[MINI-EVENT] A l'ombre de Boisdorés

Le soleil déclinait sur Boisdorés, offrant la vision de l'embrassement de la végétation qui faisait la renommée du fief et lui donnait son nom. Dans les jardins d'or et de fleurs, Lady Ellery précédée de son gros ventre annonçant la naissance prochaine d'un troisième enfant, supervisait la fin des festivités qui avaient accueilli bon nombre d'alliés de la maison Rowan pour célébrer l'anniversaire du petit héritier. Une fête grandiose en l'honneur de son fils, Josua, présentement en train de courir après sa soeur aînée, Abigaëlle, sous le regard de leur mère. Et tandis que s'offrait au visiteur cette vision bucolique et romantique, et que la maisonnée s'activait à ranger les traces de la fêtes tout en préparant le grand diner de ce soir, une toute autre scène se jouait à l'étage.

Engoncé dans son grand fauteuil, Andrew Rowan contemplait les rares invités qui avaient du prolonger leur séjour en sa demeure. Rien de bien officiel toutefois car si le seigneur Rowan semblait offrir une hospitalité de convenance à des invités s'attardant un peu trop, la réalité était que l'évènement dans son ensemble n'avait pour but que de dissimuler la rencontre qui se déroulait à présent. Nobles dames et estimés seigneurs s'étaient rassemblés en son fief sous un prétexte superficiel, attendant que ne partent les oreilles indiscrètes, pour révéler la nature de leurs pensées. Cette réunion lui en rappelait une autre qui avait eut lieu à Corcolline, plusieurs années auparavant. Ils étaient plus nombreux à l'époque, songea Andrew qui ne pouvait que composer avec l'absence de certains grands seigneurs, défaits et exécutés par la guerre ou Hautjardin ou simplement parti au loin pour sauver leur vie. Lorent Caswell, Alester Florent, Durran Bulwer ... Toutefois, il restait encore bien des visages connus, et d'autres qui l'étaient moins. Installés dans un petit salon, attenant au bureau seigneurial, s'amassaient dans une ambiance confortable et feutrée ses alliés rebelles. Son regard se posa sur Tarly, toute en hauteur et la mine aussi sévère et morne que d'ordinaire, silencieux tandis qu'il était adossé au bois sombre du mur. Le Maitre de la Guerre était soudainement devenu bien silencieux lorsque la trêve, et la fin de la répression Tyrell, avait sonné sur le Bief, demeurant dans un mutisme réflectif qui changeait de ses ordres à demi-mots. A présent ce n'était pas à Corcolline mais chez lui qu'on se réunissait et Andrew ignorait si cela était le signe du déclin de Lord Tarly ou un simple stratagème visant à semer le trouble mais il ne pouvait s'empêcher d'y voir un lugubre présage. « Bien. Commençons, si vous le voulez bien. » finit-il par dire, brisant le silence pesant dans ce qui s'annonçait comme la discussion la plus houleuse que ses murs aient connu depuis des années.

Déjà qu’elle détestait voyager, Perra Bulwer n’avait qu’une hâte, c’était de rentrer à Noircouronne. Elle avait finalement réussi à s’accommoder du fief de son époux malgré des débuts difficiles. Il faut dire que Perra était la fille de feu lord Duncan Lychester, devenu seigneur de Castel-Lychester par un concours de circonstance. Véritable fille à papa, il lui laissait tout faire. Mais quand il a fallu la marier, c’était une tout autre histoire. L’envoyer loin de Castel-Lychester était une première trahison pour la jeune femme qui n’y remit plus les pieds ensuite. Bien loin du Conflans, bien loin de sa famille, elle apprenait à s’intégrer dans une autre tandis que les mauvaises nouvelles s’enchaînaient. Si elle n’avait que peu pleurer la mort de ses grands-parents, elle avait été dévastée en apprenant celles de son père, sa mère et de son petit frère. Elle en pleurait encore certaines nuits. Cela faisait presque cinq ans maintenant.

Mariée à Torman Bulwer (@Petyr Baelish), un cousin éloigné de la jeune Alysanne, désormais jeune femme, Perra avait mis du temps à s’adapter au Bief et à cette nouvelle vie loin de chez elle. Aujourd’hui, elle avait fait de Noircouronne son foyer. Mais, beaucoup de choses avaient changé depuis qu’elle était arrivée. La guerre était passée par là, mettant un doute prononcé sur la fidélité des Bulwer. Conscient de la position délicate dans laquelle ils s’étaient retrouvés après la prise de Trois Tours, Perra et son époux étaient de ceux qui avaient montré pattes blanches. Elle ne voulait pas finir comme Loren Caswell, Alester Florent ou encore Jason Nègrebar. Elle avait d’ailleurs aucun scrupule à être responsables de la mort de ces deux-derniers. Lord Alester était un personnage bien détestable. Elle plaignait, par ailleurs, sa pauvre cousine qui s’était, tout comme elle, retrouvée dans une famille qui avait tourné le dos au pouvoir en place.

À l’instar de Morya, Perra semblait plus vindicative, plus prompte à obtenir réparation de la mort de sa famille. Après tout, son oncle, seigneur de Bois-de-Saule, en était le seul responsable. Aveuglée par le chagrin qui la faisait maudire les Ryger, elle trouvait encore, au fond d’elle, la force de ne pas tous les mettre dans le même panier. Mais elle chassa bien vite cette pensée tandis qu’elle se retrouvait, aux côtés de son mari, dans une salle à l’étage de Boisdorés où ils avaient été invités pour l’anniversaire de Josua Rowan, le fils et héritier de lord Andrew (@Margaery Targaryen). Mais en réalité, cet anniversaire était un prétexte pour une tout autre réunion qui se déroulait ici-même, en présence de membres de familles qui avaient secrètement tourné leur veste. Il était temps de constater ce qu’il restait de cette allégeance et ce qu’ils allaient, devaient mais aussi pouvaient en faire.

Avant de rejoindre les derniers invités, Lady Caswell s’était assurée que tout était en ordre. Un rituel qu’elle avait déjà répété plusieurs fois depuis leur arrivée à Boisdorés. L’entrée de sa fille dans les mondanités avait été un rituel longuement pensé, minutieusement préparé par sa mère. La Caswell couva du regard sa première née, finissant par hocher la tête, un sourire en coin, visiblement satisfaite de l'image qu’elle renvoyait. Tout juste dompta-t-elle une mèche quelque peu rebelle. Après avoir fait ses premiers pas dans ces festivités si chères aux Bieffois, Rhaena répéterait ce processus dans un tout autre univers. Un monde qu’elles devaient rejoindre, à présent.


« L’heure est venue, il serait fort malheureux de faire patienter de la sorte nos aimables hôtes. intima sa mère, avec douceur, caressant la joue de sa fille une dernière fois. Comme votre père serait heureux de vous voir ici, vous êtes radieuse, mon enfant. »


Une pointe d’émotion lui prit la gorge. Lady Caswell la réprima bien vite, prenant délicatement le bras de sa fille afin de la guider jusqu’au lieu de rendez-vous. En mémoire de Lorent, sa veuve avait fait tout son possible pour préparer leur fille à son futur rôle de dame et de seigneur. Rhaena était leur joyau. Un joyau qu’elle façonnait encore et toujours, tant les enjeux étaient importants. Rhaena dirigerait leurs terres, un jour prochain. Cette rencontre avec leurs alliés en devenait primordiale. Sa timidité était manifeste, c’était un fait. Mais cela ne l’empêcherait pas d’écouter et de réfléchir. C’était là le plus important. Rhaena aurait toute une vie pour prendre des décisions, ce moment lui appartenait à elle, sa régente.


Il semblait à Lady Caswell qu’elles n’étaient ni les premières, ni les dernières à rejoindre Lord Rowan et Lord Tarly. Fort bien, c’était là l’effet qu’elle recherchait. Poliment, la veuve salua les quelques personnes présentes. Les discussions sérieuses ne tarderaient plus. Si la fête précédente avait été somme toute des plus agréables, Lady Ellery avait été une parfaite hôtesse, il ne fallait pas oublier les choses sérieuses pour autant. Leurs défaites avaient été nombreuses, trop nombreuses peut-être. Pour autant, Lady Caswell ne voulait pas abandonner. Elle avait déjà trop perdu pour reculer et espérait que Lord Randyll aurait quelques informations à leur transmettre. Le fait de continuer la lutte semblait évident. Encore fallait-il le faire dans de bonnes conditions et avec l’appui de celui qu’ils considéraient comme leur souverain légitime.


Les premiers mots furent lancés. Simples, froids, efficaces. La Caswell posa une dernière fois son regard sur sa fille, l’encourageant de cette manière, alors que sa main quittait son bras pour lui accorder un peu d’espace. Elle était là pour Rhaena, comme toujours mais souhaitait qu’elle puisse observer à sa guise, loin d’elle. Ainsi, peut-être que sa fille serait au fait de quelques détails qui lui échapperaient. Tout irait bien pour elles-deux, elles trouveraient leur place en ces lieux. Observatrice, Lady Caswell le serait également, dans un premier temps. Il y avait là d’autres grands noms qui avait bien des choses à dire et elle voulait avoir une idée d’ensemble avant de prendre la parole. Les convenances, toujours les convenances. Ils restaient des Bieffois et devaient se comporter comme tels et la veuve Caswell avait pour elle un grand respect des rangs de chacun. C’est en silence qu’elle aborda cette rencontre, affectant un air grave de circonstances.

Margot avait confié Lorimar, son fils aîné qui avait fait le déplacement avec ses parents, aux bons soins d'une de ses servantes qu'elle avait emmené avec elle de Stellepique, puis, se forçant à donner le bras à son époux, elle l'avait suivi jusqu'à cette pièce où s'étaient rassemblés certains des invités de la Maison Rowan. La blonde fit circuler son regard dans la pièce, détaillant les visages pour remettre un nom sur ceux-ci. Elle les reconnut tous sans mal et les salua d'un presque indicible mouvement de la tête. Malgré toutes ces années passées dans le Bief depuis ce mariage qui n'était, à ses yeux, qu'une farce, Margot ne s'était jamais réellement acclimatée à la vie bieffoise, ni à ses habitants. Seuls les Dieux savaient à quel point elle avait envié et jalousé sa lointaine cousine Cersei, lorsque cette femmelette qui lui servait d'époux est décédé en voulant voler au secours de son amant malade de la Peste Rouge. Grâce à son décès, la Lionne avait pu retrouver l'Ouest et le Roc, tandis qu'elle est toujours coincée dans le Bief, auprès d'un homme qu'elle abhorre mais qui lui a, au moins, donné trois beaux fils. Sa seule fierté. Mais peut-être que ce soir, tout allait changer entre eux. Peut-être que ce soir, ce couple si mal assorti allait enfin se trouver un point en commun.

Titus l'accompagna jusqu'à un siège autour de la table. Il l'aida à s'y asseoir puis pris place à ses côtés, sans que Margot n'ait un seul regard pour lui. Ses yeux clairs teintés d'or papillonnaient sur les visages des autres personnes présentes ce soir et s'étonna de la jeunesse de certaines, à commencer par la jeune Rhoane Tarly. Elle eut pour elle un léger sourire en coin puis elle tourna la tête vers leur hôte à tous qui venait de déclarer cette séance un peu particulière ouverte. Margot s'adossa bien droite contre le dossier de son siège, posa ses bras sur les accoudoirs et se rendit attentive à ce qu'il se passait autour d'elle. Car si son époux avait choisi le camp du Dragon de l'Est, ce n'était pas son cas. Sa loyauté envers Viserys Targaryen était très relative. En revanche, Margot désirait plus que tout se venger de sa famille qui l'avait exilé loin de l'Ouest et n'avait depuis presque plus pris la moindre de ses nouvelles. Si elle se trouvait présente ce soir, c'était par pur esprit de revanche. En aucun cas par loyauté pour un homme qui semblait avoir bien oublié ses premiers alliés bieffois, depuis sa prise de pouvoir dans le Val.

@Margaery Targaryen  @Rhoane Tarly ♛ Dialogues: Gras ♛ Pensées: Italiques

Voilà bien longtemps qu'il n'avait eu l'occasion de croiser certains des grands noms réunis là. Depuis l'échec de leur rébellion, Torman avait fait profil bas au même titre que l'ensemble de la maison Bulwer. Peut-être aidés par les liens de sang de Victaria Tyrell avec Hautjardin et le jeune âge de dame de Noircouronne, ils n'avaient pas eu à subir le courroux des vainqueurs. Le meurtre de Lord Florent et le massacre de ses forces retranchées chez eux y était sans doute pour beaucoup. De fait, si s'élimination d'un allié devenu gênant leur avait sauvé la mise il y a cinq ans, elle risquait aujourd'hui de les mettre dans une situation délicate. Alester Florent avait beau ne pas être apprécié par grand monde, la traitrise dont il avait été victime ne ferait qu'attirer la suspicion sur les Bulwer. Il était d'ailleurs celui qui avait un terme à l'existence du vieux renard, parfait exécutant des ordres de son cousin exilé depuis dans le nouveau royaume de Viserys Targaryen. Torman le savait : il avait beau ne pas être stratège, il avait la réputation d'être le chien de garde de Noircouronne. Un homme dont on attend d'avantage un office sanglant que d'être enclin à la discussion. Peut-être cette rencontre lui permettrait elle de mettre fin à ces ragots. Du moins si son épouse (@Ashter Yarwyck) lui en laissant l'occasion. En s'unissant avec Perra Lychester, il n'avait pas imaginé devoir composer avec une personnalité aussi forte que la sienne. Le Bulwer n'espérait qu'une autre : que la mise au point faites à son épouse avant d'arriver chez les Rowan porterait ses fruits.

Il n'avait nul besoin de voir contrarié le partie de Noircouronne par la soif de revanche - somme toute justifiée - de la conflanaise.

Le prétexte donné à leur rencontre paraissait des plus frivole en comparaison de leurs projets à tous. Pour beaucoup comme pour Torman, ils avaient l'impression d'avoir été sacrifiés. Laissés à leur sort par le Dragon de l'Est désormais installé sur son trône à Goëville. Ils avaient contre eux le nombre, la raison et leurs serments respectifs. Pire, le leadership des Tarly n'avait pas aidé à prendre Hautjardin. Torman ne serait pas étonné si Randyll Tarly n'était pas un minimum contesté en ce jour. Il n'avait su se faire obéir de tous les partisans de Viserys Targaryen. Jamais sa bannière ne s'était trouvée au côté de ceux revendiquant un changement dans le Bief. Et même si ce culte du secret avait sans doute sauvé de nombreuses vies parmi les rebelles, il existait forcément un profond ressentiment chez certains. Aujourd'hui, et si le ton des échanges le permettait, il ferait en sorte de mettre de côté ce ressentiment. Quant à savoir s'il ressortirait quelque chose de valable de leurs complots... Il n'attendait qu'une chose : remettre au goût du jour leur lutte, voir enfin les Tyrell tomber et sa maison émerger de sa simple condition de banneret des Hightower.

Voilà comment il abordait la chose, en prenant place au milieu de toutes ces familles promptes à trahir.

La main délicatement posée sur le bras de Thaddeus, Rhoane sondait du regard le petit attroupement de comploteurs. À travers les fenêtres du salon, les derniers rayons du soleil venaient baigner la salle de reflets d’or et de cuivre, pourtant, deux hommes demeuraient dans l’ombre. L’un était leur hôte, en contre-champ, sa silhouette, mêlée à celle de l’imposant fauteuil, s’élevant du sol comme une ombre. Et l’autre, n’était autre que son propre père, qui, muet, s’était fondu dans la pénombre de la pièce, quelque peu à l’écart.

À la manière d’une danseuse, la Tarly se tenait là, le cou gracieusement étiré, la mine digne, presque impassible, si ce n’était pour ce soupçon de sourire qui venait adoucir ses traits, sans véritablement en être un. Elle s’était vêtue simplement mais élégamment, d’une robe couleur sapin, adornée çà et là par quelques touches ambrées, laissant la broche du chasseur ressortir fièrement au creux de son décolleté. Celui-ci restait d’ailleurs discret, ne dévoilant que légèrement les épaules de l’héritière, comme il convenait pour une femme de son statut. C’était avec finesse, qu’elle avait voulu mêler les atouts d’une courtisane à la noblesse d’une déesse vierge, maintenant le tout sur un équilibre si fragile qu’il ne pouvait que créer une forme d’attraction, aussi bien pour l’œil féminin que masculin. Aujourd’hui, elle ne devait apparaître ni trop extravagante, ni trop imposante, mais dégager assez de confiance et de sensibilité pour créer une pesanteur autour d’elle. Thaddeus, quant à lui, était pour elle comme un ornement, sur lequel se reposer pour briller un peu plus.

Croisant une esquisse d’un sourire chez Lady Margot, Rhoane réciproqua, avant de tenter une approche sur le duo féminin des Caswell, son regard se posant sur sa charmante jeune Seigneuresse, tandis qu’elle les saluait d’une chaleureuse révérence.
« Toutes mes félicitation, Lady Rhaena, pour ce début plus que réussi. Vous être absolument charmante…mais pas que. Maintenant que les langues sont déliées, je vous adresse encore une fois toutes mes condoléances pour votre cher père. Je vous assure qu’il est dans l’intérêt de Corcolline de tout faire pour que sa mort n’eut pas été en vain. »
Voyez, comme les guerres font tomber les hommes. Si tout Westeros venait à s’embraser, peut-être ne resterait-il plus que les femmes pour gouverner.

Rhoane s’apprêtait à continuer quand l’ambiance électrisante s’alourdit encore une fois, lorsque d’une voix, ô si macabre, annonça le début de la réunion. Se tournant à nouveau vers le centre de la pièce, Rhoane vint pincer le bras de son homme, et le laissa ensuite la guider jusqu’à une chaise, à une petite table ronde. Posant à nouveau son regard sombre sur le grand Lord Randyll Tarly, Maître de la Guerre, elle attendit. Attendit une prise de parole qui ne vint pas. Ou pas assez rapidement.
Oh, père, ne vous attirez point ainsi la foudre de chaque rebelle ici présent…Parlez. Expliquez-vous.
Venant légèrement faire tapoter ses doigts sur la table, Rhoane ne put que saisir en ce léger flottement, l’occasion de se démarquer. Et, d’un ton qui laissait transparaître tout l’humble respect pour son père et pour le reste des invités, elle parla.
« MesDames, Messires. Mon Seigneur Père et moi souhaitions tout d’abord vous laisser exposer brièvement vos positions et situations respectives. »

Le bras de Rhoane enroulé comme un lierre autour du sien, Thaddeus respirait profondément. Il regardait, autour de lui, les invités triés sur le volet par son frère aîné. Tous étaient venus-là, en apparence, pour fêter l’anniversaire du petit Josua, jeune héritier de Boisdoré. Si on interrogeait toutefois leurs motifs profonds, ils venaient surtout pour participer à une réunion secrète, qui se tenait en cette fin de journée, dans un salon de la demeure des Rowan. Les rebelles du Bief, opposés à la couronne d’Aerion Targaryen, se réunissaient ce soir là, sous la lumière d’or typique des fins de journées dans ce domaine, pour tenter de faire avancer leur cause.  C’était la première fois que Thaddeus assistait, lui-même, à une rencontre de ce type-là, d’une telle envergure en tous cas. Depuis qu’il avait épousé la fille de Randall Tarly, tout était allé très vite dans son engagement pour la cause de Viserys Targaryen. Elle servait bien son ambition propre, et si le puîné des Rowan n’avait aucune affection particulière pour la cause des rebelles, celle qu’il avait pour lui-même motivait son implication dans les stratégies politiques menées par son aîné et par son beau-père.

Alors qu’il avait l’impression de prendre racine tant il était immobile, sa femme s’agitait à côté de lui. Elle s’impatientait, sans doute, comme c’était toujours son cas. Rhoane l’arracha à sa contemplation pour aller discutailler avec la jeune Rhaena Caswell et sa mère. Il resta parfaitement impassible : point qu’il eut envie de passer pour une étoile de mer, dorant sur son rocher nonchalamment au bras d’une épouse aux allures de sirènes, mais parce que leur malheur ne l’intéressait pas. Le bonhomme n’était pas horrible ou insensible, mais à son avis, son épouse était bien plus douée que lui dans les simulacres. Car il ne fallait pas s’y méprendre : il n’y avait pas une once de sincérité dans la voix de son épouse, Thaddeus en était le meilleur juge. Pourtant, les rebelles bieffois réunis-là ce soir étaient fort esseulés, et avaient besoin d'être écoutés, et sans doute plus attentivement encore par la fille de Randyll Tarly. Le maître de la guerre du Roi Viserys devait entendre les amertumes des veuves et des trop jeunes héritières, même trop loin de la cour pour les rapporter à son souverain. Son héritière aussi. Thaddeus, lui, n'était pas obligé de s'assujettir à de telles exigences : après tout, bien que marié à une Tarly, il s'appelait encore Rowan.

Finalement, sa Dame l’attira vers une petite table, de laquelle il tira une chaise pour qu’elle puisse s’y installer. A nouveau, il la voyait s’impatienter, ce qui l’agaça un peu. Avec ce caractère, elle prenait toute la place, risquant de faire passer Andrew pour un pleutre, ou pire, son père pour un charlatan. Posant une main apaisante sur la sienne, il s’assit à côté d’elle, l’écoutant attentivement ouvrir la discussion en proposant aux invités d’exposer leurs doléances. Il espérait que ça ne les encouragerait pas à déverser leur aigreur à l’égard d’un Targaryen dont on n’avait plus aperçu le dragon vert dans le Bief depuis bien trop longtemps.

Rhaena était nerveuse, c’était le premier grand évènement auxquelles elle assistait en tant que dame de sa maison, même si elle pouvait compter tout le soutien précieux et inébranlable de sa mère.  Il y avait tellement de grand seigneur présent et réunis au sein d’un même lieu que cela lui faisait tourner la tête. Elle se remémorait toutes les leçons qu’elle avait apprise au courant de ses dernières années. Elle ne voulait commettre aucun impaire. Elle voulait rendre son père fier d’elle de là où il était. Elle faisait ses premiers pas dans la cour des grands. Sa mère l’avait préparé depuis plus de cinq ans alors elle devait montrer de quoi elle était capable.

Sa tenue était impeccable et ses cheveux roux bien que laissés libre étaient disciplinés. Alors quand il fut l’heure, elle leva ses yeux clairs vers sa mère qui semblait si fière d’elle. Ce doux contact et échange donna un peu de courage à Rhaena pour dompter son cœur et ses peurs. Elle entrait enfin dans la cour des grands.

Rapidement une jeune femme s’approcha des deux Caswell, plus âgé que Rhaena. Elle repéra rapidement la broche en forme d’archer qui se trouvait sur la tenue de la demoiselle. La maison Tarly. Probablement avait-elle à faire à lady Rhoane Tarly, fille héritière de lord Randyll Tarly. Un détail auquel la jeune Caswell voulait s’accrocher pour ne pas se tromper quand les gens lui adressaient la parole. Une simple broche pour indiquer sa filiation. Avec sa nervosité, il était facile pour elle de se tromper, d’offenser quelqu’un et elle ne voulait pas. Pas après tout ce que sa mère avait fait pour elle. La jeune fille rousse tenta alors de maîtriser sa voix pour répondre à la jeune Tarly.
« Je vous remercie lady Rhoane. C’est un honneur de faire mes débuts par un tel évènement. » répondit-elle aux félicitations.

Sa voix cristalline et légèrement fébrile trahissait ses émotions qu’elle tentait de maîtriser. Elle ne s’attarda pas de peur que cela n’augmente.
« J’espère surtout faire honneur à feu mon père. »

Puis le début fut lancé par la voix de leur hôte et Rhaena s’asseyait sagement au côté de sa mère. Ses mains posaient sur jambes, lissant nerveusement un pli inexistant de sa robe. Elle aurait aimé avoir l’aplomb de la Tarly, mais il n’en était rien. Heureusement qu’elle avait sa mère à ses côtés, elle serait morte de peur avant même que tout ne commence.

Le regard d'Andrew glissa sur Lord Randyll comme un couteau sur l'épiderme fragile d'une peau mise à nue : quoi qu'il avait toujours des doutes, il peinait à avoir confiance en cet homme, surtout depuis les évèements qui avaient amené à une guerre bien inutile. Les Tarly, connu pour leur loyauté sans faille devenant les porteurs d'une rébellion. De père en fille, visiblement, songea Andrew tandis que l'héritière prenait la parole en même temps qu'elle tentait de prendre la direction des opérations. Il y avait quelques années que cette dernière était mariée à Thaddeus, une belle union mais qui l'impliquait bien plus qu'il ne l'aurait souhaiter dans toute cette mélasse insoluble qu'était devenue la grogne bieffoise. Quel suzerain ferait Randyll Tarly, un homme avec autant d'émotion qu'une petite cuillère ? Quand à sa fille ... Elle avait beau être sa belle-soeur, elle ne lui avait encore rien prouvé de ses capacité et il ne se voyait pas respecter son autorité plus qu'il n'avait de respect pour celle de Willos. Sans grande surprise, la jeune Rhaena Caswell répondit favorablement aux paroles de sa comparse, demoiselles de grandes responsabilités, il n'était pas étonné de les voir formé une alliance féminine naturelle dans cette salle pleine d'hommes prêt à en découdre. « Merci, Lady Rhoane, mais je crois que nous nous connaissons déjà tous. » soupira Andrew avec agacement, rappelant par la même une réunion qui avait eut lieu à Corcolline bien avant le début des hostilités.

Il considérait que la discussion n'avait pas le temps de se perdre en politesse mièvre et compliments vides : le Bief était connu pour ses circonvolutions à outrance mais Andrew constatait que trop de cette habitude leur avait couté cher la dernière fois. En outre, les festivités de l'anniversaire de Josua avaient, outre le fait de permettre à tout le monde d'échanger, offert une opportunité à chacun de faire plus ample connaissance. « Il semble évident que notre première tentative de mettre à mal l'autorité de Hautjardin s'est soldé par un cuisant échec. Maintenant que nous ne pouvons plus compter sur le soutien des Négrebar et Florent, le Sud du Bief sera difficile à faire tomber. Quand au nord, nous avons bien vu ce que la folie des Targaryen a pu donner ... » Il adressa un signe de tête plein de respect à Lady Rhaena tandis que le sacrifice de son père était si subtilement mentionné. « Lord Randyll, avez-vous eut l'occasion d'analyser les raisons de notre échec ? » finit-il par demander au sire de Corcolline.

Silencieux dans son coin de pièce, la mine sombre de Randyll se redressa pour fixer l'assemblée. Parjure n'était pas de ces tâches qu'il voulait voir sur le nom de sa maison mais pour l'heure, il faisait parti du mauvais côté de l'histoire et il devait agir vite, et intelligemment, pour redresser la situation. « Nous avions sous-estimé la force que Willos Tyrell mettrait dans sa riposte et l'aide que Villevieille serait prête à offrir. » dit-il brièvement. « J'espérais qu'attaquer sur deux fronts permettraient de forcer la division des forces du Bief et rendrait les combats moins déséquilibré. » Malheureusement, les Tyrell n'avaient eut à se concentrer que sur le Sud, laissant la part nord est de leurs terres à la protection des armées de la Couronne. C'était un miracle que la mort de Lord Lorent n'ait pas offert au nouveau roi fou une raison de marcher sur Pont l'Amer. En cela, le sacrifice de Lord Caswell était peut être un mal pour un bien : son décès juste avant l'attaque du roi, n'avait permit de donner de preuve de l'implication de la maison dans la prise de Chutebourg, protégeant son héritage et sa lignée. Et quand on voyait ce qu'étaient devenus les Piète, victimes d'une guerre dans laquelle ils n'avaient pas choisi de s'engager, les évènements qui avaient suivis étaient bénis des dieux : l'absence d'enquêtes évitant de remonter toute la ligne de commandement. Il avait eut des inquiétudes en entendant dire qu'Olymer Tyrell s'était rendu à Chutebourg mais finalement, cela serait peut être à leur avantage. « Le petit Tyrell a cependant montrer qu'il n'était pas totalement capable de défendre son territoire seul : sans les armées de la Couronne, contrer nos forces auraient été bien plus difficile et dommageable. » Sans compter que l'intervention royale, l'ingérence de la Couronne dans la justice du Bief, avait du leur heurter dans son égo. Si quelques chose devait reprendre, il valait mieux organiser les combats loin de Villevieille et Hautjardin qui formaient les plus gros bastions loyalistes de la région : plus longtemps ils mettrait à rejoindre la zone occupée, plus de terrain les rebelles pourraient gagner. « Ser Bulwer, vous êtes le seul dont la maison s'est retrouvé face aux forces loyalistes, comptez nous ce qu'il s'est passé à Noircouronne. » ordonnant Randyll en se tournant vers le chevalier qui représentait Lady Victaria et sa fille.

La tension pouvait être palpable dans la salle compte tenu du passif des personnes présentes. Tous avaient prêté allégeance au prince Viserys, désormais roi des Montagnes et du Val. Tous étaient conscients des engagements qui les incombaient. Tous se demandaient néanmoins quel serait leur avenir maintenant que le calme était revenu. Viserys installait son pouvoir dans le Val tandis qu’ils pourrissaient dans le Bief. Les débâcles des tentatives d’il y a cinq ans résonnaient encore dans l’esprit de chacun. La tentative d’empoisonnement du suzerain avait échoué et il ne faisait aucun doute que la mort récente de la suzeraine porterait un coup à Hautjardin. Pour l’heure, néanmoins, ils devaient se concerter, discuter, agir et réagir. Un silence pesant avait envahi la salle tandis que Perra lançait un regard à son époux (@Petyr Baelish) qui, quelques heures avant leur arrivée à Boisdorés, avait mis en garde la jeune femme. D’un caractère bien trempé, hérité de sa grand-mère, Perra était une femme déterminée et ambitieuse. Seulement, il était parfois bien difficile de se faire entendre auprès de son époux.

La parole fut alors prise, par lady @Rhoane Tarly, une très jeune femme mais dont la prestance n’était pas sans pareille. Fille et héritière de lord Tarly, elle semblait vouloir prendre les choses en main tandis que son père demeurait dans l’ombre, silencieux. Honteux de sa défaite ? Cinq ans après, il pouvait l’être. Perra ne machait pas ses mots lorsqu’il était question de Randyll Tarly et de sa piètre manœuvre à l’époque. Mais la place de Perra n’était pas à la confrontation. Elle demeura silencieuse, laissant son époux dont le regard était régulièrement tourné vers elle. Il craignait qu’elle dise un mot plus haut que l’autre, sans doute. Qu’il se rassure, elle n’en ferait rien. Puis Andrew Rowan poursuivit, rappelant ainsi les faits. Les forces rebelles avaient sous-estimés celle de leur suzerain. Perra jouait avec ses doigts, se retenant d’intervenir tandis qu’elle sentait la colère monter en elle. La voix, soudaine, de lord Randyll, intervenant à la suite de leur hôte, l’interrompit dans ses pensées vindicatives. De surcroît, lorsque les regards se dirigèrent vers son mari, elle sentit ses joues rosir quelque peu. En effet, de cette assemble, le couple était le seul à avoir été au cœur de la tourmente.

Silencieuse, aux côtés de son époux, elle le regarda à son tour. Tout le monde s’attendait ainsi à ce qu’il prenne la parole, afin d’expliquer la situation de Noircouronne à l’époque. Qui sait vers quoi mènera cette discussion mais peut-être que le ralliement autour de la bannière de Viserys Targaryen pouvait encore se faire. Elle pensa ainsi, soudainement, qu’il n’avait encore été question du prince – elle n’arrivait à se dire qu’il était roi désormais – jusqu’ici. Or, il faudra bien l’inclure dans cette conversation puisque c’est pour lui qu’ils se réunissaient après tout. Mais Perra tenait son rôle d’épouse silencieuse. Il viendra bien un temps où elle pourra parler

Il aurait aussi bien marcher dans une fosse à serpents, l'effet aurait été le même. Avec les regards portés sur lui, Torman se demandait ce qu'il convenait de dire. Aux yeux de tous, les Bulwer étaient ceux qui avaient mis un terme à la vie de Lord Florent pour sauver leurs têtes. Mais ils étaient aussi les seuls présents ici à avoir combattu les forces de Willos Tyrell sur un champ de bataille. Une rencontre peu glorieuse dans son résultat comme son déroulement. Les forces de lady Victaria s'étaient rangées de mauvaise grâce derrière la bannière au renard lorsqu'il fallut quitter les remparts de Trois-Tours pour affronter une force supérieure en nombre en terrain découvert. La débâcle qui avait suivi s'était terminée dans le sang. Celui de son instigateur et de ses hommes, les larmes de sa maitresse Tyrell à Hautjardin mettant un terme à leur rébellion en leur offrant un répit de cinq années. D'un nouveau regard à son épouse Perra ( @Ashter Yarwyck), le chevalier trouva la force d'intervenir derrière Lord Randyll. Peut-être parce que ses mots seraient plus justes et mesurés que ceux de la née Lychester. Si le complot pouvait être l'apanage des femmes, la guerre restait et resterait celui des hommes. N'en déplaise à certaines lady assemblées là.

« Ce que je pourrais vous dire ici sera tiré de l'expérience de mon cousin Ser Durran, mais je partage son point de vue. » , annonça l'homme de main de Noircouronne d'un regard à l'assemblée. « Nous avons été trop gourmands, trop fiers. Nous nous sommes gargarisés de succès bien trop modestes vis-à-vis de la réalité de la situation. Faire tomber Mielbois, fermer le Murmure en prenant Trois-Tours... Lord Florent était persuadé que cela mènerait Villevieille à trembler. Il fut suffisamment sûr de lui pour engager nos forces en rase campagne sous les murs de Trois-Tours, là où l'ennemi avait l'avantage du nombre. Notre cause fut vouée à l'échec après cette défaite. », affirma t-il avec ferveur.

De son point de vue, si les combats venaient un jour à reprendre, il faudrait que ce soit dans un contexte bien plus favorable. Sans un soutien extérieur au Bief, leur cause paraissait perdue d'avance. Il y avait toujours la possibilité de rallier d'autres mécontents à leur camp, mais cela restait extrêmement risqué. Qui donc parmi les bannerets de Hautjardin viendrait à tourner casaque pour le camp des vaincus ? Sans un changement drastique dans le paysage politique de leur région ou du royaume, leurs efforts resteraient vains. Victaria Tyrell partageait cet avis. Ce fut même leur principal sujet de discussion avant qu'il ne quitte Noircouronne. Elle l'avait encouragé à faire entendre leur voix. Quitte à bousculer le débat.

« Les lunes suivantes ne furent qu'une période moribonde, sans perspective d'amélioration. Nos forces se trouvèrent trop éparpillées. », poursuivit il, s'attendant presque à être interrompu en raison de son point de vue pessimiste. « Aujourd'hui, les circonstances sont encore moins favorables pour notre cause qu'il y a cinq ans. La maison Bulwer n'imagine pas reprendre les armes si le contexte politique du Bief et du royaume n'évoluent pas en notre faveur. A moins qu'un soutien extérieur ne vienne changer la donne... », conclut il lourdement, ses derniers mots ne pouvant que trahir un certain ressentiment vis-à-vis du Val et de son monarque.

Lady Caswell s’était contentée de baisser la tête quelques instants, alors que la mort, le sacrifice, de son époux était mentionné. Il ne s’agissait pas de masquer un quelconque trouble, tout simplement de se recueillir quelques instants avant que les débats ne débutent vraiment. Elle devait être à la hauteur aussi bien pour Lorent que pour Rhaena. La veuve écouta posément le résumé de leur situation. Une situation peu brillante, il est vrai. L’espace qui leur était offert pour manœuvre était moindre, plus encore avec autant d’alliés hors-jeu. S’en sortir avec les honneurs était encore possible, Lady Caswell ne pouvait en douter. Pas sans une aide extérieure, cependant. Ils étaient comme pris en tenailles par bien plus grands qu’eux et ne devaient, pour certains, leur survie qu’à un coup du sort.


Les propos de Ser Torman étaient sensés. Peut-être avaient-ils été trop optimistes en agissant de la sorte. Il était vrai que la prise de Trois-Tours et celle de Mielbois avaient forcé leurs adversaires à agir au plus vite, pour protéger Villevieille et d’autres fiefs d’une averse de combats et de flèches. Peut-être aurait-il été préférable d’avancer masqués encore quelques temps, ralliant maison après maison pour un assaut de grande envergure ? Ainsi, leur roi aurait peut-être pu  leur prêter assistance. A n’en pas douter, la majorité des protestations, qu’elles soient tues ou non, concernaient cette question. Au fond, tous devaient avoir cette amertume sur la langue, celle d’avoir soutenu un souverain, d’avoir versé jusqu’à leur propre sang, pour ne rien obtenir en retour si ce n’est l’impression de devoir se terrer en attendant des jours meilleurs qui ne viendraient pas. Existait-il seulement un antidote a un tel sentiment de trahison ?


« … Il est vrai que nos premières victoires nous ont donné des ailes. convint Lady Caswell, avec une douceur mesurée. Si agir à nouveau n’est pas impossible, nous devons prendre la mesure de nos erreurs passées. Pourrions-nous imaginer mettre nos activités en sommeil en attendant des jours meilleurs ou l’annonce d’une aide extérieure ? Nous sommes parvenus à déstabiliser nos adversaires une première fois, nous pourrions recommencer. »


L’idée n’était pas forcément mauvaise. Dans cette pièce, personne ne s’était encore compromis d’aucune manière. Et si tel avait été le cas pour certaines familles, les éléments perturbateurs n’étaient plus de ce monde pour causer d’autres troubles. Ils étaient en infériorité numérique, dans une région pacifiée et éloignée de leurs alliés naturels. Bien sûr, il y avait là quelques risques. Au-delà de possibles trahisons, les maisons ne changeaient pas mais les têtes, oui. Dans quelques années, leurs successeurs pourraient très bien avoir un tout autre avis sur la question et éventer quelques plans consciencieusement préparés. D’un autre côté, attendre quelques temps pourrait leur permettre de cultiver leurs alliances ou quelques coups durs pour suffisamment déstabiliser le Bief. Et pourtant, imaginer cette attente la répugnait. Pourrait-on venger Lorent un jour, dans de telles circonstances ? Elle en doutait mais ne voulait pas voir sa cause, leur cause, désespérée pour autant.

« Je vous remercie, Lord Andrew, d'avoir corrigé ma prise de parole peu judicieuse. », glissa-t-elle, le miel dans sa voix se transformant en ortie dans sa gorge.

Quelle espèce d’abruti prétentieux. Si elle avait eu un couteau en main, c’est la langue de son beau-frère qu’elle aurait voulu arracher, en cet instant. Ne voulait-il d’ailleurs pas plutôt prendre exemple sur son père et se taire ? Maintenant un sourire charmant sur ses lèvres, c’est pourtant un coup d’œil incendiaire qu’elle lança à son propre époux. Celui-ci avait intérêt à la défendre, la prochaine fois. À son grand dam, elle devrait à présent se montrer plus prudente, sous peine de se faire à nouveau décrédibiliser par une remarque du Grand Lord Andrew. Quant bien cela lui fut particulièrement difficile.

« Je vois bien qu’il nous faut être plus intelligents cette fois-ci, et en cela je m’en remets à l’expertise des guerriers entre vous, reprit-elle tout de même à la suite de Lady Caswell. Cependant, penchons-nous sur la situation au-delà du Sud. Nous avons perdu le Bief, mais n’oublions pas notre rôle primordial dans la déstabilisation de l’armée Loyaliste. En ouvrant des foyers de combats à chaque coin de Westeros, chaque maison rebelle a contribué à mettre le Roi Viserys sur son trône. »
Fronçant légèrement les sourcils d’une mine pensive, la jeune femme prit une pause, avant d'affirmer, son regard s'attardant sur le taureau de Noircouronne « De toute évidence, nous n’avons pas fait tout ceci par simple générosité. Et je vous suis entièrement, Sir Torman Bulwer, quand vous parlez d'une aide extérieure. Nous ne sommes pas assez forts seuls, pour représenter une menace dans le Bief, encore moins si la Couronne est là pour soutenir Willos. Pour avoir une chance, il nous faudrait à nouveau bousculer l’équilibre de Port-Réal. Et il me semble clair que cette mise en action doit venir du Royaume du Val. Peut-être que nous pourrions ainsi répéter le scénario d'il y a cinq ans, et arracher cette fois-ci le Bief aux Loyalistes. Nous-même disposons encore de cartes à jouer dont notre ennemi ignore l’existence. Avec les forces Florents, les Tyrell pensent avoir écrasé le coeur de notre rébellion. »

Se redressant de sa chaise, l’héritière s’avança légèrement, sa main venant se poser sur l’épaule de son mari, comme pour lui signifier qu’elle comptait sur lui, cette fois-ci.
« Je voulais par ailleurs vous présenter une idée, ou plutôt une crainte de ma part. Si Westeros venait à se rebeller une nouvelle fois, j'ai bien peur que Lord Tywin cherche à éteindre le feu le plus rapidement possible, quitte à employer des forces de destruction massive. Et en cela, je fais allusion aux monstres ailés cracheurs de feu dont disposent nos ennemis. Combinant cela à la folie Targaryenne, si nous ne nous protégeons pas, c'est tout le Bief qui risque de s'enflammer. » Sa voix avait pris un ton sévère, cherchant à éveiller en eux le souvenir de ces bêtes reptiliennes qu’ils avaient peut-être eux aussi aperçus au Tournoi de Port-Réal. « Willos Tyrell a autorisé une certaine militarisation de Corcolline. Je voulais ainsi proposer, qu'avec votre accord et celui de Viserys, nous nous attelons au développement d'un arsenal anti-dragon dans les Montagnes Rouges, à l’abri des regards. Je voulais, ainsi, demander également le soutien de la maison Peake, qui pourrait participer au projet si elle le souhaitait. »