D'écailles et de plumes [Brynden & Daenerys]

An 304, lune 1



J'espère que ma missive vous trouvera en bonne santé ainsi que nos enfants.
J'ai conscience de vous avoir laissé à la tête d'une lourde charge mais j'ai confiance en votre capacité à gérer les affaires courantes et en ceux que j'ai laissé à vos côtés pour vous protéger et vous conseiller. Si, par le plus grand des hasards, il devait advenir une affaire qui vous pose soucis, je sais qu'Hoster vous épaulera comme il se doit mais si vous redoutez de prendre une décision difficile, je tâcherai de vous aiguiller au mieux, pourvu que la chose ne soit pressante.

A l'heure où vous recevez cette lettre, le siège de la Haye-Pierre sera déjà installé devant les murs des Bracken. L'ambiance au sein de nos hommes est mitigées. Bien que je n'ai appelé à la levée du ban pour éviter d'être accusé d'abuser de mon pouvoir de suzerain envers une maison qui a un passif avec la mienne, je sens que certains hommes sont encore septique. Ils ne portent guère les couleurs de Corneilla mais ce simple fait me rappelle vos paroles et m'intime à la prudence.
Je m'inquiète davantage pour Lucas. J'ai confiance en ses capacités mais j'ignore ce qui pourra nous arriver durant ce siège et sa réussite est capitale, pour notre pouvoir, notre famille et pour envoyer un signal clair à tout ceux qui tenterait de suivre l'exemple de Jonos Bracken en se rebellant.

J'ignore si ce siège sonnera le début du conflit que nous redoutons tous. J'ose encore penser qu'il ne s'agit là que d'une querelle entre deux seigneurs, indépendamment de oppositions entre vos frères, mais je ne suis pas à l'abris de mettre le feu à la poudrière. Jonos a été beaucoup trop loin et j'ai bon espoir qu'il retrouvera la raison face aux forces alliées qui camperont devant sa fenêtre. Toutefois, je reconnais en l'avis que vous m'avez prodigué avant mon départ, une vérité que je ne parviens à occulter : j'ignore encore, si la victoire nous attend, ce qu'il adviendra de ce château. Il est évident que je ne pourrais laisser au seigneur des lieux la vie sauve et après avoir montré de la clémence envers son bâtard, en l'envoyant au Mur, je ne suis pas certains d'être capable de faire montre d'autant de retenue.
Tant que la Haye-Pierre reste le symbole d'une animosité contre les Nerbosc, je ne peux me permettre de la laisser en d'autres mains que les nôtres ...

J'ai conscience que mes mots doivent heurter votre coeur, et je m'en excuse, Daenerys. Je n'ai jamais été l'homme tendre et délicat que vous méritiez et dans ce contexte de guerre imminente, je ne peux être à vos côtés. Sachez que, malgré tout, je ferais ce qu'il faut pour que nos ennemis n'arrivent jusqu'à vous.

Je prie mes dieux, et les vôtres, qu'il nous soit donné de nous revoir prochainement.

An 304, lune 1, semaine 4



Je suis heureux de lire de vos nouvelles, d'autant plus qu'elles me parviennent alors que nous campons depuis une semaines aux pieds de notre ennemis. Savoir que vous n'êtes, vous, assiégée d'affaires brûlantes me soulage : certains auraient pu profiter de mon absence pour tenter leur chance auprès de votre grand coeur ou bien se chamailler tout en sachant que je ne saurais venir leur rappeler les règles de bons voisinages. Le Conflans est une terre compliquée où une moitié n'est jamais d'accord avec l'autre ... Les dieux soient loués que vous en soyez, pour l'heure, épargnée mais les gens se lasseront bien vite des nouvelles du siège, soyez prête à toute éventualité.

Ici, le temps est maussade mais l'humeur est encore aux rires et aux blagues. Contrairement aux hommes, je doute que ce siège s'arrête en quelques jours : je connais assez Jonos Bracken pour savoir qu'il fera tout ce qui est en son pouvoir pour faire durer les choses et souffrir autant de personne que possible. Dut-il manger tous les chevaux de ses écuries, il ne se rendra jamais. J'ai envoyé quand même envoyé quelques hommes de confiance sonder les murs du domaine, j'espère y trouver une faille, quelque chose qui nous permette de les avoir par surprise.
J'aurai pensé que l'exemple de Liane Vance l'aurait poussé à plus d'hypocrisie mais il faut croire qu'il parvient encore à me surprendre malgré les années.

Je regrette, ma dame, de vous inquiétez pour pareille bêtises. La maison Nerbosc et la maison Bracken ne se sont jamais entendu et cela remonte à tant de génération que je ne saurais vous dire comment cela a commencé : sans doute une histoire de terre ou d'influence. Mon père père avait coutume de dire que c'est parce que nos deux maisons revendiquaient avoir eut une souveraineté sur l'autre durant l'Âge des Héros. Je vous épargnerais les basses manigances qui s'en sont suivies au Donjon Rouge dans une guerre de jupons et de fard pour l'attention d'un Roi, impliquant de fait, votre famille. Je suis certains qu'il y a tout un tas d'évènement qui pourraient rappeler et raviver les colères de Corneilla et de la Haye-Pierre mais je compte y mettre un terme à présent.
J'espérais que l'accession à la suzeraineté de mon père permette d'enterrer des rivalités, à présent, dépassées, qu'à défaut d'une amitié, nous aurions pu prétendre à une paix. Mais la félonie est dans l'âme de cet homme, et je dois l'en châtier. Je sais que vous n'aimez discuter de cela, mais je vous assure, Daenerys, si traitres dans le Conflans il y a, leur nid ne peut se trouver que là.

Peut être que ce siège pourrait permettre d'épargner le Conflans de la guerre entre vos frères ...

Je me trouve, cependant, face à une question qui nécessite une délicatesse dont vous me savez dépourvu : vous êtes ma suzeraine, et en cela, j'en appelle à votre féminine décision. Lorsque nous entrerons dans ce château, car nous y entrerons, que ferons nous des filles de Lord Bracken ? Je ne peux prendre le risque de les voir épouser des alliés à la cause de Jonos ou de qui que ce soit, mais je me refuse à toucher à des enfants.  En tant que Nerbosc, que feriez vous ?

Mes pensées sont vôtres.