L'ombre de la neige | Ramsay & Lyra
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L'ombre de la neige
semaine 2, Lune 10, an 298
Ramsay & Lyra
Les contrées de l’est, au-delà de Winterfell, étaient encore inconnues et mystérieuses pour Lyra. Elle était habituée aux forêts denses, sombres et rassurantes de l’Île aux Ours et du Bois-aux-Loups, de l’autre côté de la Baie des Glaces. À travers les montagnes écharpées et les crevasses scélérates, son pied était sûr. La sylve et les monts étaient autant de cachettes, de zones d’ombres idéales et d’enfers où perdre ses ennemis, lorsqu’on en connaissait les secrets. Si certains ne voyaient dans les bois et dans les apiques rocheux que des pièges et des coupes gorges, ce n’était pas le cas de la troisième ourse.
En revanche, étrangement, les vallons dégagés des Collines Solitaires, non loin de Fort-Terreur, lui faisait froid dans le dos. À perte de vue, s’étiraient jusqu’à l’horizon ces sentiers déserts, battus par les vents. Tout était plat. Désespérément plat. Si la typographie du terrain leur permettait de voir approcher des cavaliers à des kilomètres, l’inverse était également vrai. Cette absence totale de couverture et de zone de repli plongeait la jeune femme dans un inconfort palpable. D’ailleurs, elle ne cessait de se retourner pour regarder par dessus son épaule, laissant ses yeux inquiets se perdre dans l’immensité grise du Nord.
Intérieurement, l’émissaire se désolait de la tournure des événements. Harrion Karstark s’était proposé pour accompagner la petite escorte de la Mormont composée de l’Écorce, de Benjicot Branche et d’un soldat de l’Île aux Ours. Tous étaient censés se retrouver à Winterfell, y séjourner quelques jours pour planifier la suite du voyage et faire le plein de vivres avant d’emprunter le Route Royale jusqu’à Cerwyn, Moat Cailin, puis le Neck. Cela n’aurait pris qu’une semaine, peut-être un peu plus si une neige épaisse était venue encombrer leur chemin ou si la météo les obligeait à rester au creux d’une auberge.
Pourtant, voilà qu’ils chevauchaient vers le fief des Bolton pour retrouver l’héritier des Karstark, retenu à Karhold en raison de la soudaine faiblesse de son père. Ils avaient reçu un corbeau dès leur arrivé dans le fief des Stark pour les informer de la situation. Il avait donc été décidé qu’un léger détour serait fait pour retrouver le dernier homme de l’escorte près de la Larmoyante, avant de descendre vers le sud en direction de Corbois avant de rejoindre Blanc-Port. Le crochet ne rajoutait que quelques jours à leur voyage, mais Lyra voulait en avoir fini au plus vite. Cette situation quant à Lyanna l’incommodait. Mais enfin, ils évitaient ainsi de passer par la Route Royale, ce qui était autant une bénédiction qu’une malédiction, en esquivant les brigands et les marauds, mais également en se privant d’un passage dégager et emprunté quotidiennement par des marchands. Détail de praticité s’ils venaient à manquer de nourriture.
L’archère ne se résolvait cependant pas à en vouloir au retardataire. Son géniteur était malade et elle louait sa volonté de l’épauler tout en continuant d’honorer sa parole lorsqu’il lui avait affirmé vouloir l’accompagner dans les marais.
D’ailleurs, il lui tardait d’arriver à Fort-Terreur. Malgré la réputation sulfureuse de la forteresse et les rumeurs tout aussi glaçantes concernant leurs propriétaires, la jeune femme avait hâte de revoir Domeric Bolton. Son départ pour le Val les avait éloignés l’un de l’autre et la captivité de l’ours sur les Îles de Fer les avaient privés de leur correspondance régulière. Elle était étonnée de ne pas avoir reçu de ses nouvelles depuis son retour dans le Nord. Peut-être avait-il beaucoup à faire auprès de son père.
Bientôt, au loin, se dessina la silhouette massive de la forteresse nébuleuse. Ce simple accroc dans la platitude ennuyante de l’horizon suffit à réjouir l’émissaire. D’un seul mouvement, la petite équipée talonna légèrement et les chevaux allongèrent la cadence. Il n’était pas encore en milieu de journée que déjà, les ventres gargouillaient. Et la perspective de faire une halte dans une famille fidèle aux Stark où ils recevraient l’hospitalité les avaient dissuadés de fouiller dans leurs réserves, préférant conserver leurs provisions pour plus tard, au cas où.
Les hauts murs et les merlons triangulaires, ressemblant à s’y méprendre à des dents tranchantes, ne rendaient pas le château accueillant. Les tours imposantes avaient l’air d’os noirci à la cendre.
Nos lames sont acérées.
Les mots de la maison Bolton résonnèrent comme une alarme dans un coin de la tête de Lyra. Le dédain de sa mère à leur sujet était sans fin. Elle se souvenait encore de ses grimaces lorsqu’une de leurs anciennes cuisinières leur avait un jour raconté comment elle avait un jour été témoin d’un écorchement dans un des cachots de la demeure lugubre de ceux que l’on appelait jadis les Rois Rouges. Mais la domestique était vieille et édenté et son esprit lui jouait souvent des tours. Alors, malgré sa naïveté et sa jeunesse, la chasseuse avait décidé de ne pas la croire, bien qu’elle s’évertuait toujours à afficher un air étonné et profondément attentif lorsqu’il prenait à la servante de leur conter une histoire.
Tout le monde savait qu’après avoir ployé le genou devant les loups du Nord, les Bolton avaient abandonné leur tradition barbare et que cela tenait aujourd’hui plus du mythe que de la réalité. Mythe que Domeric se plaisait quelques fois à entretenir, de la même manière que l’émissaire racontait qu’elle était la fille d’un ours. Des rumeurs. Des farces faites pour divertir et pour troubler. Des légendes que racontaient les nourrices pour terroriser les enfants. Rien de plus.
La jeune femme n’aurait jamais pu imaginer un homme aussi doux et discret que l’héritier de Fort-Terreur capable de telles horreurs.
Pourtant, en franchissant les portes de la forteresse après s’être annoncé, la brune entendit Benjicot marmonner dans sa barbe.
« Et c’est parti, » grommela-t-il. « Nous voilà dans la gueule du loup… Maudit Karstark. »
Il remonta sa lourde écharpe de laine sans couleur sur son nez avant de se replonger dans le mutisme. Lyra lui lança une œillade interloquée et curieuse avant d’être abordée par un domestique. Celui-ci lança un regard suspicieux à l’arc et au carquois pendus dans son dos.
« Je suis Lyra Mormont, » l’informa-t-elle avec un sourire, comme si cela eut servi de justification. « Il a été convenu qu’Harrion Karstark nous retrouverait à Fort-Terreur dans peu de temps. Lord Bolton en a été informé par corbeau de notre part, ainsi que de la part du fils de Rickard, j’imagine. »
Le palefrenier se proposa pour l’aider à descendre de sa monture. Si elle n’avait certainement pas besoin de lui, elle accepta tout de même gracieusement sa proposition pour ne pas le mettre dans l’embarras.
« Je profite de cette halte pour prendre des nouvelles de lord Domeric. Comment va-t-il ? Est-il présent ? »
Un trouble qu’elle ne comprit pas passa dans le regard du serviteur.
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L’ombre de la neige
An 298 – Lune 10 – Semaine 2
Lyra Mormont & Ramsay Snow
PITIÉ NON !!! ARRÊTEZ !!! NOUS PAIERONS VOUS AVEZ MA PAROLE MAIS ARRÊTEZ !!!
Tels étaient les mots que le vieux paysan hurlaient dans mon dos tandis que son jeune fils, qui devait à peu près avoir mon âge se trouvait à ma merci, attaché à mon jouet favori : la grande croix de bois de chêne, solidement fixée au sol. J’allais commencer à l’écorcher vif, en débutant par les pieds pour progressivement remonter vers le haut de son corps et pour finir en apothéose par son visage, mais les cris du vieux m’en empêchèrent, surtout qu’il avait prononcé le mot que je n’ai jamais pu supporter… « Pitié » Agacé, je levais les yeux au ciel et serrais les dents, me relevais avec lenteur avant de me retourner vers le vieux, de le désigner à l’aide de mon couteau aiguisé à la perfection et de lui répondre, de ma voix calme et douce :
Tu paieras ? Et quand comptes-tu réellement le faire ? Le Seigneur mon Père fut suffisamment bon pour t’avancer 10 dragons d’or, pour que tu puisses te payer un cheval pour labourer tes champs. Rappelles-moi quand a eu lieu ce généreux prêt ?
L’autre baissa la tête, en pleurs. Je l’avais attaché au mur situé juste en face de la croix. Un garde se trouvait à ses côtés, chargé de lui relever la tête et de lui maintenir les yeux grands ouverts sur le spectacle donné par son fils écorché.
Il y a 3 lunes…, répondit-il dans un souffle entrecoupé de sanglots.
Je fis mine de n’avoir rien entendu et fit un geste derrière mon oreille lui signifiant de parler plus fort :
Un peu plus fort, je ne t’ai pas entendu.
Il y a 3 lunes !! répéta-t-il plus fort cette fois.
3 lunes hein ? Le prêt de Lord Bolton t’obligeait à le rembourser sous 2 lunes. Mon Père n’est pas homme de patience et moi non plus. Si tu étais incapable de tenir les délais, alors il fallait t’abstenir de demander un prêt.
Je vous ai remboursé ! 2 sacs de blé de…
Du blé ? Oui c’est vrai…Mais du blé, c’est bien loin de ressembler à des dragons d’or…
L’autre se remit à pleurer. Je ne pus m’empêcher de sourire en voyant toute cette détresse sur son visage ridé. Je m’adressais alors au garde qui se trouvait à ses côtés :
Redresse-le et maintiens-lui la tête relevée vers son fils et les yeux bien ouverts. Préviens-moi s’il les ferme. Je veux qu’il voit ça…
Le garde ricana et hocha la tête d’un air entendu. Je me retournais vers son jeune fils et m’approchais lentement de lui, faisant jouer mes doigts devenus experts en la matière avec la lame acérée de mon couteau. Il avait tellement peur qu’il pissa de trouille, mouillant mes bottes. Je plantais mes yeux bleus dans les siens, mon sourire avait disparu mais ma voix était toujours calme et posée :
Tu as sali mes nouvelles bottes…
Il fondit en larmes, résigné par le sort fatal qui l’attendait. Puis, d’un geste rapide, je lui assenais un coup de poing violent sur le visage, lui cassant le nez par la même occasion, puis me baissa et entrepris de commencer mon chef d’œuvre par sa jambe droite. Immédiatement ses hurlements stridents remplir le sombre cachot situé dans les bas-fonds de Fort-Terreur, hurlements mêlés de pleurs et de ceux de son père derrière moi. Peu à peu, ma lame retirait sa peau, en commençant par le pied, puis le mollet et la cuisse. Une fois à hauteur de son entrejambe, je m’arrêtais et fis de même sur l’autre jambe. J’avais à peine atteint le dessus du genou quand tout à coup, les cris cessèrent…Il était déjà mort. « Non pas déjà ! » me dis-je. Je me relevais, pris une poignée de ses cheveux pour lui relever la tête et constata qu’il était effectivement mort. Enervé et déçu, je relâchais sa tête, haussa mes épaules et ordonna à deux de mes gars de nettoyer la pièce avant de rajouter :
Donnez ses restes à mes chiens. C’est de la viande fraîche après tout.
Je me retournais vers le vieux et, m’adressant au garde :
Il a bien tout regardé ?
Ouais mais j’crois que l’droit s’est fermé un peu…
L’autre secoua la tête, m’assurant que ce n’était pas le cas, mais je repris, sourd à ses protestations :
Le droit s’est fermé un peu tu dis. Il n’a pas respecté les règles du jeu…Je m’occuperais de son cas, après le déjeuner:
Quittant le cachot et refermant la porte derrière moi, je tendis mes bras au-dessus de ma tête pour m’étirer avant de les laisser mollement retomber. Je ne pouvais pas dire que j’étais satisfait de cette matinée. C’est vrai que 10 Dragons d’Or, c’était peu pour un seigneur comme Lord Bolton et la punition pouvait sembler exagérée…Mais il me fallait de la distraction, moi qui ai l’ennui en horreur. Après m’avoir écouté et longuement observé, Père avait finalement accepté que je m’occupe de son cas. Maintenant qu’il n’a plus de fils, et qu’il va aussi bientôt perdre son œil droit pour s’être « un peu fermé », nul doute que le vieux allait trouver le montant dû au Seigneur de Fort-Terreur…
Je me dirigeais vers un seau d’eau, y plongea mes mains et mon couteau couvert de sang pour les nettoyer, puis essuya mes mains sur mon pantalon noir, de même que la lame de mon couteau, que j’astiquais avec précaution en utilisant le pan de ma manche. Puis je pris mon manteau et ma cape, les enfilèrent et remontais les marches en direction de la cour principale de Fort-Terreur. Le froid du Nord me frappa au visage, mais fort heureusement il n’y avait pas de vent aujourd’hui. M’avançant dans la cour tout en mettant mes gants, mes vêtements bruns et noirs juraient sur la blancheur neigeuse du sol, mais étaient en accord avec la couleur des pierres formant les murailles de Fort-Terreur. C’est alors que mon regard fut attiré par une voix féminine. Je tournais la tête en direction de celle-ci et vis trois nouveaux arrivants, une femme portant arc et carquois en bandoulière, et deux hommes, tous montés sur de belles bêtes. J’en conclus qu’ils devaient être les invités qu’attendait Père mais comme il était absent aujourd’hui, c’est sur moi qu’incombait la lourde tâche de prendre soin de nos invités. Alors qu’ils mettaient pied à terre, je m’avançais vers eux pour les accueillir, redoutant déjà de devoir prononcer le nom de « Snow » que j’abhorrais pour me présenter. J’étais presque à leur hauteur quand je l’entendis questionner le garçon d’écurie au sujet de Domeric Bolton. « Ce cher Domeric… » pensais-je. Un sourire en coin déforma mon visage mais je l’effaçais aussitôt, tout comme l’air sadique qu’avaient pris mes traits à la pensée de son discret assassinat, avant de leur lancer :
Vous m’en voyez navré, mais Lord Domeric nous a quitté il y a plusieurs Lunes de cela…
Je fis mon possible pour m’empêcher de sourire. A la place, je pris un air enjôleur et bienveillant pour les accueillir comme un Seigneur se doit de le faire envers ses invités :
Je suis Ramsay Snow, fils illégitime de Lord Roose Bolton. Le Seigneur mon Père est absent aujourd’hui et s’en excuse. Il m’a chargé de vous accueillir en son nom et de vous porter assistance si besoin. Vous devez être Lady Lyra Mormont je suppose ? la questionnais-je en m’inclinant légèrement avant de reprendre : J’allais passer à table pour déjeuner. Vous êtes bien sûr tous les trois inviter à la table de Lord Bolton. Vous devez sûrement avoir faim.
« Mignonne » pensais-je… « Très mignonne »…
Tels étaient les mots que le vieux paysan hurlaient dans mon dos tandis que son jeune fils, qui devait à peu près avoir mon âge se trouvait à ma merci, attaché à mon jouet favori : la grande croix de bois de chêne, solidement fixée au sol. J’allais commencer à l’écorcher vif, en débutant par les pieds pour progressivement remonter vers le haut de son corps et pour finir en apothéose par son visage, mais les cris du vieux m’en empêchèrent, surtout qu’il avait prononcé le mot que je n’ai jamais pu supporter… « Pitié » Agacé, je levais les yeux au ciel et serrais les dents, me relevais avec lenteur avant de me retourner vers le vieux, de le désigner à l’aide de mon couteau aiguisé à la perfection et de lui répondre, de ma voix calme et douce :
Tu paieras ? Et quand comptes-tu réellement le faire ? Le Seigneur mon Père fut suffisamment bon pour t’avancer 10 dragons d’or, pour que tu puisses te payer un cheval pour labourer tes champs. Rappelles-moi quand a eu lieu ce généreux prêt ?
L’autre baissa la tête, en pleurs. Je l’avais attaché au mur situé juste en face de la croix. Un garde se trouvait à ses côtés, chargé de lui relever la tête et de lui maintenir les yeux grands ouverts sur le spectacle donné par son fils écorché.
Il y a 3 lunes…, répondit-il dans un souffle entrecoupé de sanglots.
Je fis mine de n’avoir rien entendu et fit un geste derrière mon oreille lui signifiant de parler plus fort :
Un peu plus fort, je ne t’ai pas entendu.
Il y a 3 lunes !! répéta-t-il plus fort cette fois.
3 lunes hein ? Le prêt de Lord Bolton t’obligeait à le rembourser sous 2 lunes. Mon Père n’est pas homme de patience et moi non plus. Si tu étais incapable de tenir les délais, alors il fallait t’abstenir de demander un prêt.
Je vous ai remboursé ! 2 sacs de blé de…
Du blé ? Oui c’est vrai…Mais du blé, c’est bien loin de ressembler à des dragons d’or…
L’autre se remit à pleurer. Je ne pus m’empêcher de sourire en voyant toute cette détresse sur son visage ridé. Je m’adressais alors au garde qui se trouvait à ses côtés :
Redresse-le et maintiens-lui la tête relevée vers son fils et les yeux bien ouverts. Préviens-moi s’il les ferme. Je veux qu’il voit ça…
Le garde ricana et hocha la tête d’un air entendu. Je me retournais vers son jeune fils et m’approchais lentement de lui, faisant jouer mes doigts devenus experts en la matière avec la lame acérée de mon couteau. Il avait tellement peur qu’il pissa de trouille, mouillant mes bottes. Je plantais mes yeux bleus dans les siens, mon sourire avait disparu mais ma voix était toujours calme et posée :
Tu as sali mes nouvelles bottes…
Il fondit en larmes, résigné par le sort fatal qui l’attendait. Puis, d’un geste rapide, je lui assenais un coup de poing violent sur le visage, lui cassant le nez par la même occasion, puis me baissa et entrepris de commencer mon chef d’œuvre par sa jambe droite. Immédiatement ses hurlements stridents remplir le sombre cachot situé dans les bas-fonds de Fort-Terreur, hurlements mêlés de pleurs et de ceux de son père derrière moi. Peu à peu, ma lame retirait sa peau, en commençant par le pied, puis le mollet et la cuisse. Une fois à hauteur de son entrejambe, je m’arrêtais et fis de même sur l’autre jambe. J’avais à peine atteint le dessus du genou quand tout à coup, les cris cessèrent…Il était déjà mort. « Non pas déjà ! » me dis-je. Je me relevais, pris une poignée de ses cheveux pour lui relever la tête et constata qu’il était effectivement mort. Enervé et déçu, je relâchais sa tête, haussa mes épaules et ordonna à deux de mes gars de nettoyer la pièce avant de rajouter :
Donnez ses restes à mes chiens. C’est de la viande fraîche après tout.
Je me retournais vers le vieux et, m’adressant au garde :
Il a bien tout regardé ?
Ouais mais j’crois que l’droit s’est fermé un peu…
L’autre secoua la tête, m’assurant que ce n’était pas le cas, mais je repris, sourd à ses protestations :
Le droit s’est fermé un peu tu dis. Il n’a pas respecté les règles du jeu…Je m’occuperais de son cas, après le déjeuner:
Quittant le cachot et refermant la porte derrière moi, je tendis mes bras au-dessus de ma tête pour m’étirer avant de les laisser mollement retomber. Je ne pouvais pas dire que j’étais satisfait de cette matinée. C’est vrai que 10 Dragons d’Or, c’était peu pour un seigneur comme Lord Bolton et la punition pouvait sembler exagérée…Mais il me fallait de la distraction, moi qui ai l’ennui en horreur. Après m’avoir écouté et longuement observé, Père avait finalement accepté que je m’occupe de son cas. Maintenant qu’il n’a plus de fils, et qu’il va aussi bientôt perdre son œil droit pour s’être « un peu fermé », nul doute que le vieux allait trouver le montant dû au Seigneur de Fort-Terreur…
Je me dirigeais vers un seau d’eau, y plongea mes mains et mon couteau couvert de sang pour les nettoyer, puis essuya mes mains sur mon pantalon noir, de même que la lame de mon couteau, que j’astiquais avec précaution en utilisant le pan de ma manche. Puis je pris mon manteau et ma cape, les enfilèrent et remontais les marches en direction de la cour principale de Fort-Terreur. Le froid du Nord me frappa au visage, mais fort heureusement il n’y avait pas de vent aujourd’hui. M’avançant dans la cour tout en mettant mes gants, mes vêtements bruns et noirs juraient sur la blancheur neigeuse du sol, mais étaient en accord avec la couleur des pierres formant les murailles de Fort-Terreur. C’est alors que mon regard fut attiré par une voix féminine. Je tournais la tête en direction de celle-ci et vis trois nouveaux arrivants, une femme portant arc et carquois en bandoulière, et deux hommes, tous montés sur de belles bêtes. J’en conclus qu’ils devaient être les invités qu’attendait Père mais comme il était absent aujourd’hui, c’est sur moi qu’incombait la lourde tâche de prendre soin de nos invités. Alors qu’ils mettaient pied à terre, je m’avançais vers eux pour les accueillir, redoutant déjà de devoir prononcer le nom de « Snow » que j’abhorrais pour me présenter. J’étais presque à leur hauteur quand je l’entendis questionner le garçon d’écurie au sujet de Domeric Bolton. « Ce cher Domeric… » pensais-je. Un sourire en coin déforma mon visage mais je l’effaçais aussitôt, tout comme l’air sadique qu’avaient pris mes traits à la pensée de son discret assassinat, avant de leur lancer :
Vous m’en voyez navré, mais Lord Domeric nous a quitté il y a plusieurs Lunes de cela…
Je fis mon possible pour m’empêcher de sourire. A la place, je pris un air enjôleur et bienveillant pour les accueillir comme un Seigneur se doit de le faire envers ses invités :
Je suis Ramsay Snow, fils illégitime de Lord Roose Bolton. Le Seigneur mon Père est absent aujourd’hui et s’en excuse. Il m’a chargé de vous accueillir en son nom et de vous porter assistance si besoin. Vous devez être Lady Lyra Mormont je suppose ? la questionnais-je en m’inclinant légèrement avant de reprendre : J’allais passer à table pour déjeuner. Vous êtes bien sûr tous les trois inviter à la table de Lord Bolton. Vous devez sûrement avoir faim.
« Mignonne » pensais-je… « Très mignonne »…
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semaine 2, Lune 10, an 298
Ramsay & Lyra
Le domestique resta muet, le nez baissé sur ses chaussures crottées et les yeux regardant de partout, sauf vers elle. Il était presque désemparé. Instinctivement, Lyra sut que quelque chose n’allait pas. Que quelque chose ne tournait pas rond. Sinon, pourquoi s’obstinerait-il dans un mutisme presque religieux, semblable à celui des Sœurs du Silence dans le Sud ?
Il lui présenta sa pogne dont elle se saisit avant de se laisser glisser le long des flancs de l’animal. Ses lourdes bottes s’enfoncèrent dans la neige noire et piétinée par les sabots et les pieds depuis de nombreux jours déjà et le bas de sa robe ne tarda pas à changer de couleur au contact du sol humide.
Alors qu’elle allait renouveler sa question, l’approche d’un homme lui fit lever la tête. Il avait plus d’allure que les autres domestiques et il arborait des vêtements plus riches et plus élégants. Une cascade de cheveux noirs et frisés auréolait un visage blanc aux joues rosies, comme celles d’un nouveau-né. L’ourse pensa dans un premier temps qu’il devait s’agir de l’intendant de Fort Terreur, chargé de les accueillir et de les conduire jusqu’à Lord Bolton. Pourtant, un détail attira son attention. Les mêmes yeux… pensa-t-elle. Ces iris tantôt bleues, tantôt grises, d’une pâleur déconcertante, presque dérangeante. Domeric les avait aussi. Plus jeune, elle avait été troublée par ce regard de glace qui vous perçait les chaires jusqu’à vous geler les os. Puis, elle s’y était habituée et y avait trouvé la douceur et le bienveillance d’une journée d’hiver ensoleillée. Dans les yeux de l’intendant cependant, elle ne décela rien de tout cela.
À son arrivée près du quatuor, le palefrenier se retira subitement, presque brusquement alors que sa face restait tournée vers le sol, dans un salut respectueux et craintif, à la manière d’un animal dominé face à son dominant. La Mormont n’aurait pas été étonnée de le voir se mettre par terre avant de lui présenter son ventre, signe ultime de la soumission.
Ce fut l’inconnu qui vint répondre à ses interrogations.
La nouvelle la laissa confuse. Hébétée. Les yeux grands ouverts, elle le toisa sans le voir. Elle sentit tout le sang se retirer de son visage, de ses bras, de ses pieds. Elle eut l’horrible sensation de sentir ses jambes se dérober sous elle, mais la chasseuse resta bien droite, comme statufiée. Sa vision devint trouble et elle se rendit compte que des larmes menaçaient de franchir la lisière de ses cils. Un bourdonnement désagréable envahit ses tympans et elle entendit à peine ce que disait l’intendant qui se révélait être un bâtard de Lord Bolton. Le mirage de son souffle blanc se matérialisait devant elle dans un tremblement fantomatique. Sa poitrine opprimée l’empêchait de respirer correctement. Sa main tremblante vint se placer devant sa bouche, figée d'horreur.
« Que… » articula-t-elle difficilement. « Q-Qu’est ce que cela signifie ? »
Les mots ne venaient pas naturellement, elle avait l’impression de se forcer, comme si sa tête avait cessé de réfléchir.
L’Écorce vint se ranger à côté d’elle. Lyra se retint de s’agripper à son bras pour s’empêcher de tomber, mais sa seule présence suffit à la sortir du marasme dans lequel elle s’était embourbée. Une bourrasque vint violemment secouer leurs capes de voyage et il encercla les frêles et minces épaules de la fille de Maege de son gros bras de soldat.
« Allons discuter de tout ça à l’intérieur, » entonna-t-il de sa voix rauque et bourrue. « Ou le vent va finir par nous décoller la peau. Le voyage a fatigué m’lady. »
C’était faux. L’émissaire n’était pas le moins du monde éreinté par le trajet. Pourtant, un grand froid l’avait envahi et ses jambes semblaient avoir été sciée.
Docilement, comme une marionnette, elle se laissa escorter jusque dans l’antre de la forteresse où on la confia à une suivante avant qu’ils ne déjeunent.
Fermée dans une petite pièce chauffée par un âtre minuscule, elle resta seule, immobile, à contempler les flammes danser en attendant que la domestique ne revienne pour lui nettoyer les mains et le visage, gercés par le blizzard. Même si les braises rougeoyantes brillaient ardemment, sa peau restait gelée.
Lord Domeric nous a quitté il y a plusieurs lunes de cela… Les mots résonnaient encore dans sa tête avec les intonations sirupeuses, mais sans malveillance de son demi-frère. Que s’était-il passé ? Comment une telle horreur avait-elle pu se produire ?
Enfin, Lyra éclata en sanglots. Des pleurs sans bruit, discrets. Elle plongea son visage dans ses mains pour y cacher ses yeux rougis et ses joues mouillées. Elle n’y comprenait rien. En venant ici, elle s’était préparée à gentiment rabrouer son ami pour son manque de constance dans leurs missives et aujourd’hui elle apprenait que ses lettres étaient restées sans réponse car il était mort ? Y croire lui semblait insurmontable. L’héritier de Fort Terreur était son ami depuis de nombreuses années. Il était jeune et en parfaite santé. Était-il tombé malade dans les hautes montagnes du Val, lorsqu’il était encore écuyer ? Pourquoi n’était-elle pas au courant ? Pourquoi personne ne lui en avait-elle parlé ? Aucune explication logique ne lui venait en tête tandis que son cœur demeurait ravagé par le chagrin.
La domestique revint et en dépit de son état, ne lui posa aucune question. Sans un mot, elle se contenta de faire son labeur. D’une éponge gorgée d’eau tiède, elle nettoya les paumes et les ongles noircis de la jeune femme avec une douceur compatissante avant d’essuyer son visage avec un torchon chaud. L’ourse se laissa faire et entre deux hoquets, ses larmes se tarirent.
« C’est la période de cette lune ? » lui demanda soudain la servante sans la regarder. « Vos humeurs se détraquent m'lady ? »
En effet, Lyra saignait depuis deux jours. Cependant, la nouvelle semblait avoir traumatisé son corps si bien qu’il était comme engourdi et qu’elle ne ressentait plus rien. Distraite, elle acquiesça.
Sans demander son reste, la femme d’un âge déjà avancé coiffa rapidement ses cheveux pour la rendre présentable. Des futilités, pensa-t-elle. Des futilités… Elle la débarrassa également de son arc et de son carquois. Après tout, elle était en sécurité ici.
Dans la salle de réception des torches avaient été allumées pour réchauffer la pièce et éclairer les longues tables d’ébène. Les hommes étaient déjà installés et la jeune femme s’invita à leur table avec un léger hochement de tête.
« Navrée, » s’excusa-t-elle autant pour le retard que pour la faiblesse qui l’avait prise. « Merci de jouer à l’hôte en l’absence de votre père, lord Ramsay, et de nous accueillir à votre table. »
L’annonce de la mort de Domeric l’avait profondément contrariée et sa voix rocailleuse ne laissait aucun doute sur ses sanglots précédents. Pourtant, elle ne voulait pas que cela embarrasse le fils de Lord Bolton. Aussi, s’obligea-t-elle à garder la face. Elle était l'émissaire de la maison Mormont et si elle ne possédait définitivement pas la force de composition de Dacey, elle se devait de faire face. Elle s’assit à côté de l’Écorce, en face du bâtard qu’elle gratifia d’un maigre sourire.
« Je suis ravie de faire votre connaissance, » commença-t-elle, sincère. « Je n’avais aucune idée que Domeric avait un frère. Il ne m’en a… m’en avait jamais parlé. »
Prononcer son nom était une épreuve. Parler de lui au passé également. Mais elle se forçait pour faire bonne figure devant Ramsay Snow. D’ailleurs, elle n’était pas sûre de savoir comment elle devait l’appeler. Sur l’Île aux Ours, bâtards ou non, il n’existait que peu voire pas de différence. Si l’on y regardait de plus près, Lyra était une bâtarde elle aussi. Après tout, sa mère ne s’était jamais mariée et gardait farouchement le nom du ou des pères de ses filles. Or, les mœurs sur leur île étaient différentes que sur le continent. Mais si on l’appelait « ma dame » alors elle estimait logique d’appeler leur hôte « mon seigneur ».
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An 298 - Lune 10 - Semaine 2
Lyra Mormont & Ramsay Snow
Mais certainement répondis-je à l’homme à la voix bourrue qui s’était porté aux côtés de la Mormont pour l’éviter de tomber mollement sur le sol boueux. Je ne parvenais cependant pas à feindre la tristesse autant que ce que je pouvais voir sur son visage. Aussi repris-je :
Le Seigneur mon Père a fait apprêter une chambre pour vous, Lady Lyra, ainsi qu’une autre pour vos gens. Je vais faire mander des domestiques pour votre toilette puis je vous attendrais dans la salle de réception pour le déjeuner.
J’inclinais très légèrement la tête, un fin sourire sur le visage, tandis que nos hôtes suivaient nos domestiques vers leurs chambres respectives. A peine eurent-ils le dos tourné que, me redressant, mon sourire se dissipa aussitôt et que mes sourcils se froncèrent. Visiblement, elle semblait très bien connaître Domeric…Elle allait certainement poser des questions à son sujet, sur les circonstances de sa mort… « C’est embêtant ça » me dis-je. L’un de ses gardes se retourna pour me jeter un dernier coup d’œil avant de s’engouffrer à l’intérieur du bâtiment principal. Je lui lançais un signe de tête avec un sourire mais ne reçut rien en retour qu’un regard soupçonneux. Une fois qu’il eut disparu à l’intérieur, l’expression glaçante et menaçante qui se lut alors sur mon visage dut être telle qu’elle fit faire demi-tour à un des jeunes garçons d’écurie, qui venait vers moi certainement pour me poser quelques questions sur les soins supplémentaires à prodiguer aux montures de nos invités.
Je me trouvais encore dans la cour, immobile dans le froid à réfléchir à la façon dont j’allais devoir aborder ce déjeuner lorsqu’une odeur reconnaissable entre mille se fit sentir sur ma gauche. Sans même me donner la peine de me retourner vers lui, je lui lançais :
Mon bon Schlingue, on a un problème je crois…
Mouaisfit-il,la donzelle connaît bien Domeric.
Et quand aurais-tu juger bon de m’en parler ? les questionnais-je en me retournant vers lui tout sourire même si mes yeux exprimaient tout sauf la joie. Il cracha par terre, avant de me lancer un regard torve et de répondre :
J’lai vu qu’une fois cte fille. C’tait avant que j’parte pour ta piole. Si elle est revnue après, moi j’pouvais pas savoir. J’revnais ici qu’pour vous chercher à bouffer c’tout.Il se rapprocha de moi pour me souffler à l’oreille :T’as vu comment qu’elle a failli tourner d’l’œil ? M’est avis qu’elle l’aimait vraiment bien, le Domeric…. Son visage se tordit en un sourire aussi écœurant que son odeur.
Je m’écartais de lui :
Pas si près, je n’ai pas envie d’avoir ton odeur sur moi durant le déjeuner. Arranges-toi pour ne pas te trouver dans les parages tant qu’ils seront là…
Mouais fut sa réponse. Il me donna une petite tape dans le dos puis tourna les talons et alla rôder de son pas traînant vers l’extérieur de l’enceinte de la cité.
Pour ma part, je me dirigeais vers ma chambre, ôta manteau, cape et gants, brossa mes ongles dont le dessous et les contours portaient encore les traces du sang de ma victime, puis me rendis à la salle de réception, habillé de noir, sobrement, comme de coutume.
J’étais le premier arrivé, ce qui ne m’étonnait pas vraiment. Ne prenant guère attention aux torches ni aux autres préparatifs et soins apportés par les domestiques pour ce déjeuner, je me dirigeais droit vers la table et me servit une coupe de vin tandis que les deux gardes de Lyra Mormont firent leur entrée.
Aaah mes invités !, les acclamais-je avec un sourire,que diriez-vous d’une coupe de vin en attendant votre jeune et ravissante Dame ?
L’un répondit immédiatement par l’affirmative en me remerciant poliment. Mais le second, le même qui m’avait jeté un dernier regard avant de disparaître vers sa chambre quelques instants auparavant, s’il prit la coupe que je lui tendais, me regardait toujours avec suspicion et méfiance. J’entamais la conversation avec le premier, même si le second restait muré dans son silence. Nous prenions place à table et commencions à manger lorsque Lyra fit son apparition. Elle était toujours habillée simplement, mais sa coiffure était un peu plus sophistiquée. Nous nous levâmes à son entrée et ses excuses, combinées au fantastique « Lord Ramsay » qui sonnait magnifiquement bien à mes oreilles, me fit m’approcher d’elle. Les mains jointes dans mon dos, je m’inclinais à nouveau, cette fois un peu plus bas qu’avant :
Lady Lyra, vous êtes toutes pardonnée. Je vous en prie, prenez place. dis-je en l’invitant à s’asseoir en face de moi. Je fis de même, claqua dans mes doigts pour qu’un domestique vint la servir, puis écouta ses mots. Je scrutais son visage ; elle me paraissait sincère.
De cela, je n’en doute pas. Domeric était un homme plein de secrets, assurément. Il ne me parlait guère vous savez. Il est vrai que je ne suis que de deux ans son cadet. Peut-être voyait-il en moi un concurrent au titre d’héritier de Lord Bolton…même si je lui ai maintes fois assurée que ma condition de bâtard ne devrait pas lui donner d’inquiétude sur la question…Enfin…c’est du passé…Inutile de le ressasser.
Je pris une bouchée de viande. « Trop cuite…pas assez saignante…J’en toucherais deux mots à la cuisinière plus tard » pensais-je, puis je repris à l’attention de Lady Lyra :
Vous semblez avoir été beaucoup affectée par l’annonce de son décès. Vous étiez proches ? Je me sens redevable de votre peine, ma Dame. Si je peux faire quoi que ce soit pour vous aider, dîtes-le moi., avais-je dit en plongeant mon regard dans le sien, prenant un air aussi sincère et bienveillant que possible. Une chose est sûre ; Schlingue avait raison quand il disait que je pourrais devenir comédien tant je n’avais aucun mal à mentir et à jouer la comédie…
Le Seigneur mon Père a fait apprêter une chambre pour vous, Lady Lyra, ainsi qu’une autre pour vos gens. Je vais faire mander des domestiques pour votre toilette puis je vous attendrais dans la salle de réception pour le déjeuner.
J’inclinais très légèrement la tête, un fin sourire sur le visage, tandis que nos hôtes suivaient nos domestiques vers leurs chambres respectives. A peine eurent-ils le dos tourné que, me redressant, mon sourire se dissipa aussitôt et que mes sourcils se froncèrent. Visiblement, elle semblait très bien connaître Domeric…Elle allait certainement poser des questions à son sujet, sur les circonstances de sa mort… « C’est embêtant ça » me dis-je. L’un de ses gardes se retourna pour me jeter un dernier coup d’œil avant de s’engouffrer à l’intérieur du bâtiment principal. Je lui lançais un signe de tête avec un sourire mais ne reçut rien en retour qu’un regard soupçonneux. Une fois qu’il eut disparu à l’intérieur, l’expression glaçante et menaçante qui se lut alors sur mon visage dut être telle qu’elle fit faire demi-tour à un des jeunes garçons d’écurie, qui venait vers moi certainement pour me poser quelques questions sur les soins supplémentaires à prodiguer aux montures de nos invités.
Je me trouvais encore dans la cour, immobile dans le froid à réfléchir à la façon dont j’allais devoir aborder ce déjeuner lorsqu’une odeur reconnaissable entre mille se fit sentir sur ma gauche. Sans même me donner la peine de me retourner vers lui, je lui lançais :
Mon bon Schlingue, on a un problème je crois…
Mouaisfit-il,la donzelle connaît bien Domeric.
Et quand aurais-tu juger bon de m’en parler ? les questionnais-je en me retournant vers lui tout sourire même si mes yeux exprimaient tout sauf la joie. Il cracha par terre, avant de me lancer un regard torve et de répondre :
J’lai vu qu’une fois cte fille. C’tait avant que j’parte pour ta piole. Si elle est revnue après, moi j’pouvais pas savoir. J’revnais ici qu’pour vous chercher à bouffer c’tout.Il se rapprocha de moi pour me souffler à l’oreille :T’as vu comment qu’elle a failli tourner d’l’œil ? M’est avis qu’elle l’aimait vraiment bien, le Domeric…. Son visage se tordit en un sourire aussi écœurant que son odeur.
Je m’écartais de lui :
Pas si près, je n’ai pas envie d’avoir ton odeur sur moi durant le déjeuner. Arranges-toi pour ne pas te trouver dans les parages tant qu’ils seront là…
Mouais fut sa réponse. Il me donna une petite tape dans le dos puis tourna les talons et alla rôder de son pas traînant vers l’extérieur de l’enceinte de la cité.
Pour ma part, je me dirigeais vers ma chambre, ôta manteau, cape et gants, brossa mes ongles dont le dessous et les contours portaient encore les traces du sang de ma victime, puis me rendis à la salle de réception, habillé de noir, sobrement, comme de coutume.
J’étais le premier arrivé, ce qui ne m’étonnait pas vraiment. Ne prenant guère attention aux torches ni aux autres préparatifs et soins apportés par les domestiques pour ce déjeuner, je me dirigeais droit vers la table et me servit une coupe de vin tandis que les deux gardes de Lyra Mormont firent leur entrée.
Aaah mes invités !, les acclamais-je avec un sourire,que diriez-vous d’une coupe de vin en attendant votre jeune et ravissante Dame ?
L’un répondit immédiatement par l’affirmative en me remerciant poliment. Mais le second, le même qui m’avait jeté un dernier regard avant de disparaître vers sa chambre quelques instants auparavant, s’il prit la coupe que je lui tendais, me regardait toujours avec suspicion et méfiance. J’entamais la conversation avec le premier, même si le second restait muré dans son silence. Nous prenions place à table et commencions à manger lorsque Lyra fit son apparition. Elle était toujours habillée simplement, mais sa coiffure était un peu plus sophistiquée. Nous nous levâmes à son entrée et ses excuses, combinées au fantastique « Lord Ramsay » qui sonnait magnifiquement bien à mes oreilles, me fit m’approcher d’elle. Les mains jointes dans mon dos, je m’inclinais à nouveau, cette fois un peu plus bas qu’avant :
Lady Lyra, vous êtes toutes pardonnée. Je vous en prie, prenez place. dis-je en l’invitant à s’asseoir en face de moi. Je fis de même, claqua dans mes doigts pour qu’un domestique vint la servir, puis écouta ses mots. Je scrutais son visage ; elle me paraissait sincère.
De cela, je n’en doute pas. Domeric était un homme plein de secrets, assurément. Il ne me parlait guère vous savez. Il est vrai que je ne suis que de deux ans son cadet. Peut-être voyait-il en moi un concurrent au titre d’héritier de Lord Bolton…même si je lui ai maintes fois assurée que ma condition de bâtard ne devrait pas lui donner d’inquiétude sur la question…Enfin…c’est du passé…Inutile de le ressasser.
Je pris une bouchée de viande. « Trop cuite…pas assez saignante…J’en toucherais deux mots à la cuisinière plus tard » pensais-je, puis je repris à l’attention de Lady Lyra :
Vous semblez avoir été beaucoup affectée par l’annonce de son décès. Vous étiez proches ? Je me sens redevable de votre peine, ma Dame. Si je peux faire quoi que ce soit pour vous aider, dîtes-le moi., avais-je dit en plongeant mon regard dans le sien, prenant un air aussi sincère et bienveillant que possible. Une chose est sûre ; Schlingue avait raison quand il disait que je pourrais devenir comédien tant je n’avais aucun mal à mentir et à jouer la comédie…
© DRACARYS