Un vent de justice [PV Bébé Koala]

Se faufiler à l’extérieur du château des Desdaings était devenu si facile que l’exercice avait perdu tout ce qu’il avait d’amusant autrefois. Aussi Alyssa avait hâte de retrouver son frère. L’éducation de lady dispensée par des septas plus aigries les unes que les autres rendait la vie étouffante dans l’enceinte de la demeure du lord de Beaumarché, et la maladie soudaine du Lord l’avait privée de sa compagnie, puisque ce dernier avait tout simplement refusé de la voir. Vexée, elle avait cependant decidé que c’était sans doute pour la protéger du mal étrange dont il souffrait. L’état de son père, bien qu’alarmant au début de sa maladie, semblait aller en s’améliorant, du moins d’après ce qu’elle entendait dire. La santé du Lord n’avait pas empêché Cerenna de continuer à surveiller de près les progrès de sa fille unique. Que dirait-elle si elle la voyait maintenant, chevauchant aux cotés d’Isendre, vêtue de vieux vêtements de ce « bâtard » comme la vipère se plaisait à lui rappeler.

La quiétude des bois qui entouraient la ville des Desdaings n’aidait pas à remplir le silence qui s’éternisait entre le frère et la sœur. Pourtant depuis qu’ils étaient enfants ce genre d’escapades étaient l’occasion de débattre sur à peu près n’importe quel sujet, mais aussi de se confier l’un à l’autre. Alyssa n’avait même pas essayé de démarrer une conversation, tant elle le sentait fermé et absent. Elle laissa échapper un soupir d’énervement en détournant la tête de son frère. Plus ils avançaient dans la forêt, plus la colère montait en elle. Elle ne comprenait pas, et ne voulait pas faire l’effort de chercher pourquoi Isendre était comme ça ce jour là, alors qu’elle voulait qu’il soit souriant et bavard, comme c’était généralement le cas lorsqu’ils se retrouvaient pour s’entrainer. Cette contrariété s’ajoutant à de nombreuses autres dont les septas étaient principalement la cause, ainsi qu’à l’inquiétude que lui causait la santé de leur père, tout cela ne demandait qu’à exploser, et c’était Isendre qui allait en faire les frais.

Le calme qui régnaient dans la clairière où ils venaient d’arriver n’allait pas durer. Les deux Desdaings avaient mis pied à terre, mais ce n’est que lorsqu’il fut en place pour débuter l’entrainement qu’Isendre lui accorda son premier regard, ainsi que les premiers mots qu’il lui adressait de la journée. Il semblait si désintéressé de ce qu’il lui disait qu’elle ne répondit rien. Le ton un peu absent de ses paroles, la cadette le prit comme une insulte, et son sang ne fit qu’un tour. Sans faire un pas vers son frère, elle lança l’épée de toutes ses forces, sans autre but que le toucher. Si Isendre était aussi blond que leur père, elle avait pour sa part hérité de son impétuosité. Et si les crises de colère d’Alyssa ne surprenaient plus grand monde dans la demeure des Desdaings, il était beaucoup plus rare que son demi frère, avec qui elle s’entendait si bien, en soit la victime désignée. Les poings serrés, il suffirait d’un geste, d’un mot de lui pour que leur entrainement vire à la bagarre.