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We don't get to choose who we love - avec Anya Vanbois

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We don't get to choose who we love
An 302, lune 9, semaine 1.

Sa respiration dessinait un petit nuage de brume dans le froid. Lysa, vêtue d’une fourrure hivernale, se trouvait dehors, à l’endroit où reposaient non seulement son défunt mari mais aussi son fils, le dernier seigneur de la maison Arryn. Bientôt, Lysa quitterait le Val pour l’officialisation de ses fiançailles et elle ne pouvait savoir quand elle remettrait les pieds ici, à la Porte de la Lune…Mentalement, elle s’adressait à Robin. Elle ne voulait pas qu’il pense qu’elle l’oubliait ou qu’elle le trahissait d’une quelconque manière mais au fond, elle ne pouvait se mentir à elle-même ; depuis sa mort il y a plusieurs lunes, c’était la première fois qu’elle sentait de la joie l’envahir. Était-ce mal ? Devait-elle se sentir coupable de se réjouir de ce mariage futur quand la douleur affreuse qu’elle ressentait suite à la mort de son fils était paradoxalement toujours bien présente en elle ?

La précédente maîtresse des lieux s’était adressée à son successeur, Harold Hardyng. Elle lui avait demandé si lorsqu’elle quitterait la Porte de La Lune, elle pouvait être certaine que les tombes de Robin, mais aussi de Jon, seraient bien entretenues et fleuries. Il avait bien sûr, répondu par l’affirmative. Elle se demandait aussi si elle serait toujours la bienvenue ici, pour se recueillir sur la tombe des deux derniers Arryn. Mais, cette question là, elle ne l'avait pas posée.

Lorsqu’après le banquet, Petyr et elle s’étaient retrouvés seuls. Il ne s’était écoulé que quelques secondes avant que Lysa brise le protocole. Petyr avait embrassé sa main et ce seul contact avait suffi à la faire flancher. Elle s’était effondrée dans ses bras, dans les bras de cet ami qui avait toujours été là pour la conseiller, pour l’aiguiller depuis la mort de Jon. Elle l'avait serrée contre elle, souhaitant que jamais il ne reprenne la route. Qu'il ne la laisse pas seule, ici. A ce moment là, elle ignorait ce qu'il comptait justement lui proposer ensuite. Mais déjà, elle avait eu envie que cette étreinte dure toujours et qu'il reste près d'elle désormais...

C’était d’une main tremblante qu’elle lui avait écrit après la mort de Robin. Elle n’avait pas cherché à cacher son émotion ni à réécrire sa lettre, abîmée par une larme fuyarde…Et là, combien de temps était-elle restée réfugiée dans ses bras, comme si la dernière fois qu’elle y avait trouvé refuge ne remontait pas à si loin ? Elle ne saurait le dire. Elle n’avait pas parlé, il n’avait pas parlé non plus. Il n’y avait pas besoin de mots pour expliquer la raison de sa peine, Petyr la connaissait. Ils lui avaient pris Robin et elle n’avait rien pu faire, elle n’avait pas pu le protéger…Ce que son amant d’autrefois ignorait, c’était que Robin était le deuxième enfant qu’elle échouait à protéger de la cruauté de ce monde…Et que le premier était de son sang...

« Je suis tellement désolée, Robin… », pensa-t-elle si fort qu’elle le murmura dans un souffle. Remarquant le plus grand nuage de brume qu’avait formé sa respiration,  elle comprit qu’elle avait parlé. « Je t’aime tellement. Je t’aime tellement, tellement fort, mon fils…Ne crois pas que je t’oublie…Je t’en prie, ne penses pas cela de moi… », pensa-t-elle ensuite sans le dire. Elle préférait que ses conversations avec Robin, désormais auprès du Père d’En Haut, restent silencieuses, conduites uniquement par l’action de son esprit.

Les images qui la hantaient depuis des lunes vinrent alors s’immiscer dans son esprit, comme cela arrivaient malheureusement souvent lorsqu'elle pensait à son fils. Les fer-nés, leurs cris de sauvages, leurs hachettes levées vers le ciel, la porte de la voiture qui s’ouvre alors qu’elle serre Robin contre elle…Et ce qui arrive ensuite...

Des bruits de pas s’écrasant dans la neige arrachèrent Lysa à ce triste souvenir. Elle se retourna et découvrit Lady Anya Vanbois, qui s’approchait d’elle. Que lui voulait-elle ? Lysa posa à nouveau son regard sur les tombes de son époux et de son fils.

Lady Anya et elle se connaissaient depuis fort longtemps. Très proche de Jon, le visage de la vieille dame était l’un de ceux qui lui était rapidement devenu familier, après son arrivée aux Eyriés. De nombreuses années durant, leur relation avait été au beau fixe même si Anya était surtout une amie de Jon, étant plus de sa génération que de celle de Lysa. Alors que Robin était enfant, leur relation s’était un peu dégradée. La santé de Robin était fragile et si les décisions de Lysa à son sujet pouvaient paraître surprotectrices, elles ne l’avaient sans doute pas assez été, étant donné que c’était durant un voyage diplomatique, assurant ses obligations de seigneur, que le petit garçon avait été tué. Anya avait pourtant été de ceux qui malgré sa fidélité à la maison Arryn, avait regardé l’ascension de Robin au titre de seigneur d’un mauvais œil, Lysa le savait. Du temps où Jon était encore vivant déjà, il était arrivé qu’Anya donne son avis sur l’éducation du petit, chose que Lysa n’avait pas beaucoup appréciée. Et lorsqu’il était devenu sire des Eyriés, la précédente dame du Val se doutait qu’Anya l’avait déploré, imaginant l’actuel seigneur, dont elle était très proche, mieux taillé pour le rôle.

Les pas se rapprochèrent. La née-Tully ne s’était donc pas trompée ; Lady Anya venait bien vers elle, qu’importe si elle troublait son moment de recueillement.
« Lady Vanbois », la salua-t-elle lorsqu’elle parvint à ses côtés.

*
@Anya Vanbois : J'espère que ça te convient We don't get to choose who we love - avec Anya Vanbois 3992757740 Si en lune 9 semaine 1 Anya est déjà repartie vers son fief je changerais pour lune 8 semaine 4 Wink
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Portes de la Lune, an 302, lune 9, semaine 1



Lysa Arryn & Anya Vanbois

« Pardon ? »

Assise à côté de son petit-fils Sandor, Anya avait une moue désabusée qui hésitait entre dégoût et étonnement. Harold lui avait fait sa révélation et s'en était allé rejoindre quelque conseil obscur, laissant sa bienfaitrice en compagnie de Sandor. Drapé de ses plus beaux vêtements, le jeune homme avait définitivement perdu l’aura d’adolescent crâne qui le caractérisait jusqu’alors. Il ressemblait à un lord. A un roi, presque, avec son allure fière et son visage charismatique. Néanmoins, il subsistait d’enfantin la lueur d’amusement qui brillait au fond de ses yeux bleus. Il s’amusait du désarroi de sa grand-mère, plutôt que de s’inquiéter de la révélation qu’il venait d'entendre. Pourtant, il n’y avait vraiment pas de quoi rire. En cela, il avait encore beaucoup à apprendre.

« Vous n'avez pas entendu, grand-mère ? » demanda-t-il. « Vous êtes contrariée ? »

Il y avait bien l’intonation d’une question, mais il ne faisait aucun doute qu’il affirmait plus qu’il ne demandait. Anya soupira et ses yeux sombres se perdirent dans la contemplation du vaste bureau lumineux qu’elle connaissait déjà par cœur. Les énormes étagères de bois noirs qui grimpaient au plafond, lourdes de livres – Harold y jetterait-il seulement un œil ? -, les cartes de Westeros affichées aux murs, l’odeur de parchemins anciens et de cuir usé… Les vitraux projetaient des lueurs dansantes bleues et grises, creusant les visages d’ombres douces. Un vol d’oiseaux flou fila derrière les lourds nuages d’hiver. Combien de temps y avait-elle passé en compagnie de Jon Arryn ? Conseillère, confidente, amie… Elle avait joué les trois rôles pour celui qu’elle considérait comme le dernier Lord Arryn. Son fils ne comptait pas. Il n’avait été qu’une illusion éphémère qui ne marquerait en rien l’histoire. « Oh, Jon, » songea-t-elle. « Qu’aurais-tu dit de ça ? Ta femme avec ce gredin de Baelish… »

« Voilà encore autre chose… » grogna-t-elle. « Qu’est-il encore allé chercher celui-là ? Epouser Lysa Tully ? »

La pauvre femme devait avoir perdu la tête. La mort de sa famille, de son mari, de son fils… Certes, elle ne pouvait pas la blâmer. Mais Littlefinger. Bien sûr, elle connaissait l’amitié que lui portait l’ancienne dame des Eyriés et Anya s’était toujours questionnée sur la santé mentale de la sœur de Catelyn Stark depuis, mais de là à l’épouser ! Il y avait tout de même une limite à ne pas franchir. Si elle n’avait jamais considéré la rousse comme un foudre de guerre, elle l’estimait et la respectait assez pour ne pas lui souhaiter un tel malheur.

« Peut-être qu’ils s’aiment ? » proposa l'écuyer.

La Vanbois lui répondit par un rire narquois.

« Allons Sandor, je croyais que tu avais grandi… et que tu avais pris un peu de plomb dans la cervelle. »

Il roula des yeux.

« Qu’en sais-je moi ? » se défendit-il. « Ils peuvent bien faire ce qu’ils veulent. »

« Oh ça oui, ils peuvent. Mais tu devrais te méfier, » la corrigea-t-elle. « Baelish n’est pas notre allié. Lysa non plus. »

« Mais elle n’est pas notre ennemie non plus. »

La vieille dame se rembrunit. Il avait raison, elle n’était pas leur ennemie. Pas encore. Mais il suffisait d’un murmure de Littlefinger pour la retourner comme une crêpe. En cela, on ne pouvait pas lui faire confiance. Et les Sept seuls savaient ce que cette raclure de Petyr avait derrière la tête en épousant la fille Tully.

« Je vais aller lui parler, » décréta-t-elle de son air sérieux. « Peut-être qu’elle entendra raison. »

Pourtant, bien qu’elle les ait prononcés, elle ne crut pas une seule seconde à ses mots.  

A l’extérieur, le froid était mordant. D’un regard, elle Anya embrassa l’horizon brumeux dont l’atmosphère cristalline se matérialisait en ondoiements blancs. Les pics des montagnes avaient disparu dans le ciel bas et il ne faisait aucun doute qu’on ne les reverrait pas avant le printemps.

Lysa ne fut pas difficile à trouver. Immobile dans la cour gelée, elle ressemblait à une de ces statues que l’on trouvait dans les jardins des Portes de la Lune. Mais à l’inverse d’Alyssa Arryn, la rousse avait bel et bien pleuré la mort de son jeune garçon. Prostrée dans le silence, sa silhouette de femme endeuillée se tourna vers la Vanbois qu’elle salua. Anya lui répondit par un hochement de tête respectueux.

« Lady Arryn. »

Ses yeux tombèrent sur les tombes du père et du fils qu’elle salua de la même manière. « Si tu n’étais pas mort, Jon, nous n’en serions pas là ! » l’accusait-elle presque mentalement.

« Je vous trouble et j’en suis navrée, »
commença-t-elle de sa voix sèche. « Néanmoins, je dois vous parler. Harold m’a parlé de vos fiançailles avec Petyr Baelish. »

Elle parvint à peine à masquer la grimace qui déforma ses lèvres fines à la mention du nom. Franche et directe, la chef de famille ne tourna pas autour du pot.

« Vous n’appréciez pas mon avis quant à feu votre fils et vous n’apprécierez pas celui-ci, mais je me dois de vous le partager. Vous ne pouvez pas faire confiance à cet homme. »

La soeur Tully devait la trouver bien inconvenante de se mêler ainsi d’histoires personnelles. Mais Anya la connaissait depuis longtemps. Elles n’avaient jamais été amies, mais Lysa était la dernière dame Arryn qu’elle avait servi. Et elle l’estimait assez pour la prévenir en cas de danger.



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An 302, lune 9, semaine 1.


Lady Anya n’y alla pas par quatre chemins, expliquant d’emblée à Lysa ce dont elle voulait lui parler. Anya Vanbois avait toujours été ce genre de femme, très franche et très directe. L’épouse Arryn n’avait pas toujours aimé entendre son avis, dont elle se serait parfois très bien passée. D’un côté, sa franchise lui permettait de savoir ce à quoi s’en tenir avec elle ; face à cette hypocrisie ambiante qui régnait toujours dans les milieux nobles et qui encourageait la paranoia, cela pouvait être un soulagement de parfois cotoyer des gens qui exprimer le fonds de leur pensée. Cependant, Lady Arryn était également une jeune femme susceptible sur les bords et la franchise d’Anya pouvait donc la heurter ou l’agacer.

Ses fiançailles avec Petyr Baelish. Cela sonnait si bien à ses oreilles. Immédiatement, Lysa devina que si Anya voulait lui parler de Petyr, ce ne serait pas en termes élogieux. Sa culpabilité secrète, qu’elle venait d’exprimer à l’égard de Robin, s’envola alors pour laisser place à une ferme assurance. La médisance des gens envers Petyr lui insufflait le courage et l’envie de défendre bec et ongle cet homme qu’elle aimait et de se montrer imperturbable quant à sa décision.

« En effet. Lord Baelish m’a exprimé son souhait de m’épouser après le banquet donné en l’honneur du roi, et j'ai accepté sa demande. », répondit Lysa. Elle avait dû revoir la tournure de sa phrase avant de la prononcer car amoureuse comme elle l’était, c’est tout naturellement qu’elle avait pensé « Lord Baelish m’a demandé ma main ». Pour protéger ses sentiments des mauvaises langues, elle avait finalement opté pour une tournure plus neutre et moins fleur bleue. Pourtant, qu’était cette demande sinon de l’amour ? La maison Baelish n’avait toujours pas d’héritier et Petyr la choisissait elle pour devenir son épouse, malgré son âge et ses grossesses à problèmes. Oh certes, Lysa estimait que le problème devait venir de Jon et de sa semence vieille et de mauvaise qualité. Mais tout de même, Petyr aurait très bien pu choisir une femme plus jeune et plus susceptible d’être fertile. De plus, Lysa n’appartenait plus à aucune noble maison existante et sans avoir grand-chose à offrir,  n’avait d’autres choix que de se trouver un époux pour rejoindre un nouveau foyer. Et c’était Petyr qui l’avait demandée en mariage. Pour lui offrir le bonheur qu’elle méritait, avait-il dit. Qu’était ce sinon de l’amour ?

Lysa ne s’était pas trompée ; Lady Anya lui conseillait de ne pas faire confiance à « cet homme ». La née-Tully, qui avait confiance en Petyr plus qu’en n’importe qui en ce monde, interprétait cette méfiance de la part des valois à l’égard de son futur époux comme de la jalousie. Petyr était un homme qui s’était élevé seul. Issu d’une maison nouvelle d’ascendance braavienne, il avait construit par ses propres moyens sa richesse et sa place enviable dans la noble société. Certains le considéraient comme un parvenu. Certains n’approuvaient guère non plus certaines de ses activités, comme la gérance de ses maisons de plaisirs, considérées comme « peu respectables » pour une personne de la noblesse. Lysa, elle-même, se demandait ce que cela lui ferait de voir Petyr entouré de ces femmes à moitié-nue qui étaient ses employées…Néanmoins, comment expliquer la répulsion de certains valois à l’égard de Petyr autrement que comme de la jalousie face à sa réussite fulgurante, qu’il ne devait qu’à lui et à son intelligence ?

Impulsive comme elle pouvait l’être parfois, Lysa était sur le point de répondre froidement à Lady Anya, agacée qu’elle se permette ainsi de juger Petyr et qu’elle tente de la faire douter de lui. La première chose qui lui vint à l’esprit fut de défendre Petyr avec fermeté. Cependant, pensant à l’ascension de son futur époux, ascension qu’il devait à son intelligence, Lysa choisit d’agir autrement. Il était souvent arrivé qu’elle se sente stupide après avoir réagi de manière impulsive, lorsqu’elle lisait les conseils que Petyr lui prodiguait par courrier alors qu’elle était régente du Val. Elle s’était sentie stupide également lorsque Petyr lui avait fait cette demande, juste après qu’elle ait insinué ses reproches à Rhaegar Targaryen quant à ce qui était arrivé à son fils. Quelle mauvaise idée…Elle partirait bientôt pour la capitale, pour vivre à la cour et Rhaegar Targaryen se méfiait désormais d’elle. Elle s’était sentie stupide, oui, stupide et désolée pour Petyr qui en l’épousant, lui, Grand Argentier du Roi, épouserait une femme dont sa Majesté se méfiait.

Le savoir, c’est le pouvoir, avait coutume de dire Petyr…

« Et pourquoi ça ? », demanda Lysa. Cela pourrait peut-être lui être utile, ainsi qu’à son mari, de savoir ce qui se disait sur lui. Elle se sentit fière, intérieurement, de s’être empêchée de répondre sous le feu de l’action. Elle avait trente-cinq ans, elle avait été dame du Val pendant quinze ans et elle faillait parfois encore à agir sagement ; il n’y avait donc pas de quoi se sentir fière d’elle, après tout. Et pourtant, telle une adolescente, elle imagina cet homme qu’elle aimait la regarder en ce moment et esquisser un léger sourire complice. Elle imagina son futur époux fier d’elle et c’est cette vision qui lui permit de ressentir cette fierté. Elle espérait pouvoir lui insuffler une telle émotion un jour ; le rendre fier, fier de sa femme.

Étrangement, alors que tout le monde semblait penser que Petyr ne méritait pas Lysa, la née-Tully, de son côté, se demandait si elle serait à la hauteur de cet homme qu'elle aimait tant...
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Portes de la Lune, an 302, lune 9, semaine 1



Lysa Arryn & Anya Vanbois

À l’entente du nom de Petyr Baelish, l’attitude de Lysa Arryn changea du tout au tout. De mère effondrée et endeuillée, elle gagna en assurance. Ses épaules légèrement voutée d’avoir tant pleuré se redressèrent et malgré un visage encore blême, elle n’hésita pas à lever haut le menton, fière comme un coq. Derechef, Anya sut que tous les mots du monde ne feraient pas changer l’ancienne Tully d’avis. La jeune veuve était prête à camper sur ses positions et la Vanbois devait bien admettre qu’elle était aussi têtue qu’elle lorsqu’elle avait une idée en tête.
La rousse lui répondit simplement, imperturbable, et confirma les craintes d’Anya. Ainsi, c’était donc vrai. Baelish avait demandé l’ancienne suzeraine du Val en mariage et cette imbécile avait accepté. Les méninges de la dame de fer se mirent en marche. Pourquoi, par les Sept, ce vil animal souhaitait-il épouser Lysa ? De l’amour ? Bah, la bonne blague ! Baelish n’aimait qu’une seul chose : le pouvoir. Bien sûr, comme tout le monde, elle avait entendu l’histoire ridicule de son affrontement contre Brandon Stark pour la main de Catelyn Tully. Mais il n’était alors qu’un jeune adolescent. Il avait changé. Aimait-il encore la soeur aînée de Lysa ? Peut-être. Mais ce noble et naïf sentiment ne parvenait même pas à chatouiller son ambition. Il avait plus de jugeote que ça pour tomber amoureux. Mais maintenant, qu’est-ce que Lysa pouvait bien lui faire gagner ?

Il était évident que la dame était échauffée. On l’aurait cru piquée par une guêpe. Néanmoins, elle fit preuve de retenue et garda son calme, derrière son masque narquois. Peut-être que toutes ces années en tant qu’épouse de Jon n’étaient pas vaines, finalement…
Un peu plus et Anya aurait pu croire qu’elle venait de l’attaquer elle et non pas son fiancé. Si Petyr ne l’aimait pas, il ne faisait aucun doute que l’inverse était faux. Comment la mère de Morton aurait-elle pu lui faire entendre raison ? Il était évident que son interlocutrice se berçait d’une douce illusion. La question candide qu’elle lui posa alors fit soupirer la vieille femme. Lysa Arryn était sur la défensive.

« Je ne suis pas votre amie, mais je ne suis certainement pas votre ennemie, » se sentit-elle obligée de lui rappeler. « Pourquoi pensez-vous que je vous mette en garde ? Pour vous nuire ? Cela n’a aucun sens. »

Au contraire, elle avait conseillé le couple Arryn pendant des années et s’était toujours montrée d’une loyauté indéfectible. Elle pouvait certes se montrer un peu ardue quelques fois, mais elle ne pensait qu’au bien de la famille suzeraine et qu’au bien du Val. Et jusqu’à preuve du contraire, Lysa était encore une Arryn.

« Dois-je vraiment vous énoncer tous ses travers ? Lady Arryn, vous n’êtes pas sourde, vous savez ce qui se dit à travers tout Westeros sur Petyr Baelish, » rétorqua-t-elle, désabusée.

Se pouvait-il qu’elle l’ignorait ? Non, Anya n’osait y croire. Si vraiment, elle ne savait pas qui elle épousait, tout ceci relevait de la blague. Et était-ce son rôle que de lui ouvrir les yeux ? Cela, elle l’ignorait. La Tully était-elle entourée de conseillers n’ayant que faire de sa réputation et de sa sécurité ? Pourquoi l’avait-on laissé prendre une décision aussi insensée ?
Mais Lysa lui posait la question et elle se sentit dans le devoir d’y répondre.

« Aucun honnête homme n’est à la tête d’un réseau de bordels, ne devient Grand Argentier en seulement quelques années et décuple les revenus de la Couronne en claquant des doigts. Aucun. C'est un ambitieux retors que ne songe qu'à ses intérêts. »

Ces choses là, en dehors de son ignoble réseau de prostituées, demandait du temps, de l’investissement et de faire ses preuves. Une telle ascension, une telle fulgurance, ne pouvait être que la preuve de moyens détournés à la nature obscure. Tout homme et toute femme réfléchie se méfiaient de Baelish comme de la peste. Lysa pensait certainement qu’il était unique. Exceptionnel. Un monstre d’intelligence. Sur ce point-là, elle n’aurait pas tort. Mais cela ne justifiait en aucun cas l’absence de méfiance !
Anya était inflexible. Sèche, sa silhouette longiligne étirée de tout son long, elle observait la jeune Arryn de son oeil sévère. Elle trouvait également étrange que le Roi Rhaegar n’ait pas déployé d’hommes sur les côtes de Westeros, pourtant attaquées par les fer-nés. Le Roi se fichait-il donc de son peuple au point de risquer un sourd mécontentement ? Probablement pas. Cela était-il dû à un manque d’argent ? Pourtant, on disait Petyr Baelish si prompt à répondre aux besoins royaux… Cette question la taraudait depuis la mort du jeune Robin Arryn, mais elle n’avait pas assez d’éléments pour en faire son fer de lance.

Ses yeux tombèrent une fois encore sur la tombe de Jon et de son fils. Une fine couche neigeuse recouvrait la pierre grise. Comme il était inconvenant de discuter de cela ici ! Les morts avaient beau ne jamais revenir, elle n’appréciait que guère de parler du futur mariage de la veuve devant les dépouilles de sa famille.

« Pourquoi lord Baelish vous épouse-t-il ? Et pourquoi avez-vous accepté ? » lui demanda-t-elle honnêtement.

Lady Arryn s’était-elle posée la question ? Se l’était-elle réellement posée ? Anya en doutait fortement. Voilà pourquoi elle lui demandait.
Elle était encore belle, malgré une vie semée d’obstacles. Mais la beauté se fane. La stupidité, en revanche, reste pour toujours. Et elle espérait vraiment que Lysa avait un peu appris dans le Val. Littlefinger n’était pas du genre à prendre ce genre de décision uniquement sur la physique de sa future épouse. La veuve était-elle encore capable de porter des enfants ? Ses nombreuses fausses couches laissaient présager que non. Baelish mettait donc en péril le futur de sa maison. Il ne sacrifiait pas tout cela pour rien. Il avait quelque chose derrière la tête.

Et Anya était bien déterminée à découvrir quoi.



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An 302, lune 9, semaine 1.

La dame de Chênes en Fer ne craignait pas de se montrer franche, même lorsque ses paroles d’une honnêteté tranchante déplaisait à ses interlocuteurs. Elle n’avait pas manqué de dire à Lysa ce qu’elle pensait de l’éducation de Robin. Et aujourd’hui, elle ne manquait pas de lui dire ce qu’elle pensait de Petyr. Non, bien sûr, Lady Vanbois ne tentait pas de mettre Lysa en garde pour lui nuire. Elle la mettait en garde parce qu’elle se méfiait réellement de Petyr Baelish. Cela n’étonna pas Lysa. Elle n’était pas la première à penser du mal de lui, elle ne serait pas la dernière non plus.

« Je pense que vous me dites de me méfier de lui parce que vous pensez que je devrais m’en méfier. Vous n’êtes pas la première à penser du mal de Petyr et sans doute pas la dernière. Mais, je le connais depuis longtemps et je le connais mieux que vous, Lady Anya. », soupira Lysa.

Lysa avait accidentellement laissé tomber le cérémonial « Lord Baelish »  pour une dénomination plus familière qui n’étonnerait cependant probablement pas Lady Anya. Il était connu que Petyr et Lysa avaient grandis ensemble, à Vivesaigues. En revanche, certains détails de leur relation étaient ignorés. Et parmi eux, la fréquence à laquelle Lysa avait été habituée à tracer les lettres de ce prénom bien souvent, ces dernières années. Oh, si les valois savaient qu’elle avait compté Petyr Baelish parmi ses plus proches conseillers – conseiller par correspondance, certes, mais conseiller tout de même – ils ne seraient certes pas ravis…

Mais, Lady Anya ne se laissa pas convaincre si facilement.

« Aucun honnête homme n’est à la tête d’un réseau de bordels, ne devient Grand Argentier en seulement quelques années et décuple les revenus de la Couronne en claquant des doigts. Aucun. C'est un ambitieux retors que ne songe qu'à ses intérêts. »

Les épaules de Lysa se voutèrent légèrement alors qu’elle s’emmitouflait davantage dans son manteau. Bien sûr, elle savait. Et sa première pensée ne fut pas pour réfléchir à ce que cela pouvait potentiellement cacher sur Petyr, non. Elle pensa à l’éventuelle rivalité que cela lui apportait. Elle pensa à la jalousie qu’elle pouvait ressentir. Elle pensa comme pensent les femmes éprises. Car c’était une réalité qu’elle redoutait…Savoir son époux régulièrement entouré de femmes dans la fleur de l’âge, au visage et aux courbes parfaites, soigneusement sélectionnées, sans doute par Petyr lui-même, pour devenir une de ses employées…Des femmes qu’ils verraient nues ou très dénudées, des femmes dont il pouvait disposer à sa guise. Des vulgaires prostituées, certes. Mais, Lysa était peu confiante face au poids des années qui l’avait transformée, de la jeune fille qui plaisait à Petyr, à une femme marquée par les grossesses et les prises de poids qui les avaient accompagnées. Elle n’avait plus quinze ans, désormais, et son corps gardait certaines marques…Est-ce que Petyr la trouverait belle, malgré tout ?

« Lord Baelish est un homme ambitieux, je vous l’accorde. Tant de nobles le sont, et est-ce que nous les pointons du doigt pour autant ? Non. Contrairement à vous et moi, il se fait simplement que Lord Baelish ne provient pas à l’origine d’une très grande ou très ancienne maison. Il a construit sa richesse avec les cartes qu’il possédait, tout simplement. », répondit Lysa avec assurance. Petyr avait été un plus grand soutien pur elle que n'importe qui d'autres durant ces dernières années. Elle ignorait comment, exactement, Petyr avait pu obtenir de tels résultats. Cependant, elle ne passait pas ses journées à se poser la question. La précédente dame du Val n’imaginait pas son ami de toujours capable de monstruosités et probablement souhaitait elle inconsciemment éviter la question de savoir de quoi Petyr était capable pour grossir sa fortune ou agrandir son pouvoir. Il était intelligent, voilà tout. Il avait toujours été très intelligent. S’il avait réussi de telles prouesses, sa clairvoyance et ses connaissances hors-pairs pouvaient sans doute l’expliquer en très grandes parties. Quant à ses rumeurs à son sujet, la jalousie y était sans doute pour beaucoup. Qu'il était déplaisant pour la noblesse de Westeros de voir à quel point un petit nobliau d'une maison d'ascendance braavienne était parvenu à s’élever. Bien sûr, cela faisait parler...

« Pourquoi lord Baelish vous épouse-t-il ? Et pourquoi avez-vous accepté ? », lui demanda Anya Vanbois.

Parce qu’il m’aime, pensa Lysa. Mais, bien qu'elle pensa cette phrase, l’épouse de feu Jon Arryn ne parvint pas à la formuler à haute voix, de peur de paraître ridicule. Pourtant, c’était la vérité. Mais, elle pouvait sentir à quel point cela pourrait la faire paraître stupide d’avouer qu’un « homme comme Baelish » demanderait quelqu’un en mariage par amour. Derrière le Grand Argentier, pourtant, il y avait un homme. Un homme qu’elle connaissait mieux qu’eux tous. Un homme qui l’avait aimée et qu’elle avait aimé. Un homme qui revenait aujourd’hui vers elle, pour leur offrir le bonheur qu’ils n’avaient pas pu avoir par le passé. N'est ce pas ?...

Le regard de Lysa, qui s'était baissé à nouveau sur la dépouille de son fils Robin, quitta celle-ci. Elle se détourna des tombes et commença à marcher dans la neige. Peut-être ressentait-elle elle aussi un certain malaise à parler de son futur mariage juste devant Robin...

« Pourquoi voudriez-vous qu'il m’épouse, Lady Anya ? », demanda-t-elle  « Si vous pensez que chacune de ses actions sont guidées par l’intérêt, alors dites-moi pourquoi il me propose ce mariage. Pour l’argent ? Il en a bien plus que moi, maintenant que je n’ai plus le titre que j’ai porté si longtemps. Pour mon statut, alors ? Je ne suis plus dame du Val. Je ne suis plus dame de quelque lieu que ce soit d'ailleurs. », répondit-elle. Elle reprit avec sa propre hypothèse, cependant plus mesurée que ce qu'elle pensait réellement : « Je vous l’ai dit, Petyr et moi nous connaissons depuis longtemps. Nous avons grandi ensemble. Nous avons de l’affection l’un pour l’autre, nous sommes amis. Voilà pourquoi il me demande de l’épouser. Pour quelles raisons sinon ? », dit-elle. « Quant à moi, vous n’allez pas me dire que vous ne comptiez pas sur le fait que je me trouve un nouvel époux, afin que je puisse quitter les lieux et décharger ce cher Harold de ma présence. C’était la seule chose que je pouvais faire pour espérer être chez moi quelque part à nouveau et nous savons toutes les deux que j'aurais bien été forcée de le faire, car je ne peux de toute évidence rester ici éternellement. J’imagine que Lord Hardyng et peut-être même vous-même craigniez d’ailleurs que cela ne soit trop long, qu’il s’écoule un certain temps avant qu’un mariage ne se projette pour moi et que je ne puisse quitter les lieux... », répondit Lysa. Après tout, elle n’avait plus quinze mais trente-cinq ans. Et si elle avait prouvé qu’elle savait porter des enfants, elle en avait écoulé perdu trois.  « Je me marie parce que je dois me marier, comme vous le savez. Et je me marie avec lui pour les mêmes raisons que lui m’a choisi moi ; nous nous connaissons depuis longtemps et c’est un ami qui m’est cher. Vous en conviendrez je pense, cela est plus sûr d’épouser un ami qu'un homme qu'on ne connait pas. », dit-elle. Elle avait mesuré sa réponse car ce qu'elle pensait réellement, c'était que Petyr l'aimait plus que comme une simple amie, qu'il l'aimait vraiment. Il voulait lui apporter le bonheur qu'elle méritait, c'est ce qu'il avait dit. De plus, il n'avait pas d'héritier. Pourquoi la choisirait-il elle, une femme de trente cinq, si ce n'était pas par amour ? Oh, elle pensait le connaître, oui. Mais, elle avait tout faux à son sujet…
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Portes de la Lune, an 302, lune 9, semaine 1



Lysa Arryn & Anya Vanbois

Dans le froid glacial de l’hiver, les deux femmes se faisaient face. Semblables à deux statues, elles bougeaient à peine. Une neige fine tombait doucement, comme pour les recouvrir d’un voile immaculée, qu’aucune ne faisait mine d’ôter. En contrebas, une brume blanche rampait le long des chemins rocailleux et viendrait bientôt envelopper leurs pieds. Les tombes d’un vieil homme et d’un enfant comme seuls témoins, elles ne flanchaient ni l’une, ni l’autre, dans cette joute qui n’en était pas vraiment une. Lysa Arryn était peut-être la plus expressive, bien qu’elle s’évertuait à conserver un masque d’indifférence. Malheureusement pour elle, la nonchalance n’était pas dans sa nature et garder le change devait relever d’un effort considérable pour elle. Néanmoins, Anya ne pouvait pas cracher sur l’intention. Après tout, c’était ce qu’elle lui avait conseillé durant toutes ces années où elle l’avait servie. C’était ce que sa grand-mère lui avait appris, bien qu’elle ait hérité d’une froideur naturelle à sa naissance. La cultiver n’avait fait que la sauver.

La veuve roula des yeux. « Pauvre sotte ! » songea-t-elle. « Elle ne voit pas plus loin que le bout de son nez. »

« Si nous sommes autant à nous méfier de Petyr Baelish, c’est à raison, vous ne croyez pas ? Ou alors croyez-vous que tout Westeros lui en veut, le jalouse, pour sa terrible intelligence et son sens si honorable des affaires de la chair ? Ne faites pas l’erreur de penser que parce que vous jouiez ensemble lorsque vous étiez enfant à vous éclabousser dans les rivières du Conflans vous le connaissez mieux que moi, mieux que tout ceux qui ont l’intelligence de vous mettre en garde contre lui. Les gens changent. Mais les Sept seuls savent s’il n’est pas né ainsi. »

Allons, depuis combien de temps la Tully et Littlefinger ne s’étaient-ils pas vus ? Croyait-elle épouser l’adolescent malingre qu’elle avait un jour connu ? Lui ne pensait certainement pas se marier avec la jeune fille fraîche comme la rosée qui riait dans le château de Vivesaigues.

« L’ambition est un trait de personnalité, » répondit-elle de sa voix grave. « Un des rares qu’on ne saurait classer en qualité ou en défaut. C’est la manière dont on assouvit cette soif de pouvoir qui la range dans l’une ou dans l’autre des catégories. Où classeriez-vous une ambition servie par le mensonge, la ruse et un réseau de prostitution ? Ce sont là les cartes qu’il possède, lady Arryn. »

L’assurance de la rousse l’agaçait. La Vanbois ne parvenait pas à comprendre comment il était possible d’accorder une confiance aveugle en un homme comme Petyr Baelish. Un peu de doute était toujours bénéfique. Il permettait de ne pas s’illusionner et de garder les pieds sur terre. D’envisager les « et si… »… Mais la mère de Robin ne semblait pas capable d’une telle simplicité. Elle se bornait à n’envisager Littlefinger que sous un seul angle. L’angle de l’amour, en n’en pas douter. La dame de fer était assez vieille et avait assez vécu pour reconnaître les signes d’une telle catastrophe. Elle se rappela alors du tout jeune Arys Manning qui s’était tant évertué à faire les yeux doux à sa fille Alyssa. Le spectacle pathétique que cela avait été ! Pourtant, Anya ne pouvait lui en vouloir et pour lui éviter une plus grande humiliation devant Steffon Rogers, le fiancé d’Alyssa, elle avait coupé court à son jeu. Peut-être conservait-il une amertume pour la chef de famille, mais celle-ci ne regrettait rien. Au moins, la face avait été conservée. Et peut-être que Lysa Arryn la détestait à ce moment précis. « Bah, j’y survivrai, » pensa la Vanbois.

Finalement, la veuve de Jon frissonna et, après un dernier coup d’oeil vers les pierres grises destinées aux deux derniers membres de sa famille, s’en éloigna. La grand-mère de Roland eut un regard désolé pour son ami de toujours. Mais Lysa, malgré l’entrave de la neige, était déjà loin.

« Croyez-vous que je vais vous courir après ? » grogna-t-elle. « Je n’ai plus les jambes de ma jeunesse… ah, c’est peut-être la seule chose que je lui envie à votre Littlefinger, ses genoux parfaitement huilés ! »

Car il devait en faire des kilomètres à courir partout entre ses bordels, la demeure des dragons et les dieux seuls savaient où encore… Prudente, mais le pas toujours digne, la dame de fer rattrapa son retard et força la jeune femme à se calquer à son rythme.
Lorsque Lysa lui retourna sa question, la veuve sourcilla.

« Mais enfin lady Arryn, c’est à vous que je pose la question. J’ignore complètement ce que votre fiancé à derrière la tête. En revanche, vous semblez avoir votre avis sur la chose. »


Lysa avait méthodiquement éliminé toutes les options rationnelles. Ni l’argent, ni le statut. Quoi alors, sinon l’amour ? Oh, elle se plaisait tant à le croire que c’en était un crève-coeur. À trente-cinq ans et après des années de mariage à l’homme le plus puissant du Val, elle ressemblait plus que jamais à l’adolescent orageois de quinze ans qui était tombée amoureux d’Alyssa. N’était-ce pas tout bonnement ridicule ?

« Allons, allons, laissez moi récapituler, » commença-t-elle en levant trois doigts. « Ce n’est pas l’argent, certainement, vous avez raison -elle baissa un doigt-, en effet, ce n’est pas le statut -elle baissa son deuxième doigt- mh… que nous reste-t-il… il vous épouserait pas amitié ? A-t-on déjà vu ça ? Non, ce n’est pas ce que vous pensez… L’amour peut-être ? Qu’en dites-vous ? Je vous l’ai dit, j’ignore complètement ce qui se passe dans la tête de Baelish, mais vous qui le connaissez si bien, dites-moi. »

Pourtant, il était évident que bien que la cervelle de Petyr Baelish soit une énigme pour elle, son coeur, lui, ne l’était pas. Était-il seulement capable d’aimer ? Certainement. Mais pas un être humain. Sacrifierait-il l’avenir de sa maison par amitié ? Par amour ? Impossible. Un homme comme lui cherchait à s’élever, à rayonner. Et ce n’était certainement pas en épousant Lysa Tully qu’il parviendrait à un tel résultat. À moins que… À moins que quoi ? C’était ce flou qui l’inquiétait.

Encore une fois, elle roula des yeux.

« Cessez donc de vous comporter en victime. Vous savez très bien qu’Harrold ne vous aurait jamais mise à la porte. Vous êtes une Arryn et le Val vous respecte assez pour ne pas vous jeter dehors comme une malpropre. Pourquoi croyez-vous donc que votre présence aurait été un fardeau ? Je vous le demande honnêtement. Ne vous êtes-vous donc jamais sentie acceptée ici ? Ne me faite pas croire que vous avez accepté la proposition de Baelish pour l’abnégation de nous débarrasser le plancher. »

Jamais Anya n’avait été témoin d’un manque de déférence d’un seigneur du Val à l’égard de sa dame. Evidemment, elle ne plaisait pas à tout le monde et certaines de ses idées et de ses décisions avaient fait grincer des dents. Mais on ne pouvait pas séduire tous les coeurs et le temps avait fait que Lysa avait finalement trouvé sa place ici. Du moins, c’était ce qu’Anya croyait.

« Vous avez été courtisée par plus d’un seigneur du Val à la mort de Jon, » lui rappela-t-elle. « Des hommes de confiance que vous connaissez, des hommes d'honneur qui vous aurait soutenue. Je suis persuadée que leur proposition tient toujours. »

À la dernière affirmation de la rousse, la dame de fer resta de marbre. Sa bouche se pinça, laissant apparaitre une multitude de ridicules entaillant ses lèvres fines comme des dizaines de cicatrices disgracieuses.

« Croyez le ou non, j’ai épousé un ami. Et je n’ai jamais été aussi heureuse que veuve. »

Elle expira et son souffle se matérialisa en une fumée blanche qui s’étiola dans le ciel de la même couleur.

« Je suis dure, je le sais. Mais en tant que dernière lady Arryn et en tant que personne, je ne souhaite réellement que votre bien. »



DRACARYS
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An 302, lune 9, semaine 1.

Lysa ne put s’empêcher de se sentir gênée lorsque Lady Anya mentionna les « affaires de la chair » tenues par son futur mari ainsi que l’enfance qu’elle avait passée aux côtés de Petyr à « s’éclabousser dans les rivières du Conflans » comme elle le décrivit. Lysa et Petyr avaient partagés bien plus que d’innocents jeux d’enfants... Et Jon, qui gisait mort sous terre face à elles, ne l’avait jamais su. Il avait su pour sa grossesse et pour son avortement mais il n’avait jamais cherché à connaître l’identité du père de cet enfant avorté. Petyr non plus, n’avait jamais su…

« Je n’ai pas peur de lui, Lady Anya. », se contenta de répondre Lysa, qui s’était de toute évidence refermée. Oh, elle savait bien qu’Anya ne parlait pas de peur, mais de méfiance. Lysa avait-elle confiance en Petyr ? Oui. Elle avait besoin de le croire. Et pourtant, cette mention à leur vie passée à Vivesaigues avait fait remonter à la surface de douloureux souvenir ; ne lui avait-elle pas fait suffisamment confiance que pour lui offrir ce qu’une jeune femme de noble famille a de plus précieux ? Et pourtant, cela ne l’avait pas empêché de tomber dans les filets de Catelyn ensuite. Se pouvait-il qu’elle puisse lui suffire désormais, alors que sous sa robe, ses cuisses avaient grossis et que par endroit sa peau avait perdu de sa fermeté au profit des marques de grossesses échouées quand à l’époque, jeune et intacte, elle n’avait pas été assez ? Elle chassa ces prémices de jalousie de son esprit et se repassant la scène de cette demande en mariage qu’il lui avait faite, ne put que se montrer solidaire de son futur époux. « Et de mon côté, j’ai toutes les raisons de penser qu’il mérite ma confiance. », osa-t-elle répondre, peu importe à quel point cela pourrait sonner absurde aux oreilles de la Vanbois.  La née-Tully poursuivit en répondant à Anya Vanbois que Petyr avait certes de l’ambition et qu’il n’était pas le seul ; sa seule différence était son origine plutôt modeste qu’il avait contrainte à jouer d’autres cartes.

« L’ambition est un trait de personnalité. Un des rares qu’on ne saurait classer en qualité ou en défaut. C’est la manière dont on assouvit cette soif de pouvoir qui la range dans l’une ou dans l’autre des catégories. Où classeriez-vous une ambition servie par le mensonge, la ruse et un réseau de prostitution ? Ce sont là les cartes qu’il possède, lady Arryn. »

Le mensonge. Voilà une chose qui effrayait Lysa. Elle ne doutait pas que Petyr puisse mentir aisément. Au contraire de la née-Tully, Lord Baelish savait en effet très bien masquer ses sentiments et ses émotions, ce qui devait beaucoup le servir dans sa vie à la cour, cette cage dorée sous la surveillance permanente d’un roi perturbé. Mais, il ne lui mentirait pas à elle, n’est-ce pas ? Il l’avait conseillé lorsqu’elle était régente du Val. Il l’avait réconfortée par ses mots lorsqu’elle avait perdu Robin. Il avait été là pour elle…Et il voulait l’être, c’était ce qu’il lui avait dit. Il voulait la rendre heureuse. Il ne lui mentirait pas n’est ce pas ? Il ne lui mentirait plus. Et pourtant, les mots de Lady Vanbois donnèrent envie à Lysa de trouver Petyr et de lui poser la question face à face tout en sondant son regard. « Me mentirais-tu Petyr ? Mentiras-tu à ton épouse ? » Hélas, Petyr n’était plus à la Porte de la Lune. Hélas, son regard était de toute façon parfois très difficile à sonder…

« Croyez-vous que je vais vous courir après ? » grogna Lady Anya lorsque Lysa se détourna des tombes de feu son époux et son fils. « Je n’ai plus les jambes de ma jeunesse… ah, c’est peut-être la seule chose que je lui envie à votre Littlefinger, ses genoux parfaitement huilés ! »

Votre Littlefinger. Petyr détestait ce surnom et Lysa ne l’avait jamais appelé ainsi. Mais ce simple choix de déterminant permit à Lady Arryn de douter d’une chose ; Etait-elle si mauvaise actrice que cela ? Anya Vanbois avait-elle pu deviner qu’elle aimait Petyr Baelish ?

La veuve Arryn ralentit le pas suite à la plainte de la dame de fer de la maison Vanbois. Elle lui répondit en éliminant la possibilité d’un mariage motivé par l’intérêt politique ou financier, étant donné la perte de son statut et d’une grande, très grande partie, de son capital économique.

« Mais enfin lady Arryn, c’est à vous que je pose la question. J’ignore complètement ce que votre fiancé à derrière la tête. En revanche, vous semblez avoir votre avis sur la chose. »

« Allons, allons, laissez moi récapituler, » commença-t-elle en levant trois doigts. « Ce n’est pas l’argent, certainement, vous avez raison -elle baissa un doigt-, en effet, ce n’est pas le statut -elle baissa son deuxième doigt- mh… que nous reste-t-il… il vous épouserait pas amitié ? A-t-on déjà vu ça ? Non, ce n’est pas ce que vous pensez… L’amour peut-être ? Qu’en dites-vous ? Je vous l’ai dit, j’ignore complètement ce qui se passe dans la tête de Baelish, mais vous qui le connaissez si bien, dites-moi. »

L’amour, oui, c’était finalement ce qu’elle pensait être l’explication la plus évidente. Lady Anya lui avait posé la question sur un ton neutre mais Lysa ne tomba pas dans le piège. Elle se doutait bien qu’elle paraitrait ridicule si elle optait pour cette option. La conflanaise aux longs cheveux roux répondit alors en évoquant son besoin de se marier afin de retrouver un nouveau foyer.

Lady Anya ne masqua pas ce qu’elle pensait de cette explication en roulant des yeux.
« Cessez donc de vous comporter en victime. Vous savez très bien qu’Harrold ne vous aurait jamais mise à la porte. Vous êtes une Arryn et le Val vous respecte assez pour ne pas vous jeter dehors comme une malpropre. Pourquoi croyez-vous donc que votre présence aurait été un fardeau ? Je vous le demande honnêtement. Ne vous êtes-vous donc jamais sentie acceptée ici ? Ne me faite pas croire que vous avez accepté la proposition de Baelish pour l’abnégation de nous débarrasser le plancher. »

Cette fois, Lysa sentit la colère monter en elle.
« Me comporter en victime ? », répéta-t-elle d’un ton tout de même marqué par l’agressivité liée à sa douleur. Etait-ce Anya Vanbois, mère de si nombreux enfants, qui lui disait cela quand elle venait de perdre son fils unique, littéralement transpercé par la lame d’une épée sous ses yeux ? Et avec lui, non seulement sa raison d’être mais aussi son titre, son statut, sa maison ? Que savait-elle de sa peine ? Que savait-elle de tout cela ?

La née Tully tâcha de réprimer cette colère montante car de toute évidence, non, elle ne voulait pas expliquer à Anya l’inexplicable. Elle n’avait pas à se justifier, et quand bien même le ferait-elle, il y avait des douleurs que personne ne pouvait comprendre sans en avoir fait l’expérience.

« Je ne suis peut-être pas un fardeau pour Harrold, soit.»
Elle en doutait fortement mais n'insista pas. «  Vous est-il venu à l’esprit que c’est Harrold mon fardeau ? », demanda-t-elle, très honnêtement. Son ton était plus calme, même s’il demeurait froid. « Vous est-il venu à l’esprit qu’il m’est pénible de le regarder quotidiennement siéger là où mon fils… »[/i] Sa voix s’étrangla malgré elle sur le coup de l’émotion. Peu importe la légitimité d’Harrold, il n’était point difficile de comprendre que sa présence n’était qu’un constant rappel de la mort de Robin. Elle s’arrêta et déglutit. Elle dut également stopper les larmes qui menaçaient de monter à ses yeux avant de reprendre mais en démarrant une autre femme, craignant de ne pas pouvoir terminer la précédente sans céder à l’émotion. « J’ai été dame du Val pendant près de 20 ans, Lady Vanbois. Imaginez-vous un instant passer de dame des lieux à simple invitée chez vous, à Chêne-en-Fer et ensuite, vous pourrez venir me reparler du fait de me sentir « acceptée » ou non dans la demeure où j’ai élevé mon enfant. », déclara-t-elle d’une voix assurée. Peu importe ce que Lady Anya pourrait en dire, Lysa peinait à voir une femme d’un tel caractère se satisfaire d’une telle situation.

« Vous avez été courtisée par plus d’un seigneur du Val à la mort de Jon, » lui rappela Anya Vanbois. Oh, oui ils avaient été nombreux à en vouloir à son titre, à son statut, à son argent. Ils avaient été nombreux à s’intéresser soudainement à son petit Robin, à déclarer le vouloir prendre comme pupille. Et pourquoi donc ? Pour ensuite décider de son éducation sans son consentement ?  Très peu pour elle, sans compter que parmi ses prétendants se trouvaient des hommes qu’elle ne supportait qu’à très petite dose, comme Nestor Royce, par exemple. « Des hommes de confiance que vous connaissez, des hommes d'honneur qui vous aurait soutenue. Je suis persuadée que leur proposition tient toujours. »
« Croyez le ou non, j’ai épousé un ami. Et je n’ai jamais été aussi heureuse que veuve. Je suis dure, je le sais. Mais en tant que dernière lady Arryn et en tant que personne, je ne souhaite réellement que votre bien. »


« Ces hommes qui m’ont courtisés étaient des monstres d’ambitions et des vautours pour la plupart. », répondit Lysa. « Et pourtant, c’est l’ambition de Petyr que vous pointez du doigt, lui qui, ceci dit, ne s’est pas précipité pour me demander ma main lorsque j’avais l’argent, le titre, les propriétés et un fils seigneur, Lady Vanbois. », répliqua-t-elle.  En le disant, elle se remémora simultanément la force de cet argument là. Si Petyr l’épousait par intérêt, il aurait souhaité l’épouser bien plus tôt que maintenant. Son absence sur le banc des prétendants lorsqu’elle était devenue régente du Val jouait indéniablement en sa faveur et en faveur de ce désintéressement qu’il affichait, donnant l’affection comme raison de sa proposition de mariage.

Lady Vanbois avait déclaré ne souhaiter que le bien de Lysa, ce qui avait radoucit le ton de la dame du Val, néanmoins, elle s’était montrée assurée dans ses propos.

« C’est que les hommes rendent rarement les femmes heureuses. », répondit Lysa. Elle pensait cette phrase, et pourtant, elle en excluait Petyr. Amoureuse comme elle l’était, elle ne pouvait que croire son ami de toujours lorsqu’il disait vouloir la rendre heureuse. Elle ne pouvait que voir en lui l’exception tant il était exceptionnel à ses yeux. Mais cet amour si fort, cet amour qui la rendait si faible, elle ne ferait pas la bêtise de le confier à Anya Vanbois ou à qui que ce soit d’autres. Elle s’était retenue d’ailleurs, pour l’heure, de le formuler auprès de Petyr lui-même. Elle avait dit « oui » mais elle n’avait pas dit « je t’aime. » Et pourtant, qu’est ce qu’elle en avait eu envie…

« Pour ma part, j’ai déjà épousé un inconnu. Et avec tout le respect que je porte à feu mon époux, je préfère désormais donner une chance à l’option de l’amitié. », répondit Lysa. Lady Anya avait cotoyé le couple de longues années durant. Elle savait qu’il ne s’était jamais vraiment transformé en mariage d’amour. Le mariage de Lysa et Jon avait reposé sur le respect mutuel et le sens du devoir. Ensuite, avec la naissance de Robin, un nouveau lien s’était créé autour de cet enfant. Mais si Lady Lysa avait toujours joué son rôle d’épouse et de dame du Val correctement, son mariage avec Jon ne l’avait, en tant que tel, jamais rendue heureuse…

@Anya Vanbois
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Portes de la Lune, an 302, lune 9, semaine 1



Lysa Arryn & Anya Vanbois

L’ombre des montagnes tombaient sur les coures intérieures du château. Les jardins pétrifiés laissaient s’avancer les deux dames dans un silence opaque, bercés par le cheminement de leurs pas craquant la neige, piétinant les restes d’une herbe glacée. Les arbres morts semblaient menacer leurs têtes nues de leurs grands doigts noirs et osseux. Une troupe de corbeaux somnolents, perchés là, regardaient les valoises d’un oeil vitreux. Ces messagers, ces vagabonds, du monde des dieux semblaient voir l’invisible. Derrière elles gisaient pour toujours les dépouilles des deux derniers lords du Val que les flocons auraient déjà entièrement recouverts. Dans quelques heures, cela serait comme s’ils n’avaient jamais existé.
Lysa Arryn ne valait guère mieux qu’un fantôme. Son nom n’existait plus. Ses noms n’existaient plus. Dernière rescapée de deux époques révolues. Et pourtant, elle était toujours là. Cela, personne ne pouvait lui retirer.

La veuve la toisa, désabusée. Elle ne parlait pas de peur. Lysa le savait, elle aussi. Elle l’entendait au ton de sa voix. Pourquoi donc amenait-elle cela maintenant ? Sa remarque tombait comme un cheveu sur la soupe. L’inverse aurait été étonnant après tout ceci. La rousse aurait-elle réellement pu lui affirmer que finalement, en réalité, Petyr Baelish la terrorisait ? Quand bien même cela eut été le cas - et Anya en doutait fortement -, elle ne l’aurait jamais admis. Plus maintenant. En dépit des apparences, la Tully avait sa petite fierté et elle n’aurait pu souffrir de se contredire.
Anya balaya ses phrases d’un revers de main excédé.

« Oui, oui, j’ai entendu, je ne suis pas sourde, malgré ce que l’on pourrait croire. Il mérite votre confiance, c’est un homme idéal, bon et sincère… À vous entendre, c’est un don des dieux. Apparemment, c’est également un saint. Sacrifier l’avenir de sa maison pour une femme sans nom, sans fortune et sans terre… Une figure d’abnégation. »

Elle aussi avait déjà répété ces mots. Mais visiblement, la conflannaise ne daignait pas l’écouter. Pourtant, il lui sembla, l’espace d’un instant, qu’elle l’entendit. Se pouvait-il réellement qu’elle puisse se remettre en question ? Qu’elle repense à son mariage avec Littlefinger ? Si Anya réussissait seulement à la faire douter, à la rendre plus méfiante à l’égard de la fouine du Val alors, elle avait gagné.

La femme de Jon s’anima. Après ces longues minutes froides, le sang monta à ses joues et son ton se fit plus dur, plus enflammé.

« Une nouvelle fois, je ne suis pas ici pour vous faire la leçon, » répéta Anya. « Je ne suis pas ici pour nier votre situation ou votre peine. Cette dernière existe, à raison, et vous n’êtes pas dans une disposition des plus agréables, j’en conviens. »

C’était une chose que la matriarche ne supportait pas. Les apitoiements, les jérémiades… La vie était cruelle et il semblait que Lysa Arryn venait tout juste de s’en rendre compte. Elle pouvait comprendre sa tristesse, ce sentiment d’injustice peut-être… Pourquoi elle et pas une autre après tout ? Mais tout le souci était là. Lysa Arryn n’était pas la seule femme à Westeros en proie au tourment. Il y en avait des milliers. Cela ne réduisait en rien ses sentiments, certes, mais cela agaçait la veuve. Elle détestait qu’on ne l’écoute pas, en particulier lorsqu’elle venait en paix.

« N’agissez pas comme si le monde était contre vous. Ce n’est pas le cas. Nous nous connaissons depuis plus d’une dizaine d’années et pas une seule fois je ne vous ai vu agir comme un faucon. Le faucon des Arryn. Aujourd’hui, je vous demande de vous comportez comme tel. Oh, pas pour un époux, pas pour une famille… pour vous ! »

Et la Vanbois ne voyait rien de plus avilissant que de se ranger sagement dans le sillage de Petyr Baelish, un homme perfide - elle l’avait, elle aussi, assez martelé - qui n’aurait aucun scrupule à utiliser Lysa pour servir ses propres desseins. N’en avait-elle pas conscience ? Ou n’osait-elle se l’avouer ?

Ici, les femmes n’avaient pas le droit à l’erreur. Anya l’avait appris et ce depuis toute petite. Rapidement destinée à devenir Lady Vanbois en l’absence d’héritier mâle, elle avait subi les moqueries, le dédain, les regards en coin et la condescendance. Tout cela par des hommes paresseux qui croyaient dur comme fer que tout leur était dû. « Elle n’en sera jamais capable… Symon, vraiment, quel malheur pour ta maison. » Quels mot humiliants cela avait été pour elle ! Tout juste adolescente, alors qu’elle sortait tout juste de sa coquille, on l’accablait des pires maux parce qu’elle était née fille. « Quelle injustice ! » avait-elle pensé. « Oh oui quelle injustice ! » Mais le monde était injuste et si on ne s’y faisait pas, on terminait à se morfondre sur son sort. Guère mieux qu’une loque sur laquelle on se frottait les pieds. Alors, elle avait grandi, elle s’était endurcie et elle avancerait, peu importait les obstacles.
Certes, Lysa Arryn avait perdu son époux et son fils. Certes, elle était la dernière survivante de deux illustres maisons, certes, elle avait vécu l’enfer et le vivait probablement encore… mais enfin, elle vivait ! Combien de femmes vivaient ce qu’elle traversait actuellement ? Depuis toujours, on la traitait avec respect de part ses titres. Fille Tully, épouse Arryn… Cachée, toujours, derrière des ombres plus grandes qu’elle.

« Il est temps de vous faire respecter pour qui vous êtes. Après tout ce temps, vous le méritez. Ne vous abaissez pas au niveau de Baelish. Croyez moi, vous ne serez qu’un pion entre ses mains. Enfin, vous l’êtes déjà. Je me demande simplement depuis combien de temps. »

Car il était certain que lui ne la respectait pas.

Elle s’abstint de rétorquer à sa remarque sur Robin. Ce pauvre enfant malingre n’avait jamais siégé sur le trône des anciens rois du Val. Il n’avait fait que garder la place tiède. Il serait mort, tôt ou tard, de froid, de maladie ou de bêtise. Finalement, la dernière hypothèse l’avait emporté et il avait été assassiné. La dernière Arryn l’avait étouffé, privé d’un entraînement sérieux et constant et l’enfant avait couru à sa perte dans un excès de zèle. Mais la rousse ne verrait jamais les choses ainsi. Elle n’était pas assez pragmatique.

« Un jour, je serai vieille. Plus vieille que je ne le suis déjà… Si je ne meurs pas avant. Mon fils me succédera et prendra les rennes de Chênes-en-fer pendant que je baverai dans ma soupe. Et je regarderai mon petit monde de loin, comme une observatrice invisible. Je serai une invitée. Un meuble que l’on mettra au placard. »

Les mots étaient prononcés sans tristesse, ni frustration. Elle avait déjà songé à son futur. Après tout, elle était plus proche de la fin que du début.

« Mais vous avez raison, » finit-elle par admettre avec un soupir. « Je ne vivrai jamais ce que vous avez vécu. Et jamais je ne quitterai ma demeure. Quand bien même on me l’arracherait, je préfèrerais m’y tuer que de l’abandonner. »

Les trémolos dans la voix de la rousse la firent renifler. Les sanglots la mettaient mal à l’aise. Entre agacement et gêne, elle ne savait jamais vraiment sur quel pied danser. Elle se souvenait toujours des larmes silencieuses et des tremblements de Rowena, lorsqu’Ysilla était morte. De l’impuissance qu’elle avait ressenti face au chagrin de sa fille - elle qui était pourtant si froide et calme - alors qu’elle n’était capable que de lui tapoter le dos en espérant que cela passe. Anya, pourtant, ne s’était pas laissée aller au moindre hoquet de douleur.

« Des monstres d’ambition ? Allons, si même vous étiez capable de voir dans leur jeu, alors ce n’est pas d’ambitieux que je les qualifierais, mais de patauds ! Vous n’auriez rien eu à craindre d’eux. Ils auraient fini par vous manger dans la main. Des hommes de confiance. Des hommes sans méchanceté, » réitera-t-elle.

Des hommes dont elle n’aurait pas eut à se méfier. Des hommes auprès desquels elle aurait pu s’exprimer et vivre sans crainte.
Son dernier argument la laissa songeuse. C’était justement ce point qui la turlupinait. Pourquoi diable Littlefinger avait-il attendu ? N’importe qui y aurait vu une incroyable opportunité. Beaucoup l’avait fait. Mais lui ne s’était pas pressé. Si Anya supposait que l’hypothèse de la Tully était vraie - une supposition qui lui donnait des boutons - alors il aurait pu épouser une « amie », devenir lord Arryn et ainsi faire d’une pierre deux coups. Mais non, il avait préféré l’épouser alors qu’elle n’avait plus rien. S’était-il assoupi durant ce laps de temps ?

« C’est bien ce qui m’embête… Pourquoi attendre ? S’il vous fait tant confiance, s’il vous place en si haute estime… Pourquoi ? Pour qu’il ait le temps de rédiger sa demande en mariage ? Laissez moi rire. »

Le ciel cotonneux se perça d’un éphémère rayon de soleil qui vint se refléter sur les pics enneigés des cols alentours. Taillés en pointes, ils ressemblaient à une collection de cornes blanchies par le soleil. À leur pied, une vallée creuse, semblable à un bol, recueillait en son sein les flocons tourbillonnants.
Dans un souffle de vent glacé, le rayon s’évanouit. Lady Vanbois resserra les pans de son manteau autour de son cou et enfouit son menton dans la fourrure.
La remarque de la Arryn trouva un écho dans le coeur de la veuve qui acquiesça. Les seuls hommes l’ayant rendu heureuse étaient ses fils et ses petits-fils. Artys n’avait été qu’une vaste farce.

« Vous n’avez pas répondu à ma précédente question, lady Arryn. Alors, laissez moi vous en poser une nouvelle. Aimez-vous lord Baelish ? Pas comme deux vieux amis, j’entends. »

La question était posée, mais la réponse lui semblait toute faite.



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An 302, lune 9, semaine 1.


« N’agissez pas comme si le monde était contre vous. Ce n’est pas le cas. Nous nous connaissons depuis plus d’une dizaine d’années et pas une seule fois je ne vous ai vu agir comme un faucon. Le faucon des Arryn. Aujourd’hui, je vous demande de vous comportez comme tel. Oh, pas pour un époux, pas pour une famille… pour vous ! »

Le visage de Lysa s’empourpra, vexée et en colère, face aux critiques d’Anya Vanbois. Elle ne se serait pas montrée à la hauteur du nom des Arryn, alors ? Comment osait-elle ?! Si Lysa avait encore été vêtue de son titre, elle n’aurait pas hésité à renvoyer Lady Anya.

« Comment osez-vous me dire une telle chose ?! »

« Il est temps de vous faire respecter pour qui vous êtes »,
poursuivit la Dame de Fer. « Après tout ce temps, vous le méritez. Ne vous abaissez pas au niveau de Baelish. Croyez moi, vous ne serez qu’un pion entre ses mains. Enfin, vous l’êtes déjà. Je me demande simplement depuis combien de temps. »

Que faisait donc Anya Vanbois ? Comptait-elle lui dérouler une véritable collection d’affront ? La voilà qui la qualifiait de pion alors qu’elle avait été au sommet de la pyramide, dame du Val puis régente au nom de son fils. Croyait-elle que diriger le Val était aussi aisé que de commander quelques troupes ? C’était toute une région qu’elle avait gouverné, par les Sept, et elle la traitait de pion ! Si le visage de Lysa s’empourpra davantage, elle détourna cependant les yeux car les mots d’Anya étaient malheureusement les messagers de la vérité. Dès son ascension à la régence, Lysa avait en apparence gouverné essentiellement à sa manière, sans beaucoup écouter les avis extérieurs que la susceptible dame prenait aisément pour des critiques. Mais pour les questions politiques les plus délicates, elle s’était toujours enquise de l’avis d’un homme, cet homme idéal à ses yeux, celui dont il était question en cet instant ; Petyr.

« Vous n’avez pas…!» Le droit de me parler ainsi, avait-elle voulu dire, peinant à cacher à quel point elle était vexée et se détestant encore plus d’être si mauvaise que Petyr était bon pour masquer ses émotions. Cette impression qu'Anya pouvait lire en elle comme dans un bol rempli d'eau claire l'horripilait. Seulement, elle n’avait plus aucun droit, elle n’était plus personne. Elle ne pouvait pas parler de droit maintenant. Elle reprit, bafouillant. « Ce…Ce n’est pas parce que je ne suis plus dame du Val que vous avez le droit de me manquer de respect de la sorte Lady Anya !»

La matriarche de Chene-en-Fer avait touché de ses doigts une corde sensible, provoquant un tremblement dans l’esprit de Lysa, celui du doute, un doute qu’elle ne voulait pas regarder en face. Petyr l’avait toujours conseillé depuis la mort de Jon…Elle secoua la tête, tentant de chasser le venin d’Anya de son esprit. Non, non, non. Petyr l’avait toujours bien conseillée, toujours. Il avait été présent pour elle, plus que n’importe qui. Il ne l’avait jamais utilisée, il l’avait soutenue et épaulée. Elle n’était pas un pion pour lui mais une amie. Lysa allait se détourner de l’odieuse valoise quand celle-ci retint à nouveau son intention, en lui disant de ne pas se comporter en victime. Outrée face à ce qui semblait être une minimisation de l’horreur que la dame du Val avait vécu en voyant son fils se faire assassiner sous ses yeux par ces vagabonds de fer-nés, elle répondit à la valoise. Tâchant cependant de se contrôler un minimum, bien sûr, car là oui ,elle aurait pu exploser... Et si sa colère autrefois était redoutable et respectée, elle n’était désormais que ridicule aux yeux du monde. Oh quel enfer était-ce que de perdre ce pouvoir qui lui avait conféré un tel sentiment de sécurité, surtout pour elle, la si peu sûre d’elle Lysa Arryn... Comme elle regrettait ce temps où elle pouvait se permettre de n’avoir que faire de ce que les autres pouvaient penser d’elle, tantôt ivre de la sécurité conférée par son statut, tantôt pleine de doutes. Car malgré les erreurs qu’elle pouvait en ce temps commettre, malgré ses émotions qui souvent dépassaient sous contrôle, jamais la plupart des gens n’avaient osés lui dire en face ce qu’ils pensaient. Elle s’était enivrée d’herbes contraceptives, retrouvant sa jeunesse avec un jeune chanteur peu importe les ragots, comme elle s’était enivrée de ce sentiment de liberté et surtout de sécurité que lui procurait la régence…Et aujourd’hui, passée du sommet au bas de l’échelle, la liberté n’avait plus le moindre goût, tant elle était effrayante lorsque l’on est dépourvue de repères…

« Un jour, je serai vieille. Plus vieille que je ne le suis déjà… Si je ne meurs pas avant. Mon fils me succédera et prendra les rennes de Chênes-en-fer pendant que je baverai dans ma soupe. Et je regarderai mon petit monde de loin, comme une observatrice invisible. Je serai une invitée. Un meuble que l’on mettra au placard. Mais vous avez raison, Je ne vivrai jamais ce que vous avez vécu. Et jamais je ne quitterai ma demeure. Quand bien même on me l’arracherait, je préfèrerais m’y tuer que de l’abandonner.»

« Vous parlez de suicide et vous me dites à moi que je n’ai pas été un faucon ! », rétorqua-t-elle, fière de sa réplique. Fière de pouvoir tromper Anya, au moins sur ce point. Car En vérité, si le suicide était qualifié de lâche, Lysa savait qu’il fallait du courage pour mettre fin à ses jours. Car elle y avait pensé, bien sûr. Elle l’avait souhaité aussi…

Ses doigts avaient tapotés de longues minutes durant le marbre glâcé du balcon de sa chambre alors qu’elle contemplait les montagnes. Elle avait fermé les yeux, s’était vue monter sur le rebord, sentir le froid sous ses pieds nus et puis faire un pas en avant, un pas vers le vide…Mais, elle n’avait pas pu. Parce qu’à la vision de ces montagnes pointues comme des cornes, elle avait pris peur. Peur de souffrir. Peur de mourir. Et ce, malgré l’horreur qu’était sa vie dans ces instants… Mais, Anya ne le savait pas. Et Lysa était d’ailleurs surtout fière de ce qu’elle venait de lui rétorquer car cela masquait sa véritable pensée ; sa réponse suggérait qu’à ses yeux le suicide était lâche, alors qu’en réalité, elle savait très bien qu’il ne l’était pas…

« Des monstres d’ambition ? Allons, si même vous étiez capable de voir dans leur jeu, alors ce n’est pas d’ambitieux que je les qualifierais, mais de patauds ! Vous n’auriez rien eu à craindre d’eux. Ils auraient fini par vous manger dans la main. Des hommes de confiance. Des hommes sans méchanceté, » avait rétorqué Anya lorsque Lysa avait donné son avis sur ses prétendants.

« Même moi ! », releva Lysa, avant de rire légèrement cette fois, tâchant comme elle le pouvait de trouver une armure apparente à sa vexation grandissante, qui, elle le savait pertinemment, lui donnerait l’air ridicule si elle explosait. Mais, au fond, Lysa ne riait pas non…La susceptible veuve Arryn était bien peu capable de prendre les critiques et les affronts avec humour et de s’en moquer. Ce n’était qu’une illusion qu’elle tentait de donner, pour ne pas perdre la face.
« Je ne les crains pas, Lady Anya, et qu’ils aillent manger dans d’autres mains, voilà ce que j’en dis ! Car voyez-vous, il est pénible pour les femmes qui ne sont pas nées héritières comme vous, de devoir sans cesse se vendre auprès des hommes ! », rétorqua-t-elle. Elle pointa ensuite le fait que lorsqu’elle était une riche et puissante veuve, Petyr, lui, n’avait pas accouru comme ces hommes trop paresseux que pour créer eux même leur propre prestige.

« C’est bien ce qui m’embête… Pourquoi attendre ? S’il vous fait tant confiance, s’il vous place en si haute estime… Pourquoi ? Pour qu’il ait le temps de rédiger sa demande en mariage ? Laissez moi rire. », lui dit Anya.

Et bien sûr, oui, Lysa avait espéré qu’il le fasse. N’ayant jamais oublié Petyr, elle avait tant souhaité le voir lui demander sa main lorsqu’elle avait été débarrassée de Jon, enfin… Mais il avait gardé le silence. Pourquoi ? Cette question, elle se l’était posée dès que Petyr avait pris sa main dans la sienne, avait plongé ses yeux gris dans ses iris bleutées de née-Tully, et lui avait demandé de l’épouser. Elle avait eu envie de dire « Quoi ? », de dire « Pourquoi maintenant ? » mais ses lèvres avaient parlés pour elle. « Oui », avait-elle juste dit, tant cela était inespéré, tant elle ne voulait pas gâcher cet instant avec des questions inutiles...

Il pouvait y avoir plein de raison, toute plus louables les unes que les autres. Peut-être pensait-il n’avoir aucune chance face aux grands seigneurs qui la courtisaient ? Peut-être pensait-il qu’elle choisirait la raison politique au-dessus de l’amour ? Mais, Petyr la connaissait non ? Alors…Peut-être avait-il craint qu’elle ne pense qu’il l’épouse pour l’argent et le pouvoir ? Cela était possible... Mais, ils étaient si proches, il aurait pu lui dire qu’il désirait l’épouser pour elle et non pour tout cela. Elle l’aurait cru, bien sûr. Elle lui faisait confiance, il le savait…

Alors, peut-être simplement s’était-il juste réveillé à travers leur correspondance, plus régulière depuis qu’elle était régente et plus intime encore après la mort de Robin, lorsqu’elle lui avait confié sa peine…Peut-être avait-il pris conscience, alors, qu’il l’aimait.

« Il a ses raisons et elles ne vous concernent pas.», répliqua simplement Lysa, d’une voix qu’elle voulut assurée, estimant que sur ce point rester vague et prétendre connaître exactement les raisons de Petyr pour ne pas avoir parlé plus tôt restait sa meilleure option pour ne pas avoir l’air d’un pion, ce qu’elle n’était pas, peu importe de quoi ça avait l’air !

La précédente dame du Val pensa qu’elle en avait fini avec cette conversation étouffante. Elle pensait partir gagnante, sur cette réponse mystérieuse que l’on ne pouvait contredire. Mais, le piège se referma sur elle sans qu’elle puisse l’avoir vu venir quand Anya Vanbois insista ;

« Vous n’avez pas répondu à ma précédente question, lady Arryn. Alors, laissez moi vous en poser une nouvelle. Aimez-vous lord Baelish ? Pas comme deux vieux amis, j’entends. »

Elle ne pouvait pas partir malgré tout et refuser de répondre car cela, en soit serait une réponse des plus éloquentes. Elle était piégée. Il lui fallait dire « non », pensa-t-elle, il le fallait. Après tout, elle ne devait pas l’honneteté à Anya Vanbois !  Et pourtant aussi stupide que cela puisse paraître, la pauvre Lysa se sentait emplie de honte et gêne à cette simple idée. C’était comme si, en formulant ce « non », il lui paraissait trahir Petyr, qui lui, lui avait ouvert son cœur en lui expliquant qu’il ne souhaitait que la rendre heureuse, après avoir été stupide, dans leur jeunesse…

Alors, elle n’avait qu’à dire oui et assumer pleinement ce qu’elle pensait de Petyr. Pourquoi en aurait-elle honte ? Elle ne se trompait pas sur lui, elle le savait bien. Mais dépourvue de ce sentiment de sécurité lié à son précédent statut, Lysa hésita. Elle n’avait pas le temps de réfléchir davantage, pourtant, car ne hésitation trop longue serait une réponse également….

« Non. », fut son dernier mot. Mais c’était un « non » étrange que Lysa avait prononcé. Comme si elle avait écrit le mot bleu, munie d’une encre noir. Elle avait dit non, mais on semblait entendre oui.

« Mais, lui oui. », ajouta-t-elle, pressée de dire autre chose devant ce non qu’elle-même avait entendu comme étant peu convaincant. Elle anticipa également la réplique suivante d’Anya, qu’elle devinait. « Si vous ne l’aimez pas, alors épousez-en un autre. », aurait-elle sans doute conseillé. « Alors, il sera un bon mari pour moi. », ajouta-t-elle. « Et oui, je pense que je pourrais l’aimer, avec le temps. Après tout, c’est un proche ami, je vous l’ai dit. », termina-t-elle, rattrapée inévitablement par sa loyauté à Baelish. Même si son non ressemblait à un oui, cela avait été plus fort qu'elle, il avait fallu qu'elle ajoute qu'elle pourrait un jour l'aimer.

« Je vais rentrer maintenant. Il fait trop froid, ici. », dit-elle finalement, pressée de se trouver loin de cette femme. Pressée de se trouver loin de ceux qui tentaient de semer le doute dans son esprit quant à la personne en qui elle avait le plus confiance...



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Portes de la Lune, an 302, lune 9, semaine 1



Lysa Arryn & Anya Vanbois

Lysa Arryn n’était pas une femme de caractère. Du moins, pas pour Anya. Facilement influençable, apitoyée sur son sort, lunatique et prudente au point d’en être peureuse, elle n’inspirait la dévotion que par les titres qu’elle avait collectionné tout au long de sa vie. Fille de l’illustre maison Tully, épouse et mère Arryn… Mais la respectait-on pour elle ? L’aimait-on pour elle ? Pour Lysa ? Si la Vanbois avait fait preuve de retenue et d’égards envers la jeune femme, c’était bien pour la seule affection de Jon et par loyauté envers sa position. Pour Lysa, en revanche, elle n’éprouvait qu’une vague compassion doublée d’un agacement profond. Son manque de jugeote et de recul, en plus de l’irriter, était dangereux. En particulier lorsqu’il conduisait à des situations comme celles-ci.

Si par ses mots elle avait espéré secouer la rousse et lui ouvrir les yeux sur son mariage, elle ne récolta qu’un visage luisant de colère et des yeux remplis de larmes. « Ah, » pensa-t-elle. « J’ai dû mal m’y prendre. »

« Le droit ? » lui demanda-t-elle, complétant son exclamation horripilée. « Je ne vous manque pas de respect, » asséna-t-elle. « Je vous dis la vérité. »

Sa vérité, en tout cas. Celle qu’elle constatait avec désolement depuis si longtemps. Celle qui, à ses yeux, avait conduit à la mort du jeune Robyn Arryn. S’il était parti en écuyage dans une famille valoise, le chevalier qui l’aurait eu sous son aile aurait peut-être pu en faire quelque chose. Loin de l’influence néfaste de sa mère, il aurait peut-être pu devenir digne, courageux et travailleur. Mais au lieu de cela, il avait été couvé, gâté et protégé à outrance. Il ne faisait aucun doute que lui, un oisillon chétif à peine capable de tenir une épée, courait à sa perte. C’était peut-être ce qu’Anya lui pardonnerait le moins. Elle pouvait bien s’illusionner d’avoir gouverné une région - qu’avait-elle réellement fait durant ces quelques temps de régence ? - et elle pouvait bien se bercer du songe d’avoir été une femme forte, mais il lui faudrait avaler qu’elle avait été la forgeronne de la destinée de son unique enfant puisqu’elle ne lui avait pas donné les armes pour affronter la vie.

Les paroles de l’épouse de Jon sonnaient creuses. Elle avait beau hurler, ricaner et s’enorgueillir de quelconques traits d’esprit, elle-même ne croyait pas en ce qu’elle disait. Du vent.

« Croyez-vous vraiment que le suicide est un acte de lâcheté ? Je ne suis pas d’accord, » trancha-t-elle de sa voix cassante comme du verre.

Au contraire, il fallait un grand courage pour choisir de mourir dignement plutôt que de glisser dans la décrépitude. Lorsqu’un acte déshonorant, salissant pour un homme, son nom et les siens, était commis, choisir de s’ôter la vie était un acte qui relevait du dévouement.

La troupe de corbeaux s’agita sur les branches, laissant tomber de gros paquets de neige paresseux accumulés entre les rameaux. Dans le silence opaque des montagnes endormies, leurs voix résonnaient comme des cris.

« Oui, même vous. Vous semblez si prompte à fermer les yeux face à la plus flagrante des manipulations, je m’étonne que vous ayiez été capable de voir clair dans les intentions de vos courtisants. »

La dernière esclandre de la née Tully la fit grincer des dents. Que croyait-elle donc ? Que parce qu’elle était née héritière, elle était née homme ? Qu’elle avait pu choisir son mari ? Que celui-ci lui avait obéit au doigt et à l’oeil ? Enfin, mais dans quel monde vivait-elle ? Anya était une femme comme elle. Une femme à qui son père avait imposé son époux, un homme ridicule et aux qualités morales limitées. Une femme qui avait dû prouver sa valeur auprès de ses vassaux. Prouver qu’elle était aussi capable qu’un autre… Aussi capable qu’Artys, par les septs enfers, car les premières années, c’était auprès de lui qu’ils se tournaient naturellement !
De cela, elle ne dit pourtant rien à la jeune femme. Ces choses-là, elle les gardait pour elle et n’irait certainement pas les partager avec son ancienne suzeraine.

Du vent, une fois encore. L’air satisfait de Lysa la fit soupirer et son front se creusa de trois rides profondes.

« Autant dire que vous ne savez pas, vous non plus… J’aurais dû m’en douter. »

Pourquoi Petyr Baelish tiendrait-il Lysa Arryn de ses plans ? Après tout, elle le prouvait à présent, elle était capable d’une grande instabilité et d’un manque de contrôle flagrant. Anya avait toujours perçu ce caractère lunatique en elle, mais peut-être la présence conciliante de Jon avait-elle aidé à masquer ce dangereux défaut.

Le blanc marqué après son ultime question fit office de réponse. À ce stade, elle n’en avait guère besoin, elle s’était faite son idée sur la question et elle ne changerait pas d’avis, peu importait le déni de la mère de Robin. D’ailleurs, elle sembla hésiter et se perdre en réflexions, ce qui ne fit que conforter un peu plus la veuve sur son opinion.

Encore une fois, ce « non » lapidaire était vide. De sens, de conviction. Ainsi donc, c’était l’amour qui aveuglait la Arryn… Quel malheur. C’était ce genre de sentiment idéal et la loyauté violente qu’il dégageait qui conduisait aux catastrophes. Néanmoins, la matriarche s’étonna de ce tour de force. Aimer Littlefinger ? Voilà qui relevait de l’exploit ! Lysa devait bien être la seule dans tout Westeros à éprouver un sentiment affectueux envers lui.

« Oui, oui, c’est cela, » fit-elle, pas le moins du monde convaincue. « Rentrez donc… »

Anya resta quelques secondes songeuse alors que la rousse s’éloignait à grandes enjambées, contrariée et vexée.

« Peut-être penserez-vous à moi lorsque Baelish dévoilera ses véritables intentions ! » lança-t-elle sans un dernier regard pour celle à qui elle avait obéit durant plus d’une décennie.

Peut-être Lysa Baelish pleurera-t-elle, là encore. Mais enfin, elle aurait été prévenue.  



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