras la première fois. Quelque part au fond d'elle, sans même savoir pourquoi, Vaeranah s'était dit que sa mère savait pour Vaeron et elle. Peut être que, de la même manière, Ferrego, tout à son déni de ce qui avait pu se passer entre ses enfants, se doutait que l'alliance forte entre sa cité et le royaume du Val ne passait pas que par de bon sentiment et une amitié naïve mais par l'action, plus intime et personnelle, qu'un de ses enfants avait auprès d'un membre important du gouvernement. Et ce n'était pas Vaeron qui était actuellement rond comme un tonneau et incapable de voir ses propres pieds.

Elle était en train de songer à ce que lui couterait le fait d'envoyer une directive indiquant un malencontreux accident entre son père et l'une des nombreuses marches de son palais lorsque du bruit attira son attention vers la porte. Considérant que se débarrasser de son géniteur, si tant est qu'elle en avait le courage ou la sottise, n'était guère une bonne idée dans son contexte actuel, elle refoula son envie de le faire noyer dans son propre bain et s'extirpa, avec plus ou moins de facilité de son siège. Les sursauts de son coeur semblaient en rythme avec les éclats extérieurs, bruit de pas ou conversations étouffées, elle aurait été bien en peine de le dire. Il eut une frappement, elle répondit par l'affirmative et la porte s'ouvrit sur l'une des servantes de Roches-aux-Runes. Elle ne l'entendit pas réellement, ses yeux captant immédiatement la silhouette sombre derrière elle. Les fourmis qui parcouraient ses doigts un peu plus tôt se propagèrent dans l'entièreté de son corps et un léger engourdissement la prit tandis qu'elle baissait révérencieusement la tête en signe de salut marmonnant quelques mots avant que la porte ne claque indiquant que la servante était partie. Le silence amena dans son sillage une pesanteur presque réconfortante, loin d'un éventuelle lourdeur qui étouffait l'âme. Ses paupières se relevèrent pour constater qu'ils étaient seuls. Alors, seulement, le sourire de Vaeranah se permit d'apparaitre, abandonnant la mine d'indifférence qu'elle lui offrait en public. « Gerold. » souffla-t-elle.


*Mysteries of Thorn manor, Margaret Rogerson, p178
:copy.right:️crack in time



┗ DAUGHTER OF THE SEA ┛
People think that intimacy is about sex. But intimacy is about truth. When you realize you can tell someone your truth, when you can show yourself to them, when you stand in front of them bare and their response is 'you're safe with me'- that's intimacy..
Gerold Grafton
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La campagne baignait dans une paix ensoleillée. La route, tantôt sinueuse, tantôt large et ventée, qui menait au château de Roche-aux-Runes était agréablement brève dans la géographie qui la reliait à Goëville et passait par une forêt de pins entrecoupée de gorges rocailleuses. Des oiseaux, et maintes autres bêtes, chantaient dans le sous-bois fleuri. L'or pailleté du soleil, des dentelles d’ombre glissaient sur les genoux des voyageurs et faisaient jaillir des lueurs vertes dans le gros bouton de cuivre que le cocher portait à la martingale de son habit. Le petit cortège traversa quelques hameaux rêveurs, qui consistaient en trois ou quatre maisons faites de troncs rustiques, avec parfois une échoppe tenue par un raccommodeur de seaux à lait et une forge sous un dôme embaumé de jasmin. Sur le dernier quart, ils filèrent à découvert au milieu des champs, sur une route pleine de racines et qui chevauchait colline après colline ; à chaque montée, les chevaux ralentissaient leur course comme s’ils étaient sur le point de s’endormir et qu’ils devaient se faire violence pour vaincre leur fatigue. Lucas, qui avait su garder sa réserve au début du voyage, parvint difficilement à feindre l’indifférence lorsqu’ils tressautèrent sur les pavés cahoteux qui menaient à sa maison natale. Sans s’en rendre compte, éperonnant sa monture, il dépassa l’équipage qui franchissait un pont antique, et Roche-aux-Runes apparut sur un lit de roc escarpé, brillant d’une réjouissante bigarrure de toits. L’enthousiasme de la pupille des Grafton était suffisamment manifeste et focalisé pour demeurer dans l’ignorance d’une émotion, probablement plus ardente encore, qui brûlait son oncle depuis le début de leur trajet.  
Dans le long chemin qui longeait le parc, la végétation avait revêtu un caractère plus marin et malgré la distance, l’on sentait dans l’air un semblant de sel. Contrairement à son frère, Gerold n’avait pas connu ces murs en temps de siège ; le découvrir à nouveau après tout ce temps n'évoquait que l’ambivalence d’un mariage depuis longtemps consommé, mais qui ramenait les souvenirs comme tant de bois flotté sur la plage de sa mémoire. L’impatience tenace qui l’avait creusé depuis Goëville, étrangement, s’étouffa alors qu’ils arrivaient enfin au pied de la demeure des Royce, à l’instar de celle de Lucas, qui soudain se drapa dans une dignité d’adulte et feignit vaguement la solennité. Du bout des lèvres, Gerold sourit à l'attitude de son neveu qui essayait déjà d'être un homme, puis son regard, à bout de souffle, se porta vers le château, toujours plus proche.
Depuis quand ne s'étaient-ils pas vus ? Vivre sous le même toit aussi longtemps les avait prémunis contre les affres de la séparation et il avait l'impression que ce confort prolongé les avait rendus plus vulnérables à la solitude qui, pourtant, avait été leur refuge depuis la plus tendre enfance. Sans elle, il avait éprouvé la véritable solitude : non pas celle que l'on choisissait de son plein gré par respect pour ses goûts ou sa tranquillité, mais celle que l'absence d'un être cher laissait dans l'existence. Plus d'une fois dans la journée se surprenait-il à vouloir arpenter les couloirs, la retrouver et susurrer à son oreille l'idée saugrenue qui venait de traverser son esprit, l'histoire qui venait de le faire sourire, ou déverser au contraire une tempête de frustration à ses yeux éclairés, toujours patients, mais surtout compréhensifs. Ecrire des lettres avait rapidement atteint sa limite naturelle d'un monologue répandu sur plusieurs pages, quoi qu'attendre les réponses à ses récits avait quelque chose d'extrêmement exaltant. Il n'avait probablement jamais autant écrit à quiconque. Plus que jamais, leur moment de séparation lui avait fait envier la franchise de son frère Vaeron qui avait, malgré sa réputation plutôt sulfureuse, eu au moins le privilège d'accompagner sa soeur, de la serrer dans ses bras et peut-être d'embrasser sa joue avec un regard de tendresse sans éveiller les soupçons de quiconque. En son absence, ces petites banalités lui fendaient le coeur. Jadis, des subterfuges avaient été mis en place : quittant Goëville, Gerold descendait de sa monture quelque part dans les sous-bois et traversait les broussailles pour rejoindre Vaeranah dans un berceau de trembles, œuvre de la nature, aux murs de la ville pour l'étreindre une dernière fois sans quiconque pour les déranger dans leurs chaleureux adieux. Souvent, ils faisaient tout leur possible pour contenir et travestir leurs plaintes frustrées, les transformant en autant d'exclamations émotives. Puis, il embrassait tout visage, baisait ses mains et ses lèvres encore, et ses paupières et ses cheveux d'argent, avant de partir pour de bon.  
Aujourd'hui cependant, l'accompagnateur de Vaeranah et son état précaire ne leur avait pas laissé le loisir d'une séparation suave, et il avait toujours été hors de question d'accabler Vaeron avec ce genre de services... Ils s'étaient quittés beaucoup plus tôt, à l'abri des regards, dans une chambre transie d'appréhension. Il l'avait regardé quitter le manoir à travers une fenêtre isolée, jusqu'à ce que son cortège disparaisse dans le dédale de ruelles qu'était Goëville.  
Et puis, poser sa paume contre son ventre lui manquait. De ses doigts déliés, il faisait une étoile de mer et lovait sa main sous le nombril, là où son enfant poussait parfois, dans un probable étirement. A travers la peau toujours plus fine, il retrouvait le contact étrange, au pluriel, de leurs êtres confondus. Bien sûr, il adorait ses filles, mais le secret qu'il partageait avec Vaeranah rendait ces instants d'intimité plus précieux que toutes les grossesses de Catelyn, car il était probable que cette tendresse silencieuse fut la seule qu'il n'ait jamais l'occasion de partager avec cet enfant. Il y avait souvent réfléchi et l'insupportable réalité avait fini par s'imposer à lui avec l'implacable force de l'évidence. Bientôt, très bientôt, Gerold allait devoir faire comme si cet enfant n'était pour lui qu'un visage parmi tant d'autres, qu'il avait pour lui moins d'amour que pour ses propres filles, moins d'amour que pour Lucas. Si sa retenue était capable de ne pas s'abandonner à l'affection paternelle en toute occasion, pouvait-on en attendre autant d'un bébé qui reconnaissait dans les traits du Suzerain du Val l'expression d'un amour protecteur et inconditionnel ? Qu'allait-il faire ou prétendre si, en entrant dans une pièce, cet enfant se mettrait spontanément à tendre les bras dans sa direction, comme parfois ses propres filles le faisaient, exigeant d'avoir contre elles la présence de leur père ? Pouvait-il les blâmer pour cela, alors qu'il leur avait donné dès la naissance cette confiance absolue en son affection ? A l'âge adulte, peut-être, mais avec un bébé, une âme innocente, il n'allait décemment pas pouvoir l'aimer la nuit et le négliger le jour, le presser contre son coeur, puis l'ignorer dans une foule d'inconnu pour son propre bien... Les subtilités de leur position respective ne voulaient strictement rien dire pour l'adoration qu'avait un enfant envers ses parents. Gerold était bien placé pour le savoir, lui, qui avait vénéré son père aussi longtemps que le lui avait permis sa déception. Alors, il ne lui restait que très peu de temps avant que l'ignorance ne s'estompe et qu'un attachement ne se forme sans qu'aucun raisonnement ne soit capable d'en venir à bout.  
Quelque peu en retrait, il regarda les portes du château s'ouvrir, laissant Lucas s'avancer de sa précipitation dignement réprimée. Gerold appréhendait le temps qu'il était en train de perdre et celui qu'il perdait en appréhension. Et puis, contrairement à son neveu, il n'avait pas le droit de ne serait-ce que feindre l'impatience ; seul le travail l'avait amené ici et rien d'autre. Il allait devoir se perdre en convenances, en ennui et en fatigue. Vaeranah était censée être alitée, souffrante, recluse et monter dans sa chambre aussi tôt, ne serait-ce que pour la saluer poliment, aurait été hautement suspicieux ou simplement déplacé. Le Mestre, des servantes ou simplement Alys tenteraient d'empêcher ce mufle sans gêne, obsédé par le travail, d'aller déranger une femme enceinte avec des requêtes de stupide compte-rendu. Alors, il prit son mal en patience : l'instant de son arrivée à Roche-aux-Runes n'allait pas être celle de ses retrouvailles...  
Le temps passa. Il feignit son humeur habituellement hautaine, dissimulant sans difficulté son malheur. On l'ignora bien vite au profit de Lucas, ce qui lui permit de s'éclipser pour indiquer aux domestiques la façon d'ordonner ses affaires. Il s'enquit de l'Argentière, courtoisement, puis se reposa et attendit que la famille soit bien trop occupée par leur aîné et son bonheur personnel pour remarquer ses déambulations. Ayant décompté l'instant exact où l'inconvenance n'entrait plus en collision avec des prétentions purement formelles, il sollicita une servante de bien vouloir le conduire jusqu'à l'Argentière. La suite demeura floue ; il la suivit aux talons à travers ce qui lui parut être un dédale de couloir, puis la servante toqua à une porte qui bientôt, fit lumière. Il s'était arrêté sur le seuil, mais à peine avait-il commencé à scruter son contenu humain épars qu'un remous se produisit dans un coin du salon. Comme à chaque fois, le temps parut s'arrêter alors qu'ils attendaient dans un simulacre de politesse que les témoins partent. Ce délai semblait disproportionnellement long et s'étirait, élastique, entre eux. Lorsque la porte claqua, Gerold retint sa respiration alors qu'elle remontait ses yeux vairons vers lui, illuminés d'un sourire familier.  
« Gerold »
Dédaignant l'étiquette, il se précipita vers elle. Son élan solitaire et rapide consuma à rebours toutes leurs lunes de séparation, lorsque l'Etrangère au scintillement d'argent redevint sa bien-aimée aux bras pâles et qui n'avait jamais cessé de lui appartenir. Il la rejoignit comme sur une scène, comblant ce qui avait promis d'être le point culminant de cette approche impétueuse, l'extase qui paraissait dans ses yeux et dans le feu de ses bijoux, se laissant aller à une explosion d'amour volubile. Inassouvi, Gerold chercha sa bouche de la sienne glissant ses phalanges entre ses cheveux dans une étreinte commodément en biais. Son ventre empêchait tout enlacement sans se pencher et pour l'éprouver, il avait pris l'habitude de se glisser contre son flanc telle un lierre, comme dans une danse de séduction. Cette recherche de tendresse bornée représentait pour lui la plus haute cime d'un amour de plusieurs années, majorité périlleuse, compliquée, radieuse indiciblement. Muet d'abord, il goûta à ce qui avait tant manqué à leurs lettres : un peu de sensualité. Ses mains descendirent vers les rondeurs de son ventre et il fit ce geste tant de fois répété et éprouvé.
« Issa qēlos... chuchota-t-il contre ses lèvres les quelques mots appris qu'il avait fait siens. Est-ce qu'ils te traitent bien ? »
Quand bien même les Royce n'étaient pas plus au courant de leur secret que quiconque à Goëville, Gerold craignait toujours qu'on ne s'emploie à l'atteindre à travers Vaeranah et un instant, sans le formuler clairement dans son esprit, il s'était figuré l'un des Royce capable de se venger sur elle, par suspicion, ou simplement parce qu'elle était de Goëville et au service du Roi. Son frère était parti et il n'y avait eu personne pour la protéger en cet instant particulièrement vulnérable. Alors il l'enlaçait de ses bras fébriles, caressait sa peau et embrassait ses lèvres pour s'assurer qu'elle ne lui échappait pas.
« J'ai vu Visenya, reprit-il entre deux caresses avides, elle, au moins, a l'air heureuse... un sourire narquois l'effleura, alors qu'il savait l'Argentière forcée au lit depuis longtemps, enfermée dans une cage qu'elle détestait. Combien de fois as-tu traité ton horrible Mestre de charlatan ? Son sourire s'accentuait, toujours plus moqueur, tandis que se substituait à l'impatience, la joie des retrouvailles. Vraiment tu es... tout ce que je peux désirer. »
Vaeranah Antaryon
L'étoile de l'Est

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When the sun rises in the west and sets in the east. When the seas go dry and mountains blow in the wind like leaves. Then you will return, my sun-and-stars.



Elle n'avait pas souvenir d'avoir jamais ressenti une telle impatience, une attente si lourde qu'elle en devenait douloureuse tandis que son esprit s'amusait à la torturer, profitant de l'absence et de la distance pour imaginer les pires scénarios possibles. Hypothèses toutes plus sombres les unes que les autres qui la voyaient immanquablement finir par être abandonnée, que ce fut par un soudain sens du devoir envers Catelyn ou par une brusque lassitude contre laquelle elle ne pouvait rien. Pourtant, si elle opposait à ses inquiétudes irrationnelles les lettres qu'elle recevait et les souvenirs qui venaient nier ses craintes, ce fut son empressement à la rejoindre qui balaya le reste de ses angoisses tandis que ses propres bras venaient enlacer sa nuque, l'esquisse d'un sourire s'invitant au baiser qu'il venait lui offrir. Jamais personne n'aurait pu présager que la femme qui avait posé le pied à Cordial cinq ans plus tôt était la même que celle qui, les yeux fermés dans la délectation du moment, se perdait dans l'étreinte presque fantasmée de Gerold Grafton. Elle se demandait parfois ce qu'aurait été sa vie, ce qu'aurait pu être leur relation, si elle avait rencontré Viserys Targaryen lors de son exil en Essos, si elle avait gagné Westeros en même temps que Cassandre et appartenu aux soutiens de la première heure. Les choses auraient-elles été différentes entre eux ou était-elle destinée à finir par s'éprendre de lui ? Car éprise, Vaeranah constatait qu'elle ne pouvait que l'être quand elle voyait combien son absence lui paraissait lourde, combien il avait pris de place dans son existence et la myriade d'émotion qu'un simple mot de sa part suffisait à faire naitre dans son coeur. Ce n'était pas qu'une histoire d'attraction et de désir, c'était aussi la prise de conscience que ses peurs les plus profondes l'impliquait directement et que l'idée de ne jamais le revoir lui était plus que tout insupportable. Elle l'avait déjà ressenti dans les premières lunes de sa grossesse quand, tout en en subissant les premiers symptômes, elle se devait feindre l'indifférent calme qui était attendu d'une consoeur tandis que l'amante, elle, trépignait d'angoisse à le savoir tester son éther. C'était le prix à payer, se répétait-elle encore et encore tandis que passaient minutes et heures, tandis qu'à l'insoutenable silence s'était formé l'ultime vérité : elle l'aimait follement. Alors, soudainement, cette distance publique imposée, ces quelques heures de retenue n'étaient plus rien en comparaison des instants volés où tombaient titres et responsabilités, familles et obligations. Car si, au cours des cinq dernières années, elle s'était assez ouverte aux autres pour leur offrir sourires en coin, gloussements mesurés ou oeillades entendues, cela n'avait rien à voir avec ce qui l'animait lorsqu'à l'abris des regards ils se retrouvaient enfin seuls. Telle la baie d'Alguamère se transformant en mer d'Eté, Vaeranah s'illuminait lorsqu'elle abandonnait au seuil de la porte, la froide rigueur de l'Argentière. Dans cette double vie, les débats politiques houleux du conseil semblant s'achever sur une mésentente se faisaient plus passionné en privé lorsqu'ils reprenaient de manière plus philosophiques pour s'argumenter de plus belle s'achevant dans une curiosité pragmatique qui, lorsqu'elle se voyait à court d'affirmation, la laissait avide de combler sa lacune. Et le savoir n'était pas la seule chose dont il la laissait affamée car même lorsque le désir, toujours aussi vivace, s'apaisait par moment, elle se surprenait à apprécier la tendresse, d'abord timide et maladroite puis de plus en plus présente, qui s'était installée entre eux. C'était d'autant plus vrai depuis qu'elle lui avait annoncé sa grossesse : les caresses de son amant, toujours si merveilleusement satisfaisantes au demeurant, s'attardant désormais de manière plus doucereuse sur ses formes changeantes. Elle en avait acquis une forme d'adoration toute particulière pour ses mains, s'attardant sur le détail de ses articulations se mouvant lorsqu'il tapotait le bois de la table du conseil, sur la manière dont ses doigts glissaient sur sa peau ou sur la façon qu'il avait, comme c'était le cas à l'instant, de l'étreindre. « Kessa. » répondit-elle dans un souffle, appréciant sa chaleur autant que la légère inquiétude qui résonnait dans le ton de sa voix qui démontrait l'importance qu'elle avait à ses yeux. Et par tous les dieux qu'elle lui avait manqué cette voix, la rondeur de sa langue maternelle roulant sur les lèvres de l'être aimé. La preuve de leur intimité résidait dans ces quelques mots de valyrien lui rappelant le fou rire qui l'avait traversé lorsqu'elle avait commencé à lui en apprendre des rudiments qu'il abimait dans son impatience à vouloir tout maitriser du premier coup. Elle appuya sa tempe contre celle du valois, inspirant son odeur, se rappelant de combien il était bon de le savoir là, de le sentir contre elle, ses mains glissant sur l'arrondi de son ventre comme il l'avait fait tant de fois avant son départ. « Je vais bien, nous allons bien. » Comme s'il venait approuver ses dires, comme s'il ressentait la présence paternelle, l'enfant poussa contre elle, offrant pression pour pression, lui arrachant un sourire. Malgré tout, l'inquiétude de la question la laissait songeuse : au fur et à mesure de son séjour, Vaeranah s'était interrogée sur les raisons qui l'avaient poussé à choisir Roches-aux-Runes plutôt que sa Braavos natale. Au delà de l'alibi plus évident pour dissimuler sa retraite, elle en était arrivée à la conclusion que ce n'était pas seulement la facilité avec laquelle tout le monde s'était accordé à concevoir le besoin d'aide de Lord Andar. Il aurait été facile de casser du sucre sur le dos des Royce, après tout n'étaient-ils pas déjà assez accablés par les conséquences du siège qui avait eut lieu cinq ans plus tôt tant dans l'absence de leur héritier que dans la réputation complexe de leur seigneur qui évoquait tantôt l'odeur avinée de l'ivresse malvenue, tantôt la grandeur déchue de l'une des plus importantes maison du Val ? Car, si elle était honnête, c'était l'axe qu'elle avait décidé de prendre pour justifié sa venue : Roches-aux-Runes se relevait certes, mais pas assez vite. Il était plus simple pour le conseil et pour le royaume, de n'y voir que la froide raison d'état, le coup de pied aux fesses nécessaire pour aider les Royce à se ressaisir, pour allier le devoir à l'exil volontaire qui était sien, à la fuite du regard suspicieux que Catelyn Grafton avait commencé à poser sur ses rondeurs. Mais plus simple pour elle aussi de se voiler la face sur l'une des raisons sous-jacente à ce choix : ce n'était ni Roches-aux-Runes, ni Lord Andar, ni le travail ou le calme d'une bourgade loin de toute cité -mais pas trop loin non plus- qu'elle était venue chercher ici. C'était Alys Royce. Car elle aurait tout aussi bien été accueillie à Braavos, entourée de sa famille, oeuvrant pour la Couronne auprès de la Banque pendant quelques semaines. Non, tout cela n'était qu'accessoire, prétextes justifiant son départ mais guère le choix de la destination, préférant l'illusoire familiarité, le lien, certes distant mais indéniable, que la Dame de Roches-aux-Runes avait avec le seigneur de Goëville. Car il avait fallut cette discussion nocturne avec la cadette de son amant pour qu'elle saisisse l'ampleur de ses affections, pour qu'elle comprenne qu'elle n'imaginait plus une existence dans laquelle il n'était présent, qu'il faudrait que le monde s'effondre pour qu'elle ne soit plus à ses côtés. Même les ambitions les plus solitaires, secrètement fantasmées et à jamais tut, se paraient de son regard, le laissant s'insinuer jusqu'en des lieux oniriques où même Vaeron n'avait jamais eut sa place.

La mention de Visenya la fit sourire : elle même ne pouvait nier les changements qui s'étaient opérés chez la fillette qui d'ombre discrète, véritable poupée de porcelaine, s'était soudainement métamorphosée. Si Vaeranah n'était pas certaine que le nouveau caractère de l'enfant soit plus simple à gérer, elle n'en demeurait pas moins heureuse de constater que la petite s'était enfin ouverte, qu'elle semblait heureuse et désireuse de créer du lien. Elle qui avait toujours été une page blanche, une aigrette volant au quatre vent, lui apparaissait désormais tenir de plus en plus de son père, elle-même n'ayant jamais été d'une prodigieuse extraversion à cet âge. Cela s'entendait dans le timbre de voix presque autoritaire, dans ses soudaines courses dans les couloirs ou dans sa propension nouvelle à lui conter des plans toujours plus rocambolesques pour subtiliser l'une des épées de bois que Samwell Stone usait à l'entrainement des fils Royce. Vaeranah savait que la liberté nouvelle dont sa fille jouissait ici, à Roches-aux-Runes, lui permettait de s'épanouir pleinement et qu'il n'était plus question désormais de lui imposer le silence des fillettes obéissantes. Car si elle savait quelle Visenya elle avait amené à Roches-aux-Runes elle ignorait quelle Visenya elle en ramènerait : à présent que le bourgeon s'était ouvert, il lui paraissait difficile d'imaginer l'enfant retrouver la discrétion passée et nul ne pouvait prédire la manière dont cela se passerait de retour à Goëville. « Elle se fond étrangement bien dans le paysage, oui. C'est à se demander si je vais réussir à la ramener avec moi, quoi que je crains que ton château soit encore plus bruyant à l'avenir. Il semblerait que sa nouvelle amie lui ait appris à donner de la voix. » Mais pour combien de temps ? Elle avait gardé pour elle la majorité de son entretien avec Viserys Targaryen préférant digérer seule les nombreux sujets qu'ils avaient abordé dans le cadre de cet échange privé. Ce n'était pas par désir de cacher le contenu de la conversation ou par honte de la discussion qui s'était prolongée au delà de sa demande initiale de quitter Goëville mais elle avait elle-même besoin de réfléchir aux avertissements du roi autant qu'à l'avenir qu'elle se voyait avoir sur ces terres. Si, en son fort intérieur, elle priait pour qu'il ait oublié l'idée de la faire se marier pour étouffer l'hypothétique scandale, elle savait qu'elle ne pourrait échapper à un choix bien plus douloureux auquel elle avait d'ors et déjà consenti en sa présence. Elle préparait Vaeron à cette idée depuis que leur correspondance avait retrouvé une certaine paix mais l'enfant avait atteint l'âge de recevoir une autre instruction que la leur, puisqu'ils n'avaient ni terres, ni nom sur ce continent pour exiger quoi que ce soit, puisque les origines de Visenya demeuraient obscures malgré l'illustre patronyme dont seul le statut d'étrangère de sa mère lui permettait de bénéficier, il n'y avait qu'un endroit où protéger son avenir. Un seul lieu où elle recevrait la même éducation que le reste de la noblesse tout en se faisant aux us et coutumes de Westeros : le matristère de Maris. Néanmoins, l'avenir de sa fille faisait parti des discussions qu'elle se devait d'avoir dès son retour à Goëville quoi que la vision de la fillette lui manquerait sans aucun doute, elle hésitait par moment à faire part de ces réflexions à Gerold. Bien qu'ils partageaient une vie secrète, il lui paraissait injuste de l'impliquer dans la décision qu'elle se devait de prendre et d'ôter, à Vaeron, le seul privilège qu'il pouvait avoir, si ce n'était en tant que père, ne serait-ce qu'en tant qu'oncle et chef de famille, de la même manière qu'il aurait été fort malvenu qu'elle s'invite dans l'éducation des deux filles de Gerold. De lui, elle ne pouvait qu'attendre le réconfort qu'il pourrait lui offrir à l'idée de la séparation ou, tout au plus, au conseil d'un parent envers un autre. Cela lui fit néanmoins du bien de le voir constater le bien être de Visenya, de l'entendre s'intéresser à tout ce qui gravitait autour d'elle, fut-ce l'enfant d'un autre. C'était l'une des nombreuses choses qu'elle aimait à son propos : Gerold était l'un des rares dans la confidence plus ou moins avouée de la vérité sur Visenya mais il n'avait jamais commenté la conception de l'enfant. Même dans les moments les plus houleux de leurs désirs refoulés, lorsqu'ils s'inventaient toujours plus blessants, il s'était toujours contenter d'attaquer la proximité qu'elle avait avec son frère sans jamais mentionner la petite alors même que la confidence, faite à demi-mot dans un moment de faiblesse, aurait été une arme non négligeable contre sa personne. Cette époque lui semblait si lointaine tant l'incertitude désolante qui l'avait torturé s'était oubliée dans les étreintes secrètes de leur liaison.

Un rire étouffé accompagna le sourire légèrement coupable qui naquit sur ses lèvres. Force était de constater qu'il ne la connaissait que trop bien, subissant déjà sa mauvaise humeur quand le mestre de Goëville se permettait remontrances et conseils qui venaient brider ses désirs. Si Vaeranah pliait face aux ordres que son père, Viserys ou son conseil avait pu lui donner, il lui était plus difficile d'écouter les recommandations limitantes et contraignantes du mestre. C'était devenu presque un jeu, une guerre puérile qui l'opposait au guérisseur et qui n'avait fait que se transmettre d'un mestre à l'autre laissant les deux hommes supporter la piètre humeur et mauvaise volonté de leur patiente. Elle n'avait consentit à écouter mestre Elwing que lorsqu'elle avait senti ses limites atteintes, lorsqu'il était évident qu'elle ne pouvait plus faire autrement et ne manquait pas de gratifier le pauvre homme de regards assassins dès qu'il passait le pas de sa porte comme s'il était lui même responsable de son état. Il n'y avait rien de personnel, ils le savaient tous deux, mais son aigreur avait besoin d'une victime et il semblait d'une facilité déconcertante à la braavienne de se changer en un véritable cauchemar pour les chevaliers de l'esprit. « Je crois que charlatan n'est pas le pire de ce que j'ai pu lui dire ... Même si je ne suis pas certaine qu'il ait tout compris. » dit-elle d'un ton amusé. Du temps de son travail à la Banque, Vaeranah avait été amenée à côtoyer nombre de personnes d'origine différentes : la langue commune s'était rapidement installée dans son quotidien, délaissant le braavien et l'accent chantant qui s'y attachait pour ses compatriotes quand le Haut Valyrien devenait le langage presque secret qu'elle partageait avec ses frères ou sa famille maternelle. Si rare était devenue la pratique de la langue antique, réservée aux descendants de Valyria tandis qu'aux anciennes Possessions s'installaient des versions dérivées, plus rares encore étaient ceux qui pouvaient, sur Westeros, prétendre le comprendre. Si sa pratique restait généralement l'apanage des Targaryen, Vaeranah avait mis en pratique l'idée selon laquelle le langage quasi disparu était enseigné aux jeunes novices et acolytes de la Citadelle pour finalement constater que la partie argotique, presque injurieuse, leur était de toute évidence inconnue. Si le terme échappait peut être à l'érudit, le ton, lui, ne laissait aucun doute sur la nature du propos et un froncement de sourcils contrarié succédaient généralement à la lueur d'incompréhension de son regard. « Néanmoins, il doit sans doute jubiler maintenant que je ne peux pas faire plus que de me déplacer entre deux pièces. A chacune de ses visites j'ai le droit au même sermon : et je vous l'avais dis, si vous vous étiez alitée plus tôt on en serait pas là ... » pesta-t-elle, forçant sur sa voix pour imiter caricaturalement et de la manière la plus ridicule qui soit, la voix du vieil homme. Abandonnant la grimace moqueuse qui avait suivi son imitation d'Elwing, Vaeranah glissa de nouveau son regard dans celui de son bienaimé, le plissement de son regard sonnant comme une mise en garde. « La prochaine fois je partirais à Braavos, je suis certaine qu'on m'y laissera tranquille. » Les mots lui avaient échappé avant même qu'elle ne puisse les retenir, les penser. La prochaine fois ... songea-t-elle, horrifiée de ce qu'elle sous-entendait à ce moment et des conséquences qu'une telle chose pourrait avoir sur elle, sur eux, autant que terrifiée par la réaction que ces quelques mots auraient sur lui. Elle renonça à l'idée de revenir sur ses paroles, songeant que nier ce qu'elle venait de dire ne ferait qu'appuyer sur la chose, ne ferait que mettre en exergue l'étrange délectation qui s'était invité à la confusion de la découverte de son état et qui ne l'avait plus quitté depuis. Il y avait quelque chose de différent dans cette grossesse, quelque chose de presque dangereux résonnant dans les mises en garde de Viserys autant que dans celles de sa raison car si, tout comme Visenya, il s'agissait d'un accident, elle ne pouvait nier éprouver un certain délice à l'idée de porter son enfant, cette part de lui qui grandissait en elle et que personne ne pourrait jamais lui enlever. D'aucun dirait que son ravissement n'était que le résultat de son nouveau larcin, de ce qu'elle continuait à grignoter du privilège de Catelyn mais pour la valyrienne, la née-Bracken n'avait strictement rien à voir dans tout cela. Je suis à toi et tu es à moi, s'étaient-ils dit des années auparavant telle une promesse, tel le précurseur de ce que leur relation allait devenir. Et il n'avait jamais été plus à elle qu'à cet instant.

Une vague de possessivité la prit tandis que ses mains remontait à son visage, dégageant un mèche de cheveux noire, caressant le contour de sa mâchoire avant de l'attirer dans un nouveau baiser. Quoi que nettement moins empreint de la longue absence et de la frénésie des retrouvailles, il lui offrit la certitude qu'elle ne rêvait pas, qu'il était bien là avec elle, loin des murs indiscrets de Goëville. Elle ne parvenait à s'ôter de l'esprit le zèle de Baelish, mentionné par Viserys, la rage de Vaeron dès qu'il posait les yeux sur l'enfant qui grandissait en elle ou les étranges allers-retours de Catelyn dans son manoir. Dans cette incertitude constante et cette crainte d'être épiée, Gerold était le refuge : qu'importe l'endroit, il la faisait se sentir en sécurité mais, aujourd'hui, cela était d'autant plus fort qu'ils étaient loin de tout, comme pris dans une parenthèse où ils pouvaient vivre l'arrivée de cet enfant en paix. « Tu m'as manqué, ñuho glaeso vēzos. » Soleil de ma vie, chuchota-t-elle contre ses lèvres, n'offrant qu'à lui la douceur de ses paroles, cherchant dans le murmure à préserver un peu de cette première étreinte. Car malgré la plus grande liberté de mouvement, ils se devaient de faire attention : tout à leur choix de retrouver leur fils, les Royce ne prendraient sans doute par garde à l'absence de leur invité, mais ce n'était qu'une question de temps avant qu'ils ne doivent reprendre leur manège habituel. « Tu n'as pas eu trop de mal à partir ? Je n'espérais pas te voir avant mon retour ... » confessa la braavienne qui s'était presque convaincue que les obligations du Grafton le retiendrait à Goëville. Au delà de sa fonction de seigneur et de Main, Vaeranah craignait surtout les réactions du conseil ou de Vaeron à l'annonce de son départ : bien qu'elle ignorait quelle excuse il avait du employer pour la rejoindre, elle n'avait aucun doute sur le fait qu'aux yeux de son frère, le départ du brun sonnait comme un aveu. Toutefois, sa présence la soulageait et tout comme elle ne voulait pas gâcher leurs retrouvailles en pensant aux Royce, elle ne voulait pas davantage gaspiller ce précieux moment en songeant à ce qui les attendait à Goëville.
Il était là, c'était tout ce qui comptait.


:copy.right:️crack in time



┗ DAUGHTER OF THE SEA ┛
People think that intimacy is about sex. But intimacy is about truth. When you realize you can tell someone your truth, when you can show yourself to them, when you stand in front of them bare and their response is 'you're safe with me'- that's intimacy..
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