[FB] Le sacrifice d'un rêve Feat Harlon

Depuis plusieurs semaines, Leeven possédait un précieux secret, elle avait vu sous ses yeux que la magie était bel et bien présente sur cette terre. Quand l'oeuf avait éclos après avoir pensé à son sacrifice sur le précipice, elle en était restée bouche béé, puis son coeur s'était rempli d'amour pour ce petit être si fragile. Faïrie était une part d'elle qui lui semblait avoir toujours manqué, telle une mère avec son petit, elle se jurait de la protéger, de prendre soin d'elle jusqu'au jour où la dragonne pourrait le faire seule. De par sa petite taille, il était facile de la cacher, Leeven se faisait aussi plus discrète, plus solitaire. Moins de tête-à-tête avec le mestre, elle s'occupait toujours d'aider Harlon, mais pareil, il pouvait lui arriver de ne pas le faire tous les jours. Faïrie était devenu sa vie. En même temps, n'était-ce pas le prix de son sacrifice ? Une vie sur les Îles de Fer, privé de sa propre liberté, ayant abandonné son plus grand rêve pour pouvoir voir la magnifique dragonne grandir.

Ce matin-là, elle avait quitté la demeure des Botley très tôt. Faïrie était cachée dans une couverture dans un panier. Panier qu'elle utilisait normalement pour aller chercher des algues. Marchant quelque temps, elle se posa sur un rocher assez bien placé pour qu'elle puisse voir si une personne approchait. Son petit dragon libre, celle-ci s'amusait sur le rocher, tandis que Leeven lui proposait des bouts de poissons. Finalement, comme une mère pouvait faire face à son enfant, elle se mit à jouer avec elle, faisant aussi ses plus belles grimaces. Entre tirer la langue, montrer ses dents, faire la moue, toutes les mimiques étaient bien présentes. La guérisseuse s'amusait comme elle ne s'était pas amusée depuis longtemps.

Le temps passa, Leeven vint à s'installer pour observer l'océan, tandis que Faïrie vint à s'endormir, lover sur ses jambes. Les pensées de la guérisseuse s'échappèrent loin, car si son corps était bloqué auprès des Fer-nés, son imagination, lui était libre de voyager. Elle vint à repenser à son village natal, à sa famille, une larme vint à s'écouler sur sa joue, portant chaque jour le poids de son sacrifice, mais du moins, s'ils allaient bien et qu'elle allait bien, elle était heureuse. N'ayant fait mention de Faïrie à personne, ni même du fait que finalement, elle resterait ici, Leeven se demandait qu'elle avenir serait sien en ce lieu. Peut-être pourrait elle trouver une petite chaumière ou vivre en paix avec Faïrie, ou elle pourrait servir les Fer-nés par ses soins. Une idée bien idyllique et risquée en vue du peuple qui l'entourait, mais il lui semblait improbable que les Botleyla gardent. Oui, il y avait cette histoire de femme-sel d'Harlon, mais le jeune homme méritait, une véritable femme à ses côtés. Leeven l'appréciait, bien plus qu'elle ne pourrait le reconnaître, mais Faïrie se devait de passer en premier et Harlon se devait d'avoir une personne auprès de lui qui le ferait passer en premier. 

D'un avenir incertain, Leeven sourit en voyant le bébé dragon dormir. Ensemble, elles seraient fortes, elles se suffiraient. Il ne pouvait pas en être autrement. Ses boucles blondes virevoltaient au contact du vent, quand d'un coup un bruit si particulier lui vint à oreille. Retournant la tête, la surprise put se lire sur son visage.

- Harlon. Cachant la petite dragonne sous la couverture. Qu'est-ce que tu fais ici ?

Cette nuit-là, il n’eut aucun chant d’oiseau nocturne pour le distraire, ni de cri effrayant pour l’inquiéter, il était seule face au silence et aux ténèbres parsemé de lumière. Le Botley scrutait le ciel, à la recherche de quelques choses d’invisible à l’œil nue. Ce magnifique tapis pigmenté d’étoiles s’étendait à perte de vue, d’aussi loin qu’il puisse se souvenir, il aimait monter sur le toit du château de Lordsport et se tenir en-dessous des astres. Dès lors, il avait l’impression d’être jonchée sur la voute du monde et attraper d’un revers de main de la poussière céleste. Le jeune homme était aujourd’hui privée de ce petit rituel, lui qui aimait les étoiles, il se sentait encore plus insignifiant face à elles. A la place d’escalader les murs, il resta à sa fenêtre, au coin du feu, les yeux rivés sur le ciel et s’endormit.

À son réveil, le feu s’était éteint, laissant qu’une légère fumée disparaissait dans l’âtre. Il avait ouvert difficilement les yeux et aperçu, à travers de sa lucarne, la guérisseuse filant vers la plage. Cela faisait plusieurs semaines qu’elle quittait le château à la première lueur, Harlon avait bien remarqué qu’elle disparaissait durant des heures, mais ne l’avait pas questionné sur ça, il feignait même parfois l’ignorance. Il l’aurait laissé continuer ainsi durant longtemps, s’imaginant qu’elle faisait des choses de fille ou que peut-être, elle allait à la rencontre d’une autre personne. Toutefois, il pensait que ces rendez-vous manqués ne concernaient que lui, mais non, elle faisait de même avec le Mestre. Le vieil homme s’inquiétait pour la jeune fille, à vrai dire, elle était peut-être la seule qui le comprenait réellement. Il était tout aussi seul que la Waters.

Son corps glissa sur le sol, il roula sur le ventre et avec sa force acquise durant ses nombreuses semaines, il se hissa sur le sol, mais… Parce que rien ne pouvait se passer comme il le voulait, sa porte de chambre était fermée, ce qui – pour une personne comme lui – était problématique. Il était trop bas pour tirer la poignée et trop proche de la porte pour l’entre-ouvrir. Il retourna s’assoir à sa table, attendant que quelqu’un daigne venir ou qu’une personne lui apporte de la nourriture. Pour lui, l’attente fut interminable, il s’ennuyait, jouait avec des restes de mie de pain pour combler ce temps perdu. Il tournait en rond, du moins, si ce dicton pouvait encore être utilisé par un estropié. L’ennui lui était tel qu’il utilisa un chiffon oublié pour nettoyer sa table collante. La nuit précédente, il avait renversé de la bière qui avait incrusté le bois et qui collait lorsque sa peau était en son contact. Il humecta le chiffon avant de frotter sa table, faisant disparaître toute trace de bière. Il ne comprenait pas comment les domestiques aimaient faire cela, ce n’était ni gratifiant, ni amusant.  

Finalement, après un long moment passé à nettoyer cette table, un des leurs arrivait, arquant un sourcil en le voyant se traîner autour de la table. Sans un mot, le Fer-né se laissa pas tomber au sol et se traîna jusqu’à dehors, après tout ça, il avait besoin de prendre l’air. Il croisa le Mestre qui, une fois encore, lui demanda où était sa femme-sel, ce sur quoi, Harlon haussa les épaules. Toutefois, cette fois il voulut en avoir le cœur net, que trafiquait cette guérisseuse.

Il se traîna jusqu’à la plage, mais ce fit accueillir d’une drôle de manière, ce qui se vit sur son visage.

- Bien le bonjour à toi aussi.

Il continua de s’enfoncer dans le sable avant de s’assoire.

- Il y a des rumeurs te concernant, il paraît que tu te faufiles, que t’évites les Botleys. Même le Mestre si met maintenant. Faut dire qu’maintenant, on m’laisse moins tranquille parce qu’ils sont inquiets pour toi et s’disent que je devrais savoir où t’es.

Il se frotta les mains contre son torse, faisant tomber les particules de sable sur ses jambes.

- Mais je vois que tu vas bien. Donc, qu’est-ce que toi, tu fais ici ?

Le bébé dragon endormi sur ses genoux, le regard de la guérisseuse se perdait dans l'horizon. Voyageant de par son esprit, si son corps ne le pouvait plus. Son coeur était toujours triste et pourtant, elle ne regrettait pas sa décision, Faïrie méritait ce sacrifice et il n'y avait rien de plus précieux que le dragon dans son coeur. Elle n'était pas idiote, elle savait qu'à un moment, cette petite créature magique viendrait à grandir et être dévoilé, mais là, elle était trop jeune, incapable encore de se défendre, c'était donc son rôle de le faire et donc de la cacher des autres. Leeven était loin de se douter que des personnes viendraient à s'apercevoir de ses absences, ne pensant pas réellement compter pour qui ce soit en ce lieu. Elle n'était là au final que pour servir, les Botley se retrouvaient bel et bien très accueillants, la mère d'Harlon la chouchoutait comme une mère pourrait le faire. Leeven les appréciaient car il lui était si facile de voir le bon côté de chacun, mais à ce moment précis, tout ce qui comptait c'était Faïrie, tandis que son coeur plairait sa liberté perdue en silence. En tout cas, elle ne s'attendait pas à voir Harlon débarquer. Sa première réaction fut de cacher la dragonne sous la couverture avant de demander un fer-néce qu'il faisait ici.

- Bien le bonjour à toi aussi.

Une grimace se dessina sur le visage. Oui, il n'était pas de son habitude de le saluer et elle réalisa que sa surprise venait peut-être de la dévoiler. En tout cas, prouver qu'elle cachait quelques choses. Voulant s'excuser de ne pas l'avoir accueillit comme il se devait de l'être, elle n'eut pas le temps de parler qu'Harlon vint à ajouter :

- Il y a des rumeurs te concernant, il paraît que tu te faufiles, que t’évites les Botleys. Même le Mestre si met maintenant. Faut dire qu’maintenant, on m’laisse moins tranquille parce qu’ils sont inquiets pour toi et s’disent que je devrais savoir où t’es.

Au final, elle avait réussi à être discrète, mais à tel point que cela avait éveillé des soupçons sur sa personne. Qu'est-ce qu'il pouvait bien penser ? Et surtout pourquoi le Mestre était venu parler à Harlon ? Cela pouvait se voir qu'elle était gênée d'entendre cela.

- Mais je vois que tu vas bien. Donc, qu’est-ce que toi, tu fais ici ?

Lui mentir, elle se devait de lui mentir, Leeven ne pouvait pas faire autrement, malheureusement le mensonge n'avait jamais été son fort, caché des choses en les taisant était bien plus simple. Son coeur battait la chamade, ses joues s'empourpraient. Elle n'osait bouger, peur que cela réveille le dragon. Faïrie ne devait surtout pas se dévoiler, pas à cet instant, c'était primordial.

- J'aime regarder l'océan, cela me permet de voyager en pensée.

Elle avait dit cela d'un ton calme et hésitant, même si au final, cela était vrai. Elle retourna sa tête vers l'étendue d'eau, ne voulant plus regarder Harlon dans les yeux. Pouvait-elle lui demander de la laisser seule ? Elle allait devoir le faire, mais elle ne voulait pas le brusquer. 

- J'irai rassurer le Mestre pour lui dire de ne pas s'inquiéter et de te laisser tranquille, qu'il vienne m'en parler au lieu de t'embêter.

Malgré cette histoire de femme-sel inventée par les Botley, au final, Harlon était une personne qu'elle se devait d'aider. Elle ne pouvait même pas le qualifier d'ami, ils n'étaient pas réellement proches. Pour dire vrai, elle l'appréciait bien plus qu'elle pouvait l'imaginer, un sentiment encore bien étranger à son coeur. Prenant une grande aspiration, elle prenait le courage de lui demander de partir, mais tout se bouscula. Faïrie vint à se dégager de sous la couverture, dévoilant sa tête à Harlon. Son regard se décomposa par la peur, elle plaça ses mains protectrices sur le dragon et supplia : 

- Je dois la protéger, il faut que tu en parles à personnes... Harlon, si te plaît, peux-tu faire cela pour moi ?

En réalité, bien qu’il fût totalement désintéressé de la jeune femme, cherchant davantage à passer moins de temps en sa compagnie qu’autre chose, mais il l’avait observé. Suffisamment pour comprendre qu’elle cachait bien quelques choses. Le son de sa voix, son étonnement, ses joues qui se peignaient de rouge, son comportement à son égard… Leeven agissait étrangement. Cependant, il ne s’attendait pas à ce qu’elle lui mente aussi effrontément, malheureusement pour balafrée, elle n’était pas douée pour le mensonge. De sa voix douce, un peu tremblotante, elle se justifia avec l’océan. Elle aimait fixer son regard sur cet horizon, cela lui permettait de voyager, paraissait-il. Il aurait pu la croire après tout, mais il n’y arrivait pas. Elle ajouta qu’elle irait rassurer le vieux Mestre, ce qui en soit l’arrangeait.

Son secret pouvait être lié à tellement de choses, frasques sexuelles ? Non, cela ne ressemblait pas à la guérisseuse. Mais soigner une personne sans que personne ne le sache ça, ça lui correspondait davantage. Cependant, il ne voyait pas pourquoi elle se cacherait. Les Botley n’avaient pas d’ennemi en particulier… Mais ce qu’il vit émerger de la couverture dépassait tout ce qu’il aurait pu imaginer. Son visage d’habitude implacable se métamorphosa et se déforma par l’incompréhension et la surprise. Mais qu’est-ce que c’était ce truc ? Leeven protégea sa bête de ses mains et le supplia du regard en ajoutant :

- Je dois la protéger, il faut que tu en parles à personnes... Harlon, s’il te plaît, peux-tu faire cela pour moi ?

L’étrange animal l’observait, pile à sa hauteur, voir un peu plus grand perché sur son rocher. Le sourcil arqué, il le dévisageait et observait ensuite sa propriétaire qui arborait ce même visage effrayer. Mais lui, était parasité par ses questionnements et la questionna :

- Mais c’est quoi ce truc ?

Comment pouvait-il savoir que c’était un dragon ? Il n’en avait jamais vu, tout ce qu’il pouvait dire, c’est que cet animal était loin d’être un petit kraken. Harlon se frotta les mains et les petites particules de sables glissèrent sur son pantalon.

- Où est-ce que tu l’as attrapé ?

Bien sûr, pour un esprit aussi complexe de celui d’Harlon, il était impossible qu’un tel animal ait pu venir à elle, comme ça. La magie, c’était une chose particulière et déroutante, il y croyait à sa manière finalement.

Protéger Faïrie devenait primordiale, elle était encore trop jeune pour se défendre seule, avait encore trop besoin d'elle pour survivre, sa mission se retrouvait mise en péril. Son coeur tambourinait dans sa poitrine, ses mains devenaient moites, elle ne lâchait pas la pression sur la dragonne, cherchant d'une certaine façon à la cacher de nouveau, mais c'était trop tard, Harlon l'avait vu. Pour le coup, tout ce qui lui restait à faire était de le supplier de ne rien dévoiler, sachant bien que ce n'était pas dans la nature des fer-nés de se laisser attendrir ainsi, elle ne pouvait s'empêcher de tenter d'atteindre son coeur. Elle avait passé plusieurs lunes à ses côtés, à tenter de l'aider, elle n'avait jamais rien demander en retour, car cela ne fonctionnait pas ainsi pour elle, mais là, pour une fois, elle cherchait une sorte de remerciement rien que pour la protection de Faïrie. Jamais, elle n'avait trahi Harlon, le soutenant même durant le mariage de Theon Greyjoy, pouvait-il à présent la soutenir elle ? Était-ce trop demander au Botley ?! D'un regard suppliant et apeurée, elle attendait une réponse, espérant une promesse de sa part, mais à la place elle pouvait voir qu'il se questionnait sur Faïrie.

- Mais c’est quoi ce truc ?

N'ayant pas dévoilé tous les corps de la dragonne, il était normal qu'il ne puisse pas réellement savoir à quoi il avait à faire. Sa petite tête noire et ses écailles aux reflets bleus, dépassaient de la couverture. Les iris de Faïrie observaient Harlon, mais pourtant, elle ne se dégageait pas des mains protectrices de Leeven, comme si elle avait compris que sa gardienne ne voulait pas la voir bouger.

- Où est-ce que tu l’as attrapé ?

Leeven n'avait pas eu le temps de lui répondre à la première question, qu'une deuxième arrivait. Elle réalisa qu'elle se devait de lui dire la vérité, du moins en partie, n'ayant pas besoin de rentrer dans les détails de son sacrifice, enfin elle espérait ne pas devoir le faire. Gardant son calme, elle se laissa à dire : 

- Je ne l'ai pas attrapé, son oeuf a éclos auprès de moi !

Puis il était clair dans son esprit que personne ne pouvait attraper un dragon. Un tel lien existait entre Faïrie et elle que Leven ne pouvait s'imaginer qu'il en soit différent pour chacun des dragons qui a pu exister. Il se liait avec un humain et ils vivaient en symbiose ensemble. Une belle magie. Finalement, elle vint à ajouter : 

- Ma mère veillait sur l'oeuf et je suis devenu sa gardienne, à sa mort. J'ai eu la surprise de le voir éclore, il y a quelques semaines. 

Surprise, c'était certains, mais aussi préparer en vue des rêves qu'elle avait faits avant de choisir son sacrifice pour que Faïrie vienne à la vie. Sa liberté contre la sienne, sa famille contre une vie auprès des Fer-nés, voilà le prix qu'elle avait à payer. Finalement, elle se décida à lui faire confiance et enleva ses mains de sa dragonne pour défaire totalement la couverture, laissant apparaître le corps, mais surtout les ailes de la créature.

- C'est une dragonne, Harlon, elle s'appelle Faïrie !

L’insulaire ne savait pas s’il devait hurler, fuir ou bien continué à agir comme un benêt. Hurler ? Dans toutes les situations, un homme Fer-né ne ressent pas la peur, mais honnêtement, face à un dragon – aussi petit soit-il soit – à bien le droit de s’alarmer. Cependant, la bête qui était, normalement, porté disparu depuis pas mal de temps, n’était pas encore assez impressionnante pour pousser des gémissements de terreur. Alors son instinct s’orienta davantage sur le : agir comme un idiot à poser des questions basiques. Bien qu’il n’appréciât pas réellement ce moment, Harlon avait décidé de rester. Pourquoi devait-il fuir ? Après tout, l’animal aux écailles sombres ne l’avait pas attaqué, il s’était bien conduit jusque-là. De toute évidence, le jeune homme n’était pas le genre à déguerpir, mais à affronter et assumer les conséquences. Et puis même s’il essayait, le truc le rattraperait bien vite et il serait ridiculisé par une bestiole au passé douteux. L’œuf avait éclos près de la bâtarde, il pouvait accepter ça, pourquoi pas après tout. Cette femme était assez intelligente et surtout particulière, pour trouver une manière de faire éclore sa carapace ovale. Mais il y avait des limites. Si sa mère possédait déjà le dragon, comment se faisait-il qu’il ait survécu autant de temps ? À cette question qu’il comprit que rien n’avait de sens, cela faisait des lunes que les dragons avaient disparu, cet œuf était donc plus vieux que… n’importe qui.

Harlon observait la dragonne qui était nommée Faïrie, il n’était pas vraiment adepte de la magie, bien sûr, il avait la foi pour le dieu noyé et le kraken. Mais ses croyances avaient des limites. La magie ne faisait pas partie de ses préoccupations, mais maintenant qu’il voyait une de ses bestioles, il était obligé d’y croire. Le jeune souffla tout en se frottant les mains. Il était déjà exténué par la situation.

- C’est toi qui l’a appelé comme ça ? Féerie c’était plus simple à prononcer. Dit-il en levant les sourcils avec son ton monocorde.

Le jeune Botley se sentait dépasser par la situation. La Waters était pour le moment sous la protection de sa famille, mais si les autres Fer-nés apprenaient la nouvelle, qu’elle répercussion cela aurait sur sa maison ? Il n’oubliait pas ses origines, leurs modes de vie, son dragon devenait un bien rare à acquérir.

- Tu m’as pas dit que ta famille habitait dans une forêt ? Ça va être amusant une bestiole pareille avec les arbres.

À ce moment-là, il ne pensait qu’à sa famille, tout en essayant d’occulter l’opportunisme de son père. Et puis qu’est-ce que ça mangeait ? Sa maison était riche, mais pas à ce point !

- Tu n’devrais pas attendre trop longtemps avant de r’prendre la mer, plus ça va grossir et moins tu pourrais le cacher dans ta cabine.

En soit, il n’avait pas tort !

La révélation était faite, Harlon ne fuyait pas et observait sa protégée. La guérisseuse n'était pas encore rassurée, cherchant toujours le soutien de cet homme qui lui faisait face, cet homme qui était devenu spécial en son cœur sans qu'elle le réalise encore.

- C’est toi qui l’a appelé comme ça ? Féerie c’était plus simple à prononcer.

L'avait-elle réellement nommée ? Elle n'en était même pas certaine, cela avait été comme une évidence, elle avait su que c'était ainsi que la dragonne viendrait à se faire appeler et très vite, elle s'était reconnu sous ce nom. N'ayant pas envie d'expliquer cette évidence qui n'en serait peut-être pas une pour Harlon, elle hocha simplement les épaules, que pouvait-elle lui répondre, il était certain que Féerie serait plus simple à prononcer, mais ça resterait Faïrie.

- Tu m’as pas dit que ta famille habitait dans une forêt ? Ça va être amusant une bestiole pareille avec les arbres.

Sans pouvoir le contrôler, son visage se décomposa. Plus jamais, elle ne reverrait sa famille, ni même cette forêt qui l'avait vu grandir. Il était certains que la forêt lui manquait, cette sensation de se sentir libre, de voir la lumière passer entre les arbres. L'océan pouvait emmener ce même sentiment de liberté et pourtant, cela n'égalait en rien le bois-au-roi dans son cœur. Incapable de répondre, elle baissa son regard vers Faïrie, elle ne regrettait rien de sa décision, mais ce n'est pas pour autant qu'elle n'en souffrait pas.

- Tu n’devrais pas attendre trop longtemps avant de r’prendre la mer, plus ça va grossir et moins tu pourrais le cacher dans ta cabine.

Elle comprenait qu'Harlon la poussait à partir, en même temps, elle ne s'était jamais caché qu'elle le ferait, elle ne s'était pas destinée à rester sur les îles de Fer à son arrivée, mais le destin en avait décidé autrement. Arrivant à relever le regard, son visage n'affichait aucun sourire, chose rare de sa part.

- Je ne...veux pas partir Harlon !

Le premier mot qui lui était venu à l'esprit était qu'elle ne pouvait pas partir, car tel était son sacrifice, mais ayant peur de briser la magie qui avait réveillé Faïrie, elle préféra dire qu'elle ne voulait pas et ce n'était après tout pas un mensonge, elle avait peur des répercussions si elle quittait les îles de Fer. 

- Je n'ai plus de famille, hormis Faïrie et on a choisi de vivre sur les îles de Fer !

Cela lui brisait le cœur de le dire à haute voix, oui, elle avait sacrifié les siens pour sa dragonne, autant que Thorren ne viendrait pas à lui manquer portant à jamais le geste contre sa vie avec la cicatrice sur sa joue, mais le reste des siens lui manquait déjà, bien plus qu'à présent, elle savait qu'elle ne le reverrait pas. 

- Je pourrais me construire une cabane loin des habitations, trouver un endroit reculer ou vivre. J'apprendrais à pêcher pour survivre et je pourrai vendre mes potions... Elle est encore trop petite pour se protéger, je dois la cacher quelque part, Harlon.

Sa voix s'était empli d'espoir, Leeven se devait à présent de trouver sa place sur les Îles de fer et là, elle cherchait de l'aide auprès d'Harlon.

S’il y avait bien une chose à laquelle il ne s’attendait pas – hormis de voir un dragon entre les jambes de la guérisseuse – était de découvrir que la jeune femme souhaitait rester sur l’île. Le visage d’Harlon, toujours aussi expressif, se métamorphosait par cette nouvelle inattendue. Comment pouvait-elle avoir fait ce choix ? Et puis d’abord, pourquoi ne voulait-elle pas partir ? Depuis dès le début, elle ne rêvait que d’aventure, de découvrir d’autres cultures et diverses médecines. La terre des Fer-nés était la sienne. Pas celle de la guérisseuse. Et même s’il aimait son île, il en avait déjà fait le tour. Une personne ayant cette soif de connaissance allait s’ennuyer ici. Réellement. La jeune femme semblait désemparer et impuissante face à sa situation. Progressivement, le désespoir lui déliait la langue. À ses dires, elle n’avait plus de famille, seulement cette salle bête monstrueuse. C’était pour cette raison qu’elle voulait rester sur l’île, mais honnêtement, est-ce que cet endroit était tout indiqué pour protéger son animal ?

Harlon n’était pas du genre à se mêler des histoires des autres, même si parfois, il rêvait d’en apprendre plus. Cependant, à ce moment précis, il voulait comprendre. Que voulait-elle réellement dire ? Avait-elle reçu un corbeau lui indiquant le massacre de sa famille ? Une maladie foudroyante ? Un parricide ? Matricide ? Fratricide ? Mais avant qu’il puisse poser sa question, la jeune femme, toujours au regard assombris par la tristesse, lui exposait son plan d’action. Un plan ridicule, mais qui pouvait tenir debout après tout. Même si elle ne l’avait pas aidé avec ses problèmes physiques, elle savait utiliser ses plantes.

- Honnêtement ? Vivre dans une cabane toute seule ? Sur une île qui t’révulse par ses coutumes ?

Le regard d’Harlon se fit plus dur. Il tentait réellement de comprendre.

- Soyons réaliste. Toute seule dans ta cabane, tu s’ras attaqués, violés, tués et ta bête sera vendu, esclave d’un maître qui n’aura pas ta délicatesse. Rester s’rait idiot et imprudent. Un mot que j’n’ulises jamais, mais qui m’semble correspondre.

Il n’aimait pas cette situation, ni la place où elle venait de le mettre. Famille morte ou non, elle n’avait pas le droit d’agir de la sorte. Elle était réellement inconsciente. Et voir naïve.

- Pourquoi vouloir rester ici ? Il y a plein d’autre contrée qui accept’rait mieux ta bestiole.

Pour le moment, il n’était pas encore décidé à l’aider, mais davantage à la faire fuir.

Si son coeur souffrait, son esprit restait clair, Leeven ne pensait qu'à une chose protéger la petite dragonne et c'était pourquoi, elle cherchait des idées pour vivre dans ces iles, qu'elle ne pouvait de toute façon plus quitter. Même si elle avait su au moment de faire son choix, que les répercussions pouvaient être rudes, elle ne s'attendait pas à devoir persuader Harlon de l'aider, mais surtout d'avoir besoin de lui. Oui, les îles de fer étaient son futur, mais une part d'elle ne concevait pas une vie en ce lieu sans la présence d'Harlon, même si elle était prête à vivre dans une cabane isolée, elle s'était attachée au jeune homme.

- Honnêtement ? Vivre dans une cabane toute seule ? Sur une île qui t’révulse par ses coutumes ?

Là, son regard, empli d'espoir, s'estompa. Il n'arrivait pas à croire à ses paroles. C'était certains qu'elle ne pouvait pas cacher sa tristesse d'avoir dit à haute voix qu'elle n'avait plus de famille, mais pourquoi douter qu'elle puisse rester vivre ici ? 

- Soyons réaliste. Toute seule dans ta cabane, tu s’ras attaqués, violés, tués et ta bête sera vendu, esclave d’un maître qui n’aura pas ta délicatesse. Rester s’rait idiot et imprudent. Un mot que j’n’ulises jamais, mais qui m’semble correspondre.

Alors qu'il cherchait simplement à la faire fuir, cela ne poussait que davantage Leeven dans ses retranchements. Croyait-il vraiment qu'elle craignait de se faire violer ou tuer ? Oui, là, elle put ressentir la détermination l'envahir. 

- Pourquoi vouloir rester ici ? Il y a plein d’autre contrée qui accept’rait mieux ta bestiole.

Sans bouger, son regard pourtant d'habitude si doux, se fit plus sévère. Elle n'était pas en colère, elle voulait simplement être prise au sérieux. Là, elle ne baissait plus les yeux, non sans savoir d'où lui venait ce courage, elle faisait face à Harlon.

- Crois-tu vraiment que Faïrie sera à l'abri sur le continent ? Les dragons sont l'emblème de la famille Targaryen, qui me dit qu'ils ne voudront pas la récupérer et la retenir prisonnière comme les derniers dragons. Puis, je connais pas les dangers d'Essos pour aller m'y aventurer avec elle.

Oui, au moins les îles de fer, elle savait ou elle mettait les pieds, bien plus que son arrivée, il y avait déjà plusieurs lunes de cela. 

- Je ne peux pas dire que j'ai rêvé d'une vie sur les îles de fer, que je comprends encore totalement toutes vos coutumes, mais j'ai appris ici, de quoi, on est capable pour survivre et qui pourrait croire qu'un dragon se cache sur les îles de Fer. Cela semblerait si grotesque que Faïrie sera protégé le temps qu'elle soit plus grande. De toute manière, je ne changerai pas d'avis, je resterais sur les Îles de Fer. À toi de voir, si tu m'aides ou tu me laisses me débrouiller !

Réellement, elle ne laissait pas le choix de sa présence sur les Îles, puis d'une certaine manière, elle n'avait elle-même pas le choix. Puis sans pouvoir s'arrêter, elle était bien décidée d'évoquer le sujet d'être tuée.

- Tu vois cette cicatrice sur ma joue, c'est mon frère qui me l'a infligée. Je me suis interposée entre lui et une femme qui violentait et il a voulu me tuer pour cela. Cela m'a fait comprendre qu'on est en sécurité nulle part et jamais, j'aurai entrepris mon voyage, ni même ne serai venue t'aider si je m'étais laissé envahir, par ce genre de pensée défaitiste de viole et de meurtre.

Toutes les particules de son corps exprimaient ce sentiment qui pouvait aisément être mis en mot par le Botley ; fait chier. Sa vie ne lui convenait pas réellement, mais il avait su jusque-là s’y accommoder, il n’était pas prêt pour ce genre d’aventure. Un dragon n’apporterait que des ennuis et cela compliquerait ses journées qu’il souhaitait tranquille. Bien sûr, tout ceci n’était que de la mauvaise foi et le jeune Harlon pouvait en convenir. Il était prêt à trouver kyrielle d’idées et d’excuses pour échapper à cette corvée. Protéger une femme qui plus ait avec un dragon allait être… il ne trouvait même pas le mot, mais il était sûr qu’il ne voulait pas de ça pour sa famille. Et voilà, maintenant qu’il utilisait des mots qui ne lui correspondait pas, comme imprudent, il se mettait à agir comme un couard… Réellement, la bâtarde faisait chier. Un sentiment qui semblait être partagé par la jeune femme dont le regard se fit plus dur qu’à l’accoutumer. Étrangement, cela lui plaisait, de la voir s’endurcir de la sorte. Il y a encore quelques lunes, jamais elle n’aurait osé le défier de cette manière et encore moins élevé la voix. Bien sûr, elle l’avait déjà fait autrefois, mais tout était toujours lié par sa médecine qui était pour son cas, inutile.

Le fils de Sawane l’observait d’une façon qui se voulait impassible, mais tous savaient que son visage reflétait parfaitement ses opinions, ses ressentit. Il ne pouvait mentir tant son faciès était bien trop expressif pour cela. Durant tout son discours qui ne manquait pas d’intérêt, tous ses traits s’étaient mués, changeant radicalement cette tête boudeuse. Et tandis que la guérisseuse exposait ses arguments, il se mit à réfléchir sur la situation de la jeune femme. Il ne la croyait pas réellement, une personne comme elle ne pouvait vouloir rester sur Pyke. La cicatrice sur sa joue en était la preuve. La Waters avait sauvé une de ses congénères d’un viol alors que son frère avait revendiqué cette femme… Une telle valeur, d’autant plus pour qu’on risque sa vie pour elle, ne pouvait pas être modifié de la sorte. Non, il sentait qu’il y avait bien autre chose, sans pouvoir mettre de mot dessus. Et comme elle le disait si bien, la guérisseuse était venue sans craindre la mort et les dangers qui lui flottaient au-dessus de sa tête, alors cela aurait dû normalement, dragon ou non, en être de même sur Essos.

Le Botley l’avait scruté du regard, observant le moindre de ses traits qui pouvaient l’aider à émettre d’autres hypothèses, mais tout ce qu’il vit c’était une femme décidée. Maudit soit le poulpe pour lui avoir amené une telle calamité. Harlon ne trouvait pas de solution et ne souhaitait pas réellement en trouver. Son fardeau, n’était pas son fardeau après tout. Car si elle restait ici, il en payerait les conséquences.

- Et bien…. Bon’Chance, dit-il le sourire aux lèvres avant de se retourner et commencer à se hisser sur le sable.

Il n’eut pas le temps d’observer le visage de la Waters, est-ce qu’il s’était décomposé ? Était-il devenu blanc comme un linge ? Ou rougit par la colère ? Le jeune homme n’était pourtant pas fier de lui. Ressentait-il de la culpabilité à la laisser derrière lui ? Fait chier… Au-delà de son instinct, Harlon s’arrêta. Il ne pouvait pas l’abandonner. Et c’est bien ça qu’il lui faisait peur. Devenait-il quelqu’un de gentil ? Ses mains s’enfonçant dans le sable, il maugréait dans sa barbe et n’appréciait pas du tout ce qu’il allait dire.

- Aller vient ! Mais si elle crame la maison, ta bête d’vra nous en voler une autre !

C’est Sawane qui allait être heureux et ça, ce n’était pas un euphémisme. Et Harlon sentait qu’il n’allait pas aimer ses stratagèmes pour protéger la jeune femme au dragon.