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What come from the sea, return to the sea.

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What come from the sea, return to the sea.

Lune 7 -  Semaine 2





Le jour se levait à peine sur la baie de la Néra. La météo ne semblait pas s'annoncer clémente en cette journée. Cela faisait plusieurs jours que les vents et quelques gouttes tombaient sur la forteresse de Marée-Haute et les alentours de l'île de Lamarck. Mes bottes presque recouvertes du sable humide en contrebat du château, je regardais le soleil tenter de remonter au devant des nuages sombres, sans grand succès. Le vent relevait mes cheveux, tentant de se glisser dans les ouvertures de mes vêtements, trouvant contact, par endroit, avec ma peau légèrement brunie. Seul face à l'étendue d'eau salée mouvementée se dévoilant devant moi, je laissais mon regard se perdre dans l'écume des vagues tentant de lécher mes pieds.
La mer avait ce pouvoir de nous faire réfléchir, de remettre en question tout ce dont nous étions pourtant si sûrs. Notre condition humaine même ne ressemblait plus à rien lorsque, face aux flots, nous assistions à ce spectacle extraordinaire, presque effrayant. Les éléments déchainés, nous perdons nos repères; il m'était désormais impossible de déceler la silhouette de la presqu'ile de Claquepince au Nord, ni celle de la forteresse de Rooks Rest à l'Ouest, que nous pouvions pourtant apercevoir lorsque le temps était clément. Comment nous repérer, alors, nous, pauvres humains, combattant pour de pauvres causes qui sont pourtant si futiles à l'échelle des éléments naturels nous entourant. Comment avouer détenir un pouvoir à l'égal des Dieux, alors que nous étions incapables de mener une traversée sans être certains d'en atteindre l'autre rive. J'aimais la mer, j'aimais cet océan incompréhensible et mystérieux, que nous tentons de découvrir et de connaitre sans jamais y arriver entièrement. Mais j'en étais également effrayé; effrayé de ce qu'il m'était impossible de contrôler, effrayé de ce qui pouvait remettre en question tous les bons sens que nous étions pourtant censé connaitre. Toutefois, je gardais en tête une chose, une leçon primordiale que mon oncle Monford, et même mon père, m'avaient enseigné; c'est en ayant peur, en reconnaissant la supériorité et les avantages de ce que l'on trouve en face de nous, que nous arrivons mieux à les combattre, que nous avons le plus de chance de trouver comment contourner et nous adapter aux difficultés.

Daemon ! Je me retournais vivement, lâchant l'étendu grisâtre et mouvante des yeux, pour faire face à ma mère, traversant le sable pour me rejoindre. Je te cherchais... Arrivée à ma hauteur, elle caressa ma joue de sa douce main aussi mate que ma peau, plantant son regard noisette dans mes yeux clairs. J'aimais ma mère passionnément. Elle avait des qualités magnifiques pour une femme, dont une grande partie des hommes devrait s'inspirer. Elle était forte, elle était majestueuse et savait inspirer le respect. Sa douceur était magnifique, et elle était de celle en qui nous pouvions toujours avoir confiance. Son jugement était juste, et elle ne cessait d'être sincère. C'est le moment, mon fils. Il faut monter. Son regard traduisait une certaine inquiétude, peut-être de l'appréhension, mais également de la fierté. Je pris sa main dans la mienne, la pressant contre mon cœur, puis lui sourit. De toute manière, je commençais à avoir froid. Rentrons.

Cela faisait plusieurs Lune que Westeros recouvrait de sa force. Il y a trois lunes de cela, on apprenait la naissance de l'héritier de Lady Tyrell et de Viserys III Taragaryen. Un renouveau chez les Targaryens, que suivit la Jeune Reine en nommant son tout aussi jeune frère Aegon en tant que maîtres des navires. De nouvelles fiançailles furent même annoncées la lune dernière, entre Valena Allyrion et Quentyn Martell. Une atmosphère relativement paisible estompait peu à peu les conflits interminables de Westeros qui ne cessaient depuis d'innombrables semaines. C'est comme si le Lord Velaryon avait attendu que les orages passent pour quitter son poste.
En effet, cela faisait deux lunes déjà que Monford Velaryon ne quittait plus ses appartements. Un mal dont personne n'arrivait à déceler la source, ni le remède. Un empoisonnement peut-être, les séquelles d'une blessure suite à la bataille de la Baie de la Néra où il faillit trouver la mort étaient envisageables également, mais rien n'était sûr. Nous avions fait appel aux mestres du royaume, sans qu'aucun ne puisse guérir le maitre de Marée-Haute. Et alors que nous avions fait le voyage depuis Carène en fin de la sixième Lune, j'avais été appelé à revenir en début de semaine pour constater que son état était bien pire encore que la fois précédente. Seul avec mon cousin Monterys, il avait réclamé notre présence, à moi, ma sœur et mes parents. Une surprise pour mon père, avec qui il ne partageait pas une bonne relation, euphémisme de ce qu'ils ressentaient l'un pour l'autre. Mais il voulait probablement mettre quelques choses au clair avant de rejoindre le monde d'au-delà.

C'est un véritable comité d'accueil auquel j'ai le droit, dîtes moi ! tentais-je avec humour alors que je pénétrais dans la forteresse, au bras de ma mère, arrivant devant mon père, Daena tenant Monterys par la main, et quelques gens. Garde ton humour à deux balles pour toi, Daemon, c'est pas franchement le moment. Sans prendre le temps de répliquer, je me tournais vers mon père qui soupira, avant d'insuffler à un jeune garçon de me conduire. Tous semblaient attendre quelque chose, la tension étant palpable, comme si la forteresse venait de se mettre sur pause. Mais personne ne pourrait me prendre mon optimisme et mon humour. Les temps présents sont bien trop noirs pour que l'on sombre dans la monotonie.
Je marchais derrière le garçon, encore ben jeune, jusqu'aux appartements de mon oncle. Il toqua, attendit quelques secondes, puis ouvrit la porte avant de m'annoncer. Un raclement de gorge m'invita à entrer, après quelques hoquettements. Je marquais une pause, la main droite sur la massive porte, soudain réticent à pénétrer dans l'obscurité de la chambre du malade. Je respectais mon oncle, je l'appréciais, nous avions la chance de partager une relation presque privilégiée, mais soudain, j'appréhendais de m'asseoir à son chevet. Jetant un coup d'œil au garçon, perplexe devant mon hésitation, je poussais le cadrant en bois et le refermais derrière moi.



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Lune 7 -  Semaine 2





On ne connait jamais ses capacités à accueillir une nouvelle avant de s'y retrouver confronter, de s'y retrouver face à face. En pénétrant dans la chambre qu'occupait Monford depuis le début de son mauvais état, je pensais tenir compagnie a un malade, je pensais tenir la main de mon oncle et évoquer, s'il en avait la force, quelques souvenirs heureux. Je me pensais prêt à tout, prêt à affronter n'importe quelle situation. On se sent toujours prêt à faire face à n'importe quoi lorsque l'on a reçu une éducation comme la mienne. Comment peut on se découvrir une faille dans notre propre armure si, justement, tout le travail consistait à n'en construire aucune. Néanmoins, on ne peut jamais être préparé à tout.
Le parquet craque sous mes bottes, alors que je me rapproche du lit de mon oncle. Je n'aime pas les malades. Pas qu'ils me dégoutent, au contraire, je déteste plutôt mon incapacité à leur venir en aide. Je déteste l'impuissance que l'on peut ressentir face à la souffrance de quelqu'un, proche de nous qui plus est. Je ne redoute pas de tomber moi même malade, mais je ressens un certain malaise, justement dû à mon incapacité de faire quoi que ce soit. Face au lit de Monford Velaryon, je me sentais tout aussi démuni, que j'avais l'habitude de trouver face à moi, un homme puissant, un homme à fort caractère qui ne se laissait jamais démonter. J'ai toujours beaucoup admiré cet homme, qui ne semblait désormais plus lui-même. Il m'avait tellement enseigné, tellement donné. Le voir ainsi, presque invisible sous les couvertures, me pinçait le cœur.

Le vent souffle, je devrais probablement fermer cette fenêtre, mon oncle... prononçais-je avec difficulté, arrivant près du lit, la fenêtre entre-ouverte à ses côtés. Je scrutais son visage dans l'attente d'un quelconque signe, d'une réponse qu'elle quelle soit. Il avait l'air soudain bien plus vieillit que son âge le demandait. Avec ce qui semblait lui rester de forces, il tourna lentement la tête vers moi, le regard vide, le teint livide. Laisse, si c'est mes dernières sensations, elles seront bonnes J'opinais avec respect, prenant place sur la chaise en bois posée à côté de l'oreiller du vieillard. Je ne savais quoi dire, je ne trouvais tout simplement pas mes mots. Et je m'en voulais d'autant plus que c'était lui qui avait tenté de m'enseigner une répartie diplomatique digne de la famille Velaryon. J'en perds mes mots moi aussi, mon garçon. Ce n'est pas comme ça que je voyais ... ma fin. Je me redressais. Je n'aimais pas entendre l'optimisme quitter la bouche de quiconque, même dans les pires moments. Vous m'aviez demandé, mon oncle ? Je tentais de changer de sujet, espérant ne pas avoir à parler de cette fin que le malade abordait avec un air presque narquois. Pendant quelques minutes, il replaça sa tête probablement bien lourde, au centre de l'oreiller moelleux qui soutenait sa nuque, ne pipant mots. J'attendais, dans un silence presque religieux, entrecoupé des râles de Monford Velaryon, qu'il prenne a nouveau la parole. Il n'en fit rien, désignant simplement du bout des doigts, une feuille de parchemin brunie, à ses côtés. Je la saisis, réalisant doucement que nous n'allions pas aborder de beaux souvenirs aujourd'hui.
Quelques mots y étaient tracés avec difficulté, presque illisibles à certains endroits. Je ne pourrais dire quand ils avaient été inscrits sur le papier, aucune date n'étant indiqué, simplement le tampon de la maison, et l'hardiesse avec laquelle ils avaient été imprimés. Je réalisais néanmoins assez vite, qu'ils me concernaient. Mon prénom, mon rang, mon ascendance y était cité. Et en relevant les yeux vers l'homme, presque inconscient, allongé dans son lit, je compris pourquoi il m'avait fait venir. Je ne saurais remettre en question votre jugement, votre décision, mon oncle... Mais êtes vous certain de ce qui est stipulé ici ? Je marquais une pause, espérant encore entendre une quelconque réponse, mais sachant pertinemment qu'il n'en avait plus vraiment la force. Je me redressais sur mon siège, incapable de lui répondre quoi que ce soit de censé. Lord Velaryon. Lui qui m'avait pensé apte à obtenir ce nom, ce rang, je me retrouvais totalement dénué de tout bon sens et bonne répartie. Je n'y croyais qu'à peine, alors que tout était écrit, noir sur blanc, devant moi; Monford Velaryon nommait son neveu, Daemon Velaryon, à la tête de la maison. Seigneur de Lamarck. Maitre de Marée Haute.

C'est un tel honneur que vous me faites... Je sais à quel point vous avez tenu à participer à mon éducation, et je suis fier de pouvoir dire aujourd'hui que, grâce à vous et mes parents, je suis prêt à relever une telle position. Même si ma surprise est des plus grandes, je vous promet, mon oncle, que je m'en montrerais à la hauteur. Prenant sa main, bien trop légère, dans la mienne, j'essayais de le remercier et de lui montrer mon implication dans la tâche qu'il venait de me confier, essayant tant bien que mal de lui trouver un quelconque signe de présence, sans vraiment y arriver. Ses paupières closes, sa respiration lente, souffrante, il n'avait pas l'air de m'entendre, ni de me sentir. Je baissais alors le regard, la tête en appuie sur mes poings. Tu es à la hauteur, Daemon. Tu l'as toujours été. Je relevais le regard vers le visage de cet oncle qui m'avait tellement apporté. Ne prouve rien à personne, suis tes propres initiatives. Elles sont belles. Elles sont juste. Il partit ensuite dans une quinte de toux, assez forte pour interpeller le mestre resté à la porte, et quelque personnel venu pour apporter une aide quelconque.
Debout face à une scène que je n'aurais jamais pensé voir un jour, je réalisais petit à petit ce que tout cela impliquait. Le regard déterminé, je quittais la pièce, serrant la feuille de papier froissé entre mes mains. J'avais à faire.


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