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Petite mise au point après avoir remonté la pente

Liliyana Racin
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An 304, Lune 3 semaine 2

Petite mise au point après avoir remonté la pente

Je suivis la ligne des points que j’avais déjà fait du bout du doigt avant de tendre la main en tâtonnant pour trouver l’aiguille avant de la coincer entre deux doigts pour prendre le bon fil. J’avais réussi à expliquer que j’avais besoin de marques spécifiques sur un petit morceau de parchemin posé sur les fils. J’avais toujours peur qu’on m’emmêle les fils. J’attachai le fil soigneusement avant d’essayer de retourner à la conversation en plus de faire ma broderie. Je serrais un peu les dents, mes cousines discutaient joyeusement et leur broderie avançait dix fois plus vite que moi. Chaque point était un véritable casse tête pour moi… Je devais tenir le tambour, essayer de suivre le tracé qu’on m’avait fait…

« Et toi Liliyana ? Tu en penses quoi ? »

Je levai les yeux pour tourner la tête vers l’une de mes cousines en essayant de rattraper la conversation. J’inclinai légèrement la tête :

» Je crains que je ne sois incapable de te dire si ta broderie est bien, et encore moins si les regards de ce chevalier sont aussi langoureux. »

J’avais déjà assez de mal à ma vie de tous les jours, Damon ne me laissait plus rien passer sur mon emploi du temps. Il surveillait, et lorsqu’il n’était pas là c’était les servantes qui faisaient la suite. Tout était soigneusement organisé pour que… je ne me laisse plus couler après la suite des décès… Ça fonctionnait plus ou moins bien ! Je n’avais pas trop le choix que de me bouger… Il y avait des jours où je n’avais pas envie, où c’était encore très dur, sauf que Damon refusait que je laisse tomber… Encore. Même si des fois j’aurais préféré rester couchée, ne plus faire d’efforts. Sauf que pour ça il aurait fallu que des gens laissent passer. Même Polar semblait de mèche à vouloir bouger, se promener. Damon me refaisait faire du cheval au moins une heure par jour, avec Polar près de moi pour le dépenser. Entre cela et Tante Celia qui était de mèche et qui continuait les enseignements de grand-mère et m’obliger à faire tout comme tout le monde. Comme la broderie. Même si c’était relativement compliqué. Et je craignais qu’elle n’attaque l’écriture.

Polar s’étira en baillant et je lui flattais doucement le flanc avant qu’il ne s’étale encore plus sur le sol devant moi. Mes cousines continuaient de discuter alors que j’avais l’impression de ne pas avancer comme je l’aurais souhaité. La porte s’ouvrit et je relevai la tête, j’avais reconnu le pas.

« Bonjour Tante Celia. »

J’inclinai la tête, mais j’essayais de ne pas me déconcentrer de ma tâche.
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Celia and her nieces – Part 1


- Better Bent than Broken -



Bois-de-Saule avait bien changé depuis la mort du couple seigneurial, lord Perwyn et lady Melantha. Tous deux avaient rendu l’âme l’année passée à quelques lunes d’intervalle. La matriarche aux Portes de la Lune le lendemain matin du mariage de lord Harrold avec lady Mya. Le seigneur dans sa demeure, tranquillement, entouré de sa famille qu’il quittait pour rejoindre son épouse. L’année 303 n’aura pas épargné les Ryger qui ont également perdu deux oncles. Lord Lymond Lychester, frère de Melantha, et ser Merwyn Ryger, frère de Perwyn. C’était un nouveau chapitre qui s’ouvrait sur Bois-de-Saule. L’ancienne génération quittait peu à peu les lieux, ne laissant alors qu’une dame, lady Genna, épouse Grimm, ayant quitté le domaine depuis son mariage avec ce seigneur bieffois, et ser Robin, maître d’arme des lieux, dernier enfant de la fratrie. Désormais, c’était la nouvelle génération qui dirigeait le domaine familial ouvrant une nouvelle ère sur le château et ses jardins somptueux. Richard Ryger en était ainsi le seigneur. Cela faisait seulement sept lunes qu’il était à la tête du fief mais excellait dans la gestion des affaires. Depuis près d’une quarantaine d’années, son père l’avait éduqué pour prendre sa suite. Lorsqu’un homme est héritier aussi longtemps que l’a été Richard, il n’est pas étonnant de le voir réussir avec brio la transition entre son père et lui. Néanmoins, contrairement à celui-ci, il n’avait pas à ses côtés une épouse de la trempe de lady Melantha. Lythène Terrick était une femme effacée, plus occupée par ses enfants que par le pouvoir. Elle était, par ailleurs, complètement tombée amoureuse de son époux et cela se voyait. Elle avait été bien triste lorsque Sarya, leur unique fille, s’en était allée loin dans le Val, épouser l’héritier Pryor. Aujourd’hui, elle semblait néanmoins mieux vivre la distance et menait un petit train de vie bien tranquille. C’est pourquoi les gens s’accordaient à dire dernièrement que la véritable dame des lieux était la sœur du seigneur, Célia Van.

Ressemblant de plus en plus à sa mère, bien que son caractère diffère grandement, Célia Van s’était vu confier bon nombre de tâches à la mort de sa mère et de son père. Richard lui faisait entièrement confiance et c’est ainsi qu’elle se retrouva à gérer le fief lorsqu’il dut partir pour Corneilla avec Kirth et Damon. Célia n’était néanmoins pas seule dans cette tâche et pouvait, comme le reste de la famille, compter sur ser Robin. Le mestre n’en demeurait pas moins une aide précieuse entre les leçons données aux petites-filles et petits-fils restants à Bois-de-Saule et les affaires à gérer alors que la guerre à Westeros se fait de plus en plus sentir. Au retour de Richard, les mauvaises nouvelles ne manquèrent pas. Lady Liane Vance de Bel-Accueil avait été exécutée pour parricide. Voilà une nouvelle qui aurait pu bouleverser leur mère, qui était amie avec les Vance depuis bien des années. Avant de mourir, elle avait espéré pouvoir contracter un mariage entre les deux familles et y était presque parvenue. Malgré la distance qu’avait soudainement prise Liane Vance, des discussions avaient eu lieu entre les deux dames. La mort de l’une et le renfermement de la seconde n’avaient malheureusement pas permis de concrétiser la chose. Lord Perwyn avait alors repris l’affaire mais sa mort repoussait encore. Richard était bien décidé à honorer la volonté de sa mère de voir une Vance et un Ryger s’unir mais là encore, les Sept semblaient en avoir décidé autrement puisque la dame de Bel Accueil n’était plus. Malgré cela, Richard était entré en contact avec ser Desmond, désormais régent du fief. Damon serait promis à lady Marianne Vance si le destin voulait bien que la chose se fasse. De son côté, Célia avait du renoncer à son projet de rejoindre sa fille Morya, sur le point d’accoucher de son premier enfant. Les nouvelles de Richard étaient bien plus mauvaises qu’elle ne l’aurait pensé. La guerre était proche, plus proche que jamais. Par sécurité, le nouveau seigneur n’avait pas souhaité voir sa sœur partir si loin et espérait que son frère, Hollis, parti dans l’Ouest pour marier son fils, revienne rapidement à Bois-de-Saule.

- Savez-vous où je peux trouver mes nièces, Alessa ?

- Dans le petit salon, Madame. Elles brodent tout en discutant.

- Merci, Alessa.

Parcourant les couloirs de la demeure qui l’avait vu naître, grandir, partir puis revenir, rire, pleurer, marcher, courir, Célia Van repensait aux dernières semaines qu’ils avaient vécu. La guerre était bel et bien là. Son oncle, ser Robin, avait quitté les lieux à la fin de l’année passée à la tête d’une petite troupe pour rejoindre les forces de Brynden Nerbosc afin de prendre la Haye Pierre. Célia n’avait pas eu les détails mais cela n’annonçait rien de bon. Les Nerbosc et les Bracken n’étaient pas les meilleurs amis du monde et qui sait pourquoi le suzerain avait décidé cela mais Célia se demandait si ces deux familles ne pouvaient pas pour une fois s’entendre alors que le royaume est menacé par Viserys Targaryen. À moins que tout cela ne soit finalement lié ? Célia n’en savait rien et s’en inquiétait grandement. Elle laissait néanmoins cela à son frère. C’était lui le seigneur maintenant. C’était à lui de se charger de tout cela. La quinquagénaire, elle, s’occupait de ses nièces et c’était déjà pas mal, sans parler de gérer avec l’intendant la tenue de la demeure des Saules et l’entretien des jardins, pour que ceux-ci demeurent aussi magnifiques que du temps de lady Melantha Ryger. Ce sont justement ses nièces qu’elle allait retrouver alors qu’une accalmie semblait avoir lieu dans le château. Elle s’efforçait de ne pas penser à sa pauvre fille, Morya, qui avait eu la terrible épreuve de mettre au monde un enfant mort-né. Elle lui avait alors envoyé une missive qui était demeurée sans réponse. Elle espérait que les Florent s’occupent bien d’elle. Mais de là où elle était, elle ne pouvait rien faire. Arrivant devant la porte du petit salon, elle fit son entrée et retrouva ainsi ses nièces, Liliyana et Kyra, ainsi que sa fille, Tyta. C’étaient là les seules petites-filles de Melantha qui demeuraient encore à Bois-de-Saule. Il y avait, il fallait dire, une abondance de garçon dans la nouvelle génération. Elle ne fit pas trois pas que la jeune aveugle sembla la reconnaître et la salua.

- Liliyana. Kyra. Tyta. Je vois que vous vous êtes remises à la broderie, ma fille. Cela vous avait-il tant manqué ?

Un sourire vint accompagner cette remarque et Tyta répondit avec le même sourire qu’effectivement, la broderie lui manquait, que de temps en temps, elle s’adonnait à cette occupation en compagnie de ses cousines. Tyta était l’aînée des trois jeunes femmes. Elle avait vingt-neuf ans et se destinait à être septa dont elle était novice. Kyra elle, était fiancée à un Piper et cela semblait lui plaire comme idée. La famille Piper était proche autant géographiquement que relationnellement. Il n’était donc pas anodin que les deux familles finissent par s’unir. Quant à Liliyana, la question demeurait toujours lorsqu’il s’agissait de la jeune femme. Elle allait sur ses vingt-et-un d’ici quelques semaines et malgré les volontés de lady Melantha, Richard et Célia ne savaient pas encore quoi faire de cette petite. Depuis la mort des deux parents, la jeune fille avait été par moment ingérable, si bien que lady Célia elle-même avait fini par laisser tomber, ne souhaitant plus s’occuper de la jeune fille. Elle s’en était complètement remise au frère de celle-ci, le jeune Damon. Il semblerait qu’il exerce sur elle une influence infaillible et elle était ravie de voir que les choses s’étaient arrangées, que Liliyana sortait de sa chambre, se montrait présente aux dîners familiaux, participait à la vie du château, comme l’aurait finalement voulu sa grand-mère, lady Melantha.

- Dîtes-moi, de quoi étiez-vous en train de discuter avant que j’arrive ?

Célia s’installa dans un fauteuil libre. Elle attendait avec impatience la petite collation qu’elle avait demandé à Alessa avant de venir dans le petit salon. Dans ce contexte bien particulier, il fallait bien profiter de petits moments comme celui-ci.


#677E52 : Célia Van
#A67E2E : Alessa

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An 304, Lune 3 semaine 2

Petite mise au point après avoir remonté la pente

Si Tyta voulait devenir septa, ce n’était pas mon cas. Je préférais largement vivre comme une lady. Mais pour l’instant j’étais juste la nièce du seigneur des lieux. Et Kyra était promise à un Piper. Et moi… Et moi je ne savais pas. Ma tante salua tout le monde et si la broderie avait manqué à Tyta. Je pinçais les lèvres en secouant la tête. Si cela manquait à Tyta, ce n'était pas du tout mon cas.

Je détestais cela, vraiment, cela me demandait beaucoup trop de concentration et j’avais bien souvent mal à la tête. J’essayais en plus de suivre les mouvements et les discussions… je progressais presque pas. Une broderie me prenait des heures entières là où mes cousines les faisaient en une heure. C’était très décourageant pour moi ! Je faisais de mon mieux… Je tournais légèrement la tête pour suivre les mouvements de ma tante et Polar se redressa pour venir lui dire bonjour, j’entendais presque sa queue remuer. De quoi nous parlions ? Je ne parlais absolument pas ! J’étais trop concentrée sur ce que je faisais pour réussir à tenir une conversation…

« Liliyana nous donnait son avis sur ma broderie et si Ser Piper me regardait avec les yeux doux. »

Je n’avais nullement envie de faire une plaisanterie sur le fait que j’étais aveugle aujourd’hui. Damon me manquait et puis cette broderie… m’agaçait. Je la reposais sur le tas de fil en essayant de ne rien déranger pour ne pas perdre mes petits morceaux de parchemins. Je ne savais pas à quel point j’avais détérioré les relations avec ma tante… Est-ce que j’avais tout gâché ? Polar s’ébroua et revient vers moi, je passai une main sur sa tête avec douceur.

« Oui, on ira se promener tout à l’heure Polar. Promis. »

Mon chien avait pris goût à ces ballades en cheval avec Damon. Est-ce que ma tante était au courant ? Je pensais que oui… mon frère ne ferait rien sans son accord pour quelque chose avec moi. Je tournai la tête en entendant à nouveau des pas dans le couloir, on frappa et la porte s’ouvrit. Je sentis une délicieuse odeur. Une collation. Je souris à ma tante :

« Aviez-vous peur que la broderie nous affame ma tante ? »

Polar sembla se redresser et humer l’air. J’attrapais son collier.

« Polar. Non ! On ne réclame pas ! Interdiction de lui donner quoi que ce soit ! »

Je n’avais pas envie que mon pauvre chien soit malade à cause de sucreries données sans que je ne sois au courant. Il avait sa pâtée et ce qui lui fallait. Sauf que je savais que Kyra avait parfois tendance à lui donner des gâteries. Je lâchais mon chien en lui ordonnant de se coucher contre moi. Je me tournais vers ma Tante.

« Et vous tante Celia ? Comment se passe la gestion du domaine ? »

C’était elle qui avait reprit le rôle de Grand-mère à la gestion de Bois-De-Saule.
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Celia and her nieces – Part 2


- Better Bent than Broken -



La broderie n’avait jamais passionné Célia. Elle détestait cela même. Cela ne l’avait néanmoins pas empêché de s’y adonner parfois, lorsqu’une envie passagère lui prenait. Mais tout cela était bien derrière elle. Aujourd’hui, elle avait bien d’autres responsabilités et occupations. Elle gérait Bois-de-Saule aux côtés de son frère, lord Richard. Ce n’était pas une mince à faire, surtout que la guerre était à leurs portes. Si pour le Conflans, le seul conflit résidait dans le siège de la Haye-Pierre qu’avait tenu Brynden et ses alliés sollicités, dans Westeros, bien d’autres événements eurent lieu. Célia espérait ainsi, quelque peu naïvement, que la guerre resterait loin de leur terre. Elle en implorait les Sept même, elle qui n’était pas des plus pieuses pourtant. Elle s’en remettait également à sa défunte mère dont les conseils manquaient cruellement. Les premiers instants sans la matriarche dans le château furent bien difficiles pour Célia, comme pour toute la famille. Melantha était seule qui mettait tout le monde d’accord. Seul Perwyn avait l’ascendant sur elle puisqu’il demeurait le seigneur des lieux. Il avait le dernier mot et ce, tout le temps. En cela, la fille de la vieille conflanaise savait que sa mère jalousait ses amies, lady Liane et lady Melior. Les deux dames avaient accédé au statut de seigneur grâce à la loi sur l’héritage de la princesse Rhaenys, permettant alors aux femmes d’hériter si les héritiers mâles viennent à manquer. Ce n’était clairement pas le cas chez les Ryger et, à une lointaine époque, chez les Lychester. Aucune femme Ryger ne deviendrait seigneur. C’était là un constat évident et qui n’avait aucune importance pour Célia qui n’aurait jamais voulu de ces responsabilités-là. Richard s’en sortait très bien et il ne fait aucun doute que le jeune Kirth, son héritier, ferait de même après lui.

Ainsi, les trois demoiselles échangeaient sur leur broderie et sur ser Piper. Célia sourit à sa nièce lady Kyra qui avait bien le droit à ces questionnements. Depuis qu’elle avait été fiancée au jeune Piper, elle était toute chose. Cela pouvait aisément se comprendre. Elle se souvient de l’excitation présente dans le regard et les mots de sa fille Morya lorsqu’elle lui avait annoncé ses fiançailles avec ser Merrell Florent. Elle faisait là un bon mariage avec un homme issu d’une famille majeure du Bief. Célia espérait depuis ne pas regretter ce choix au vu de la distance géographique qui les séparait. Pour sa nièce Sarya, cela avait était encore pire. Elle épousait un héritier et était alors amené à devenir épouse de seigneur. Quoiqu’il en soit, Kyra semblait heureuse de ce mariage qui n’aurait finalement pas lieu cette année, pas avant la fin de la guerre en tout cas, si tant est que son issue leur soit favorable. Célia se disait en son for intérieur que même si Viserys remportait le trône, il n’en viendrait pas à tuer tout le monde. Cela lui serait impossible de toute façon, et clairement pas bénéfique. Revenant au temps présent, Célia observait les trois Ryger qui se trouvaient devant elle. Malgré leurs âges déjà avancés qui faisaient d’elle des adultes désormais, elles semblaient encore bien insouciantes du monde qui les entourait, excepté Tyta qui, contrairement aux deux autres, était bien consciente de ce qui se passait. Le monde était en train de changer, bien plus que n’importe qui aurait pu le penser. La bataille de Winterfell avait amorcé un changement radical sur Westeros qui trouverait alors sa forme finale à l’issue de la nouvelle Danse des Dragons.

- Et donc ? Ser Piper te regarde-t-il avec des yeux doux, ma chère Kyra ?

Bien loin de la tante endeuillée et quelques peu autoritaire qui avait parcouru les couloirs du château l’an passé alors que Bois-de-Saule perdait son couple seigneurial, lady Célia semblait être bien différente depuis quelques lunes. Elle avait décidé de ne pas se laisser ronger par son chagrin. Il était hors de question pour elle, et pour la mémoire de ses parents, d’arrêter de vivre et d’avancer. La mort faisait partie de la vie dans leur monde. C’était une inévitable étape que tout le monde espérait franchir le plus tard possible. Il est vrai que depuis la rébellion du Cerf, la famille Ryger n’avait pas autant souffert que cela. Les pertes des fils Lychester, de Lanner et de Mariya avaient porté un coup à lady Melantha et sa famille. De son côté, Célia rajoutait le deuil de son époux et de l’enfant qu’elle portait de lui. Depuis ces tragédies, la mort passait son chemin lorsqu’elle venait dans le Conflans. Mais cela n’aurait pas pu durer indéfiniment. Lord Perwyn et lady Melantha avançaient en âge. Finalement, dans ces nouveaux malheurs qui secouèrent la famille, ils pouvaient, en quelque sorte, s’estimer heureux que leurs parents partent sereinement, simplement emportés par le poids des années là où d’autres souffraient de maladie ou succombaient à des blessures. C’est ce que Célia se disait dans les moments difficiles. Ses parents avaient eu une belle vie. C’était donc à son tour d’en avoir une belle. Un nouveau chapitre s’ouvrait pour elle aussi entre sa fille aînée qui se trouvait bien loin d’elle, sa fille cadette promise à une carrière de septa, son fils sur le point de se marier et le reste de sa famille, aussi nombreuse soit-elle, qui demeurait à Bois-de-Saule et qui continuait à vivre leur vie aussi de leur côté.

- Je me suis dit qu’il serait agréable de prendre le thé ensemble. Je n’ai guère de temps ces derniers temps avec tout ce qu’il se passe. C’était l’occasion de me retrouver avec ma fille et mes nièces.

Alessa vint poser le plateau sur la petite table et servit les quatre tasses. De petits gâteaux accompagnaient les boissons chaudes, de quoi faire une petite collation bien gourmande. Célia remercia la servante qui déclara rester à la disposition de la conflanaise si elle avait besoin. Célia fut alors attirée par le chien de Liliyana qui ne tenait guère en place.

- Souhaites-tu qu’Alessa apporte de la pâtée pour Polar ou en a-t-il déjà eu assez ce matin ? Le pauvre, il va nous voir manger sans qu’il n’ait quelque chose.

Mais il était néanmoins hors de questions de lui donner quelques gâteaux. Il avait sa propre nourriture et il ne fallait pas mélanger avec de la nourriture pour les gens. Célia porta alors un regard qui en disait long à Kyra qui avait la fâcheuse tendance à nourrir les animaux avec des gâteaux. Le palefrenier lui avait rapporté cela une fois. Liliyana s’intéressa ensuite à sa tante et la gestion du château. Leur relation n’avait pas été au beau fixe lors des funérailles de Melantha. La petite conflanaise avait décidé de se laisser mourir dans sa chambre. Cela n’avait guère plus à Célia qui s’en était alors complètement remise à Damon pour secouer sa sœur. Quelques lunes plus tard, alors que Perwyn disparaissait à son tour, Célia n’avait pas voulu s’occuper de sa nièce de peur que cela ne recommence. Elle avait bien d’autres choses à faire. Son voyage à Rubriant était encore d’actualité et le mariage de son fils Cleos devait se préparer. Elle n’avait donc pas le temps de gérer sa nièce bien qu’elle la portait toujours dans son cœur, au même titre que ses autres nièces qu’elle adorait. Aujourd’hui, tout cela était du passé. Damon avait, semble-t-il, réussi à la faire quitter cet état dépressif dans lequel elle s’était terrée. Mieux encore, elle la trouvait rayonnante.

- Oh comme d’habitude, tu sais. La routine s’est bien vite installée. Heureusement, je peux compter sur notre intendant qui est une aide précieuse. Mais je n’ai pas à me plaindre, ce sont de biens petites tâches que j’effectue contrairement à votre oncle.

Richard Ryger est le seigneur de Bois-de-Saule après tout. Il est donc logique que cette fonction soit bien plus difficile à porter que celle de maîtresse de maison. Célia gérait les serviteurs et servantes, les repas, la tenue du jardin, l’attribution des chambres selon le contexte, s’il y avait des visites familiales ou bien diplomatiques – même si cela devenait rare avec le contexte de guerre. Elle épaulait également son frère tout comme lady Melantha n’hésitait pas à donner son avis à son époux.


#677E52 : Célia Van

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An 304, Lune 3 semaine 2

Petite mise au point après avoir remonté la pente

J’entendis un rire de Kyra et elle se tortilla, au bruit, sur sa chaise qui grinça un peu. Elle affirma qu’elle en était sûre que oui. Je me retiens de lever les yeux au ciel, pour ne pas le voir. Polar s’agitait un peu, il voulait sortir, mais en même temps manger il ne savait pas trop. Et j’espérais pouvoir le calmer un peu avant d’aller partir en promenade à cheval avec mon frère. C’était important aussi pour moi de sortir. Tout doucement… les obligations de Daemon devenaient de moins en moins lourdes et je prenais même un peu plus goût toute seule à la vie. Je sortais même quand il ne m’y obligeait pas et j’essayais de plus en plus d’être au maximum autonome. Je souris à ma tante.

« C’est une bonne idée et cela me donne une excuse pour ne pas continuer ma broderie ! »

Moi ? Détester la broderie ? Du tout ! Je souris un peu en posant mon tambour sur les fils en essayant de ne rien déranger ou ne rien faire tomber. C’était déjà assez compliqué et si en plus tout s’embrouillait sur la petite sellette en bois qui était proche de moi. J’entendis Alessa, puisque ma tante me dit son nom juste après, poser le plateau de nourriture et de thé… Et Polar commencer à s’agiter un peu. J’imaginais parfaitement la tête de mon chien qui cherchait à avoir à manger. Je le grondais en le tenant par le collier avant que ma tante ne parle. Je secouais la tête.

« Il a eu à manger ma tante ce matin. Il en aura ce soir, je n’aime pas lui donner à manger entre les repas. Il a l’habitude normalement, quand nous mangeons ensemble le soir, il est couché à mes pieds et ne bouge pas. Il essaye simplement, mais si je le nourris trop il deviendra gros et gras. »

Heureusement d’ailleurs qu’on se baladait régulièrement, lui faire faire de l’exercice lui faisait du bien. Et à moi aussi ! Il fallait faire attention aussi pour lui. Je lui donnais l’ordre de se coucher et il sembla de s’agiter et grogner un peu, il tourna la tête vers Kyra et poussa un petit geignement.

« Polar. »

Il finit par se coucher lentement, sur mes pieds, et ne bougea plus, même si je savais qu’il avait juste envie de bouger. Je posais la question à ma tante sur la gestion du domaine. Je me mordis les joues :

« Comment sont les jardins ? »

Le cliquetis des tasses fit se redresser Polar qui s’approcha aussitôt et je sentis sa queue balayer…

« Polar ! »

Il venait de renverser tout mon travail de couture par terre. Je claquai de la langue agacée avant de me redresser pour poser un genou par terre pour ramasser la broderie et les fils, je sentis quelqu’un s’approcher…

« Je peux le faire seule ! »

Je voulais le faire toute seule, je ne voulais pas dépendre de tout le monde comme ça ! Je reposais doucement les fils en cherchant les couleurs sur les petits morceaux de parchemins que Daemon m’avait fait attacher sur le tas de chaque fil de couleur.
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Celia and her nieces – Part 3


- Better Bent than Broken -



Quel agréable moment ! Bois-de-Saule avait connu des malheurs et en connaitrait sûrement d’autre. Surtout avec la guerre à venir. Alors, quand elle le pouvait, Célia appréciait certains moments. Comme celui-ci. Assise aux côtés de sa fille et de deux de ses nièces, elle les écoutait parler garçon, broderie, déguster les boissons chaudes qu’elle avait fait préparer pour elles. De petits gâteaux les accompagnaient en guise de collation. Mais pas de pâtée pour Polar. Il se montrait d’ailleurs bien intéressé par ce qu’il y avait sur la table au point de renverser la broderie de Liliyana. Tyta voulut l’aider mais elle refusa. Célia était contente. La voir reprendre goût à la vie et se débrouiller par elle-même étaient agréables. Lady Melantha serait fière de sa petite perle. Du temps avait passé depuis leur petit accrochage après la mort de la matriarche. Célia n’avait pas souhaité s’enfermer dans une telle situation avec sa nièce. Elle-même devait faire face à son deuil et cela n’avait pas été chose facile. La mort de Perwyn vint par la suite en remettre une couche mais tout cela, sans pour autant dire que c’était du passé révolu, était derrière elles. Elles avançaient chacune comme elle le pouvait. Melantha représentait tant de choses pour sa famille. Chacun avait son avis sur la matriarche et chacun avait son lien. Célia se souvenait de l’immense chagrin de sa fille Tyta ou bien du désarroi du jeune héritier, Kirth. Chacun à leur manière avait pleuré Perwyn et Melantha Ryger mais désormais, il fallait avancer, vivre sans eux tout en les gardant en mémoire et en poursuivant leur travail. Célia s’attelait ainsi à garder la demeure et le domaine en bonne forme tandis que Richard s’occupait des affaires plus politiques. Il avait été secret sur son entretien avec lord Brynden mais elle savait que des projets de mariage avaient été discutés pour son fils Kirth. Le jeune homme avait passé trente ans et Melantha n’étant plus là pour rechercher la perle rare, il était que l’héritier de Bois-de-Saule se marie.

- Nous disions donc…

Lorsque Liliyana eut fini de ramasser ses affaires, Célia relança la conversation. Sa jeune nièce lui avait demandé comment étaient les jardins. Ils étaient...

- … toujours aussi majestueux, ma nièce. Ils sont, et j’espère qu’ils le resteront, à l’image de votre grand-mère. Elle-même en son temps s’était occupé de les transformer dans les premiers temps où lord Perwyn était devenu seigneur. Sous feu mon grand-père, dit-on, les jardins ne resplendissaient pas. Face aux malheurs de la vie, on dit qu’il aurait laissé la demeure se dépérir au fil du le temps.

C’était là une histoire vieille comme le monde que ser Merwyn, l’oncle de Célia, racontait souvent aux enfants de son frère. Lord Alyn Ryger avait en effet perdu son épouse peu de temps après la naissance de leur dernier enfant, Robin. Fou de rage, il avait eu du mal à faire face à son deuil. Les gens racontent même qu’il aurait tué sa maîtresse qui avait manqué de respect à son épouse. La fidélité n’était peut-être pas au rendez-vous mais il la respectait en quelque sorte et ne supportait pas qu’on lui manque de respect. Pendant quinze ans, le seigneur se laissa aller, prit du poids, devint de plus en plus violent et vulgaire. Il perdait petit à petit l’amour des gens de son domaine. Merwyn avait raconté une fois que son frère, Perwyn avait failli devenir seigneur bien plus tôt que prévu. Lors d’un banquet, sûrement pour un mariage ou autre, le seigneur festoyait avec excès. Trop enjoué sûrement par la musique, la vue de belles dames – et surtout de jeunes suivantes – il avait manqué de s’étouffer avec un os de volailles. Tout le monde avait été choqué, ne sachant quoi faire et lord Alyn ne dut sa survie qu’à son fils et héritier. Malheureusement, il finit malgré tout sa vie bien tristement, laissant sa place à un jeune Perwyn bien plus aimé que son père ne l’avait été. Cela fit remonter plein de souvenirs à Célia. Son oncle lui manquait. Ses histoires, son humour, sa joie de vivre, sa légèreté. C’est incroyable ce que l’absence de responsabilités et de pouvoir pouvait être bénéfique sur une personne. Ce n’était sûrement pas lord Perwyn ou lady Melantha qui aurait pu raconter de telles histoires parfois rocambolesques.

- Mais ils vont bien. Cela fait bien une cinquantaine d’années qu’ils sont bien entretenus. J’ose espérer qu’ils le seront encore dans cinquante ans.

Célia but alors quelques gorgées et prit un petit gâteau. Ils étaient bons, très bons même. Elle reprit aussitôt après avoir fini sa bouchée.

- Oh, cela me fait penser soudainement.

La bouche à moitié pleine, elle finit son gâteau et but une nouvelle gorgée pour faire passer le tout et poursuivit.

- Avez-vous déjà choisi vos robes pour le mariage de votre cousin la lune prochaine ?

Parce qu’en plus de gérer quelques affaires du domaine, Célia devait s’atteler à la préparation d’un mariage. Il était par ailleurs inattendu qu’il se maintienne malgré le contexte actuel. Cela permettrait ainsi de s’échapper le temps d’un instant. Bien que les préparatifs demandassent du temps, la quinquagénaire était tout émerveillée et excitée par ce mariage. Elle posa alors une main sur le bras de Kyra qui venait de faire une moue quelque peu déçue. La jeune femme était promise à un Piper mais le mariage n’était pas pour tout de suite. Célia comprenait la déception et d’un simple regard accompagné d’un sourire, elle lui fit comprendre que son tour arriverait bien vite. Célia ne pouvait en être sûre. Qui sait combien de temps cette guerre durera cette fois ?


#677E52 : Célia Van

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An 304, Lune 3 semaine 2

Petite mise au point après avoir remonté la pente

Je supportais de moins en moins qu’on tente toujours de m’aider. À Bois-De-Saule je connaissais parfaitement chaque millimètre de l’endroit, depuis le nombre d’années que je vivais ici, et puis avec Polar dans les autres endroits… Mais le reste du temps… Non, je voulais être autonome, autant que possible, j’étais toujours incapable de lire ou d’écrire. Il devait bien y avoir un moyen pour moi d’apprendre cet art mystique et mystérieux ! Pourquoi est-ce que je ne pourrais pas trouver un moyen pour les aveugles de lire et d’écrire ? C’était aussi une manière d’être autonome après tout… Je finis de ranger mes affaires aussi vite que possible avant de retourner m’asseoir avec Polar près de moi qui se coucha sous mon fauteuil. Tante Celia reprit la parole alors que je lissais mes jupes. Les jardins donc.

Je serrais légèrement les doigts autours de mes jupes à la mention de ma grand-mère adorée. Mon âme tangua un peu, mais j’inspirais profondément pour éviter de trop me sentir retomber en arrière. Je hochais la tête sans rien dire. Cela me faisait penser un peu à mon grand-oncle. Ce n’était pas facile de se révéler après des pertes après tout… J’étais bien placée pour le savoir. Dans cinquante ans. J’eus un sourire amusé :

« Peut-être que cela serait moi qui m’en occuperais. »

Au vu de ma condition… je doutais de me marier un jour, mais ce n’était qu’un détail. Je me penchais pour saisir délicatement une tasse sans me brûler avant de boire une gorgée de thé. Je ne touchais pas, pour l’instant, aux gâteaux. Je souris légèrement avant de hausser un sourcil à la remarque de ma tante. Le mariage de mon cousin… J’avais… oublié ce détail ? Quant à mes robes… Je me massais légèrement la nuque.

« Nullement ma tante… J’ai… légèrement oublié ce détail… J’ignore quelles robes j’ai dans mes malles et mes armoires. »

J’aurais aimé une nouvelle robe aux couleurs de ma maison. Machinalement je saisis le médaillon où il y avait une mèche de cheveux de ma grand-mère. Je me mordis légèrement les joues en jouant avec.

« Et puis vous pensez que c’est une bonne idée de me montrer avec Polar… »

Je n’aimais pas trop sortir sans mon chien. Avant, ma grand-mère était là à me tenir près de moi, ou que c’était mon frère Damon qui venait avec moi. Est-ce que j’oserais y aller après que le dernier évènement auquel j’avais été convié soit marqué par la mort de ma grand-mère ? Je me mordis un peu plus fort les joues. Il y avait toujours mon frère ! Mais je ne savais pas, je posais la main sur le crâne de mon chien avant de reposer lentement la tasse sur la sellette à côté de moi. Est-ce qu’après c’était une bonne idée de m’exposer ? Je ne savais pas…
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Celia and her nieces – Part 4


- Better Bent than Broken -



Célia était contente de ce moment de partage avec sa fille et ses nièces. Pas de mouvements brusques, pas de bruit, pas de cri. Les enfants de Bois-de-Saule était grand désormais. Le plus jeune étant Perwyn, le dernier né de son frère Hollis. Il était seulement âgé de douze ans et se voyait déjà mestre de la Citadelle. C’était une discussion qui avait eu lieu au moment de marier Jon à l’héritier de Champmoisson. La famille Ryger était grande et de multiples alliances lui étaient bénéfiques. Les anciennes perduraient et il venait le temps d’en contracter de nouvelles. Perwyn et Melantha n’étant plus de ce monde, il revenait à Richard et Célia de s’occuper de la nouvelle génération. Il demeurait encore des petits-enfants à marier. Si Tyta ou encore Alyn, un autre de ses neveux, se destinaient à une vie célibataire de septa et de mestre, d’autres comme Kyra ou bien Damon espéraient malgré leur lointaine position dans la famille, pouvoir se marier et poursuivre le grand dessein des Ryger. La première, présente aux côtés de Célia, Tyta et Liliyanna en ce jour plutôt radieux, malgré le contexte de guerre qui pesait sur eux, était destinée à un Piper. Un mariage somme tout simple et aux enjeux peu importants. Les Piper demeuraient une famille alliée et amie depuis de longues années. À l’instar des Vance, c’était là une volonté de Melantha de son vivant que de voir leurs deux familles s’allier officiellement. Il n’est donc pas non plus anodin que les discussions entre Ryger et Vance purent se poursuivre entre Richard et Desmond malgré les morts de Melantha et Liane, fortement liées par une amitié qui remontait du temps de la mère de la fraichement exécutée. Si la guerre leur était favorable, Damon pourrait alors épouser la jeune Marianne. Mais si le mariage de Kyra avec le jeune Piper était connu de la famille, les négociations pour celui de Damon demeuraient secrètes. Personne ne savait hormis Richard et Célia, à qui il confiait énormément de choses. Damon le savait également mais il avait juré de ne rien dire avant que cela puisse se faire. Bien d’autres négociations étaient à l’œuvre dans le plus grand secret. Même Célia ne savait pas tout, son frère préférant voir comment la guerre se déroule.

- Pourquoi pas, ma chère nièce ? Il faudra bien quelqu’un pour s’occuper des jardins lorsqu’il viendra temps pour moi de quitter ce monde.

Concernant Liliyana, des choses avaient été discutées du vivant de la matriarche. Mais pour l’heure, rien n’avait été mis en place. La guerre se faisait sentir. Le siège de la Haye-Pierre n’annonçait rien de bon, ni les attaques dans l’Orage. Les forces ennemies agissent dans l’ombre et il n’était pas à l’ordre du jour de s’occuper d’une jeune enfant fragile comme Liliyana. Melantha la protégeait de tout et de tout le monde, parfois même un peu trop au goût de la quinquagénaire. Depuis le décès du couple seigneurial, la vie de la jeune fille avait considérablement changé. Il était hors de question pour Célia de faire de la surveillance tout le temps. Elle devait épauler son frère et avait une vie également, un deuil auquel faire face. Elle aimait pourtant sa nièce pour laquelle elle s’est beaucoup inquiétée. Elle semblait désormais bien plus apte à affronter la vie, la vraie vie avec ses épreuves et ses malheurs. Elle n’en ressortira que plus grande et plus forte. La conversation, agréable au demeurant, bifurqua soudainement sur le mariage de Cleos Van, le fils de Célia, la lune prochaine. La blonde demanda alors aux jeunes femmes si elles avaient pu choisir leur robe pour ce jour qui viendrait mettre du baume au cœur de la famille endeuillée. Liliyana déclara que non tandis que Kyra, toute enjouée, semblait déjà avoir une précise idée de la robe qu’elle porterait. Il était bien étonnant que le mariage ait lieu malgré les tensions grandissantes. Mais Richard avait autorisé, d’un commun accord avec le seigneur Gouër, la tenue du mariage.

- Ma chère Kyra, peut-être que tu pourras épauler ta cousine sur le choix de sa robe. Si aucune ne te sied, alors nous t’en ferons une nouvelle, si tu le souhaites.

Puis la jeune fille mentionna Polar. Célia appréciait la présence du chien guide de sa nièce mais pour un événement comme un mariage, il était hors de question qu’il soit présent, du moins pas pendant la cérémonie. Il avait beau être sage, c’était un endroit spirituel. Il ne fallait aucunement que l’animal y pénètre. Célia ne voulait pas avoir à faire aux humeurs du chien, s’il voulait jouer, courir ou sauter partout. Ce n’était guère un lieu approprié pour lui. Puis, Liliyana trouverait bien quelqu’un pour l’y mener. Son frère était toujours là pour elle.

- Je ne préfère pas. Il pourra être à tes côtés lors du banquet mais pas dans le septuaire. Je veillerai à ce qu’un serviteur s’occupe bien de lui pendant la cérémonie, après quoi, tu pourras le retrouver et le prendre à tes côtés. Je suis sûr que cela ravira tes cousins et cousines qui n’auront, alors, plus aucune de raison de s’ennuyer.

Célia rit avec ses nièces et sa fille, se souvenant de l’ennui mortel qu’elle avait vu dans les yeux de ses jeunes neveux lors d’un mariage précédent. Elle avait même forcé son jeune fils, Cleos, a invité Tyta à danser. La mère et la fille se rappelèrent alors ce moment assez drôle. Cleos était un peu timide et n’osait pas, de peur que l’on se moque de lui si on le voyait danser avec sa sœur, de près de cinq ans sa cadette.

- Quoiqu’il en soit, je ne doute pas que Damon t’y accompagnera, comme à l’accoutumée. Ou alors, ta cousine Tyta se fera un plaisir de te tenir compagnie.

La jeune Tyta acquiesça physiquement et verbalement, assurant à Liliyana qu’elle ne serait pas seule pour aller à la cérémonie et même avec Polar à ses côtés, elle resterait présente lors du banquet si elle le souhaitait. Célia et Tyta échangèrent un regard et un sourire complice. Les deux femmes pouvaient se comprendre en un regard. Si Morya ressemblait plus à son père, il ne faisait aucun doute que Tyta avait hérité de la beauté de sa mère, ainsi que sa blondeur, quelque peu plus foncé que Célia. Celle-ci reprit alors une gorgée de thé et apprécia le moment. Bien loin du tumulte des affaires de Bois-de-Saule, pire encore des affaires du Conflans qui pourraient à terme avoir un impact sur eux, Célia libérait son esprit de toute inquiétude, ne se concentrant que sur l’avenir des trois jeunes filles qui étaient assises à ses côtés. La sage septa, l’intrépide fiancée et la fragile aveugle.


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An 304, Lune 3 semaine 2

Petite mise au point après avoir remonté la pente

Je me raidis malgré moi à la phrase de ma tante. Quitter ce monde. Malgré de gros efforts, je restais toujours très sensible lorsqu’on parlait de la mort et surtout de celle de mes proches… Je serrais légèrement mes paumes l’une contre l’autre.

« Le plus tard possible, ma chère tante. »

Polar poussa un peu mes mains pour me détendre et je lui offris une petite caresse sur le museau sans rien dire d’autre jusqu’à ce qu’on change de sujet et qu’on parle mariage. Pas le mien. Jamais cela ne serait le mien. Pas de valeur après tout. Grand-Mère avait beau dire que j’étais jolie… Être jolie ne me rendait pas mes yeux et j’étais inutile pour tout mariage ou alliance. Alors je faisais une jolie plante verte pour le mariage des autres… C’était déjà bien… Je caressais machinalement le pendentif où dormait une mèche de cheveux de ma grand-mère. Le choix de la robe, cela m’était complètement sortie de la tête. Je secouais légèrement la tête.

« Je dois avoir assez de robe pour ne pas avoir besoin d’une nouvelle. Mais je suis sûre que Kyra me trouvera une perle dans celles que j’ai déjà. »

Pas de dépenses inutile malgré mon envie après tout. Nous étions en guerre… Et ma tante n’avait pas compris ce que je voulais dire… Je savais que Polar ne pouvait pas venir, c’était habituel… Mais moi… est-ce que j’avais encore vraiment ma place ? Je ne savais pas… Je continuais de caresser mon chien, frottant doucement ses oreilles, il adorait ça et se colla à moi pour en avoir plus. Je gardais mes yeux rivés sur ma tante. Enfin… j’espérais bien qu’ils soient rivés sur elle. Pas de Polar pour la cérémonie. Grand-mère ne le voulait même pas pour les banquets. Il savait se tenir, surtout quand il y avait du monde. Je fronçais légèrement les sourcils à sa remarque.

« Polar n’est pas un jouet ni un divertissement. »

Quand bien même il avait le caractère d’une peluche, il restait un animal, avec ses humeurs et je préférais éviter que mes cousins ne jouent avec lui pour éviter qu’ils n’en fassent n’importe quoi. S’il les mordait, même pour jouer… Qui sait si on ne me réclamerait pas sa tête. Et cela prendrait du temps avant que je n’ai un nouveau chien comme mon Polar, qui sache faire son travail et qui soit habitué à moi… Polar cela faisait longtemps, cinq ans ? Peut-être, qu’il était avec moi. Six ? Je ne savais plus. J’offris un sourire à Tyta.

« Plaisir partagé. Damon pourra enfin éviter de tout me décrire en permanence et profiter pour discuter avec d’autres personnes et peut-être même danser et se trouver une fiancée. »

C’était de son âge après tout. Il devait arrêter de s’occuper de moi. Je reviens vers Celia.

« Si Polar n’assiste pas à la cérémonie, je préfère qu’il n’assiste pas au banquet. Il a bien le droit à une journée ou il peut se reposer ou jouer dans un jardin. »

Et ne pas servir de divertissement… Mais visiblement, à nouveau je serais là… comme une jolie petite plante verte.
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Celia and her nieces – Part 5


- Better Bent than Broken -



La fatalité dans la phrase de Célia avait semblé frapper la fragile jeune fille qu’était Liliyana. Il est vrai qu’avec les quatre morts auxquelles ils furent toutes et tous confrontés l’année passée, la conflanaise semblait bien plus accepter le triste sort que leur réservaient les Sept à la fin du voyage qu’était la vie. Ne préférant pas s’attarder sur le sujet, elle poursuivit la conversation autour du mariage à venir de son fils. Malgré les tensions présentes çà et là, surtout avec le siège en cours de la Haye-Pierre, le mariage de son fils avait été maintenu. Cela ferait un aparté pour le moins joyeux avant que la guerre n’éclate réellement. Car Célia en était bien consciente. La guerre était proche. L’air s’alourdissait. Les Dragons volaient dans les cieux. Cela faisait plus d’un an que la bataille de Winterfell avait été remportée par les Ouestriens. Chacun avait pu rentrer chez soi, rendre hommage à ses morts, panser ses blessures. Il ne faisait aucun doute que le prince exilé lui-même n’avait qu’une hâte : lancer les hostilités. La question demeurait alors : dans quelle région la guerre débutera-t-elle ? Mais il fallait dire que les Ryger étaient assez loin de tout ça. Les troupes que Richard avait pu lever étaient désormais au service de Brynden. Menées par ser Robin, leur oncle, elles demeuraient au service du suzerain aussi longtemps qu’il le souhaiterait. À Bois-de-Saule, heureusement, demeurait une garnison afin de protéger le château en cas d’attaque. Mais il était impensable à ce stade d’imaginer une attaque. Bois-de-Saule n’était nullement un fief stratégique, juste une demeure familiale paumée au milieu des forêts, rivières et autres contrées verdoyantes conflanaises. La question des robes avait semblé être réglée. Il faut dire qu’il restait encore un peu de temps pour que les jeunes dames se décident sur quoi porter. À la remarque de Liliyana, sa tante lui rappela que Polar ne serait nullement admis lors de la cérémonie mais qu’au contraire, il pourrait la rejoindre lors du banquet. C’était là une faveur que Célia faisait à sa nièce puisque la présence du chien n’était nullement admise du temps de Melantha.

- Loin de moi l’idée de le traiter comme tel, Liliyana. Je te prie de ne pas mal interpréter mes paroles. Je disais simplement par-là que la présence du chien ravirait tes cousins. Mais si tu préfères qu’il ne vienne pas, il n’y a pas de souci.

Cela avait longtemps été tendu entre Célia et Liliyana après les morts successives de Melantha et Perwyn Ryger. La tante avait finalement cédé et ne souhaitait plus s’occuper de la jeune femme. Elle s’était complètement reposée sur son frère, Damon qui faisait monts et merveilles pour sa jeune sœur. Il n’en serait pas ainsi indéfiniment, surtout avec les discussions reprises avec les Vance pour un potentiel mariage. Les semaines et lunes s’écoulèrent. Célia avait fait un pas vers sa nièce et les choses semblaient rentrer dans l’ordre. Pourtant, on pourrait croire que par moment, quelques tensions reviennent. Elles ne pouvaient pas être d’accord sur tout non plus. Sa fille était bien plus patiente et avait alors proposé à Liliyana d’être son soutien pour la soirée, libérant ainsi le jeune Damon. Célia ne pouvait parler des discussions avec les Vance. Richard lui avait fait promettre de tenir la chose secrète le temps nécessaire. Aux mots de Liliyana, elle ne dit rien et but une gorgée de thé, tachant de demeurer silencieuse alors que Kyra relançait la conversation autour de son jeune fiancé, le fameux Piper dont elles parlaient lorsque Célia est arrivée. Plongée dans son silence, écoutant la discussion des trois jeunes femmes, Célia comprenait. Elle était bien trop vieille pour participer à de telles conversations si innocentes entre jeunes demoiselles. Elle n’était plus une jeune femme, plus depuis longtemps. Elle avait connu le mariage, la vie, la mort, l’amour, la haine, toutes ces choses qui enlèvent l’innocence et l’insouciance d’une personne. Ne voulant intervenir, elle demeura silencieuse, sa tasse entre les mains, buvant gorgée après gorgée. Sa mère avait ainsi raison.

Il ne fait pas beau de viellir, ma fille. Tu verras quand tu auras mon âge.

Célia avait bien vite compris qu’il ne fallait pas attendre soixante-dix ans pour comprendre que vieillir n’était pas une belle chose. Cinquante ans était déjà un âge quelque peu avancé et, encore plus pour une femme comme elle. Veuve. Seule. Des enfants loin ou bien adultes. L’attention sur elle se dissipait de plus en plus à mesure que son âge avançait. Il était loin le temps où elle était courtisée lors des visites à Vivesaigues ou à Bel-Accueil. Il était loin le temps où Ronel faisait tout pour lui plaire et qu’elle lui menait la vie dure à cause de leur mariage dans un premier temps non voulu par la conflanaise. Au moins, elle pouvait compter sur Hector, l’intendant. Ils vivaient leur idylle dans le plus grand des secrets depuis bien des années maintenant. Il la regardait comme au premier jour, bien avant qu’elle ne cède à ses avances. Il lui restait au moins ça et les responsabilités que lui confiait son frère. Cela la faisait se sentir importante et utile. Mais il était clair que petit à petit, elle devrait laisser sa place à la nouvelle génération.


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An 304, Lune 3 semaine 2

Petite mise au point après avoir remonté la pente

Je remuais légèrement le nez à la remarque de ma tante en caressant tout doucement mon chien qui adorait que je m’occupe de lui. J’inclinai la tête.

« Pardonnez-moi ma tante. J’ai toujours peur qu’il arrive quelque chose à mon Polar. J’ai bien trop besoin de lui. Je pense qu’il serait mieux pour lui de se reposer un peu et de profiter aussi. Il n’aime pas le monde. »

Je souris à ma cousine qui proposait de s’occuper de moi pendant la soirée. Et mon Polar pourrait se reposer également. Il en avait bien besoin et de toute manière, il y aurait trop de monde et on risquait de lui marcher sur les pattes à ce pauvre chien. Qui se collait plus à moi en tendant le museau pour plus de câlin. Tout irait bien pour une soirée. Je savais que je pourrais le faire. Je continuai de caresser tout doucement mon chien qui s’appuyait doucement sur moi. On frappa et la porte s’ouvrit.

« Oh… rebonjour mes dames. Tante Celia je suis content de vous voir ! »

Mon chien se leva pour s’approcher aussitôt de mon frère qui entreprit, j’avais appris à le reconnaître, de le gratter vigoureusement. J’eus un sourire amusé.

« Lili ? C’est l’heure d’aller dehors. Tu viens ? »

Je hochais la tête avant de faire une révérence en essayant de me souvenir du chemin pour rejoindre mon frère qui attendit patiemment avant de me prendre la main.

« Tante Celia ? Vous voulez venir avec nous ? Ou l’une de vous également ? Nous allons simplement autour de Bois-De-Saule, nous nous éloignons pas. »

Il me glissa à nouveau la laisse de mon chien dans la main, j’aimais ces ballades avec mon frère autour de la maison. Vraiment. Cela me faisait du bien de respirer l’air libre après tout. Et mon frère me faisait toujours faire une course. Et si Tante Celia voulait venir… J’aimerais bien qu’elle accepte !
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Celia and her nieces – Part 6


- Better Bent than Broken -



Célia demeura silencieuse face aux paroles de sa nièce. Elle écoutait leur conversation reprendre jusqu’à ce que Damon entre dans le salon. Il salua sa tante qui inclina sa tête vers lui. Il venait convier Liliyana et Polar à une promenade. De toute façon, Célia avait fini de dire ce qu’elle avait à dire. Aucune affaire n’était urgente pour les demoiselles présentes et elle pouvait ainsi retourner à ses occupations. Contrairement à sa fille et ses nièces, elle ne pouvait pas se balader ou bien s’installer dans un salon comme bon lui semblait. Richard comptait sur elle plus qu’il ne comptait sur son épouse qui n’était clairement pas de la même trempe que feu lady Melantha, leur mère. Elle ne s’intéressait guère aux affaires du domaine hormis peut-être celles concernant les jardins. La née-Terrique n’avait d’yeux que pour son fils et héritier de Bois-de-Saule. Aussi, Richard s’était bien vite tourné vers sa sœur pour reprendre le flambeau de leur mère, flambeau qu’elle avait déjà repris bien avant que le fils aîné Ryger ne prenne les rênes du domaine. Les filles commencèrent alors à se lever, se préparant à accompagner leurs cousins pour la promenade. Tout naturellement, Damon proposa à Célia de se joindre à eux. Se levant à son tour, terminant tout de même sa tasse, elle afficha un sourire sur son visage et leur répondit poliment.

- Sans façon, je te remercie. Vous n’allez tout de même pas vous coltiner une vieille dame comme moi voyons.

- Tante Célia ! Je vous interdis de penser cela. Vous n’êtes pas vieille et vous êtes tout à fait charmante pour votre âge.

- Pour mon âge...

Célia posa une main sur sa joue. Elle voyait alors les quelques rides qui s’étaient formées sur ses mains autrefois douces. Elle sentait son visage vieillissant, les quelques plis qui se formaient à chaque mouvement, à chaque expression. Elle garda son sourire, s’approcha de Damon et lui déposa un doux baiser sur la joue, près de la tempe. Elle le trouvait adorable et appréciait ses mots.

- Pardonnez-moi, ma tante. Mes mots ont sans doute été bien maladroit...

À côté, les filles étaient amusées de voir Damon rosir quelque peu tandis que leur tante leur faisait un clin d’œil. Elle se tourna à nouveau vers le jeune chevalier.

- Il n’en est rien, Damon. Va. Emmène ta sœur et vos cousines vous promener. Profitez de ce printemps doux que les Sept nous offrent.

Elle passa ensuite entre ses nièces et sa fille, apposa sur chacune une main sur l’épaule dans un geste tendre. Elle prit congé, retournant alors vers le bureau de son frère. Ils devaient discuter de certaines affaires. Seulement, sur son chemin, elle croisa l’intendant de Bois-de-Saule. Leurs regards se croisant, ils se saluèrent avec courtoisie et respect. Ces deux-là entretenaient une relation des plus secrètes depuis bien des années. Personne ne le savait, personne ne les avait vu ensemble et personne ne le saurait jamais. Néanmoins, pensant uniquement à Hector alors qu’elle arrivait près du bureau de son frère, elle se demanda soudainement si sa mère n’était pas au courant. Bien sûr qu’elle savait. Frappant à la porte du bureau, elle attendit un mot de Richard pour entrer. Elle s’installa dans le premier fauteuil qui se présenta à elle, faisant face à son frère.

- Je sais que la Haye-Pierre et le sort du Conflans te préoccupent en ce moment mais aurais-tu, cher frère, quelques minutes à m’accorder pour parler de Liliyana. Il est temps, je crois.


#677E52 : Célia Van
#99ccff : Damon Ryger

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