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Hell around the corner.

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Gerold Grafton
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Gerold Grafton

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On se croyait toujours un petit peu au-dessus de ces choses-là. Par orgueil mal placé, parce qu'on pensait être quelque part supérieur à cette servilité inclinée, soit parce qu'on en était suffisamment éloigné pour ne même pas en voir la couleur, soit parce qu'on en était suffisamment proche pour en voir les défauts. Un rappel de l'étiquette avait été rigoureusement conduit et pourtant dédaigné par le Seigneur-même, qui avait vaqué à ses propres occupations, les jambes plus rigides que jamais et le menton relevé.
Néanmoins et malgré tout, lorsque l'aura royale avait consenti à les baigner de leur lumière, Gerold s'était incliné, comme tout le monde, et plus gracieusement encore pour quelqu'un habitué à recevoir les hommages. Cette force de gravité était plus immuable que n'importe quelle présomption d'arrogance et Gerold dut admettre se soustraire à une distinction qu'il avait tant de fois vue se refléter dans les yeux de ceux qui fléchissaient leurs articulations devant lui. La noblesse était une patine inégalable, et quand bien même pouvait-on déprécier ce don parfois spectaculairement injuste du sang qui n'était en rien exprimé par la personnalité, il y avait derrière cette broderie héraldique des symboles et des croyances qui dépassaient l'existence d'un seul homme.  
Sans se l'avouer jusqu'au bout et encore moins sans le montrer, Gerold s'était senti prendre par une fébrilité croissante, car toute sa bonne volonté et suffisance ne furent capable de le prémunir contre la crainte et la puissance de la monarchie. Soudain, après tous ses innombrables efforts pour faire resplendir sa cité, après avoir enfin mérité la place que le sang lui avait légué, il se retrouva incertain de sa position et de sa légitimité. Seule la famille royale était capable d'inspirer une si complète humilité, rappelant à quel point cette hiérarchie était ancrée, même dans le gène des plus récalcitrants. Ils n'étaient que des humains... mais leur potentiel était suffisant pour en faire les égaux d'une cause universelle.  
Des denrées avaient été étalées à leurs pieds pour représenter les bénéfices de cette partie du royaume et de son commerce avec le continent voisin, du plus trivial au plus exotique. Pêche, coquillages, mâts et armatures, techniques de calfatage, de bordage, recette du pois de filasse ou d'étoupe. De nombreuses pierres variées, ramenées d'Essos et d'ailleurs ; chrysobéryl vert olive qui devenait rouge à la lumière, cymophane aux filets d'argent, péridot pistache, topazes rosés, escarboucles d'un fougueux écarlate aux étoiles tremblantes de quatre rais. Un coffret fut offert en hommage aux Targaryen, empli par l'or rouge de pierres solaires, de cinnamome couleur de flamme, de spinelles orange et violacées et d'améthystes aux couches altérées de rubis et de saphir. Des colliers de nacre, des riches étoffes brodées de motifs étrangers. De la musique de folles vagabondes tirant une ardente mélodie de petites cithares, ou de graves nomades aux tartans beiges arrachant des sons aux cordes tendues de monstrueux luths.
Charmant et onctueux, Gerold était demeuré relativement muet, laissant représentants volontaires et intendants tenir les récits de cette belle citée valoise. Il avait toujours été un homme de peu de parole, la flatterie forcée lui était difficile et il accordait volontiers cela à des représentants plus à l'aise. Il avait cependant eu en son avantage de succincts commentaires sur tel objet ou telle œuvre, tel pêcheur ou tel ouvrier, qui témoignaient de son investissement à tous les niveaux. Cette distance maitrisée faisait de Gerold quelqu'un qu'on ne sondait pas jusqu'au bout, ce qu'il savait pertinemment être un défaut : personne ne pouvait apprécier un livre qui ne se laissait pas lire.
L'arrivée du couple princier et de sa suite fut si soumise au protocole, et Gerold fut pris d'un tel élan d'agitation, qu'il aurait pu rencontrer n'importe quel autre membre de la famille royale sans s'en rendre compte. Ce ne fut que le soir venu, après le banquet relativement intimiste durant lequel il discuta extensivement d'il ne savait plus quel sujet avec le Prince, qu'il fut enfin rattrapé par l'ampleur de l'évènement. Un rire nerveux secoua tout son corps, qui se détendit comme un ressort dans un éclat de raillerie incontrôlable. Trop exalté, alors que toutes les chambres s'éteignaient une à une et que la citée s'en allait se coucher, Gerold retourna à son cabinet. Travailleur acharné, perpétuellement passionné, hyperactif et incapable de tenir sur place, il usait son énergie durant des nuits insomniaques, à réaliser parfois Père seul savait quel genre de fantaisies.  
Ce ne fut que tard dans la nuit, une fois tout son soûl épuisé et ses nerfs maîtrisés, que Gerold arpenta les sinistres couloirs de son domaine. Les flammes de sa bougie se projetaient sur les incroyables ornements et devenaient d'horribles ombres distendues sur les murs et le plafond, invoquant quelques difformes démons des sept enfers. La fatigue s'était abattue d'un seul coup sur son corps, lui rappelant que le lourd protocole auquel il s'était adonné promettait de se réitérer le lendemain. Il s'était senti jugé ; par tout le monde, chaque noble et manant venu rendre hommage à la beauté amoureuse et comblée de ce couple, mais surtout par soi-même. Soudain, il eut l'impression de n'en avoir pas assez fait, ou trop, ou pas au bon moment et ces doutes eurent raison de sa vanité. Le regard plongé dans de vagues souvenirs, rejoignant d'un pas qu'il avait toujours eu vif ses appartements, Gerold percuta soudain une servante au détour d'un couloir qu'il avait volontairement serré.  
« Nom d'un foutu ch...! commença-t-il à s'exclamer avec hargne contre ce qui l'avait ramené à la réalité d'un savant coup d'épaule, qu'il avait d'avantage donné que reçu. Princesse ! »
A nouveau, l'insupportable gravité fit son office, alors qu'il ressentait d'autant plus cruellement l'impression d'un manque d'expérience. Horriblement gêné, il se plia avec une maladresse qui ne lui ressemblait guère, ravalant les injures qui lui étaient montées à la gorge et s'y étaient bousculées. Il s'écarta, et pendant un bref instant, ne sut quoi dire. Pour quelqu'un étant obsédé par le contrôle de soi et de son monde, Gerold venait de pénétrer dans l'univers épouvantable des gauches barbares et des frivoles malpolis, bref, des gens qu'il détestait.  
« Princesse ! Répéta-t-il encore une fois, se sentant étranger dans sa propre demeure, comme un voleur s'étant immiscé dans la maison royale. Veuillez accepter mes excuses, j'ai cru que... » Mais il se tut, pour ne pas avouer une maladresse supplémentaire, et demeura absolument penaud.  
Et puis, sa place lui revint, ainsi que l'heure avancée de la nuit et son visage se contracta, alors qu'il murmura de sa voix basse et chantante un secret qu'il avait peur d'avoir découvert :
« Pardonnez-moi mais, est-ce que tout va bien ? »


@Margaery Targaryen
Margaery Targaryen
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Margaery Targaryen

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L'on ne pouvait dire que le séjour dans le Val se déroulait comme prévu. Contrairement à leur visite de l'Ouest ou du Conflans où tout avait respecté les plans à la minute près, la visite du couple princier dans le Val d'Arryn n'était qu'une suite d'inattendu et de déconvenues. C'était la première fois que Margaery voyait autre chose que la Route de la Rose, des fiefs au delà de son Bief natal ou des quelques châteaux des terres de la Couronne où il lui avait été donné de séjourné. Bien sur, ce n'était pas son premier voyage : elle se souvenait d'avoir accompagné son frère et son fiancé à Lancehélion, mais le paysage dornien était bien la seule exception faites aux habitudes de la jeune fille. En quelques semaines, elle avait bien plus vu de Westeros que dans son existence entière. Les vertes plaines et les vergers du Bief laissant place aux relief montagneux de l'Ouest puis aux immenses forets semi-sauvages du Conflans. Et puis ils étaient arrivés dans le Val. Par la fenêtre de son carosse, Margaery avait observé les montagnes et les falaises, ce paysage qui avait en commun avec les trois autres royaumes qu'ils avaient déjà traversé tout en ayant son identité propre, celui où s'était établi la soeur d'Aegon depuis son mariage avec Ser Robar Royce. Margaery ne trouva guère l'endroit déplaisant bien qu'à ses yeux, rien ne puisse égaler la beauté de son Bief originaire, elle imaginait sans mal les balades à cheval, la chasse au vol ou toutes ces activités qui semblaient tout aussi propice dans le royaume des montagnes. L'accueil de Lady Arryn fut moins chaleureux que celui de Lord Tytos Nerbosc cependant Margaery comprit rapidement que la demeure où ils se trouvaient n'était en rien celle de la suzeraine, descendue de son perchoir des Eryés pour des raisons logistiques. Lorsqu'on conta à la jeune princesse les péripéties que représentaient une venue dans le château des Arryn, Lady Lysa lui parut soudainement bien plus sympathique ! Cependant, malgré une conversation qui permit à Margaery de sentir toute la compassion que cette femme avait pour la perte, encore récente, de son enfant, la jeune fille ne put cacher sa déception lorsque leur hôtesse les invita à rejoindre, plus tôt que prévu, leur destination suivante : une affaire diplomatique accaparant son temps et son esprit. La contrariété suivit Margaery tout au long de la route entre les Portes de la Lune et le château de Rougefort où leur arrivée précoce avait été annoncé l'avant-veille. Et malgré des préparatifs hâtés, la maison Rougefort n'avait pas lésiné sur les moyens pour célébrer la venue du couple en leur demeure, un effort que la née Tyrell remarqua et dont elle ne manqua pas de remercier les valois, offrant son plus beau sourire depuis des semaines. Comme un coup du sort, ce que Margaery avait prit pour la frustration d'avoir été mise à la porte des Arryn sans grand ménagement se révéla être un coup de froid qui la garda au lit plusieurs jours. La honte qu'elle ressentait à être malade sous le toit des Rougefort lui permit cependant de faire plus ample connaissance avec certains de ses membres et d'entretenir quelques discussions qui lui permirent de mieux cerner le fonctionnement de la politique valoise. Bien qu'elle ne soit du rang de la reine des épines, Lady Vanbois semblait avoir la même influence et le même franc-parler que sa chère bonne maman et Margaery ne manqua pas de rire aux quelques anecdotes racontés par Talia Rougefort, née Vanbois, sur cette mère si exceptionnelle. Les adieux furent sincèrement triste : en restant plus longtemps à Rougefort, Margaery s'était bien plus attachée à eux qu'à d'autres et partir lui tira une véritable larme tandis qu'ils prenaient la route de leur dernière destination valoise : Goeville.

Au périple politique se mêlait celui des sentiments. La perte de Gaemon avait profondément affecté le couple : Margaery pleurant son fils, en voulait toujours à Aegon de ne pas avoir été présent, de l'avoir inquiété en se jetant dans un danger qui lui avait déjà arraché son frère bien aimé. Leur départ de la Capitale vers Hautjardin avait apaisé Margaery qui vivait très mal la grossesse de la reine et qui s'était réconforté en pouponnant auprès de ses neveux, apaisant son âme parmi les siens. Leur départ en pérégrination avait été timide et il avait fallu tout son talent à la jeune princesse pour dissimuler la crise que son couple traversait. Une crise qui s'était apaisé au cours du séjour à Corneilla et que le périple valoise avait éloigné davantage : refaisant chambre commune, Margaery avait même désiré faire son entrée dans Goëville non pas dans le carrosse qui lui était dévolu et les suivait depuis la capitale, mais sur le même cheval sur son époux, tel le couple enchanteur qu'ils étaient depuis leur début. Il s'agissait aussi pour la jeune femme de rappeler l'amour sincère qui avait conduit à leur mariage, au delà de la puissance de leurs familles, et à redorer le blason d'un Aegon que la proximité nordienne rendait nerveux en faisant de lui, le prince charmant dont toute jouvencelle pouvait rêver. Margaery savait que nulle mise en scène ne rattraperait le désastre nordien, mais avant de conquérir le coeur de ces derniers, mieux valait s'assurer de l'affection des valois ! Goëville lui rappela, à bien des égards, Villevieille. En plus valois. Il manquait la douceur du climat bieffois et le raffinement de la plus grande cité à l'ouest mais pour la quatrième plus grande ville du continent, Goëville valait la visite. Margaery ne pouvait cacher sa curiosité face à l'endroit et à la famille qui la dirigeait. Tout comme la maison Tyrell, la maison Grafton ne possédait pas de puissant ancrage nobliesque sur ce fief : on les disait descendants d'aventuriers andals qui s'étaient rendus dans le Val et s'y étaient établis, prospérant en épousant une fille du précédent seigneur des lieux et profitant de la discorde de Goëville avec une autre maison : les Royce. Margaery adorait lire les récits de ses vieilles rivalités familiales bien que Garlan lui rappelait combien il était déplorable de voir ces conflits perdurer au fil des générations. Contrairement aux tensions entre Bracken et Nerbosc, Margaery s'intéressait particulièrement aux Grafton car, tout comme eux, sa propre maison possédait des racines andales et, tout comme eux, les Tyrell n'étaient pas, à l'origine, à la tête de Hautjardin. Il était plus simple de trouver des documents relatant la montée d'influence des seigneurs de Goëville que de trouver les mêmes récits sur celle des Tyrell. Et puis, il était toujours plus intéressant de discuter de la manière habile dont la famille s'était fait une place dans la politiquev alois que d'écouter sa grand-mère rappeler que les Tyrell n'était pas connu pour leur grande intelligence et ne devaient leur ascension qu'aux dragons. Une famille qui s'était faite par elle même, qui s'imposait au point de dominer la politique commerciale du Val, Margaery ne pouvait qu'être intriguée. Pourtant, son hôte se montra bien silencieux et s'il n'y avait eut foule de courtisans et membre de la petite noblesse des environs, elle se demandait si la soirée n'aurait pas tournée au diner privé.

L'obscurité était tombée mais Margaery en parvenait à trouver le sommeil. Ces derniers temps, Aegon dormait mal, la réveillant au milieu de la nuit, ses sursauts l'empêchant de retrouver l'apaisement nécessaire au repos. Loin de la familiarité du Donjon Rouge ou de Hautjardin, Margaery se retrouva dans un couloir sans réel but : trouver une bibliothèque où un endroit où s'abimer les yeux serait formidable mais elle ne savait encore sur quel pied danser avec son hôte et craignait qu'il n'apprécie pas d'entendre dire, au matin, qu'elle avait fureté dans sa demeure toute la nuit. Enveloppée dans un châle aux couleurs pastel, la princesse hésitait à faire demi-tour quand elle fut bousculée dans un coin de couloir. Son sourcil se haussa au langage fort châtié que son obstacle humain tandis qu'elle tentait de retrouver son équilibre malmené. Rabattant une mèche derrière son oreille, la jeune fille remarqua les traits familier de son hôte à l'instant même où ce dernier se confondait en excuse pour ses paroles qui avaient eut la chance de ne pas franchir la limite de l'acceptable, compte tenu de leurs rangs respectifs. Toutefois, quand bien même la langue de Lord Gerold se serait permit des noms d'oiseaux, Margaery aurait été fort injuste de lui en tenir rigueur : le Grafton ne devait pas être habitué à la présence d'autant de monde, et surtout d'invité aussi imposants qu'ils pouvaient l'être. « Je vous en prie, Lord Gerold, il n'y a pas de mal. » assura-t-elle en posant une main sur sa poitrine afin de calmer les battements de son coeur, encore affolé par la surprise. « C'est ma faute, je ne m'attendais pas à vous surprendre de la sorte. Pour être honnête, je ne m'attendais pas à croiser quelqu'un tout court. » confessa-t-elle avec un léger rire nerveux dans la voix : l'heure tardive et l'inconnue du château aurait pourtant du la mettre sur la piste d'une rencontre nocturne mais elle se fut imaginé rentrer dans un garde ou une servante, et non dans le propriétaire des lieux.

:copyright:️crack in time



┗ THE PRINCESS ROSE ┛
We've been living on a fault line and for a while, you were all mine. I've spent a lifetime giving you my heart I swear that I'll be yours forever : 'til forever falls apart
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Cessait-on un jour de se sentir comme un imposteur ?  
Bien sûr, il y avait le sang, le travail, le protocole et les titres. A chaque instant de son existence, le reflet de sa condition lui avait été renvoyé par l’attitude d’autrui ; l’ombre du pouvoir et de la position des Grafton se mirait invariablement sur le visage des gens, entre appréhension, défi et servitude. Pourtant, c’était un poids difficilement acceptable lorsqu’on n’avait encore rien fait pour le mériter. Très orgueilleusement, Gerold s’était figuré que son éducation, couplée à son ambition, suffiraient à lui prêter ce lustre naturel, et quand bien même s’était-il oublié dans le travail depuis la mort de son père, sa fulgurante trajectoire n’avait pas pris la courbe parfaite qu’il avait escompté. Sans cesse avait-il butté sur de menues maladresses ; avait commis des erreurs de jugement, de stratégie, de convenance ; avait souffert de ses excès d’orgueil. Si pour certains, le pouvoir exacerbait leur amour-propre, Gerold avait sommairement perdu tout assurance. La lourdeur de la charge n’avait pas tout de suite pesé sur ses épaules, mais s’était assise lentement, comme un oiseau, comme tout chagrin : soudain, il était seul. Il avait toujours été plus ou moins seul par la force des évènements, mais autant avait-il trouvé en son père un adversaire de pensée, autant entre Seigneur et héritier, ils avaient également partagé des préoccupations semblables. Sans compatir, Gerold songeait à ce Seigneur Grafton, qu’il avait toujours cru pouvoir surpasser en compétence une fois que les Dieux l'auraient repris en leur sein, et probablement l’avait-il effectivement éclipsé à plus d’un égard, mais la spécificité de la tâche lui avait très certainement échappé. Il était seul, et il y avait toujours dans l’ombre de spectateurs se désolant de ses réussites et prêts à contempler sa chute, en le poignard au passage pour l'y précipiter.  
C'était un sentiment qui s'exacerbait par moment, surtout face à d'autres Seigneurs mieux assis et à qui tout semblait sourire sans efforts apparents. Malgré leur généalogie compliquée et leurs chroniques tumultueuses, ou au contraire grâce à cela, les Targaryens inspiraient cette agitation particulière et paraissaient rendre fallacieuse toute prétention à la noblesse, qu'elle fut appuyée par un talent ou non. En y réfléchissant, leur réputation n'était nullement dénuée de lacunes ou de travers, et même pouvait-on éprouver de la rancœur à l'égard de leurs nombreux manques de jugement, mais leur présence révélait toujours quelque chose d'ineffable. Il ne s'agissait que d'humains et pourtant, pourtant... ou ne s'agissait-il que de lui et de son manque de certitudes ?  
La Targaryen devant lui était si jeune ! Une Tyrell de dix-huit ans qui avait atteint l'une des positions les plus enviées du royaume. Cela devait être effrayant... mais pouvait-on supposer innocente la petite-fille de la Reine des Epines ? Même sans le caractère propre des enfants, Gerold savait quelles armes pouvaient devenir les descendants d'une main adroite et se méfiait tant de la jeunesse candide que de la sage vieillesse. Il n'y avait dans ce monde que très peu de vérités et de raisons de faire confiance. Supposer la naïveté et la stupidité s'avérait mortel ; s'apitoyer était dangereux, surtout sur soi. La faiblesse et l’ignorance n'étaient pas des obstacles à la survie, mais l’arrogance, si. Une arrogance qui serpentait entre la ridicule jeunesse et possible inexpérience d'une Princesse à peine faite et d'un Seigneur supposément tout aussi profane. Deux ingénus dans un couloir très sombre, que la nuit avait rendus encore un peu plus seuls.  
Gracieusement, elle lui pardonna son manque de rigueur, et il n'eut ni assez d'esprit, ni assez d'audace pour lui reprocher d'arpenter les couloirs de sa demeure sans grande pudeur. Une attitude qu'ils s'était pris plaisir à adopter pour intimider les impudents et passer l'envie aux curieux de tenter sa patience. Il l'aurait peut-être subtilement fait s'il n'avait pas été autant à blâmer ; après tout, un Seigneur devait se défendre contre toutes les formes de pouvoir et d'ingérence, quitte à tenir la famille royale même en respect. Parce que la Princesse fut assez amène pour s'approprier la faute, il ne fut bien vite plus question de courtoisie que de convenance. Encore gêné, Gerold laissa son regard se balader le long du couloir, dont le silence était rompu par les sifflements du vent entre les pierres et la danse inquiétante des bougies.  
« Je crois que nous soyons nos exceptions respectives, dit-il doucement. Les seuls à arpenter ces murs la nuit sont en général les courants d'air. » 
Elle n'avait pas vraiment répondu à sa question ; Gerold se demanda s'il s'agissait d'une omission maladroite, ou au contraire, parfaitement volontaire. Dans les deux cas, il n'allait pas insister, ni lui proposer de la ramener dans ses appartements. Lorsqu'on n'était pas là où on était censé être, c'était qu'on essayait de fuir quelque chose, que ce fut un autre ou soi-même. La situation de Goëville était tout de même relativement confortable : son premier réflexe n'était pas encore de porter le couteau à la gorge de ceux qui le surprenaient. Malgré le danger, sa propre demeure lui inspirait une sécurité suffisante pour ne pas menacer la vie de Princesses en fuite. Tous les châteaux vides ne pouvaient pas se targuer d'un tel appel à la sérénité en pleine nuit. 
Distraitement, Gerold passa une main dans ses cheveux en ramenant quelques mèches désordonnées vers son front, sentant bien que le travail et l'heure avancée avaient laissé des libertés tant dans son langage que dans son apparence. Cependant, "à couvert de la nuit" n'était pas une expression pour rien. Là où le soleil ajoutait une épaisseur factice aux apparences, la lune paraissait retirer ce lustre et les gens retrouvaient un certain naturel. C'était stupide, il avait l'air d'un corbeau et elle était en chemise de nuit.  
« Est-ce que je peux vous proposer quelque chose à boire, ou à manger ?... » 
Brièvement, il se demanda ce qui avait pu la garder éveillée ainsi. Au fond de lui, il savait que ce qui l'empêchait de se coucher n'avait qu'un partiel rapport à son acharnement au labeur. Une inquiétude constante le rendait toujours plus efficace, toujours plus méticuleux, mais un peu plus nerveux et épuisé cheque jour. L'on prêtait peu de préoccupations à la noblesse, qui avait de quoi se sustenter et échapper au besoin plus facilement que la plèbe commune. Ce qui les empêchait de dormir n'avait en effet souvent rien avoir avec la faim ou la pauvreté, mais il y avait des malheurs qui atteignait chaque cœur de la même façon. Le chagrin d'une perte, la frustration de la solitude, la colère de l'incompréhension, la déperdition, l'absence. Malgré les rumeurs, à aucun moment il ne s'était figuré qu'une noble famille puisse être le parangon du bonheur, et encore moins celle des Targaryen. Même les nouvelles du bonheur familial de sa sœur le rendaient suspicieux, méfiant. Ses parents n'avaient pas exactement été à l'image d'un couple particulièrement enviable, quand bien même sa mère avait été commodément féconde. Chacun des Grafton avait mille raisons de fuir dans l'obscurité de la nuit, parcourir le labyrinthe de leur énorme maison ; et lorsqu'on se croisait, c'était sans questions.  
Une simple soif, une simple faim ? Ou bien son mari ? Son enfant mort ? les intrigues de la cour ? Les implacables chaines du pouvoir ? Les contraintes de la royauté ? Cette rencontre était une mystérieuse fissure ; une double fissure. Car s'il lui supposait une vulnérabilité apparente dans cette errance nocturne, la jeune Princesse pouvait conclure la même chose à son égard. Et la ligne était là, dans le silence de ce qu'on ne demandait pas encore.  
« Ou bien souhaitez-vous une autre forme de... distraction ? Poursuivit-il en faisant la moue. Peut-être parce qu'elle a été édifiée par une succession d'insomniaques, cette maison sait occuper ceux qui veillent. A commencer par la bibliothèque. » 
Gerold s'inclina légèrement en signe de complaisance. De sa réponse allait dépend l'opinion qu'il allait se faire, ce qui n'était pas toujours un calcul, mais plutôt une curiosité. Seulement, il lui laissa tout de même cette échappatoire indulgente, et qui valait plus lorsqu'elle était offerte que demandée :
« A moins, évidemment, que vous préfèreriez que je vous raccompagne, Princesse. » 
Margaery Targaryen
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Les insomnies étaient légions depuis la perte de Gaemon : le souvenir de son enfant, de ce qu'il aurait pu devenir, hantait ses rêves et rendait les matins compliqués. Aux premiers jours de son retour à Hautjardin, le mestre avait du lui donner du lait de pavot pour, comme il aimait le dire, soigner son esprit. Margaery avait pensé que le sommeil, induit par la substance ajouté à sa tisane du soir, la plongerait dans un sommeil sans rêve. Ce ne fut pas le cas. Tant malmenée par ses songes que dissuadée par son entourage, elle mit rapidement fin à cette alternative qui, si elle avait comblé quelques cernes, finirait par lui causer plus de tourments que de bienfaits. C'était dans cet optique qu'elle avait commencé des promenades nocturnes, commençant ses nuits dans la chaleur d'un lit pour les finir dans l'inconfort d'un fauteuil, un livre sur les genoux. Elle se revoyait, enfant, auprès de Willos dans les jardins luxuriants de la demeure Tyrell puis, plus âgée, discutant de quelques romans scandaleux avec Daena avant que la présence de sa grand-mère la renvoie à ses études. Dieux qu'elle avait aimé lire avant que grand chamboulement de la valse des alliances. Un bonheur retrouvé tandis qu'elle trouvait refuge dans des histoires épiques ou dans des recueils historiques : que ce soit la fantaisie d'une légende ou la sécurité et la stabilité de l'Histoire de Westeros, Margaery s'usait les yeux autant qu'elle usait de bougies mais son statut de princesse la tenait à l'écart des remarques à ce sujet. Elle n'avait que rarement croisé d'autre personnes dans ses déambulations nocturnes : quelques chevaliers décuvant d'un banquet, quelques domestiques s'affairant à garder le feu vif dans la chambre du maître de maison ou des amoureux anonymes pensant qu'elle ne les voyait pas, était un lot quotidien que ce soit au Donjon Rouge ou ailleurs et elle ne pensait pas tomber sur une autre victime de la privation de sommeil.  Lord Gerold était un homme intriguant : elle ne l'aurait pas défini comme beau, bien qu'il ait indubitablement du charme, et sa présence dans les couloirs, à une heure si tardive, le rendait encore plus intéressant à ses yeux. Se gardant de mentionner ses propres soucis, Margaery préférait éviter la question de sa propre personne : elle ne voulait pas se plaindre, elle qui avait la chance d'avoir épousé l'homme qu'elle voulait, de vivre dans la plus grande cour des Sept Couronnes, d'être promise à une brillante destinée. Non, elle ne pouvait se plaindre. Elle ne voulait se plaindre non plus. Outre le fait que Lord Grafton serait, un jour, son vassal, comment pourrait-il comprendre ce qui la maintenait éveillé ? Que penserait-il de ce couple de conte de fée qui, dans l'intimité de leur chambre, étaient agités de leurs propres démons ? C'était des choses bien trop intimes, bien trop sensibles pour être offerte en confidence à un quasi inconnu. Sans compter que la perte de son enfant n'était, si elle en croyait sa grand-mère, qu'un drame passager : elle était jeune, elle aurait d'autres enfants ... Quelle image offrirait-elle si elle confiait la douleur qui avait été sienne ce jour là et tous les suivants ? Que penserait-il de sa colère contre Aegon pendant plusieurs lunes, des pensées noires qui l'habitait, elle, la princesse des fleurs qui affichait depuis toujours un sourire si heureux ?

Pendant un instant, le bref instant où la surprise l'avait emporté sur le reste, elle s'était revue, enfant prise en faute, s'attendant presque à ce que les paroles peu civilisée soit de nouveau prononcées et cette fois à sa pleine destination. Il n'en fut rien. De jour comme de nuit, dans l'étiquette rythmée de politesse comme dans l'étrangeté d'une rencontre nocturne, il gardait ce même ton avec lequel il lui avait adressé la bienvenue à son arrivée. Une part d'elle se sentie légèrement coupable d'avoir imaginer autre chose mais elle laissa un rire amusé traverser ses lèvres tandis qu'il faisait remarquer les couloirs désert du reste de la demeure. Face à ses questions, Margaery s'empourpra de gêne bafouillant quelques mots incompréhensible tout en secouant la tête, ne se calmant qu'à la proposition qu'il lui fit. Elle prit un moment pour y réfléchir.  « Oh ! Je ... Je m'en voudrais de vous retenir si vous regagniez vos appartements. » dit-elle d'une petite voix, la princesse s'effritant face à la demoiselle qu'elle était. La fatigue de la journée autant que celle du voyage, la manière dont elle se sentait encore barbouillé depuis la fièvre qui l'avait tenu alité à Rougefort, la légère appréhension de ce lieu qu'elle ne connaissait pas laissait entrapercevoir la personnalité la plus sincère derrière le masque de sourire et de bonne humeur, d'aisance et de confiance qu'elle arborait depuis toujours, forgé par Olenna Tyrell et porté dès que ses mèches brunes s'enroulaient autour de sa tiare. « Je suis navrée, je fais une bien piètre invitée. » confessa-t-elle avec un rire gêné, ignorant où poser son regard. Si sa grand-mère était là, nul doute qu'elle se ferait sermonner pour s'être laissé impressionner, et sans doute aurait-elle droit à un énième rappel de ce que le culot avait offert à la Reine des Epines dans sa jeunesse. « Bien ... Hum ... Je serai plus qu'heureuse de voir votre bibliothèque mais uniquement si vous m'assurez que vous êtes vous aussi victime d'insomnie et non forcé par un quelconque sens du devoir. » dit-elle, posant malgré tout la condition qui lui permettrait d'effacer le sentiment de culpabilité qu'elle ressentait à l'imaginer rester là par simple politesse. Hésitant un instant à retourner à sa chambre, elle songea que cette rencontre était une opportunité unique de voir qui se cachait derrière le masque du seigneur de Goëville.

Tandis qu'elle suivait les pas de Lord Gerold, adaptant sa foulée au rythme de ce dernier, elle sentit le poids du silence et décida de le briser avec précaution. « J'ai eu la chance de lire beaucoup de chose sur l'histoire de votre maison mais je n'aurai jamais pensé avoir la chance de voir Goëville un jour, de mes propres yeux. » C'était réel : si elle avait épousé un seigneur bieffois ou le frère, trop temporairement héritier, de Lord Stannis, elle n'aurait sans doute jamais vu de terres plus au nord que Vieux Rouvre alors Goëville, cela semblait impensable ! La part romantique de la jouvencelle qui demeurait en elle s'interrogeait sur ce que sa vie aurait été si elle était devenue Lady Rowan, si sa grand-mère avait n'avait pas forcé la fin de leur romance. Aurait-elle rencontré Aegon ? Aurait-elle aimé Aegon ? Andrew aurait-il changé de la savoir à lui ? C'était le genre de question qui la plongeait dans une étrange nostalgie bien qu'elle n'ai aucun regret sur ses choix et la vie qu'elle menait à présent. Echappant au flot de ses pensées, Margaery se tourna vers Lord Gerold. « Mon seul regret est de savoir notre départ bien trop proche pour que je puisse en voir davantage : j'espérais pouvoir me rendre au matristère de Maris mais je crains que le temps ne me manque. » dit-elle d'un ton navré. Si le départ prématuré de la demeure de Lady Arryn aurait pu permettre plus de liberté au couple -il lui semblait d'ailleurs qu'Aegon aurait aimé se rendre à Roches-aux-Runes pour y voir sa soeur- sa maladie les avaient gardé bien trop longtemps à Rougefort, bousculant une fois de plus leur emploi du temps. Il n'était donc pas prévu qu'il demeure plus longtemps à Goëville que ce qui avait été planifié au départ et bien que Margaery eut tenter de négocier une ou deux journées supplémentaires dans l'intimité de sa chambre, Aegon lui avait rappelé que les familles de la Baie de la Néra les attendait également.

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« Ils ont un problème de boisson tous les deux, fauchés comme les blés, ils battent leurs femmes, boivent comme des trous, bousillent leur vie. Pas étonnant que j'aie le béguin, mon petit chéri, quand les produits locaux sont de si mauvaise qualité on aime ce qui vient de l'étranger »* lui avait jadis susurré une opulente charmeuse méridionale, prélassée dans une orangerie baignée par la savoureuse lumière d'un après-midi tiédi. La discussion avait été étrange, comme toutes celles que l'on entretenait avec une femme dite de petite vertu. Elle était venue de Dorne comme une saison, avec les aléas du temps. Elle avait trouvé quelque chose à Goëville qu'elle n'avait pas trouvé chez soi et Gerold n'avait alors pas été en mesure de le comprendre. Aujourd'hui, il lui apparaissait que tous ces éloignements étaient de petites fuites. On ne demeurait pas là où on n'était pas bien, fut-ce un pays, une ville, une maison ou simplement une chambre. Il y avait toujours une raison pour laquelle on était loin de chez soi, loin de là où on devrait être. Le couvert de la nuit ajoutait à cette fuite son vernis de charme silencieux.  
Gerold observait la Princesse ; elle avait pour caractère ce qu'il appréciait chez autrui comme qualité, mais qui lui était tout autant préjudiciable : la réserve. Par reflet, il aimait ce qui lui ressemblait et on ne pouvait pas décrire le Seigneur de Goëville comme un personnage particulièrement extraverti, mais il s'agissait d'un trait qui lui donnait du fil à retordre. Les gens qui ne disaient pas grand-chose étaient difficiles à cerner et à manipuler. Non que tel fut son dessein à chaque interaction, mais il s'agissait d'une éternelle option, et tout détail en sa possession était toujours examiné sous le prisme de l'intérêt et de l'utilité. Mais contrairement à une conversation courtoise et auréolée par la lumière du jour, où les lapsus révélateurs étaient jugés comme un manque de jugement fortuit, la nuit paraissait être ce que les édifices religieux étaient aux exilés : un refuge. Et pourtant, l'intimité était propice aux confidences et le Grafton devint instantanément tiraillé entre l'opportunité d'en savoir plus et la courtoisie de garder ce refuge intact. Même s'il savait pertinemment que cela pouvait lui servir, comme tout homme ayant été habitué à voir ses faiblesses exploitées par les personnes lui étant le plus proches, son intérêt n'était pas tant mal intentionné que simplement motivé par l'envie. Il voulait savoir ; depuis la raison de la couleur des fraises jusqu'aux aléas de la vie d'une Princesse.
Elle paraissait vaguement ingénue et pourtant, à plus d'un égard elle avait davantage d'expérience que lui, et il ne lui viendrait pas à l'idée de sous-estimer la descendante d'une maison réputée pour sa longévité ; une qualité qui ne s'acquérait pas par ignorance. Quoi que, deux colombes pouvaient bien se perdre dans ce troupeau de dragons. Pourtant, il ne pouvait s'empêcher de voir un soupçon d'innocence dans le carillon de ces rires nerveux et dans la gêne qui montait aux joues et empourprait une bouche incertaine. Cependant, la sincérité était une denrée rare et une promesse pas toujours tenue, mais il pensait avoir vu suffisamment de minauderies et de lèvres fardées pour reconnaitre une contrefaçon. A vrai dire Gerold était un peu surpris de faire un tel effet à la Princesse, ayant pris pour acquis que le pouvoir et l'influence allaient en cascade, et que la pierre du bas devait nécessairement déférence à la pierre du haut. Mais le reflet du sinistre envahissait ses joues comme n'importe quelle jeune fille impressionnée. Cela faisait un moment qu'il n'avait pas vu une personne, pêche ou porcelaine, rougir aussi substantiellement. Une disposition qui avait tendance à affliger comme une infirmité bien plus inconvenante qu’aucun des actes qui pouvaient la produire. Un léger sourire compatissant vint ourler le coin de ses lèvres, et il répondit doucement :  
« Et je ne suis pas le meilleur des hôtes ; nous serons donc deux. »
Dangereux de se mettre au même niveau que la royauté, non ? De se mettre au niveau que quiconque, d'ailleurs. Mais Gerold le savait parfaitement, que la plus pure sincérité, la plus méfiante ne s'acquérait que lorsqu'on acceptait de donner quelque chose d'une valeur équivalente. Pour recevoir, il fallait offrir. Laisser un petit bout de soi, de sa vulnérabilité, exposé à l'ardeur de la curiosité. Puis, il se savait être illisible et la jeune fille avait déjà bien assez perdu ses moyens devant le mur de son impassibilité. Lorsque la Princesse accepta de découvrir la bibliothèque, sa dernière remarque ramena le visage de Gerold à un flottement inexpressif. Avec beaucoup d'égard, elle lui avait rappelé sa propre condition et d'une voix blanche, sans reproche ni défiance, il répondit :  
« Connait-on seulement autre chose que le sens du devoir qu'éprouvent à notre égard les gens qui nous entourent ? Ces yeux s'étaient immobilisés un instant, avant de s'adoucir et de retrouver leur luisante netteté : A quelques occasions, le devoir et le plaisir s'épousent, Princesse. »
En d'autres circonstances, il n'en aurait pas parlé, mais les ténèbres et l'embarras de la jeune fille lui inspiraient de la souplesse. Malgré toute son admiration, Marq était probablement la seule personne à lui offrir une opinion objective, ce qui la rendait d'autant plus précieuse. Son père avait été trop rancunier ; sa mère et sa sœur, l'une trop dévouée et l'autre trop farouche, pour que Gerold daigne leur accorder une absolue confiance.  
Il avait pris les devants, déployant son pas de velours sur le pavé de la demeure, qu'il préférait sans échos. Le silence ne le dérangeait guère, mais certains y éprouvaient un vertige, meublant le vide par des propos communs. Enfin, c'était ce qu'il avait tendance à se dire à force d'entendre d'inutiles discours, mais la Princesse paraissait tendrement sincère, quoiqu'étrangement maladroite ; l'obscurité transformait les gens.
 
« Et du coup, ce que vous avez vu est-il à la hauteur de ce que vous avez lu ? »
Une question piège sans méchanceté qu'il avait posée avec un fond de facétie ; on s'ennuyait bien moins lorsqu'il fallait réfléchir un peu là où d'ordinaire la courtoisie imposait une forme de répétition décérébrée.  
« Du reste, le matristère ne devrait pas bouger et vous pouvez y voir une raison de vouloir revenir. Gardez cette visite pour la prochaine fois, comme une promesse de votre retour... »
De douces paroles pour réconforter une vie qui ne s'appartenait plus vraiment. Son quotidien devait être rythmé aussi sûrement que la lune se succédait au soleil, et avec la même régularité. Depuis le temps, Gerold avait associé cet état émotionnel à une couleur neutre. Un beige. Employé comme une sorte de toile de fond et fait pour se marier avec tous les styles de personnalité puisque, par définition, une couleur neutre ne contenait pas ou peu de couleur. Une position élevée prédisposait à devenir une tonalité quelconque : elle permettait de s'accorder avec tout le monde, de ne pas chatoyer davantage qu'un autre, de n'éclipser personne. Elle permettait d'accueillir sans agresser, de se plier sans froisser. Un état de lividité totale. Une personnalité incolore. Une absence de sentiments pour subir les obligations du titre.
Selon le dernier catalogue produit, la bibliothèque abritait 19 841 volumes. Diverses cultures et langues s'y croisaient sur plusieurs siècles. Chaque domestique avait l'occasion d'y emprunter des ouvrages, ce qui expliquait la présence d'un lourd registre que chacun devait scrupuleusement remplir, sous peine d'en être interdit. La petite lumière ne parvenait à éclairer que les premiers étages, mais Gerold savait que la hauteur s'élevait à plusieurs dizaines de mètres au-dessus de leur tête. Orgueil de la demeure des Grafton, un endroit dédaigné par le précédent propriétaire, feu Gerold. Son père ne trouvait rien de si déprimant que ces œuvres complètes d’auteurs complètement oubliés ; mais il ne lui déplaisait pas qu’un visiteur de passage exprimât son admiration pour l’aménagement de l’endroit : ses hauts rayons et ses cabinets trapus, ses tableaux sombres et ses bustes pâles, ses dix chaises en noyer sculpté, ses deux tables monumentales aux incrustations d’ébène. Dans l’oblique faisceau d’un rayon studieux un Atlas botanique ouvert sur un pupitre montrait une planche figurant des orchidées. Ces feuillets préliminaires offraient pour le Mestre un médiocre intérêt et les cinquante dernières pages étaient demeurées vierges ; mais la partie centrale, caractérisée par une diminution sensible du nombre des spécimens, recelait un vrai petit mélodrame dont les spectres des fleurs défuntes étaient les interprètes. Les végétaux étaient collés sur les pages de droite tandis qu'en regard figuraient les commentaires d'ancêtres disparus.
« Sa taille m'a longuement empêché de dormir, dit le propriétaire en parcourant les longs rayons du regard. Pis encore parce qu'on a essayé de contrôler ce que je pouvais ou ne pouvais pas lire ; j'étais obligé de tout signaler à mon mentor dans un esprit de... chasteté spirituelle. Inspection quelque peu avilissante et plutôt insupportable. Enfin, j'imagine que vous avez dû en connaître, des interdits ? »
Ce disant, il s'éloigna pour allumer de sa chandelle quelques bougies de luminaires plus imposants qui révélèrent par halos successifs l'étendue réelle de la bibliothèque.
« Si vous désirez prendre un ouvrage avec vous pour votre voyage, prévenez-moi simplement. N'hésitez pas, je ne gage pas que le reste de votre voyage offre une pareille collection. Et vous me le rendrez la prochaine fois. »
Il parût hésiter pendant un instant, mais l'embarras de la jeune femme lui faisait craindre une timidité mal placée.
« Avez-vous besoin d'un Mestre ? En tout discrétion, évidemment. »

*Salman Rushdie, Les versets sataniques.

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Un sourire amusé se dessina que le visage de la jeune fille tandis qu'à sa remarque, il opposait sa propre qualité d'hôte. L'étiquette aurait voulu qu'elle démente, affirmant combien elle était bien reçue en cette cité, et qu'il s'agissait surement de l'une des meilleures visites de son voyage, mais quelque chose lui disait que ce n'était pas le genre de chose qui flatterait Gerold Grafton. Au contraire : en quelques phrases, il avait démontré avoir plus d'esprit que bon nombre de ses compatriotes du Bief et il serait insultant de se perdre en réflexions polies s'il n'était pas enclin à les recevoir. De plus, quelque soit son avis, la question n'était réellement sur les talents de l'un ou de l'autre à se complaire dans son rôle. Voilà bien longtemps qu'elle n'avait trouvé autant d'attrait à converser avec quelqu'un ! Depuis qu'elle était princesse, la plupart des nobles qui constituait son entourage n'avaient à coeur de lui opposer débat quant à Rhaenys, Margaery avait définitivement tiré un trait sur l'idée qu'elles puissent s'entendre un jour. « Quel dommage que le vôtre soit à jamais lié à Goëville, mon seigneur. Votre présence à la Cour aurait sans doute offert des discussions bien plus passionnante que celles que ces dames de la Capitale. »  finit-elle par dire tandis qu'il philosophait légèrement sur les concepts de devoir et de plaisir. Pouvait-elle affirmer que sa position n'était que l'aboutissement ultime de cette rencontre heureuse ? Le devoir de la fille envers sa famille, celui de l'épouse envers son mari mêlé au plaisir que son rang avait su lui procurer, à celui qu'elle pouvait éprouvait face à l'exercice de son emprise sur les coeurs des gens ? Un regard glissa sur le côté pour regarder la réaction du valois à ses mots. Il était certain que deviser ainsi plus souvent aiguiserait ses talents et stimulerait son potentiel ... Quel dommage qu'il soit seigneur, et assez consciencieux pour gérer lui même ses affaires.

Un hochement de tête accompagna la question du Grafton : sortir de l'étouffante Citadelle de Maegor était une bénédiction et quitter la prévenance oppressante de Hautjardin avait été bien plus bénéfique qu'elle ne l'aurait pensé. Depuis quelques temps, Margaery acceptait de nouveau de partager le lit de son époux, ce voyage leur permettait de retrouver la complicité perdue avec la disparition d'Aegon pendant l'épidémie et malmenée par la mort de leur premier enfant. « Je crois que rien n'aurait pu m'empêcher d'apprécier la visite. » assura la jeune femme avec un sourire qui était néanmoins teinté d'une légère tristesse. Elle se demandait toujours si ce projet était réellement une occasion de rencontrer la noblesse de Westeros et les sujets du continent en vue du brillant avenir qui les attendaient ou si ce n'était pas une tentative, de la part du prince, de retarder leur retour à la Cour. La grossesse de la reine avait été particulièrement difficile à vivre pour Margaery après son propre accouchement dramatique et il n'avait pas été plus simple de se remettre de cette perte alors que Leonette rayonnait avec sa petite Mina dans les bras et que tout Hautjardin semblait changé pour accueillir la nouvelle génération de Tyrell. Elle qui avait alors le sentiment de ne plus avoir de lieu ou trouver la paix avait été surprise de l'hospitalité des gens et de la bienveillance de ses hôtes. Et Goëville ne faisait exception. « Mais je dois avouer que je n'ai jamais rien vu qui ressemble de près ou de loin à Goëville. Même Villevieille me semble bien différente. Avez-vous déjà été dans le Bief ? » demanda Margaery avec curiosité. La visite au matristère n'était pas qu'une histoire de conviction religieuse, c'était aussi le besoin de recevoir une bénédiction de la Mère afin de porter à nouveau la vie. Une bénédiction qu'elle n'avait eut l'opportunité de demander à Villeville faute de temps. Elle poursuivit d'un ton légèrement ironique, appuyée par une gestuelle équivoque. « C'est très vert, très "propre", un jardin à grande échelle où même la nature doit se plier au dictat de la perfection et de l'esthétique. Dans le Val, il existe une certaine forme de spontanéité dans la manière dont s'organiser les châteaux et les paysages : même l'air me semble plus indomptable que la brise douce de ma région natale. » C'était à présent qu'elle se rendait compte de la semi-liberté accordé par les Bieffois : vous pouviez vous livrer à d'innocent jeux de mots et d'amour mais uniquement si vous étiez parfaitement peigné, habillé, répondant à des codes de perfection légèrement différent. Un vent de jeunesse audacieuse et aventurière soufflait sur ceux beaux et jeunes gens, vent réactionnaire d'une tradition pesante et stricte, mais la contrepartie était d'une lourdeur qu'on ne percevait que dans le poids des étoffes et des bijoux que chacun se devaient de porter. « Prenez garde, Lord Gerold, je risquerais de prendre cette invitation au pied de la lettre.  » pouffa-t-elle, une main devant ses lèvres. Elle s'imaginait revenir bien qu'elle n'avait idée de quand celui lui serait possible : peut être lorsque viendrait le temps du mariage de Robb Stark ? Ou si sa route la conduisait à passer par la cité ? Oui, elle se voyait déjà profiter à nouveau de l'air iodé du Val, s'essayer à la chasse au faucon dans ce paysage si différent de chez elle, et se forger une réputation en dehors des murs de la Capitale. Cela servirait forcément Aegon et son règne futur.

Elle était certaine qu'elle n'aurait jamais trouvé l'endroit sans y être amené, songea la brune tandis que le dédale obscure de pierre et de chandelle laissait place à des rayonnages de cuirs et de parchemin à faire pâlir Villevieille d'envie. Demeurant auprès du Grafton, Margaery posa un regard tout particulier sur le grimoire qu'il lui présentait, admirant la lueur des bougies dansant sur le cuir de la couverture autant que l'attrait de passion dans la voix de son hôte. « C'est dans les récits les mieux cachés que l'on apprend le plus de choses. » dit-elle, confiant subtilement qu'elle même avait cédé à la curiosité des ouvrages interdits : des récits destinés à un public plus âgé, faisant état de ce qui se passait entre un homme et une femme parfois de manière fort originale, Margaery était aussi tomber sur des ouvrages plus controversés en matière de science ou de théologie : ce n'était pas pour rien qu'elle acceptait le monothéisme d'Aegon bien qu'elle, forgée par des années et des années d'éducation, ne parvenait à se détachée de l'étoile à Sept Branches. Les mains jointes dans son dos, la princesse initia un mouvement de balancier légers qui faisait onduler ses longs cheveux bruns, son regard s'esquivant dans un vide connu d'elle seule. « On pourrait croire que la présence de la Citadelle à quelques jours de cheval offrirait à Hautjardin une ouverture toute particulière sur le monde et l'évolution du savoir mais je crains que le Bief ne souffre encore de la main mise que la Foi a pu avoir avant d'installer son siège à Port-Réal. Certains mestres même se refusent à aborder quelques sujets qui pourrait pourtant, à mon humble avis, permettra des avancées majeures dans bien des aspects de la vie quotidienne. » confia la jeune femme. C'était la première fois qu'elle abordait ce genre de sujet, qui pourrait lui couter cher s'il parvenait aux oreilles des mauvaises personnes. Bien sur, dans les premiers temps de sa relation avec Aegon, ils avaient légèrement deviser de ce genre de chose, mais la routine de leur devoir princier ne leur laissait, désormais, guère plus de temps pour cela. Elle espérait qu'à leur retour à Port-Réal, ces conversations reviennent : il était le futur roi, elle était sa future reine, et elle ambitionnait que leur règne soit aussi prospère et grandiose que celui de Jahaerys et Alysanne. Ses sourcils se levèrent tandis que ses yeux se braquèrent immédiatement sur le brun : était-il sérieux en lui proposant pareille chose ? « Votre confiance m'honore, Lord Gerold, sachez que je prendrais grand soin de l'ouvrage que vous me permettrez de vous emprunter. » assura-t-elle, redevenue la jeune fille de dix huit ans qu'elle était.

Un rire nerveux s'échappa tandis que ses rougeurs n'étaient, de toute évidence, pas passés inaperçues. « Oh je vous remercie mais ce ne sera pas la peine, j'imagine qu'il s'agit la des reste de mon ... Indisposition. Le mestre de Rougefort m'a annoncé qu'il me faudrait prendre un peu de repos, malheureusement, mon esprit ne semble guère enclin à l'écouter. » expliqua la princesse : cela n'expliquait guère les insomnies mais elle pouvait cacher le reste dans les conséquences que la maladie avait eut sur son corps et son âme. Elle était tout juste remise lorsqu'elle avait quitté Rougefort et malgré la proposition de la famille de rester un peu plus, elle même avait annoncé qu'ils ne pouvaient abusé de l'hospitalité qui leur avait été faite et rappeler qu'ils étaient attendus. Si le mestre désapprouvait un départ précipité, il n'eut réellement son mot à dire et Margaery se remémora avec un brin d'humour, le regard plein des remontrances qu'il s'interdisait de lui faire. « Ce doit être la part anticonformiste de ma personne. Une vraie rebelle, voyez vous cela. » plaisanta la jeune fille quelque peu gênée que le valois puisse la considéré comme indisposée. Elle décida de dévier la conversation, reposant les yeux sur le précieux manuscrit présenté par Lord Gerold. « Vous êtes vous déjà essayé à mettre en pratique vos lectures ? »

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Il avait accepté son compliment avec un sourire en coin, mais avec aigreur ; il se figurait que la Princesse avait raison. Son destin était lié à Goëville et ce fait était tout autant une bénédiction qu'un désastre. Malgré ses désirs, il n'avait que peu voyagé, et toutes les cultures qu'il avait découvertes furent aperçues à travers la fenêtre de leur port. A son grand damne, il ne connaissait rien ; rien de plus qui fut en dehors de l'horizon de ce petit monde. Il y avait eu certes les tournois et les mariages, mais c'était comme prétendre connaitre le goût d'un aliment dont on n'avait fait que senti l'odeur. Alors, il se doutait bien que cette expédition royale était comme arpenter un long couloir : on ne voyait que ce qu'on voulait bien nous montrer. Et même aujourd'hui, alors qu'il avait cru être reclus selon la volonté de son père, devenir Seigneur ne lui avait pas rendu sa liberté. Du moins, pas celle qu'il aurait souhaité. Malgré tout, l'on était toujours prisonnier d'une contrainte plus grande que soi : le carcan de la société.
Il voulut répondre autre chose ; une remarque spirituelle sur les dames de la Capitale. Mais son esprit avait buté sur le fait qu'on n'aurait jamais laissé aucune femme semblable au Lord Gerold approcher la jeune Princesse d'aussi près, sans parler de Lord Gerold lui-même : ils n'étaient même pas censés déambuler ainsi dans les couloirs d'un château endormi. Il se tut donc, préservant la candeur de la jeune femme pour son propre bien à lui. Instinctivement, il sentit que cette crainte était réelle parce qu'il savait parfaitement quel genre d'homme il était, capable d'ignorer l'inconvenance, même lorsque le pressentiment d'une tentation lui parvenait. La curiosité était ce qui rendait cette inconvenance séduisante. Résolument, il ne daigna pas éveiller la jeune Princesse à l'ambiguïté de cette rencontre, qui ne cessait de s'aggraver à chaque seconde qu'ils consentaient à passer l'un avec l'autre. Quoi qu'en général peu intéressé, le génie masculin s'exacerbait avec le sentiment d'une faille dans la distance de leurs positions respectives. Une future Reine à portée de mains.
Les femmes. Gerold n'y prêtait qu'un intérêt très limité. A tout le monde, par ailleurs. Simplement, son devoir l'appelait à se confronter davantage aux hommes. Ce n'était pas par manque de succès - son héritage s'était occupé de lui attirer les intérêts des dames les plus noblement vénales -, mais plutôt par une générale absence de cohésion. Pendant un temps, il s'était accommodé à l'insensé soulagement de ses ardeurs charnelles, mais cet assouvissement absurde ne pouvait être une fin en soi, ou plutôt, il était une fin comme l'était la fin d'une impasse, puisqu'il n'était pas partagé, puisqu'il s'enveloppait dans un mystère sordide, puisqu'il ne saurait jamais se fondre par la suite dans toutes autres délices. Cette mécanique sans regards ni passion, pourtant encouragée chez son sexe, l'avait encore plus éloigné des femmes que le jour où sa bouche avait rencontré, bien par hasard, dans le dédale d'un jardin, une parcelle de chair féminine l'été de ses quatorze ans. Cependant, indéniablement, il demeurait en lui un lieu commun : la compétition. Une compétition que la Princesse avait déjà gagnée en s'attirant les faveurs d'un membre de la famille Royale. Et Gerold se disait que l'union n'était ni le fruit d'un hasard, ni à l'origine d'un amour sincère. L'amour était peut-être venu par la suite, mais comme toute chasse à la noblesse, la préméditation fut dans les mains de sa grand-mère une arme fatale. Elle était donc victorieuse, et d'autant plus convoitée à ce jour.  
« J'ai participé au tournoi de Corcolinne... une bien longue distance pour un premier tournoi, finit-il par répondre, leur conversation ayant enfin cessé de frôler l'impertinence, seulement pour mieux y revenir : Mais je ne suis pas allé à Vieilleville, ce qui est une honte, compte tenu de ce blason et de nos positions géographiques respectives, qui font presque de nous des miroirs l'un de l'autre, avait-il dit en lui jetant un regard en biais. Un miroir inversé. Comme vous dites, Goëville est agreste où Vieilleville est cultivée, nous sommes dessinés par la tempête et taillés dans la pierre, alors que vous êtes enlacés par les fleurs et gravés par le marbre. Nous brûlons d'un feu différent... »
Les Premiers Hommes avaient résolument un attrait étrange pour les tours en feu. D'aucun auraient traité Goëville de sauvage en comparaison de son reflet Bieffois, mais les carcans étaient partout ; leur nature était simplement différente. Cependant, cette nature dépravée qui soumettait les hommes qui y vivaient devait impressionner ceux habitués à la soumission totale d'un paysage clémente. Et voilà la jeune Margaery loin ; loin de la civilité, loin de sa famille, loin même de son époux, s'enfonçant dans les ombres d'une terre insoumise.  
« Prenez garde, Lord Gerold, je risquerais de prendre cette invitation au pied de la lettre.
- Risquez donc » lui répondit-il avec un sérieux empreint de malice.  
Malgré un début plutôt déplorable, naturellement, leur entente paraissait se détendre sous l'étreinte d'une nuit aveugle. En pénétrant dans la bibliothèque, Gerold avait observé la Princesse à la dérobée, tout aussi satisfait que son père avait jadis pu l'être en voyant les gens découvrir ce trésor dont il n'était pas peu fier. Grandiose et pourtant intimiste, cette pièce se prêtait encore mieux aux après-midis pluvieux, lorsque la mer roulait son propre tonnerre et que le ciel baignait l'atmosphère de sa luminosité d'un gris diffus. La nuit, cet endroit paraissait sans fin et jamais la lumière des bougies n'en atteignait le bout. Comme développée dans cet épais velours, la Princesse resta avec lui pour chuchoter sur les interdits, alors qu'ils en frôlaient un.  
« Attention Votre Majesté, on pourrait vous accuser de controverse ou de sacrilège... » Commenta-t-il la voix grave, mais avec un léger sourire en coin.  
Par-là, il soulignait qu'elle en disait plus que ce qu'elle aurait osé en temps normal, et qu'il l'acceptait, devenant complice de cet outrage destiné à n'être connu que d'eux. Certaines jeunes femmes bien élevées se laissaient aller aux confidences par provocation, mais il avait l'impression que la Princesse était, comme toute personnalité à laquelle on avait refusé sa propre expression, en train de se livrer, trouvant inconsciemment en son interlocuteur un écho semblable, quelque chose qui appelait à la confiance. Gerold le comprenait pour avoir cherché cette franchise, mais que très rarement trouvé. Une fleur déjà difficile à dénicher, et encore plus délicate à cultiver...  
« Je gage que quelqu'un qui choisit la lecture pour soigner son insomnie prends soin des livres. Vous aviez ma confiance bien avant d'entrer ici, votre Majesté. Je vous permets d'emprunter ce que bon vous semble, cependant, je crains qu'il y ait certains ouvrages ici que vos accompagnateurs ne devraient pas voir entre vos mains donc... il fit la moue avant de hausser les sourcils d'un air entendu : si l'un ou l'autre vous tente quand même, vous n'aurez qu'à m'accuser de mauvaise influence ! »
Difficile de croire qu'une future Reine ne pouvait pas lire à sa guise ce qui était parfois interdit au commun des mortels. Et pourtant, ils étaient parfois encore plus restreints dans leurs savoirs et geste que le plus banal des valets. Son visage délicat, lisse et pâle, aux grands yeux réfléchis, s'était illuminé à cette offre comme à un inimaginable honneur et Gerold mesura à travers cette fissure de gratitude démesurée à quel point la Princesse devait manquer de sollicitation. Evidemment, sollicitée, elle l'était, par tout le monde, tout le temps, mais probablement jamais comme elle l'aurait souhaité. A tort peut-être, mais il crut ressentir ici une forme de solitude, si commune aux somnambules et à ceux dont la vie ne leur appartenait plus. La solitude du faux-semblant et des esprits de génie.  
En entendant ses explications, Gerold grimaça doucement, avant de répondre :
« Faut-il vraiment écouter ces Mestres qui nous empêchent de lire ? Pour des gens sensés nous prodiguer leurs savoirs, il est tout de même étrange qu'ils s'attachent à nous en dissimuler certains, vous ne croyez pas ? J'ai l'impression parfois que leur sagesse les emmène dans un endroit confortable de leur esprit où ils tendent à vouloir se prélasser et tout trouble capable de les y déranger est à proscrire. Avez-vous déjà tenté de débattre avec un Mestre ? Ceux qui acceptent sont rares. » Répondit-il d'abord avec ironie, avant de gagner en humeur.  
Le respect inné qui leur était voué était passablement irritant. A tel point que même adulte, Gerold hésitait à porter à la connaissance de ces fameux mestres, de passage ou de profession, l'intitulé de certains ouvrages dissimulés de sa bibliothèque. Mais même sans aller jusque-là, pour des savants, leurs mœurs étaient parfois terriblement étriquées. A tel point que Gerold s'était souvent demandé à quel point il pouvait faire confiance à leur science. Et ce soir en particulier lui rappelait à quel point ces chevaliers de l'esprit connaissaient justement peu l'esprit ; s'ils étaient capables de soigner les corps, les maux de la pensée demeuraient mystérieux et entièrement décorrélés. Ne serait-ce que cette idée était un flagrant délit d'inconduite ! Quel gâchis. Quel secret ! La Princesse et lui se retrouvaient sur ce chemin obscur de la contestation, destinés à cette solitude de la pensée. D'ailleurs, il l'observa un instant, alors qu'elle négligeait son état, à raison, ou pour éviter les questions. La longue chevelure ondulée qui, dans l'ombre paraissait d'un noir rougeâtre uniforme, révélait aux feux des chandeliers des strates alternées d'acajou et d'ambre foncé. Sa question, soudaine, le troubla mais accapara assez son esprit pour qu'il s'y soumette.
« Souvent, oui. Il sourit doucement et regarda les rayonnages en se remémorant tout ce qu'il avait déjà lu et qui lui restait à lire. Il y a un petit livre tout particulièrement, écrit à l'Est il y a très longtemps, au-delà des mers, par un théoricien politique. Un ouvrage qu'il a offert à un dirigeant en cadeau et où il y décrivait, selon lui et d'après les récits des dynasties du passé, comment conserver le pouvoir, qu'il soit héréditaire ou acquis par la force. Je dois dire qu'il m'a été très utile et particulièrement instructif. Plus, probablement, que n'importe quel conseiller ou Mestre. »
Gerold redevint sérieux et un brin hésitant, réfléchissant s'il devait donner suite à sa pensée. Mais la confiance se construisait pas à pas et il savait qu'une occasion pareille de tisser un lien autrement que cordial avec une Princesse ne se représenterait sans doute jamais. Or, ces moments perdus dans les méandres du temps, des parenthèses à l'existence habituelle, étaient ceux qui parfois décidaient de tout.  
« J'en viens à me dire, voyez-vous, dit-il d'un ton égal et lentement incertain, que le problème ne vient pas entièrement de Hautjardin ou du Bief, mais de la Citadelle. Du moins, le problème est survenu le jour où l'orgueil des hommes de savoir leur a autorisé à courber la réalité pour épouser leurs intérêts, alors qu'ils devraient au contraire s'y soumettre. Ha, nous voilà deux terribles rebelles, votre Majesté » plaisanta-t-il avec ce fond de sérieux qui cherchait son chemin.  
Il la considéra un instant, en silence, mettant en perspective cette conversation et lui avoua le fond de sa pensée :
« J'ai remarqué que les mestres n'ont qu'une seule définition du repos. C'est un repos toujours physique. Mais ils oublient qu'on s'épuise parfois à ne rien faire, ou à ne pas assez parler, ni avec les interlocuteurs qu'on aimerait avoir... Avec le temps, la solitude épuise plus qu'un combat, je me trompe ? »
Margaery Targaryen
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Un regard amusé se glissa sur le valois tandis qu'elle songeait qu'il s'agissait là d'un évènement bien dramatique pour la maison Tyrell. Elle n'était qu'une petite fille à l'époque mais elle avait été profondément marqué par l'accident qui avait couté à Willos son rêve d'être un héritier parfait. Ils n'avaient, de toute évidence, pas tous les mêmes souvenirs de ce tournoi. Elle balaya d'un signe de main les paroles de son hôte, ignorant si derrière les termes acerbes qu'il s'infligeait à lui même il y avait un fond de vérité ou juste une tentative de flatterie face à la région natale de son invité. Quoi que cela fut, Margaery ne le considéra pas, n'avaient-il pas passé l'heure des politesse après tout ? « Guère une honte, voyons, je ne suis pas assez chauvine pour considérer le Bief comme le centre du monde. Ceci dit, Villevieille fait l'objet de merveilleuses critiques : quoi qui fasse battre votre coeur, vous trouverez de quoi le contenter. Je vous souhaite d'avoir l'occasion d'y passer. » Les religieux y trouvait le siège ancestral de la Foi, bien que déplacé à Port-Réal peut après le début de la dynastie Targaryen, la cité n'en demeurait pas moins un haut lieu de piété. Les érudits avaient le loisir de se bruler les yeux à la lueur d'une bougie dans la vaste bibliothèque de la Citadelle, du moins c'était ce qu'on avait pu lui en dire, cette dernière n'était, comme bien des endroits d'ailleurs, pas ouverte aux femmes. Les aventuriers apprécieraient la vaste ville dans laquelle il était aisé de se perdre. Quant aux mondains, on ne faisait pas plus noble en ancienne maison que les Hightower dont l'influence sur les Sept Couronnes étaient presque plus importante que celle de la maison Tyrell. Sa chère bonne-maman ne manquait jamais une occasion de rappeler qu'elle avait la chance d'être née avec la beauté d'une rose et le nom des Tyrell mais surtout avec la dignité et l'ingéniosité des Hightower. Quoi qu'elle aimait aussi grogner que cela avait du sauter une génération avec ce franc-parler légendaire qui avait fait sa réputation. « Ceci dit, j'espère que vous ne prenez pas ombrage de ma remarque ? Ma très chère grand-mère a coutume de dire que tout est bien beau dans le Bief mais que ces carrés de pelouse taillés au millimètre près sont d'un ennui mortel. Et je dois reconnaitre qu'elle a bien trop souvent raison : il y a du beau dans la passion et de la poésie dans la nature sauvage de chaque lieu et les dernières années m'ont apprit à apprécier ce qui est, par nature, incontrôlable.» Il y avait quelque chose d'étouffant dans la perfection, quelque chose qui lui rappelait de sombres heures de son existence qu'elle préférait oublier.

Elle fut quelque peu surprise tant par la question que par le ton, soudainement complice et amisé du Grafton. Posant une main pudique sur sa poitrine, elle braqua sur lui de grands yeux ronds, tandis que, battant des cils, elle se donnait des allure de poupée. « Moi ? » dit-elle alors avec un mélange de surprise apeurée et d'innocence naïve avant d'éclater de rire, incapable de maintenir le masque de jouvencelle choquée qu'elle avait tenté de prendre. Voilà bien longtemps qu'elle n'avait pas rit si franchement mais il était évident que derrière l'image de perfection que Hautjardin lui avait bâti, Margaery était tout sauf une oie blanche. Sa septa se serait sans doute étouffé de rage et d'indignation si elle avait sut ce que sa protégée avait pu lire ou expérimenter dans les allées secrètes du labyrinthe de Hautjardin. Néanmoins, elle retrouva son sérieux pour apprécier la confiance qu'il lui témoignait tant en l'autorisant à se trouver en ce lieu que par cette proposition que peu aurait fait, même à une personne de son rang. Un vestige de son rire passé se fit entendre lorsqu'il plaida sa possible mauvaise influence si elle était surprise avec des ouvrages peu recommandable entre les mains. « Voilà une proposition fort secourable. » lui dit-elle, songeant qu'il ignorait combien elle pouvait déjà être une cause perdue sur ce point, bien qu'elle ait toujours eut la bénédiction de sa chère grand-mère pour sortir des sentiers battus. Elle doutait que son père, ou même Willos, eurent approuvé les romans résolument romantiques, voir particulièrement détaillés sur certains aspects, qu'elle pouvait lire mais elle parvenait à se convaincre qu'elle compensait ces lectures pécheresses par les nombreuses bonnes oeuvres et généreuses donations qu'elle pouvait faire. En outre, tous seraient d'accord pour dire que ce n'était pas avec des quantiques et de soporifiques biographies de mestres obscures que l'on parvenait à conserver l'attention des autres. Qu'importe que ce ne soit pas écrit pour les femmes, ou pour les jouvencelles, si c'était écrit, elle se devait de le lire, elle se devait de pouvoir intervenir dans toutes conversations et briller. Telle était la résolution de la née Tyrell, telle était l'éducation alternative offerte par la reine des Epines. Une vision que son hôte semblait partager, si elle en croyait les critiques de moins en moins subtiles faite à l'encontre de la représentation du savoir su Westeros. « Qui fait donc preuve de controverse et de sacrilège à présent ? » dit-elle d'un ton toujours plus amusé, retournant la question qu'il lui avait posé plus tôt. Elle prit cependant un instant pour réfléchir, songeant à son enfance et à ce précepteur en robe dont les anneaux cliquetaient à chaque pas. « Je crois qu'ils sont réticents vis-à-vis de tout ce qui échappe à leur compréhension. En cela tous les mestres ne se valent pas mais tous gardent cette même rigidité d'esprit. » concéda-t-elle cependant, songeant aux différent hommes venus de la Citadelle, pétris d'un savoir longuement étudié et d'une capacité plus ou moins grandes à se remettre en question. On aurait tort de croire que les jeunes mestres étaient plus ouvert que les plus vieux : Margaery avait eut quelques discussions houleuses qui l'avaient mené à un constat : la Citadelle, plus qu'un lieu d'apprentissage, était une fabrique à pensée uniforme qui envoyait ses ouailles à travers le royaume : si un étudiant ne se conformait pas à la manière de réfléchir de la Citadelle alors sans doute son apprentissage serait bien moins agréable que celui d'une brebis docile et obésissante. Elle soupira. « A titre d'exemple ... Mestre Pycelle et moi n'avons pas de très bon rapport alors qu'à Hautjardin, on fermait les yeux sur mes lectures peu conventionnelles. Ceci dit, je me demande s'il n'avait pas comprit qu'avec ou sans son accord, je n'en ferai qu'à ma tête : j'ai toujours eu un don pour pousser mon frère Garlan à faire ce qu'il me plaisait. Y comprit se procurer des livres qui ne sont pas pour les demoiselles bien nées. » La pensée du vieux mestre du Donjon Rouge lui inspirait un profond dégout : Pycelle était de ce genre de personne qui paraissait fragile mais qui ne disait jamais réellement le fond de sa pensée. Quand au regard qu'il posait sur ces dames de compagnie, elle préférait ne pas y penser. A contrario, elle se considérait comme chanceuse d'avoir pu grandir loin de la sévérité d'une éducation réductrice, bien qu'elle doutait que cela fut à l'initiative de l'homme de science. « Enfin, j'imagine qu'il doit bien le regretter a présent ... Je suis l'épouse d'un royal hérétique après tout. » dit-elle avec un cynisme à peine dissimulé. La foi d'Aegon n'était un secret pour personne : on n'entrait pas dans un bucher sans que cela ne fasse le tour du Royaume et il était évident qu'il n'avait plus l'intention de faire semblant d'écouter les préceptes de l'Etoile à Sept Branches. Enième sujet d'opposition avant leur départ du Donjon Rouge, ils avaient fini par trouver un statut quo, un équilibre encore précaire qui ne parvenait à se maintenir que par l'absence totale de discussion sur le sujet : Aegon priait ce qu'il voulait tant qu'il le faisait loin d'elle et tant qu'il n'attendait pas de sa part qu'elle se convertisse à cette étrange monothéisme venu de l'Est. Ceci dit, elle considérait que des deux insomniaques hantant la bibliothèque à une heure fort avancée de la nuit, ce constat la plaçait bien plus haut sur l'échelle de la rébellion.

Elle se laissa un instant de réflexion : il y avait quelque chose de quasi prophétique dans ces mots, comme un écho au vide qu'elle percevait en elle, comme un lumière faite sur sa personne. Ce n'était nullement intentionnel, mais elle songeait qu'elle se trouvait là, à la frontière soudainement évoqué sans même qu'il n'en ait conscience et ce constat lui sembla bien étrange. La solitude. C'était un étrange sentiment que de l'expérimenté lorsque vous étiez perpétuellement entouré, mais c'était réel. Véritable poisson dans l'océan de ce vaste monde, Margaery se sentait soudainement en décalage depuis que la fatalité lui avait arraché son petit garçon en même temps qu'une part de son coeur. Tout ce qui avait été vrai, tout ce qui avait été évident ou même simple était soudainement devenu vide de sens. Les murs toujours bruyant du Donjon Rouge résonnaient d'un silence pesant, l'arrondis du ventre royal de la reine lui rappelait l'absence du sien. Des pensées sombres qui l'avaient suivi jusqu'à Hautjardin et une solitude qu'Aegon n'était parvenu à rompre qu'à grand peine. Dans son esprit embrumé, prisonnier de ronces et d'épines, il était parvenu à la toucher, la ramenant dans le monde des vivants bien malgré elle. Aujourd'hui encore, elle sentait le vide, le point de bascule menaçant de la faire plonger à nouveau. Et dans son équilibre précaire, des conseils plein de bienveillance qui la poussait sans le savoir vers la chute. « Et bien ... Si vous voulez mon avis sur la question, je pense que cette oisiveté forcée est la cause de bien des maux. Le sentiment de solitude, parfois même d'incompréhension, peut faire prendre de terribles décisions. » répondit-elle, empreinte d'une gravité nouvelle. Que savaient-ils de cette impression d'être seul au monde, de cette certitude d'être le seul à voir les choses comme elles étaient réellement ? « Je pense qu'il n'y a rien de pire que d'être prisonnier de soi même sur ordre d'un tiers. » ajouta la jeune femme dont la voix était lourde du poids qui pesait sur sa poitrine tandis que le souvenir des "repos" qu'on lui imposait la hantait encore. N'y avait-il rien de pire que d'être forcé de cohabiter avec ses ruminations ? De passer en boucle la mélodie d'un drame qui ne la quittait jamais ? « Le sang des Hightower coule peut être dans mes veines mais j'ai l'intime conviction que l'absolutisme est ce qui causera notre perte à tous. Pouvons-nous réellement nous reposer sur un seul savoir quand il y a une myriade de chose que ce dernier ne parvient à expliquer ? Est-ce réellement si terrible d'envisager qu'il puisse exister d'autres réalités sans remettre en question la véracité de celle qui nous entoure ? » Elle avait conscience de combien ses mots pouvaient être dangereux s'ils étaient répété à des oreilles mal intentionné. En remettant en cause l'ordre établis, elle pouvait presque être accusée de trahison : car après tout, si l'on remettait en cause le monopole de la foi et celui de la science, combien de temps faudrait-il avant de questionner la légitimité d'un pouvoir tout aussi absolu ? Tout n'était que conjecture, débat philosophique et appel à réflexion. Mais elle doutait que le monde soit prêt à de telle question et elle était presque certaine qu'une telle ouverture ne se ferait sans voir l'apparition de groupe de l'extrême opposé. Des groupes qui avaient déjà existé par le passé à l'image de la Foi Militante et des dérives engendrés par les Fils du Guerrier et les Pauvres Compagnons. « Peut être que ce sont ses question qui nous maintiennent éveillés à une heure si tardive de la nuit ? »

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┗ THE PRINCESS ROSE ┛
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L’on avait tous un fond d’amertume pour l’endroit où l’on était né, parce que comme tant de choses dans la vie, c’était encore un choix qui ne nous incombait pas, à l’instar de ses parents, sa famille, son nom et même souvent ses « amis ». Plus on était vu, plus ces choix se réduisaient à peau de chagrin, et l’amertume devenait alors facile ; une rancœur envers l’inanimé. Souvent même, on finissait par mépriser ce qui nous avait fait, souffrant des carences que le milieu, tristement homogène, nous imposait. Il y avait chez ces prisonniers-là une lucidité étrange, toujours latente, concernant le lieu de leur naissance et ce qui leur était envié ne présentait à leurs yeux qu’un moindre intérêt, usité et banal. Tragiquement, on passait le reste de son existence à combler le manque, négligeant souvent ce que l’on avait déjà. Goëville, Hautjardin… ils étaient tous les deux le produit d’un mode de vie distinct, réunis sous la sainte coupole de la bonne société de Port-Réal qui, comme le vent dictait aux arbres, imposait sa direction à toute la noblesse. Aussi, Gerold écouta la Princesse faire tinter ses chaînes et convoiter son contraire avec une compréhension mêlée à de la malice.
« Nul ombrage, lui assura-t-il avec complaisance. D’aucun diraient que Goëville est une ville de roturiers plutôt que de nobles à cause de toutes les fortunes forgées par le négoce qui y vivent. Ici, on rêve en secret d’épurer son sang pour être davantage des nobles que des marchands et les carrés de pelouse en brosse nous servent à nous en donner l’illusion. Aussi, ajouta-t-il avec facétie, puisque nous avons l’air d’aspirer à nos contraires, je vous propose d’enfiler votre robe et vous mon pourpoint, que l’on puisse échanger nos places. J’ai toujours su dans l’âme que je ferai une bonne Princesse. »
Il sentait le loisir d’être désinvolte. Peut-être un peu trop. A sa défense, sa Majesté l’y engageait, quand bien même les bonnes mœurs voudraient qu’indépendamment des circonstances, le Seigneur de Goëville connaisse son ultime place. De plus en plus, le faciès d’innocente midinette glissait comme un drap mal mis, révélant la facétie égale qui motivait la Princesse et dont elle ne pouvait, très certainement, jamais vraiment faire usage face aux convenance que son statut lui imposait. La royauté dictait aux jeunes femmes d’être les ambassadrices de la pureté, mais en même temps celles de la fertilité. De la soumission et du silence, mais en même temps de la force. Il fallait soit être extrêmement naïve pour convenir à cet idéal, soit particulièrement douée pour les faux semblants, se dit Gerold, alors qu’il comprenait enfin à quelle catégorie Sa Majesté appartenait. Cela aurait du le rendre d’autant plus méfiant mais quelque part, il en fut admiratif. Il ne savait pas encore à quel point cette jeune fille savait jouer au jeu auquel elle donnait l’impression d’exceller, car après tout, on ne se frayait pas un chemin depuis le Bief jusqu’à la couche royale sans quelques talents. Néanmoins, ces talents là n’avaient parfois rien avoir avec l’intelligence ou la malice, ni les faux-semblants. Malgré sa prudence, il ne savait pas où cette plaisanterie allait le mener, et cet inconnu espiègle lui plaisait. Peut-être parce qu’elle était une Princesse et que l’espace d’une nuit sans sommeil, l’intouchable s’était rendu gentiment accessible. Il avait l’impression que les discrédit mutuel était égal : l’un et l’autre se comportaient avec une familiarité suffisante à les compromettre tous les deux. Mais il y avait la parité des mortels et celle des Rois ; une égalité capable de lui faire tout perdre sans qu’elle n’ait à sacrifier quoi que ce soit.
Celui qui n’essayait pas n’avait rien, se disait-il en voyant la Princesse se répandra en doux sourires, lui témoignant son tacite badinage. Les femmes s’attachaient aux hommes par les faveurs qu’elles leurs accordaient. Margaery Targaryen avait été mariée jeune, comme tant de jeunes filles, et les libertés de son mariage seul lui permettaient de combler sa curiosité. Une fois épouse, une forme de coquetterie était presque permise, car il n’y avait plus aucune vertu à entretenir. Même souvent, avant le mariage, les jeunes filles arboraient une grandeur artificielle, attachée au mouvement des yeux, à un air de la tête, à la façon de se tenir, sans aller plus loin ; un esprit éblouissant qui imposait, et que l’on n’estimait que parce qu’il n’était pas approfondi. Une décérébrée greluche. Mais avec l’assurance d’une union, certaines faisaient montre d’une grandeur simple, naturelle, indépendante du geste et de la démarche, qui avait sa source dans le coeur et qui était comme une suite de leur haute naissance. Un mérite paisible, mais solide, accompagné de vertus difficiles à dissimuler derrière toute modestie.
De plus en plus malicieuse, elle lui souriait et leur trouvait des parallèles, même dans la controverse, ne ressemblant en rien à celle que Gerold avait percuté au détour d’un couloir un instant plus tôt. La conscience d’être miraculeusement seuls le força à lever les yeux et à scruter brièvement les pénombres, à la recherche d’un traître invisible en train de les épier. La Princesse se dévoilait gracieusement maligne, apte à négocier et avoir ce que son coeur désirait. La croyance du Prince cependant le laissa coi quelques instants, tant la parenthèse le surprit par ses épines. Finalement, il fit la moue et dit avec un sérieux sans équivoque :
« Au lieu de regretter, il devrait se demander pourquoi ; pourquoi le sang royal préfère le Feu aux Sept. Ils sont toujours si sûrs que la faute incombe aux fidèles...» ajouta-t-il, non sans un certain venin.
Sans connaître les affinités du Prince, Gerold était persuadé que la déchéance ponctuelle d’une religion revenait avant tout à ses représentants. Lui, n’avait jamais été un homme particulièrement pieux ; il priait par convenance plus que par certitude, préférant pendant ces moments de silence s’adonner à ses propres réflexions plutôt qu’à des requêtes envers les Dieux. Tel était son caractère : il ne jugeait avoir besoin de rien, car il avait acquis la conviction que toute récompense demandait un effort, aussi seul le labeur était capable d’absoudre. Mais le comportement de certain Septons l’avait répugné d’autant plus : injustice, orgueil, dogme, cruauté, violence et très, très peu de miséricorde. Le choix du Prince avait du faire discorde au sein de la famille royale. Mais Aegon était un Prince et la vie leur était parfois indulgente.
Sans sévérité, la jeune femme s’était tue pour réfléchir et d’instinct, Gerold n’en conçut aucun reproche. Elle aurait pu, pourtant, le réprimander. Pour ses paroles sans cesse plus effrontées ; pour son comportement, toujours plus franc et désinvolte ; pour son manque de considération envers son rang, pour l’heure avancée de la nuit, ou simplement pour son statut de jeune femme mariée. Cela faisait longtemps qu’ils étaient dans cette bibliothèque, seuls, en tenues à leur aise. Il ne sentit, néanmoins, aucun danger, même si à chaque phrase, il éprouvait l’appréhension qu’il était peut-être allé trop loin ? Ce traître confort l’obligea à bouger et, pendant qu’elle réfléchissait, Gerold fit quelques pas en laissant une petite table richement décorée les séparer, s’enfonçant dans la pénombre comme dans un brouillard. S’arrêtant, cette séparation lui parût finalement étrange, car malgré la distance, il la regardait de ces yeux qui semblaient voir à travers tout, et guettait les expression de sa liberté. Evidemment, toutes les réponses relevaient de l’intime, même lorsque l’on mentait, mais plutôt que de dissimuler des bribes de son âme derrière des paraboles, la Princesse dévoila doucement son audace et sans s’en rendre compte, Gerold se retrouva à nouveau pendu à sa bouche. A tel point qu’il ignora sa finale tentative d’atténuer ce qui venait d’être dit et prit un temps pour réfléchir à son tour.
« Vous êtes une Princesse, dit-il finalement avec humeur. Vous êtes le pouvoir. »
Sans en prendre conscience, il enjamba la distance qu’il avait lui-même créée et rejoignit la jeune femme pour mieux lui faire face. Il n’y avait nul reproche dans son ton, seulement le début d’une flamme qui brûlait au fond de lui depuis longtemps. Sa voix se fit presque murmure, alors qu’un engouement aussi prudent que fébrile l’attisait :
« Sa Majesté votre époux a choisi sa voie ; qu’est-ce qui vous empêche de choisir la votre ? On peut être seul pour deux raisons quand on gouverne : lorsqu’on cesse d’être soi-même et lorsqu’enfin on le devient. »
Gerold parlait avec la conviction de celui qui avait récemment recouvert sa liberté. Pour cela, il avait payé le prix d’une perte, tantôt désirée, tantôt regrettée. Mais la solitude, elle, promettait de ne jamais le quitter. La solitude dans la différence, dans les choix, dans la stature et la responsabilité.
« On pense que parce qu’on est seul, on l’est en tout, mais les idées, elles, se font écho bien plus qu’on pourrait le croire, poursuivit-il, désordonné et presque avec douleur. Preuve en est, je n’aurais cru trouver avec Vôtre Majesté autant de… hésita-t-il sur le mot, de ressemblance. »
Il avait levé les bras dans un geste ample, comme pour y joindre l’entièreté de leur brève mais intense conversation. En son coeur, réprimé dans sa dignité d’enfant en quête de contrôle, il avait depuis longtemps porté l’ambition du changement. Son labeur allait être long et incertain mais il rêvait d’être l’architecte de ses propres rêves, aussi controversé puissent-ils êtres pour les senseurs et moralistes. La vie ne pouvait demeurer immobile et Gerold ne comptait pas être le poids à la cheville de l’existence.
« Peut-être, poursuivit-il plus délicatement, peut-être que nous dormirions mieux la nuit si nous assumions ces idées séditieuses. On les chasse, et elles reviennent tel un chien fidèle, n’est-ce pas ? »
Ses yeux tranquilles la scrutaient lentement, mais avec une intensité singulière de quelqu’un qui cherchait son égal et pensait l’avoir trouvé. Il était frappé de la façon astucieuse dont les convenances dissimulaient aisément ces aspérités dans le caractère, car jamais il n’aurait soupçonné derrière la pauvreté de ces clichés puérils la présence en elle d’un jardin où poussaient tant de ronces. Un jardin que la politesse et l’inconnu gardaient délibérément fermé et formellement interdit. Cette nuit était un étincelle dans une vie monocorde ; elle allait cesser avant même qu’il ait pu en comprendre la rareté, Gerold le sentait. Leurs esprits vibraient en diapason un court instant avant de se désaccorder jusqu’à leur prochaine rencontre ; autant dire, à jamais.
« De qui êtes vous la prisonnière, Vôtre Majesté ? Qu’est-ce qui vous empêche de retrouver le sommeil ? Demanda-t-il, joliment défiant, le regard étincelant à couvert d’un front aux mèches désordonnées. Un sourire s'allongea sur ses lèvres, malicieux ; il s’apaisa sur une bagatelle : Si j’avais su, ce n’est pas à la bibliothèque que je vous aurais emmenée… un silence, suffisant pour laisser glisser en soi l’imagination avant de se soustraire à la réalité : mais dans la salle de conseil. »
Margaery Targaryen
queen of nothing

Margaery Targaryen

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They’re called Spreading Bellflowers. Wild, of course. Attracted to ancient woodland, wiry, deceptive, refuse to behave according to any rules.



Elle demeura un instant silencieuse, surprise d'entendre une telles paroles dans la bouche d'une telle personne. Non qu'elle doutait que son hôte fut capable de traits d'humour mais il lui paraissait si sérieux qu'elle n'aurait jamais pu imaginer pareil échange et dessiner, dans son esprit, une telle image. Aux quelques secondes de stupéfaction succéda un grand éclat de rire. Elle rit si fort qu'elle en eut mal aux joues, ne parvenant à se souvenir de la dernière fois où elle s'était permit un tel relâchement et non un gloussement habilement contrôlé afin de ne pas froisser les gens qu'elle pouvait rencontrer. La vérité était bien plus triste mais Margaery n'avait eut que peu de raison de réellement rire ces dernières lunes. Là où tout n'était que fête et joie, l'arrivée de la peste rouge avait jeté un voile terne sur son existence : la disparition d'Aegon, le décès de Loras, la perte de son enfant, ... Et dans son océan de détresse et de tristesse, le bonheur insupportable des autres. La grossesse de la reine, l'animation précédant le mariage de Rhaenys, les éclats de voix dans les couloirs de Hautjardin. Une fois passées es crises de larmes, la née Tyrell avait réussit à retrouver le masque de sa perfection, son sourire de circonstance, sa voix calme et joviale. Au cours de ces premières lunes de pérégrination, elle avait tenté de se retrouver, de revenir à Aegon, de retrouver ce qui avait été leur entente naturelle : ses sourires forcés était devenu le désir sincère de son étreinte jusqu'à ce que, finalement, elle lui autorise de nouveau l'accès à son lit. Car si le drame avait mis fin à la passion juvénile de leurs premières idylles, la tendresse d'un deuil commun, le réconfort mutuel avait finit par renforcer leurs sentiments. Mais durant tout ce long et douloureux processus, elle n'avait jamais rit. Et cela lui faisait du bien. « J'ai en tête une tiare qui vous irait à merveille ... » finit-elle par dire, essuyant du bout du doigt une larme perlant sous l'effet de son hilarité. Elle retrouva son calme quelques instant plus tard, un sourire empreint de gratitude remplaçant les mots qu'elle ne pouvait se permettre de dire avant qu'elle ne soustrait son visage à la vue du valois, quelques peu gênée. « Il n'y a bien que les idiots pour oublier que nous sommes tous arrivés un jour sur cette terre en étant rien d'autre que des roturiers ou des envahisseurs, voir les deux. Parfois je me plais à me rappeler que je suis là où je suis aujourd'hui car l'un de mes brillants ancêtres a juste sut à taper plus fort que les autres au moment opportun. » répondit-elle à sa remarque précédente, retrouvant le sérieux semi philosophique de leur conversation nocturne comme pour faire oublier les quelques minutes où elle était redevenu une simple jeune fille de dix huit ans. « Qui sait ce qu'il restera de nous dans trois millénaires ... » souffla-t-elle. Que restait-il de l'âge des héros ? Des noms dont la réalité se confondait avec la légende, des êtres dont l'histoire avaient été de si nombreuses fois contée et déformée qu'elle en devenait mystique. Qui pouvait réellement croire que Garth Mainverte, et ses pouvoirs quasi divins, avait réellement existé tel que dépeint dans les chansons ? Peut être que sa propre existence se perdrait dans les pages d'une histoire oubliée, qu'il ne resterait rien de celle qu'elle avait été, ni de sa lignée. Perspective peu réjouissante se dit-elle, mais qui avait le mérite de ramener tout le monde au même niveau dans une humilité contrainte.

Détendue de leurs propos précédents, la jeune fille laissa un rictus se dessiner un bref instant sur ses lèvres, un sourire las qui trahissait toute son impuissance face aux choix d'Aegon. Lorsqu'ils s'étaient rencontré, il était très sensible à ce que pouvait dire cette prêtresse venue d'Essos, une femme magnifique, même Margaery le reconnaissait, entière vêtue de rouge qui chuchotait à son oreille et captait son attention. Loin d'être prude ou naïve, Margaery avait songé que cette Melissandre usait sans doute de tous ses atouts pour conserver l'intérêt d'Aegon, aiguisant son attention tantôt par des charmes presque magique, tantôt par des mots qui réveillait le sang du Conquérant qui coulait en lui. Tandis qu'ils se courtisaient, elle s'était tut, préférant ne pas aborder une question si délicate sans l'assurance que son intérêt lui était totalement acquis mais lorsqu'il fut évident qu'il existait bien plus qu'un simple attachement juvénile, c'était lui qui avait chassé Melissandre pour elle. Lorsqu'ils s'étaient mariés dans le Grand Septuaire, elle avait entendu quelques chuchotements la félicitant d'avoir ramené le prince héritier dans le droit chemin. Ces mêmes chuchotements qui avaient, quelques temps plus tard, pointé du doigt les fautes évidentes qu'elle avait du commettre pour se voir ainsi accablée par le destin. Sa respiration se fit soudainement plus difficile tandis que les mots de Lord Gerold, loin de la considérer comme fautive, rappelait l'amour inné des dragons pour le feu. « J'ai essayé de comprendre. » dit-elle d'une voix si basse qu'elle doutait presque d'avoir parlé. Le regard fixé sur tout sauf son compagnon d'insomnie, elle poursuivit. « J'essaie encore aujourd'hui sans parvenir à trouver de réponse. Et il n'y a ni mestre, ni septon pour me donner une raison valable, pour m'expliquer pourquoi moi qui ait toujours été si fervente, si prompte à me rendre au septuaire ... Pourquoi j'ai perdu mon petit garçon quand mon mari que l'on qualifie à loisir d'hérétique a pu sortir indemne d'un bucher avec une épée légendaire au côté. » C'était la première fois qu'elle le disait à vive voix. Pourquoi se complaire à juger la conversion d'Aegon, à en appeler à la miséricorde des Sept pour lui pardonner son choix quand, jusque là, son dieu de la Lumière lui souriait ? Pourquoi, alors que les Sept visages de l'Etoile étaient censé protéger et guider, elle serait punie d'un choix qui n'était sien et contre lequel elle ne pouvait rien ? Ces questions en faisaient naître d'autre et elle qui avait été, jusqu'ici, si pieuse et exemplaire, n'avait que des blasphèmes au bord des lèvres. « Je n'ai juste pas encore réussi à accepter la seule conclusion qui me vient à l'esprit. » souffla-t-elle tristement. Peut être qu'au final, les Sept n'étaient qu'une manière de se rassurer dans les heures sombres, que leurs voies n'avaient de vertus que pour l'éducation mais qu'ils étaient, tel un conte pour enfant, un mirage qu'on finissait par abandonner à l'âge adulte. Peut être n'y avait-il finalement rien. Rien que la fatalité d'un destin qu'on ne pouvait éviter.

Resserrant les pans de son châle sur son corps, elle eut un rire sans réelle joie, presque un soufflement. « Cela semble si simple quand vous dites les choses ... » Et pourtant, elle voulait y croire. Ces dernières lunes n'étaient guère en faveur d'une telle affirmation mais elle voulait y croire. N'avait-elle pas été élevé pour cela ? Ses mots la secouèrent plus qu'elle ne l'aurait cru, lui rappelant les attentes que sa famille avait eut pour elle, pour ce qu'elle pourrait offrir à Hautjardin une fois membre de la maison royale. Quand y avait-elle réellement cru pour la dernière fois ? Sans doute avant que les pensées noires et humeurs changeantes ne deviennent pleinement son quotidien, lorsque la vie était belle et que le monde s'offrait volontiers à elle. Par les Sept qu'elle aurait aimé revenir à cette époque insouciante, une époque où bien qu'elle mesure les conséquences d'un faux pas, elle n'ai jamais expérimenté la véritable souffrance. Et pourtant, quelque part, elle songeait que toutes ces épreuves ne pouvaient que la rendre plus forte, qu'il ne restait qu'à sortir de l'océan dans lequel elle avait le sentiment de se noyer, certains jours, pour toucher du doigt celle qu'elle avait été mais celle qu'elle savait qu'elle ne redeviendrait jamais. « Je pourrais vous retourner l'affirmation, vous êtes seigneur de l'une des plus grandes cités des Sept Couronnes. Tous les hommes de votre rang n'ont pas autant de pouvoir que vous. » dit-elle après un instant, toussotant dans sa main pour évacuer le malaise de ses pensées si personnelles. Elle n'avait manqué de remarquer qu'une hierarchie plus subtile se dessinait à l'intérieur des Sept Couronnes : si on lui avait toujours enseigner que les maisons de chevaliers fieffées avaient moins d'influence que les maisons mineurs, elles même moins présente sur la scène politiques que des maisons majeures. Mais toutes demeuraient sous l'autorité d'une famille suzeraine qui ne répondait qu'à la Couronne. Cependant, Margaery ne pouvait nier que l'influence de son grand-père, sire de Villeivielle et seigneur de la maison Hightower, était plus importante que celle d'Andrew, à la tête de la maison Rowan et d'un statut soit disant égal. Car l'influence ne se mesurait pas qu'à l'aube des relations que chacun entretenait avec son suzerain ou au niveau de représentation que la famille pouvait avoir à la Cour. L'équilibre était plus subtile, et le pouvoir résidait tant dans l'habileté politique que dans les ressources que chaque maison était capable d'offrir au reste de la communauté. Et au final, peut importait à la maison Grafton d'avoir des représentants à Port-Réal ou aux Eryés quand on voyait l'impact que la cité pouvait avoir sur le reste du Val. Son soupire fut étouffé par le sourire qu'elle se força à afficher. « Et pour l'heure, je pense que vous en avez plus que moi. Ne le dites à personne, mais je dois avouer c'est un concept assez abstrait malgré le rôle que j'occupe. La seule chose que l'on attend de moi c'est de donner à la Couronne un enfant, de préférence un garçon, et de sourire. Je ne sais pas pour la première exigence, mais j'excelle particulièrement dans la seconde. » dit-elle avant de prouver ses dire, abandonnant la mine à demi-attristée, fatiguée mais profondément sincère qu'elle arborait pour le masque de la princesse qu'elle affichait dès le lever du jour. Un sourire radieux, irradiant d'un bonheur pourtant disparu. Cela ne dura plus qu'une demi-minute mais une fois assurée que son propos était compris, tout ceci s'évanouit. Si elle n'avait pas été noble sans doute aurait-elle été actrice, songea la jeune femme. Peut être serait-ce sa destinée si elle ne parvenait à mettre au monde un autre enfant, si le malheur continuait de la poursuivre et si le pire des scenario se produisait. Après tout, sa propre tante avait finit par fuir Westeros vers l'est : Lynce l'avait fait de son propre chef, échappant aux devoirs d'un mariage qui la rendait malheureuse. Elle le ferait pour échapper à la honte d'une répudiation. Quel homme pourrait la vouloir comme femme si le prince héritier en personne se débarrassait d'elle ? Elle songea un instant à Andrew mais éloigna le souvenir des baisers échangés en secret dans le labyrinthe de Hautjardin. Non, elle ne supporterait pas de voir une autre prendre ce qui lui revenait, porter le titre qui devrait être sien. Cette idée ralluma la flamme de son ambition dans les braises que Lord Gerold remuait depuis qu'ils s'étaient croisés dans ce couloir. « Cependant, n'allez pas croire que je ne mesure pas le pouvoir que je pourrais avoir. Lorsque mon heure viendra, je n'ai pas l'intention de demeurer une reine passive dans l'ombre d'un époux trop occupé. Lorsque je pense à l'âge d'or que le royaume a connu sous le règne de Jaehaerys le Conciliateur, je ne peux m'empêcher de constater l'importance que sa reine a eut dans la gouvernance du royaume : une importance que peu de femmes ont pu avoir par la suite. En cela, Aegon et moi partageons une même vision et un même désir de mener les Sept Couronnes au delà de tout ce que l'on peut attendre de nous. Une couronne qui n'est pas uniquement le fardeau d'un roi, mais bien un effort conjoint où la reine a également une place d'importance et dont la fonction n'est pas que d'être le vaisseau de la génération suivante. » Certain aurait considérer que son discours revenait à imaginer la mort du roi, qu'elle faisait ainsi acte de trahison. Mais quelque chose lui disait que le valois n'avait rien à gagner à la dénoncer pour de pareils propos. Ils semblaient se retrouver sur bien des sujets et sa conversation réveillait les épines limé par son bonheur conjugale puis son malheur maternel. Après tout, n'était-ce pas le but de ce voyage de se montrer au peuple et à la noblesse, de créer du lien et d'engager des allégeances bien plus profondes que quelques mots récités et perdant en valeur de génération en génération ? Aegon pouvait compter sur son sang, sur les relations qu'il entretenaient depuis l'enfance. Elle ne pouvait compter que sur elle même, sur ses talents et son charme. « Ceryse Hightower, Elinor Costayne, Alicent Hightower ... J'aimerai être la première reine originaire du Bief à ne pas être réduite à des temps de guerre ou de massacre et je crois sincèrement que j'en ai les capacités. » ajouta-t-elle avec un sourire en coin. Son regard se perdit dans le décor du lieu, son esprit divaguant dans l'avenir idéal qu'Aegon et elle avait imaginé, dans un nouvel âge d'or où elle deviendrait une nouvelle Alysanne.

Il y avait quelque chose d'extrêmement ambigü flottant dans l'air, une forme d'étrange proximité d'esprit qui rendait la conversation intime et les regards complices. Rien qui n'aurait pu être répréhensible juste assez pour attirer une certaine suspicion si un tiers s'était trouvé entre eux. Margaery connaissait son propre tempérament, ses jeux de séduction qu'elle exerçait depuis le plus jeune âge tantôt innocent, tantôt bien plus dangereux. La politique n'était qu'un jeu de charme comme un autre et à ce dernier, son comparse nocturne semblait particulièrement enthousiaste. Si elle avait été plus naïve, s'il n'y avait pas eu Aegon, peut être aurait-elle pu poursuivre de la sorte jusqu'à oublier que tout n'était que calcul et stratégie. Se faire bien voir n'était pas que son devoir de future reine, c'était aussi du seigneur de Goëville : qui pouvait bien dire de quoi l'avenir serait fait et quelles faveurs pourraient être demandées ? Cependant, c'était un jeu auquel elle s'était déjà perdue et si elle y avait gagné un titre de princesse, elle n'obtiendrait rien à pousser celui ci trop loin. « Allons, allons. Il faut bien que je garde un peu de mystère sinon qu'aurais-je à vous raconter lors de ma prochaine insomnie ? » lui répondit-elle avec un sourire indéfinissable. Elle s'était bien trop confiée pour le peu qu'ils se connaissaient et s'il voulait en savoir plus, il devrait y laisser un peu de lui même. Donnant donnant, un échange équivalent qui installerait une confiance s'il s'y prêtait. Mais malgré tout, une invitation : quelque chose lui disait qu'ils n'en avaient pas finit. Elle eut un soupire forcé, presque théâtral tandis qu'elle dissimulait autant que possible le contentement que sa flatterie lui offrait. « Quel dommage qu'il ne puisse exister de Main de la Reine, Lord Gerold ... Je vous aurais montré une salle du conseil bien plus grande. » dit-elle du ton bas des promesses et confidence mais que son sourire rendait presque chantant. Une salle plus au sud, une salle aux affaires bien plus vaste mais que son influence sur Aegon pourrait rendre bien plus accessible.

:copyright:️crack in time



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