Bad news travel fast {Rhaenys}

Depuis Winterfell, dans le Nord,
Lune 2, semaine 2,

A l’attention de la princesse Rhaenys Targaryen,
au Donjon Rouge, à Port-Réal.

Ma très chère Rhaenys,

J’ai été pour le moins surprise de voir qu’une lettre m’attendait à Winterfell de la part d’Aelinor. Son contenu était court et avare en détails, néanmoins cela a réussi à m’alarmer sur la situation. Elle m’a dit que tu ne retournerais pas dans le Val et que tu l’avais donc libérée de ses services auprès de toi. J’ai également cru comprendre que Durran n’était plus à tes côtés ? J’ai posé quelques questions aux nordiens qui étaient présents à Lestival, mais aucun d’eux n’a remarqué quelque chose d’étrange te concernant, au contraire il semblait même que Durran s’était démarqué et bien battu. Aelinor s’inquiète vraiment pour toi et en l’espace de quelques lignes posées sur le papier, elle a réussi à m’alarmer également. J’étais retirée dans le Nord pour le mariage d’une amie, je n’ai pas la moindre idée de ce qu’il se passe mais j’ai la conviction que ça ne va pas. Je sais que ton mariage avec Robar n’était pas un mariage d’amour mais pour que tu choisisses de ne pas honorer une promesse Rhaenys, c’est qu’il y a quelque chose de grave.

Je sais qu’il ne s’agit là que d’un bout de parchemin entre tes doigts, que tu ne peux qu’imaginer ma voix et que je ne suis nullement présente à tes côtés. Néanmoins, j’espère que tu n’as pas oublié que je serais toujours là pour toi mon amie, comme tu l’as été dans les moments les plus difficile pour moi. Je serais toujours une oreille attentive pour t’écouter, une épaule confortable pour t’épancher. Je t’en prie Rhaenys, raconte-moi ce qui te trouble de la sorte pour que tu tiennes tes plus anciennes amies éloignées. S’il y a la moindre chose que je puisse faire d’où je suis pour t’aider, fais-le moi savoir, sans crainte et sans gêne !

Sache que mes pensées les plus bienveillantes t’accompagne et que je prierais les Sept pour toi quoi qu’il arrive, même sans réponse de ta part.

Avec toute mon affection,
lady Wynafryd, de la maison Manderly.

P.S : Je me rends au mariage de Sansa Stark à Corneilla, je ne sais pas si je t’y verrais ? En tout cas si tu souhaites me répondre, je ne peux que t’encourager à m’adresser ton corbeau aux Jumeaux ou directement à Corneilla.

Ma chère amie,

Je ne suis pas surprise qu’Aelinor t’es envoyé un courrier alarmant, à vrai dire mes derniers échanges avec notre bien aimée griffonne n’était pas très joyeux. J’aurais probablement dû t’écrire bien avant que tu le fasses mais faire face à tout ce qu’il s’est passé mets difficile, faire face à moi-même et à tout ce que j’ai causé, la peur de perdre le peu d’amies qu’il me reste… Cela n’a rien de très brave ou de très royale j’en ai conscience mais je ne sais comment faire autrement… C’est le cœur battant que je réponds à ta lettre car tu mérites tout comme Aelinor d’avoir quelques explications.

Effectivement je ne rentrerais pas dans le Val, je ne peux pas dire que mon mariage soit une réussite et il est en ce moment plus un véritable fiasco qu’autre chose. Je ne suis plus la bienvenue sur les terres des Royce. J’ai décidé de ne pas rentrer après le tournoi, la santé de mon père décline et je ne sais pas si tu es au courant mais Aegon a renoncé à son héritage et à ses titres. Je me voyais mal l’abandonner face à cela et à ne pas soutenir les miens. Mais je crains qu’en ayant pris cette décision, d’avoir aggraver la situation. Si au début, Robar acceptait ma décision la suite n’a fait que me précipiter dans les Sept Enfers provoquant sa colère et son départ de la capitale. Je ne suis pas prête de le revoir et j’en suis la seule et unique responsable.

Effectivement ser Durran n’est plus à mon servir malgré ses exploits lors du Tournoi. Mon père et le Grand Septon l’ont renvoyé. J’ai confessé auprès des Sept un bon nombre de mes péchés et en particulier ma relation avec mon chevalier. Il a été chassé aussitôt par ma faute, j’ignore où il se trouve à l’heure d’aujourd’hui, s’il… va bien, s’il ne m’en veut pas… On ne m’a pas laissé le temps de lui faire mes adieux. Il a été bien vite remplacé par un chevalier champion des Sept.

Mais si cela pouvait être le tout de mes tourments… J’ai aggravé les choses et la culpabilité qui me ronge chaque jour me rend malade. Le départ de mon époux est également lié à la perte de l’enfant que j’attendais, j’ai été prise d’une violente fièvre et mon corps à préférer prendre la vie de l’enfant plutôt que la mienne. Me condamnant à la pire des tortures avec mes origines.

Aujourd’hui je peux à peine me regarder dans le reflet d’un miroir, deux de mes dames de compagnie se montrent froides et distantes, ce nouveau chevalier est inexpressif et le Grand Septon m’a confié à une septa qui ne ménage pas mon esprit et ne m’aide pas vraiment à aller de l’avant. Aegon est loin, mon père me tourne ostensiblement le dos, Alyria est en colère. J’ai toujours affronté les conséquences de mes actes, je pense que tu es le mieux placé pour le savoir mais aujourd’hui je n’y arrive pas. Tout mon courage et ma force de caractère se sont envolés, je me noie dans la culpabilité et la douleur en espérant que cela lave mes péchés et me ramène ce que j’ai perdue.

Je ne pourrais me rendre au mariage de Lady Sansa avec Hoster Nerbosc, je suis confinée au sein du Donjon Rouge pour une durée indéterminée, seule ma Septa jugera si je suis digne de confiance pour quitter les murs de la capitale.

Tu me manques mon amie et je chéris notre amitié quotidiennement.
Rhaenys.

Depuis Les Jumeaux, dans le Conflans,
Lune 3, semaine 4,

A l’attention de la princesse Rhaenys Targaryen,
au Donjon Rouge, à Port-Réal.

Ma très chère Rhaenys,

Je ne sais même pas par où commencer. Dire que cette lettre m’attendait aux Jumeaux depuis deux lunes ! La route depuis Winterfell vers Corneilla m’a éloigné de tout et je m’en veux terriblement. Si j’étais déjà alarmée à ton sujet avant de partir, rien de ce que tu as écris là ne m’a rassurée. Quelque chose me dit même que cela n’était pas ton intention peut-être ? Je ne suis pas celle qui te connaît le mieux Rhaenys, entre Myrielle, Gella ou Aelinor, mais j’ose prétendre que j’ai appris à te connaître durant cette année passée au Donjon Rouge. Je ne peux pas te forcer à te confier à moi ma chère amie. Et pourtant, tu connais mes qualités et mes défauts au même titre que je connais les tiens et je refuse de croire que tu aurais écrits ces mots, sans savoir qu’ils me feraient réagir et me poser maintes questions. Si bien que je ne sais même pas par où commencer si ce n’est te demander aujourd’hui, deux lunes plus tard, comment vas-tu ? J’ai cherché en vain une deuxième lettre que tu aurais pu m’adresser en attendant ma réponse à celle-ci… Le mestre des Jumeaux m’a certifié qu’il n’y avait eu que celle-ci alors je dois le croire sur parole, sauf si ta prochaine réponse (qui devra être adressée à Corneilla), m’apprend le contraire, auquel cas, il s’exposera à ma colère lors du voyage retour !

J’ai appris l’abandon de l’héritage de ton frère, et bien que je ne souhaite pas particulièrement m’exprimer sur le sujet, ni sur la personne, je ne peux qu’imaginer la réaction de votre père. Tu t’es montrée fiable et loyale en décidant de rester à ses côtés. J’ai été on ne peut plus désolée d’apprendre la perte de ton enfant à naître, mais je ne suis pas sûre de savoir lire entre les lignes de ce que tu m’as écris ensuite Rhaenys. Tes mots me font douter. Pourquoi ton époux t’en voudrais pour cette fièvre ? Pourquoi ton père te tournerait le dos ? Tu n’es pas la première épouse à perdre un enfant, les Sept estiment parfois qu’ils seront plus heureux à leurs côtés. Il n’y a là nulle insulte à tes origines dorniennes Rhaenys. Nulle raison de ne plus vouloir te regarder dans un miroir malgré la peine que cette perte a dû engendrer pour toi. Nulle motivation non plus de t’épancher sur ton passé et ton coeur auprès du Grand Septon si tu as su te montrer raisonnable avant. Rhaenys que s’est-il passé ? Qu’as-tu bien pu faire pour te montrer si dure envers toi-même aujourd’hui ?

Tu sais que tu peux te confier à moi. Je ne peux pas prétendre connaître ce que tu vis ou ce que tu ressens, mais je sais ce que c’est que de faire des sacrifices, d’avoir l’impression d’avoir blessé tous ceux qu’on aimait, pour des raisons qu’ils n’entendront probablement jamais. Cela brise de l’intérieur, et cela nous isole considérablement. Parfois, cela apporte tout de même quelque chose d’unique et d’incroyable. Je crois que les Sept savent ce qu’ils font avec nous, du moins je veux le croire. Alors si tu ne te confies pas à moi Rhaenys, fais-le au moins avec Gella. Ne commet pas les mêmes erreurs que moi. Ton père t’aime. Quelque soit la raison de sa déception aujourd’hui, soit patiente. Mais cela ne pourra se faire que si toi-même tu te relèves, tu te redresses. Appelles-en à ton sang du dragon, à ton feu intérieur Rhaenys, je t’en supplie. Je crois qu’il n’y a rien que tu ne peux affronter. Toi qui as toujours été si fière. Trouve ce qui saura t’aider et accroche toi.

Oh que j’aimerais pouvoir être de meilleurs conseils ou faire quelque chose de concret pour t’aider. Si seulement je pouvais te voir. Es-tu toujours confinée au Donjon Rouge en ce moment ? Penses-tu l’être encore dans une lune ? Je ne pense pas être capable de retourner entre ses murs, mais si seulement nous pouvions peut-être nous retrouver à Salins ou à Viergétang… Peut-être qu’évoquer les vertues curatives de l’étang de Jonquil pourrait jouer en ta faveur ? Je regrette de ne pas pouvoir faire plus pour toi et j’ai l’impression que mes mots seront vain tant ils sont loin de ton appel au secours mon amie. Je m’inquiète et je suis certaine de ne pas être la seule. Parce que tu n’es pas seule Rhaenys. Les gens autour de toi t’aimes, tu dois t’en rappeler, quoi que tu te reproches. Tu dois renouer avec cette Rhaenys là, pour le bien de tous. Je t’en prie.

Fais attention à toi et donne moi tes nouvelles rapidement !
Je continuerais de prier les Sept.

Avec toute mon affection,
lady Wynafryd, de la maison Manderly.

Ma chère amie,

Je sais que dans ma précédente lettre, rien n’était rassurant. Mais je t’aurais menti si je t’avais dit de ne pas t’inquiéter et qu’il n’y avait rien de grave. Et je ne pouvais résolument pas faire une telle chose après tout ce que nous avons vécu et par respect pour notre amitié. Pourtant les Sept savaient à quel point il m’était difficile d’écrire ces mots la dernière fois, j’ai souvent failli céder à la tentation de rendre tout cela plus facile. Mais j’ai trop de respect pour toi mon amie pour faire une telle chose. Je ne désirais pas t’alarmer mais je ne pouvais pas te rassurer pour autant.

Je vais un peu mieux, il y a des jours où je broie du noir et des jours où le ciel me semble un peu plus gris. Si physiquement, j’ai retrouvé ma forme d’avant, mon esprit est toujours tourmenté. Je ne t’ai pas écrit une autre lettre entre temps, le mestre des Jumeaux pourra dormir tranquillement sans craindre ton courroux pouvant t’informer d’une quelconque évolution. Il n’y en a pas eu réellement hormis le fait que mon corps est vidé de toutes larmes possible. Je n’ai plus la force de pleurer aujourd’hui, je cherche toujours une voie qui me permettrait de pouvoir sourire de façon spontané.

Je ne peux te dire ce qu’il s’est réellement passé Wynafryd, même si l’envie m’en dévore. Je garde cela depuis trop longtemps sans que personne ne sache vraiment. Mais j’ai trop peur que le corbeau ou ma lettre soit intercepté et lu par de mauvaises personnes. Je ne peux laisser les mots sortir, j’en suis désolée. J’ignore même si je le faisais si tu me répondrais après ça. Je doute que quelqu’un puisse réellement me comprendre sur ce point. Si je suis si dure envers moi-même mon amie c’est que je le mérite. Je ne blâme aucune des personnes qui se sont éloignées de moi, qui me tournent le dos car je ferais pareil si j’étais à leur place. Ne les en blâme, ils ont raison et sont dans leur droit.

Gella souffre autant que moi de ce fardeau qui m’incombe. Même si elle ne le montre pas, je sais qu’elle se sent responsable de mon malheur. Je ne peux lui demander de m’écouter au risque de la faire souffrir davantage. Elle qui me reste si loyale et si fidèle quel que soit la situation. Qui est mon ombre depuis de si nombreuses années. Je ne peux lui imposer cela sauf si elle me le demande, mais tu sais comme moi qu’elle a appris à ne plus poser de question. Ma seule façon de tenir ce sont ses lettres que j’écris à Aelinor et à toi, dans l’espoir que mon cœur s’allège. De me dire que Gella et Jeyne sont là si j’en ressens le besoin. La colère d’Alyria s’est tarie, elle cherche à comprendre tout comme toi, mais j’ai peur de parler à cœur ouvert face à celle que je pourrais appeler Mère. La peur me fait garder le silence.

Je suis toujours confinée au Donjon Rouge mais ma septa salue mon humilité et mon désir de revenir dans la lumière des Sept. Peut-être pourrais-je lui demander cette faveur de me rendre à Viergétang pour profiter du lac Jonquil comme la Bonne Reine autrefois. En espérant qu’elle accepte et que mon père réponde favorablement à sa requête de me laisser partir. Je te tiendrais au courant au plus vite si tel était le cas.

Une question me taraude vu que tu es à Corneilla. Ser Durran est-il présent ? Je n’ai nulle nouvelle. Aelinor n’en a pas non plus. Je m’inquiète car je sais qu’il ne retournera pas chez les Cressey. J’ignore où il se trouve et avec l’hiver qui se durcit je ne supporterais pas qu’il lui arrive malheur par ma faute. Cela allégerait mon esprit de le savoir à un endroit avec des visages familiers, je pourrais cesser de m’inquiéter sur son sort.

Dans l’espoir de pouvoir te revoir prochainement,

Rhaenys.

Depuis Corneilla, dans le Conflans,
Lune 4, fin de semaine 2,

A l’attention de la princesse Rhaenys Targaryen,
au Donjon Rouge, à Port-Réal.

Ma très chère Rhaenys,

Cela ne faisait même pas une heure que le convoi nordien avait posé pied à terre à Corneilla que leur mestre a su me trouver pour me remettre ta missive. J’en ai rapidement déchiré le cachet pour la parcourir, mais il m’aura fallu attendre deux nuits -et de nombreuses relectures- pour parvenir à y répondre. Je suis heureuse de savoir qu’il n’y a donc eu aucune méprise aux Jumeaux, mais je crois que c’est belle et bien l’unique motif pour lequel je peux me réjouir après avoir lu tes mots. Non, je dis des bêtises, je suis également heureuse de savoir que tu te remets doucement, au moins physiquement, et que tu peux compter sur Jeyne et Gella à tes côtés au Donjon Rouge. Mais je ne vais pas te le cacher, c’est une forme d’effroi qui prédomine sur le reste.

Lettre après lettre, une idée s’est formée dans mon esprit et s’est inexorablement cristallisée avec ce dernier parchemin. Cruelle déduction que j’en tire, je n’ose à peine énoncer l’idée à haute-voix, et pas plus la coucher sur ce papier. Pour les mêmes raisons de sécurité que tu évoquais, mais parce que j’ai encore du mal à le concevoir et je refuse de songer à quelque chose d’aussi violent sans avoir pu discuter de vive voix avec toi. C’est décidé, je n’y songerais plus jusqu’à que les Sept nous permettent de nous revoir parce que c’est si terrible et je ne me pardonnerais pas d’avoir tiré une telle conclusion si elle n’était pas vraie. Et j’ai du mal à imaginer une situation où cette conclusion et ce que je connais de toi peuvent coexister. Alors je te laisserais tout m’expliquer comme tu le voudras. Mais cela ne change en rien mon affection pour toi, je tiens à ce que tu le saches.

C’est pour cette raison que j’espère de tout coeur que tu auras l’autorisation de te rendre à Viergétang et que nous pourrons nous y voir. J’ai déjà pris mes dispositions pour le voyage : mon départ est prévu pour le surlendemain du mariage, et si la Ruffurque est clémente, je devrais arriver à Viergétang au bout d’une toute petite semaine de voyage. Je sais que le temps que tu reçoives ce corbeau et que tu veuilles me répondre, je ne serais plus à Corneilla. A partir de maintenant nous n’avons plus les moyens de communiquer (du moins jusqu’à ce que j’arrive à Viergétang), c’est pourquoi je t’y attendrais une semaine avant de prendre un bateau pour Blancport (sauf si tu me contactes d’ici là pour m’informer de ton incapacité à quitter le Donjon Rouge). J’espère vraiment pouvoir t’y voir ma tendre amie et t’aider à lever cet obscur voile qui tend à éteindre ton feu intérieur.

Quant à ton ancien bouclier lige, je ne l’ai pas vu pour le moment, je suis désolée de ne pas être porteuse de meilleures nouvelles. Myrielle est arrivée hier soir, je n’ai pas encore pu la voir, mais je me renseignerais auprès d’elle. D’autres invités sont encore censés arriver jusqu’à la date du mariage, je te promets de garder l’oeil ouvert et je t’en dirais plus si les Sept nous permettent de nous rencontrer.

Avec toute mon amitié,
lady Wynafryd, de la maison Manderly.

[4]