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La peau de l'Ours [Jorah & Lyra][Flashback]

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Some saw the sun, some saw the smoke. Sometimes the wire must tense for the note. Caught in the fire, say oh, we’re about to explode. Carry your world, I’ll carry your world. Some far away, some search for gold, some dragon to slay. Heaven we hope is just up the road. Show me the way, Lord because I'm about to explode. Carry your world and all your hurt.
Jorah & Lyra


La famille Mormont avait toujours été une famille très soudée. Maege, notre mère, s’était toujours occupée de nous. Certes pas comme des dames du Sud, à apprendre les bonnes manières, à saluer galamment les seigneurs et à rire doucement pour paraître agréables et ô combien superficielles, mais elle nous avait élevé. De sa bouche, de ses actes, de ses réactions nous avions appris certaines valeurs. Honnêteté, loyauté, force, dépassement, rigueur et combattivité. Des valeurs ancestrales qu’elle avait elle-même apprise de son père et de sa mère et eux même de leurs parents. La famille maîtresse de l’Île aux Ours étaient réputée pour leur fidélité et leur caractère hors-norme. Des femmes et des filles qui combattaient comme des hommes, qui affrontaient le danger sans faiblir. Une maison noble vivant dans une pauvre cabane en bois et dont la pauvreté n’avait d’égale que leur férocité au cœur des bataille et que leur justesse d’âme lorsqu’il fallait prêter serment. Nous autres, filles de Maege, digne représentante du blason de l’ours, avions conscience que nous réputation nous précédait et aussi, faisions de notre mieux pour prouver que nous le méritions.

Cependant, au sein de la famille, cela n’était pas le cas de tout le monde. Partout, il y avait un vilain petit canard. Et comme tout le monde, nous avions le nôtre. Jorah Mormont était notre honte. Enfant, malgré mes souvenirs flous, je me rappelais l’avoir admiré pour sa vaillance et sa bravoure. J’étais fière de compter notre cousin parmi nous et étais convaincue qu’il ferait alors le meilleur chef de famille que nous avions connu, après son père, mon oncle, Jeor. Mais le destin était changeant et avait souhaité se divertir un peu. Il avait ramené cette bieffoise qui avait tout détruit. Sa soif d’or, son manque d’honneur et ses caprices avaient déteint sur notre cousin qui, se pliant en quatre pour son épouse, avait commis l’impardonnable. En trempant dans le commerce d’esclaves, il n’avait pas attiré le malheur que sur lui, mais sur tous les Mormont. Lorsqu’il parlait, il ne le faisait pas qu’en son nom, mais au nom de sa tante et ses cousines également. Comment aurions-nous pu lui pardonner son égoïsme ? Comment aurions-nous pu nous montrer devant les Stark qui nous faisaient confiance depuis des générations et qui nous avaient accordé tout ce que nous avions aujourd’hui ? L’exil de Jorah avait été la meilleure réponse. Nous avions coupé tous les ponts avec lui. Il n’existait plus à nos yeux. Il n’était plus digne de s’appeler Mormont puisque notre réputation à tous avait été sali par ses actes.

Alors, je ne m’étais plus guère occupée de savoir ce qu’il était devenu. Ensemble, nous avions fait face et nous avions continué à avancer. Notre mère était devenue la chef de famille après le départ de Jeor au Mur et Dacey son héritière. D’ailleurs, celle-ci faisait tant d’effort pour redorer notre blason, allant même jusqu’à épouser Robb Stark que je lui en étais infiniment reconnaissante et admirative. Cependant, il m’arrivait encore de penser à notre cousin disparu, me demandant ce qu’il faisait, s’il allait bien… Puis, je me rappelais qu’on me reprochait mon cœur tendre et je ne pouvais plus laisser parler ma compassion puisqu’elle serait une insulte faite aux efforts de ma sœur ainée. J’étais décidée à ne jamais pardonner Jorah.

Jusqu’à aujourd’hui. Aujourd’hui, nous avions reçu un corbeau. J’avais été la première à découvrir la nouvelle. Le neveu de ma mère rentrait. Il avait réussi à quitter Essos et par je ne savais quelles entourloupes, Viserys l’avait gracié. Viserys ! Ce roi maudit et fou qui semait la désolation et les larmes ! À mes yeux, son retour était d’autant moins légitime. Mais il avait décidé de rentrer. Il savait que les foudres de ma mère et les nôtres l’attendaient, mais il avait décidé de revenir. Malgré tout. Je le savais débrouillard, mais je ne pouvais m’empêcher de m’imaginer, seule, en territoire inconnus, perdue et sans soutien… Me représenter Jorah ainsi me fendait le cœur. Lui qui m’avait faite sauter sur ses genoux lorsque j’étais enfant, l’ombre toujours rassurante, présente dans le salon…

Recousant les pantalons troués de Lyanna avec une précision inégalée, je sentais ma génitrice, assise, stoïque, me toisant de ses yeux perçants. Elle n’avait pas prononcé un mot depuis que je lui avais annoncé la nouvelle. Cela ne l’enchantait pas vraiment et je sentais, au pincement de ses lèvres, à la froideur de ses prunelles et à l’immobilité de ses membres, qu’elle se préparait à en découdre. Je ne donnais pas cher de la peau de notre cousin. Méticuleusement, je finis ma besogne et pliais le linge avant de me diriger vers la porte d’un pas tranquille.

« Où vas-tu ? » furent les premiers mots que m’adressa Maege Mormont depuis un moment.

Sa voix dure et glacée fit remonter un frisson le long de mon échine.

« Au port, » lui répondis-je avec un pauvre sourire.

Elle devina sans problème que je partais à la rencontre de l’exilé. Elle ne m’en empêcha pas cependant et balaya ma réponse d’un revers de main, m’incitant à déguerpir. Je ne me le fis pas dire deux fois. Je pris la poudre d’escampettes et enfila ma cape sur mes épaules.

Les bateaux, tous rangés le long du ponton, s’entrechoquaient doucement au rythme des vagues. La mer grise était calme et le ciel plutôt clair. Les hommes allaient et venaient, portant des caisses remplis de tissus bruns ou de poissons. Rien ne laissait présager à la tempête qui menaçait de ravager l’Île aux Ours.

Je n’attendis pas longtemps avant de voir apparaître la silhouette sombre d’un bateau, à l’horizon. Nous aurions pu croire à une attaque fer-née, mais nous attendions ce navire. Aussi, les marins s’activèrent pour l’accueillir et se tenir prêt à l’amarrage. Je mordis l’intérieur de mes joues lorsque les premiers passagers en descendirent. Ils étaient peu nombreux et arboraient tous la même mine éreintée et éteinte. Allais-je reconnaître Jorah ? Il avait probablement changé. Mais, lorsqu’une mine se détacha du lot, avec ses yeux d’acier et sa carrure imposante, je sus que c’était lui. En plein milieu du ponton, je me fis violence pour ne pas courir vers lui et lui souhaiter la bienvenue comme il se devait. Mais j’aurais eu l’impression d’être ridicule à agir de la sorte, tel un chien saluant son maître qui l’avait cependant battu. Aussi, je restais là, à croiser les bras et à taper du pied, malgré les larmes qui menaçaient de faire briller mes yeux.