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La rumeur est la fumée du bruit (ft. Daemon Sand)

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An 298 - Lune 12 - Semaine 3

Ces derniers temps, une rumeur aussi étonnante qu’amusante résonnait dans la Capitale, si bien qu’elle eu vite fait de se faufiler jusqu’aux oreilles de la Noblesse. En même temps, difficile pour quelque chose d’aussi sulfureux de ne pas avoir de succès. Vraisemblablement, un bâtard avait partagé le lit de la fille du Prince de Dorne… L’ennui étant que la demoiselle était promise au frère du Roi. Une fois ce petit détail pris en compte, il était d’une simplicité enfantine de comprendre les enjeux de ces quelques hypothétiques coups de reins entre les cuisses de la fiancée de Viserys Targaryen.

Les racontars parlaient d’une confession arrachée par la boisson, ce qui pour certain la rendaient douteuses, pour d’autres encore plus vraie. La vérité n’était-elle pas souvent dans le vin ? La vantardise et la déformation des faits aussi… Et puis, quel intérêt avait-il à révéler ce genre de choses ? Certes, cela lui vaudrait l’admiration de ses confrères, mais pourrait également lui apporter de nombreux ennuis.

Les plus pessimistes diront qu’il pourrait y perdre la tête, chose qu’il avait de toutes façons déjà faite en révélant son aventure avec la jeune Martell. D’autres pensaient, peut être à juste tire, que cela froisserait les rapports entre Lancehélion et Port-Réal… Possible, en supposant que les individus à la tête de chacune des deux villes y croient. À priori, c’était trop gros pour que le Souverain des Sept Couronnes et Doran Martell n’y croient. Une simple chimère, née des idées floues d’un homme trop alcoolisé.

Personnellement, je ne saurais juger la véracité des différentes versions proposées. N’y avait-il pas toujours un fond de vérité dans les ragots ? En soi, peu importe la vérité, car cela m’amusait et les puissants feraient en sorte d’écouter la version qui froisserait le moins leurs si précieuses relations. De plus, ces affaires ne me concernaient en rien et n’affecteraient pas ma vie. À vrai dire, j’étais de ceux y croyant…

… Et je ressentais une sorte d’admiration pour cet individu. En supposant qu’il soit au courant, cela demandait pas mal d’audace que de voler la « proie » d’un dragon. Il incarnait d’ailleurs probablement le fantasme de tous soldats : s’adonner à des activités lubriques avec une noble, d’une famille prestigieuse, en plus de cela.

D’ailleurs, pour rendre cette histoire encore plus savoureuse, l’officier au centre de pas mal de discussions, était au service de Tywin Lannister. On parlerait plus tard, si non déjà, de sabotage du mariage par les Lannister. Le Vieux Lyon avait beau dos, de nos jours. Daemon Sand, se tenait en effet à la tête des Manteaux Rouges. De ce qu’on disait, il oscillait entre son poste, la taverne et de temps en temps le Grand Septuaire. N’était-ce pas cocasse ? Un homme d’apparence pieux jouant avec le corps de la fiancée d’un Prince. L’image ne pouvait que plaire.

Affreusement curieux, et ennuyé en plus de cela, je pris la décision de partir à sa rencontre. Je trouvai le fameux Bâtard de Grâcedieu agenouillé, priant sous l’idole du Guerrier, comme on pouvait s’y attendre de la part d’un soldat. Personne d’autre, à part moi et peut être quelques Septas, n’était présent. Je fis le choix d’aller poser une bougie et de prier à côté de lui, l’étudiant du coin de l’oeil avant d’engager la discussion à voix basse. J’étais pour une fois vêtu de vêtements un tantinet ostentatoires, aux couleurs de ma Maison, le tout orné de mon habituelle broche turquoise représentant l’emblème de ma famille.

- Daemon Sand ?

Je me sentis presque mal de briser ce silence solennelle, mais de me rendre ici pour des raisons autre que la visite me rappelèrent à quel point il pouvait être ennuyeux d’être un homme de foi.
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La rumeur est la fumée du bruit

An 298 - Lune 12 - Semaine 3



Lucerys Velaryon & Daemon Sand

 Dans les rues encombrées de la ville, le ciel éclatant venait se refléter et laissait, entre deux rideaux de nuages fins, un rayon de soleil pâle venir caresser les pavés. Entre les habitations de la cité rouge, un Garde juché sur un cheval avançait. Le pur-sang dornien  disparaissait presque entre les badauds tant la piétaille étouffait  l'avenue qui ouvrait sur le Grand Septuaire. Entouré de bruit, de parfum, de relents d'oignon et d'innombrables personnes, l'animal dansait sur ses sabots, roulant ses grands yeux noisette hésitant dans ses pas malmenés par les mouvements de la masse humaine. Le bâtard tentait tant bien que mal de se frayer un chemin;poussant d'un mouvement de sa monture, faisant déguerpir d'un éclat de sa voix, il parvenait pourtant malgré toute cette agitation à conserver un calme souverain qu'il devait sans doute au sommeil qui jaunissait encore le coin de son oeil. Sur tout le chemin il ne perdit son sang-froid qu'une seule fois alors qu'un homme avait manqué de blesser son précieux destrier.  Dans la bousculade qui en avait découlé, sa cravache s'était abbattue sur l'épaule du maladroit. Puis il était parti sans un regard pour le garçon, quittant avec soulagement le tuyau de ruelles étroites où l'incident s'était produit.
Il aurait préféré emprunter des ruelles moins exposées aux regards, mais ici, cela était impossible, le moindre cul de sac était trop fréquenté et les profondeurs des bas quartiers étaient devenus impraticable par la surcharge d'étalages ou de mendiants. Et il ignorait les raccourcis qui aurait pu le mener à sa destination. Le paysage, bien que terne à ses yeux qui avaient vu le soleil du désert, était paisible, presque bucolique. Le grand marché battait son plein. Parmi les tignasses brunes ou claires qu'il apercevait depuis les hauteurs de sa monture apparaissait régulièrement l'éclat aigu d'un heaume. En service ou profitant de leur temps libre, jamais le Sand n'avait vu une ville dotée de tant de soldats.
Alors qu’un nouveau nuage libérait la lumière du soleil sur les alentours, la monture à la robe grise fit un pas de côté lorsqu’un groupe de jeune soldats installés dans une taverne se mit à entonner un chant. Par dessus le bruit lourd des sabots de sa jument qui claquaient durement sur les pavés de la route et  après avoir tourné la tête vers sa gauche pour mieux entendre, le cavalier en perçut quelques notes. C’était l’esquisse d’une chanson à la gloire du dragon tricéphale. Mais lequel? Impossible de savoir. D’ailleurs ces mêmes gardes ne cherchèrent pas à stopper ce voyageur esseulé, se contentant de longuement dévisager l’étranger à l’accoutrement ouestrien avant de le regarder s’éloigner sur le chemin. Bien vite, les filets de chant qui parvenaient encore à son oreille furent avalés par la rumeur de la foule qui fourmillait en cette belle matinée.

Arrivé au pied des marches, son regard se leva jusqu'à l'ombre sordide que projetait l'immense statue à l'éfigie du roi Baelor. Grotesque, pensa-t-il en ruminant l'humilité que sa religieuse grand-mère lui avait enseigné. Il mit pied à terre dans le cliquetis léger et sourd de la cotte de maille passée sous son armure et du glissement feutré de sa cape sur la croupe de sa jument. Il se retourna pour croiser un regard noir et froid. Le soldat posté au bas de l'escalier en compagnie d'une garnison le détailla de pied en cap avant d'échanger un coup d'oeil indéchiffrable avec son camarade le plus proche pendant que d'une rotation habile du poignée, le Sand passait les rênes de sa monture pardessus la tete de cette dernière.
Daemon connaissait bien cette réaction à la fois attentive et hésitante car il l’avait vue tout au long de son périple. En temps normal il aurait été arrété plusieurs fois mais il avait avancé résolument seul, sans que personne ne vint jamais lui demander des comptes. Sans doute était-ce cela le grand privilège de porter l'amarante des Lannister. On le regardait en chiens de faillence sans oser faire un pas ou prendre une décision à son égard, car la méfiance était dans tous le regards. Etait-il un allié, un ennemi, un simple capitaine, impossible de savoir.  Sous une façade de paix qui lui semblait désormais bien fade, la Couronne était trop déchirée de rancune et de défiance, et  trop instable pour que quiconque fasse un mouvement, visiblement.  La Capitale  était à ses yeux comme un animal blessé qui montrait les crocs prêt à mordre la main qui pourrait lui causer plus de mal encore. Porter l'uniforme de Castral Roc avait ses avantages, mais il avait l'inconvénient de réveiller en ceux qui posaient leurs yeux dessus la vieille méfiance qu'inspirait le Lion depuis que le brillant et prometteur Jaime Lannister avait occis le roi qu'il avait juré de protéger. Qui savait ce que le Suzerain de l'Ouest pouvait encore sortir de sa manche? Le Sand le servait au plus près depuis plusieurs Lunes maintenant, et il devait avouer qu'il l'ignorait parfaitement.
Finalement, après l'avoir dévisagé d'un air malcommode pendant un long moment, l'un d'eux s'obligea à s'avancer vers lui pour s'engager d'un coassement de mots indistinct à surveiller son destrier pendant que le capitaine allait prier. L'expression du garçon s'était un peu défroissé quand le Sand l'avait remercié d'un sobre signe de tête.

Lorsque le jeune homme s'engouffra dans l'ombre du somptueux bâtiment, il avait découvert sa tête, s'étant défait de son heaume qu'il portait maintenant appuyé contre sa hanche. Dans le silence où flottait un encens âcre et doux, le tintement de son armure lui paraissait aussi bruyant que cinglant. Bientôt, il se retrouva agenouillé devant la figure du Guerrier. Ses coudes appuyés sur le prie-dieu, il présentait ses paumes ouvertes vers le ciel ainsi que le voulait la coutume de son fief natal. Le dornien semblait rassuré qu'en ce jour le Septuaire fut presque vide. Le lieu lui paraissait parfois plus un semblable à un corral qu'à une place de receuillement. La taille du bâtiment l'impressionnait bien moins que la foule qui pouvait parfois se presser entre les statues monumentales des Dieux. Il baissa le menton, laissant un filet de lumière pâle retomber de l'ouverture aux allures de cyclope qui perforait le dome sur le brun de sa chevelure. Discipliné et appliqué, ses yeux se fermèrent doucement tandis que ses lèvres commençaient à esquisser les prières qu'il ne ferait que murmurer.
Ce fut à peine s'il préta attention aux pas légers et assurés qui glissèrent sur le sol à ses côtés. Malgré lui, le bâtard sentit sa respiration s'alourdir d'elle-même tandis que la conscience d'être observé par le nouveau venu grandissait, opressant sa poitrine de l'envie de se lever et de s'isoler pour pouvoir mieux prier. Il pensait finalement s'accomoder du voisinnage du jeune homme le temps de rendre son hommage au dieu de la guerre lorsque ce qu'il n'imaginait pas se produisit. Soudain, il entendit l'autre prononcer son nom. Ses yeux d'aigue-marine s'entrouvrirent d'eux-mêmes pour aller chercher le profil de l'intrus. Son coeur se serra le temps d'un battement de cils quand il confondit dans un premier temps le visage plaisant de son interlocuteur avec celui du jeune dauphin. Les mêmes boucles dorées, les yeux saphirs et la mise resplendissante de la haute noblesse. Même l'armure coulée d'or et de sang qu'il portait paraissait brutale comparée au raffinement des vêtements couteux qu'avait revêtu le blond. Ses lèvres avaient cessé leur manège silencieux. Ses sourcils s'étaient légèrement froncés, visiblement dubitatifs.
Les règles qui règnaient dans les cours des Suzerains, et à plus forte raison dans celle du Donjon Rouge étaient strictes au delà de l'imaginable pour un  jeune homme qui, comme lui, avait eu la chance de cotoyer les Princes de Dorne comme s'ils étaient sa propre famille. Or, une des règles les plus simples étaient que les hommes d'un certain rang ne pouvaient s'adresser à des hommes d'un rang supérieur, tout du moins, en public. Ils devaient attendre que ces derniers daignent faire le premier pas. Si cette formalité était déformée au grès des usages et des nécessités, son statut de bâtard l'avait pourtant vite transformée en obligation absolue, si bien qu'il lui semblait souvent qu'il lui était interdit de parler à quiconque ne portant pas un uniforme Lannister. La compagnie des soldats ouestriens ne lui plaisait guère, mais au moins était-il assuré dans leur cas qu'il était leur Capitaine, comme en témoignaient son armure et sa cape cramoisie. Quant aux jeunes femmes de la cour...La bienséance lui interdisait de s'approcher d'elles, au risque d'entacher leur réputation, lorsque le mépris viscéral qu'il leur portait ne s'en chargeait pas à la place de cette dernière. Alors, en tenant compte de tout cela, qu'un garçon de si haute naissance s'adressa à lui tenait presque du miracle. Un miracle qui réveillait la nature profondément farouche du bâtard et le poussait à la défiance. Mais la relativité de cet échange qui s'annonçait ne dépendait déjà plus de lui. L'impression détestable de devoir faire profil bas s'imposa à son instinct revêche.

"On se connait?"répondit-il d'un ton abrupt malgré le timbre bas et respectueux de sa voix. La moue naturellement hautaine de ses traits couronnée par son regard acéré donnait à ses mots une allure dédaigneuse. Avisant le pâturage cérruléen dans lequel courrait l'argent brodé dont l'autre était paré, puis la broche pompeuse qui ceignait sa poitrine au niveau de sa boutonnière, Daemon comprit. Un Velaryon, pas étonnant qu'il ressemble autant à un membre de la famille royale..., songea-t-il en jaugeant le jeune homme d'un coup d'oeil biaiseux.



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Mes paroles se noyèrent dans le silence, tandis que j’étudiais toujours l’individu, sans dire un mot. Ce dernier me fixa brièvement, d’un oeil que je ne saurais décrire. Peut être était-il surpris ? Il devait être rare pour un bâtard de se faire adresser la parole par un « bien né », tel que moi.
À y réfléchir, de nombreuses choses nous séparaient comme ciel et terre, de la naissance aux origines en passant par la couleur de nos vêtements, le turquoise des Velaryon contrastant presque parfaitement avec le cramoisie des Lannister. Même la teinte de ses yeux semblait être l’opposée de la mienne : un noir profond face à un bleu violacé, presque translucide avec cette lumière.

Pourtant… Certains enfants fruits de l’adultère de seigneurs parfois peu scrupuleux, n’avaient rien à envier aux véritables nobles. Mon sang valyrien me plaçait peut être au-dessus des autres en terme de naissance, mais je n’en étais pas moins un membre de la branche secondaire de ma Maison, tandis que le frère de Monford était le fils de l’ancien Lord. Il était donc de meilleur sang que moi, malgré les statuts ou les normes.
Autrement dit, je devais faire partie des rares membres de la noblesse à traiter la bâtardise avec une certaine relativité. Tout enfant illégitime n’était pas égale, au même titre que tout noble n’était pas au même rang. Il fallait prendre en considération l’ascendance. De plus, le déshonneur reposant supposément sur leurs épaules, demeurait pour moi un poids mal placé. La faute ne revenait-elle pas à la personne ayant choisi de leur donné naissance ?

Je sentis une certaine tension dans l’homme à ma droite, accompagnée d’un certain dédain. Lui avait souffert de son statut, c’était une certitude. Je ne pouvais pas vraiment lui en vouloir, et ne lui en tiendrais de fait pas rigueur. J’essaierais plutôt de le rassurer, après tout, ma présence ici n’avait pas pour but de l’accabler. Plutôt celle de faire une rencontre intéressante. Je finis par prendre la parole, cherchant mes mots.

- Nul besoin de se montrer trop formel ou d’être tendu… Vous êtes noble au même titre que moi, même si vous n’en avez pas le statut. À mes yeux, seul le sang compte.


J’arquai un léger sourire, tentant de me montrer amical malgré mon propre stress. Mieux ne valait pas ajouter à sa réputation celle d’avoir agressé l’un des amis du prince. Cela ne ferait qu’envenimer davantage les choses.

- Cela de dit… Vous ne me connaissez pas, non. Je suis Lucerys Velaryon, représentant de cette famille à la Capitale. En revanche, vous, tout le monde sait qui vous êtes. De nombreux racontars courent sur vous, et tous s’accordent en un point : vous auriez coucher avec la fiancée du Prince Viserys. Je n’ai moi-même pas de problème avec ça, après tout, qu’importe ? On a tous le droit au plaisir, et les conventions sont souvent… Contraignantes, que l’on soit noble ou bâtard. Je voulais simplement vous rencontrer pour deux raisons. La curiosité, car il est rare d’avoir l’occasion de passer du temps avec une personne qui deviendra peut être illustre sous peu, peut être êtes-vous même un homme appréciable, j’aurais probablement aimé échangé avec vous plus ou moins longuement dans d’autres circonstances… Mais, comme je vous l’ai dit, vous auriez couché avec la fiancée du frère du bon Roi Rhaegar. Cela peut avoir des conséquences plus ou moins néfastes sur les rapports entre entre Martell et Targaryen, également sur ceux avec les Lannister. L’avenir nous le dira, j’imagine, mais le Suzerain de l’Ouest a beau dos, et certain parlent déjà d’un coup monté, car le Prince ne voudra probablement pas d’une femme « souillée »… Par contre… Il risque de vouloir votre tête. Peut-être serait-il plus sage de quitter la ville et de vous rendre quelque part où il ne pourra vous atteindre, non ? Ses colères peuvent avoir… Une certaine intensité, disons, et bien que je n’aurais pas peur de lui en tant qu’individu, il reste un membre de famille royale, cela suffit à le rendre intimidant. Ah… Et sachez que j’ai de la sympathie pour les personnes dans votre cas. Vous incarnez une disgrâce dont les réels porteurs devraient être vos parents, pas vous. Personne ne veut naître avec le stigmate de la bâtardise, je pense. Et… Je crois en avoir fini avec ma tirade quelques peu ennuyante.

Je conclus, l’air bienveillant mais tout de même sérieux. J’en avais peut être un peu trop dit sur mes idées, mes motivations, mais il était vrai que je portais une certaine sympathie aux bâtards,  souvent victimes d’une honte parentale. Certains passaient leur vie à se cacher, d’autre à déprimer, d’autres à chercher à être reconnus par leur parents, ou le trône, afin d’être légitimés…
Je ne savais pas encore de quel genre était celui-ci, mais pour passer de la Grâcedieu à Castral Rock et servir en tant que capitaine d’une petite unité d’hommes situés à la Capitale… Il devait être du genre à chercher l’acceptation au sein de personnes dans le même cas, ou de naissance inférieure.

Dans tous les cas, je le regardais à présent de manière plus ou moins concerné, intéressé par la suite de notre échange, sa réaction, ainsi que les conséquences qu’elles prendraient. En soi, j’éviterais peut être un incident diplomatique. J’étais persuadé que l’oncle de mon cher ami Aegon voudrait sa peau, ce qui pourrait tourner en incident diplomatique, et le Vieux Lion ne portait déjà pas le dragon tricéphale dans son coeur. Après tout, l’une de ses têtes avait pris celle de son fils et héritier, ne lui laissant plus qu’un immonde nain pour héritier. Qui accepterait de perdre un fils, régicide ou non ? Cela dit, cet acte aurait sans doute porté davantage de préjudice à la prestigieuse Maison Lannister, si le pauvre homme avait été gracié. Après tout, l’idée d’un tueur de roi dans la garde royale intimidait déjà, mais celle d’un régicide à la tête de l’Ouest… Mon dos fut parcouru de frissons rien qu’à y songer.
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La rumeur est la fumée du bruit

An 298 - Lune 12 - Semaine 3



Lucerys Velaryon & Daemon Sand

 Quelque part derrière les hautes statues qui les dominaient on put entendre le frottement des pas légers d'un groupe de Septas qui s'en allaient à leurs prières. Le glissement feutré de leurs robes grises masquait les murmures discrets qu'elles échangeaient entre elles, comme le battement d'ailes d'un oiseau. L'encens flottait paresseusement dans la lumière du jour, porté par la rumeur des litanies. Pourtant, parmi tous ces charmes discrets que pouvait offrir le Septuaire, aucun ne semblait à cet instant pouvoir avoir de prise sur l'expression butée du Sand. Le visage fermé, le dos raide, ce dernier subissait la présence de son voisin sans se cacher de la peine qu'il avait à la supporter. Il ne semblait rien exprimer  si ce n'était la plus vive antipathie. Aucune peur, aucune colère, mais le simple désir impérieux d'être seul; d'être tranquille.
Son regard d'aigue-marine continuait de fixer le profil du garçon qui s'était agenouillé à ses côtés. Dans le reflet pâle de ses prunelles, il n'y avait qu'une seule et unique question: Comment connait-il mon nom? Le jeune homme affichait un sourire léger tandis qu'il entreprenait de lui répondre. Il semblait choisir ses mots. Ses yeux se plissèrent. Un garçon de bonne famille venu à sa rencontre pour jouer au plus malin, cela ne serait pas la première fois que cela lui arriverait, et cela ne serait certainement pas la dernière. Alors que penser de ce qu'il venait de lui dire? Ainsi je suis noble, comme lui, songea-t-il, cynique. Il ne put s'empécher de penser que l'étranger avait une bien énigmatique façon de s'exprimer. S'il espérait l'appaiser en prétendant ce que le bâtard ne pourrait jamais ni vérifier ni réfuter, il devrait s'y reprendre à deux fois. Daemon n'était pas un homme futile. La flatterie glissait sur son orgueil comme de l'eau, avec la même facilité que les insultes pouvaient l'écorcher à l'occasion.
Mais en étudiant mieux ses traits, le Sand les découvrit dépourvus de la malice dont il pensait devoir l'accuser. Son rictus était aimable, engageant même et semblait vouloir adoucir cette entrée en matière peu commune. Fronçant le nez, le brun se résigna à se montrer un brin plus cordial à défaut d'être tout à fait sympathique.

"Enchanté..."Souffla-t-il d'une voix plate qui traduisait tout sauf le mot qu'il venait de prononcer lorsque l'autre se présenta enfin. Puis il tourna à nouveau son visage vers la figure austère du Guerrier. Laissant échapper un soupir, son instinct lui soufflait que le garçon à ses côtés ne se tairait pas de sitôt lorsque ce dernier prononça justement quelques mots qui crispèrent les mains offertes au ciel du bâtard. Ses coudes s'appuyèrent mieux sur le prie-dieu. Baissant le menton, il fixa un regard par en dessous quelque part sur sa gauche sans pour autant l'ancrer directement dans celui du jeune Lucerys, comme pour simplement lui faire comprendre qu'il l'écoutait désormais avec attention.
Il se sentit déglutir difficilement. Les mots se suivaient rapidement, trop rapidement, se bousculant à son oreille, se forçant un passage jusqu'à ses pensées en un amalgame qui serrait son coeur d'incompréhension. Arianne, pensait-il seulement, préoccupé. Son seul nom dans son esprit avait un écho étrange, semblable à un souvenir oublié, puis retrouvé. Une image froide de son passé. Aussi froide que le bois sur lequel reposait ces genoux. Cela faisait des semaines, si ce n'était des Lunes, qu'il n'avait  songé à elle. En entendant son étrange interlocuteur lui suggérer de quitter la ville, Daemon se tourna vivement vers lui. Il darda sur son visage un regard furibond. L'air accomodant qu'il lui avait trouvé un peu plus tôt s'était transformé sous ce qu'il interprétait dans son urgence comme des menaces à peine voilées en une expression mielleuse, un masque de faux.Il se moque de moi, gronda-t-il dans son esprit qui n'était pourtant pas serein devant tant d'informations, et tant d'assurance. Déstabilisé, le Sand garda le silence un long moment, ne sachant pas très bien s'il devait répondre ou non aux propos que lui tenaient le Velaryon.

"Eh bien...C'est très aimable à vous de me prévenir. Mais c'est inutile." Son ton était trainant. Un léger sourire ourlait ses lèvres sans qu'il ne vint se refleter dans ses yeux bleus. Il se méfiait trop de l'individu à ses côtés pour cela. Baissant à nouveau ses paupières, le bâtard se tourna vers l'idôle en faisant mine de continuer à prier alors que des jeunes femmes de la cour passaient non loin. Relevant son visage vers le Guerrier, il affirma d'une voix dure:"Je ne vous crois pas, Ser. "

"J'ignore qui vous a dit tout cela, mais il s'agit d'un homme qui se croit mieux renseigné qu'il ne l'est réellement."Ses yeux se rouvrirent lentement, sans qu'il ne consentit à tourner son visage vers le jeune homme. Il poursuivit d'une voix basse et monocorde:"Nous avions quatorze ans. Et je n'ai jamais rien pris d'autre que ce que la Princesse Arianne a bien voulu me donner."Admit-il afin de mieux assurer l'autre qu'il n'y avait aucune raison de s'alarmer ainsi qu'il le faisait. Disant cela, ses lèvres ne tremblèrent pas comme elles avaient pu trembler autrefois à l'évocation de ce douloureux souvenir. Il n'y avait sur sa langue, pas la moindre émotion, pas même de la peine. Mais son coeur se serrait tout de même d'une rage froide, vestiges de l'humiliation qu'il avait subi après que le père de son amante lui eut refusé la main de cette dernière. L'entiereté de la cour de la Principauté connaissait le nom du garçon qui avait aimé la Princesse. La cour, et même sans doute les mendiants de la ville ombreuse. Si l'histoire était devenue banale dans la patrie des Martell, le Sand n'ignorait pas que le récit avait difficilement passé les frontières, d'où - c'était là ce qu'il comprenait- le comportement hâtif du jeune homme. Mais que leur importait son nom, alors que la fille de Doran était réputée pour sa légereté jusqu'aux confins du Val? Daemon se tourna légèrement  vers l'autre, toujours sans le regarder."Je ne vous reproche pas votre...enthousiasme. Mais sachez que le Prince Doran le sait depuis toujours. Jamais il ne l'aurait dissimulé en offrant sa fille en fiançailles. Et puis, comment le roi ignorerait ce que tout Dorne sait déjà?"acheva-t-il amèrement. Varys devait le savoir depuis des années, le Sand en était persuadé. "Quoiqu'il se soit passé entre la Princesse et moi, rassurez le Prince, cela n'empèchera jamais ce mariage."Que lui importe la virginité puiqu'il aura la Princesse?songea-t-il sans jalousie, bien que l'idée ne l'enchanta guère.

Sans prévenir, il se releva souplement. Ce faisant, il lâcha un dernier conseil au jeune blond:" Qui que soit cet homme, vous feriez mieux d'oublier tout ce qu'il vous a dit. Je crains que cela n'ait aucune valeur. Aucune." Se saisissant du heaume qu'il avait posé sur le sol dallé de pierre, il le coinça entre son bras et sa hanche. Le dos droit, il sembla hésiter à partir sur l'instant. Puis quelques mots murmurés d'une voix encore plus basse qu'auparavant passèrent la frontières de ses lèvres. Ses paroles étaient couronnées d'un regard glacial.

"Je n'aime que l'on se moque de moi. Et encore moins que l'on me menace. " Sans quitter des yeux les traits du Velaryon, Daemon parut réfléchir un instant, certainement intrigué par l'empathie qu'il percevait toujours dans son expression. Pourquoi était-il si concerné par son sort? Et ces avertissements à propos du Lannister, l'application qu'il avait à le prévenir de la colère de ce Prince cadet, pourquoi? Soudain, l'éclat de la défiance vint faire briller son regard au creux de son visage impassible. "Est-ce lui? C'est Viserys qui vous envoie?" Le Prince était-il déjà si jaloux de son épousée?



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La réactions du Sand aux quelques mots visant à le mettre à l’aise me stressèrent davantage. En effet, des paroles aussi clairement en contradiction avec le faciès, ou même l’intonation, de l’intéressé, s’avéraient rarement de bonne augure… L’individu paraissant ennuyé dans plus d’un sens. Ah… Mon manque de tact demeurait encore à ce jour, des plus affligeants. Enfin, cette situation ne constituait-elle pas un bon exercice ? Calmer la personne à mes côtés avant que ce soit mon meurtre qui finisse en incident diplomatique.

La suite de mon monologue ne l’irrita cependant qu’un peu plus, ses mains se crispant, mais cela eut vraisemblablement le mérite de m’accorder sa pleine attention. Un mal pour un bien, dirait-on ? Le bâtard de la Grâcedieu me parut de plus en plus troublé, voir même crispé, à mesure que mes mots fendaient l’air jusqu’à ses tympans, dont les vibrations paraissaient aussi désagréables et fortes qu’une troupe de troubadours.

Si le vent véhiculant mes mots soufflait sur son esprit d’une manière tempêtueuse, alors la lumière émanant de ses yeux traversa autant mes iris que mon être tout entier, ne me brûlant non pas moi, mais ma confiance en ma maitrise de la situation. Sa déclaration lourde ne fit qu’ajouter du bois aux flammes, qui consumèrent rapidement, trop rapidement, le peu de foi restantes en mes capacités de pseudo-diplomate : le dornien ne me croyait pas.

Mes mains, elles aussi présentées à l’idole du Guerrier dans une fausse prière, maintinrent une étrange cohérence malgré mes tremblements. Les vibrations de même intensité empruntant des sens opposés s’annulent, après tout. J’écarquillai les yeux en réalisant alors que soudainement, je fis la demande à cette déité fictive, de me prêter de sa force. Il m’en faudrait pour continuer la discussion sans me décomposer.

J’étais un homme à la langue bien pendue, chose bien connue des personnes me connaissant un tantinet, mais lui, ne transmettait qu’en quelques phrases les pensées, émotions, convictions, que mes tirades échouaient parfois à convier jusqu’à mon interlocuteur. Était-ce là la différence entre un garçon et un homme, entre un bâtard forgé par une vie ingrate et un nobliau dont la seule plainte était de ne pas être l’héritier de sa famille ?
Nous étions si différents, et pourtant, bien que tout nous sépare, nous pouvions nous plaindre de la même chose : nous étions tous les deux le fruit de la mauvaise union, sortis du mauvais utérus.

Le mal né continua, sans même prendre la peine de poser le regard sur moi, cette fois. N’en valais-je pas la peine  à ses yeux, ou tentait-t-il de garder un semblant de contrôle en espérant que je quitterais le Septuaire de Baelor avant qu’il ne s’embrase pour de bon ? Son discoure dégageait cependant à présent si peu d’émotions, que j’eu durant quelques secondes l’impression de m’adresser à un autre homme. Avait-il fait le deuil de la personne qu’il évoquait dans son souvenir ?

Je fus à nouveau chamboulé lorsque Daemon se leva, saisissant son heaume tout en s’apprêtant à me laisser seul, dans le silence. Ah… Peut être n’aurais-je pas dû me mêler d’affaires ne me regardant pas ? L’entièreté de ma démarche était enfantine, et la réalité n’hésita pas à m’apporter l’une de ses fameuses gifles. Les dieux avaient la main légère lorsqu’il s’agissait de distribuer des claques humiliantes, mais quand l’heure venait d’aider, elle devenait alors plus lourde que celle des statues que l’on dresse en leur honneur… En soi, ces souverains gouvernant même les rois n’étaient pas moins perfides ou égoïstes que ceux sur lesquels ils étaient supposés régner avec la plus grande équité, la plus grande impartialité.

Ses mots me traversèrent tel une lame, dure, glaciale, volant la chaleur de votre corps en même temps que votre vie, dont elle provoquait la fuite sous forme d’un sublime liquide pourpre. Je sentis la pression de son regard hivernal, ayant l’impression d’être fixé par l’un de ces fameux Marcheurs Blancs des légendes durant un court instant. Le capitaine des Manteaux Rouges me glaça tant que les émotions tel que l’hésitation ou la peur, s’en allèrent, comme temporairement gelées.

Je saisis la broche maintenant ma boutonnière de ma main nue, froide et pourtant trempée de sueur, l’essuyant discrètement sur la partie bleutée de ma parure afin que la trace ne se voit pas -il comprendrait alors que chacun de ses mots m’avait touché, tel des coups de fléau dans ma cage thoracique, compressant mon coeur jusqu’à l’explosion. Mais à l’instant présent, cela ne m’affectait pas.

Mes jambes engourdies soulevèrent lentement mais efficacement mon poids, me donnant une sorte de grâce maladroite tandis que je me relevais, fixant mon interlocuteur d’une manière plus sérieuse, plus mature, mais pas agressive, plutôt affligée, en vérité. Pour quelles raisons ? À la fois pour ma maladresse, son manque d’analyse… Et sa situation, en quelques sortes. On ne pouvait me retirer cette sympathie pour les porteurs du stigmate de la bâtardise, même lorsqu’ils exerçaient un effet aussi bouleversant sur ma personne.

- C’est ce que vous souhaitez entendre ?


Mes mots se perdirent dans la froidure du silence, qui semblait prendre un plaisir pervers à reprendre son règne entre chacune de nos paroles. J’avais ma salive, réfléchissant tandis que je distinguai une ou deux Septa murmurant entre elles, sans pour autant s’arrêter. Peut être pensaient-elles que nous allions souiller cet endroit saint ? N’importe qui entrant à cet instant pourrait d’ailleurs certainement sentir l’hostilité émanant du fidèle serviteur de Tywin Lannister, dont l’armure rougeâtre boirait sans doute mon sang avec plaisir.

- Je suis ici de ma propre initiative, aussi invraisemblable que cela puisse paraître. Il n’est pas que question de virginité, il est question de mariage caché entre vous et la princesse Arianne, là est le coeur du problème. À mon humble avis, cela peut s’avérer bien plus problématique qu’un banal hymen percé. Oh, le Prince trouvera bien une autre fiancée, une autre femme, je n’en doute pas, les candidates ne doivent pas manquer… Mais je pense que plus d’une personne ne seraient pas ravies d’apprendre que Targaryen comme Martell ont été tournés en ridicule par un mariage secret. D’autant plus que cela mettrait à mal certains projets d’alliance… Si je n’ai aucun mépris envers les enfants nés d’adultères tel que vous, je pense que cela ne fera qu’accentuer davantage le côté profane et inacceptable de la chose pour beaucoup d’autres nobles. Et qui dit situation inacceptable…


… Dit sentence exemplaire. Je marquai néanmoins une légère pause, repris par l’hésitation. Je savais quoi dire, mais les mots se coincèrent dans ma gorge comme si quelqu’un s’en était saisie. Oh, je ne doutais pas qu’à présent le Sand souhaite m’étrangler… Peut être que cela se produirait sous peu, cela dit. Alors je ravalai ma salive, repris un peu de courage, et achevai ma phrase. Autant profiter de mes cordes vocales tant que personne n’en entravait le fonctionnement.

- … Dit sentence exemplaire.


Je fis en sorte de rester le plus silencieux, concis et concerné possible, chose difficile pour un grand parleur tel que moi, mais l’essentiel avait sans nul doute été transmis. J’étudiais à présent les traits de l’intéressé, me préparant psychologiquement à ce que sa défiance ne devienne offense, à la fois envers ce lieu sacré et ma personne. Mon épée courte pendait à ma ceinture et une légère cotte de mailles sertissait le haut de mon corps, mais je ne pouvais pas en dire autant de mes jambes. Peut être me montrerais-je plus agile lors d’un éventuel affrontement, mais sans doute moins protégé. Sans compter que mon expérience devait être à la sienne ce que celle d’un écuyer devait être à celle d’un maître d’arme, car bien qu’entrainé, je ne possédais presque aucune expérience hors de la salle d’arme et de mes échanges de coups avec Aegon et Robb, de bons épéistes, mais sans doute pas les meilleurs.

J’hésitai désormais à rapprocher ma main de ma lame, ne souhaitant pas réellement rendre mon interlocuteur plus irrité qu’il ne paraissait déjà l’être, ni alerter les Septas, qui réagiraient de manière beaucoup moins passive à l’idée de voir quelqu’un dégainer ici. Sans compter l’éventuelle portée diplomatique d’un duel sans la moindre raison avec un protégé du Suzerain de l’Ouest. Les crocs du Vieux Lion ne s’étaient pas limés avec le temps, au contraire, il demeurait quelqu’un de puissant, les conséquences pourrait être rudes, et les compromis faciles. Être un ami du prince ne me rendait pas plus important au sein de la Maison Velaryon. Mon rôle pourrait être rempli par mon père ou Aurane. Un bâtard à la Cour n’avait plus rien d’étonnant depuis que Nymeria Sand représentait Dorne au Conseil Restreint. Il ne me restait plus qu’à espérer que rien ne dégénérerait et que mes avertissements seraient pris pour ce qu’ils étaient : le fruit d’une sincère préoccupation pour le sort de l’homme en face de moi ainsi que pour d’éventuelles conséquences fâcheuses, tandis que l’absence de bruit se chargeait d’alourdir l’atmosphère, rendait le fait de respirer pénible.
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La rumeur est la fumée du bruit

An 298 - Lune 12 - Semaine 3



Lucerys Velaryon & Daemon Sand

Le chant de quelques oiseaux nichés sur les chapitaux des hautes colonnes de marbre fusa soudain dans l'air. Léger et subtil, le son éclata en écho contre les murs, résonnant dans le creux froid de la voûte éclairée de lumière. Le lieu était beau, mais grand. Trop grand. Trop ostentatoire aussi pour celui qui avait l'habitude de rendre hommage aux divinités sous le dome de pierre nue de son foyer, ou dans la solitude parfaite d'un instant volé avec pour seul support non pas les immenses sculpture du septuaire mais les sept figures gravées dans l'argent noirci d'une manchette ouvragée. C'était un présent de sa grand-mère, et s'il le portait au poignet à cet instant, il ne pouvait ignorer l'autorité souveraine des silhouettes blanches qui veillaient sur le sanctuaire.
Ne quittant pas un seul instant  du regard les yeux sombres du Velaryon, le bâtard devina pourtant le geste qu'il fit, de porter subrepticement sa main à la riche broche qui ornait son vêtement. Un mouvement qu'il trouva, sur le moment, presque enfantin. Le désarroi fugace du jeune homme l'ébranla quelque peu, bien qu'il mit tout en oeuvre pour le masquer. Les réflexes parfois étranges que pouvait inspirer une seconde de vulnérabilité vraie ou révée lui étaient tout sauf étrangers, après cinq ans passés dans tous ces pays où il n'était qu'un étranger. Il déglutit. Daemon n'ignorait pas la dureté que pouvaient avoir ses mots. Plus qu'il ne pourrait le compter à présent, le reproche lui en avait été fait et son silence était apprécié là où ses mots heurtaient comme les mouvements trop brusques d'un jeune cheval inconscient de sa propre force. Mais s'il n'aspirait pas volontairement à blesser ou à écraser ceux qui s'adressaient à lui ainsi que certains pouvaient s'y plaire parfois à la cour,  remarquer comme le garçon aux cheveux blonds était affecté lova dans son coeur fermé le croc  sournois de la culpabilité. Pourtant, son attention première ne faillit pas et c'était aussi immobile que la statue qu'il honorait quelques instants auparavant qu'il attendait que l'autre répondit enfin à sa question. Il le regarda se relever à son tour. L'éclat de ses yeux se fit plus aigu alors qu'il les plissait légèrement. L'expression du jeune homme avait changé. Disparu le trouble, le désarçonnement qui n'avait été que passager. Un voile nouveau était tombé sur son visage. Il était sérieux.

Lorsque sa réponse franchit enfin le bord rebondi de ses lèvres, cette dernière claqua dans l'air comme un fouet dans le silence respectueux du temple. Si c'était ce qu'il souhaitait entendre? Deux voix contradictoires se disputaient le droit au chapitre sur cette question. L'inimitié qui avait longtemps opposé les Martell aux Targaryens avait encore sa place dans les mémoires. Et même en ce jour prochain où les deux grandes familles s'uniraient une seconde fois en moins de vingt ans -une alliance renouvelée comme l'Histoire ne l'avait jamais vu, un record diraient certains, mais qui avait un gout d'acharnement, sinon de désespoir, il semblait pourtant que l'on ne mariait pas le frère du Roi à la fille d'un suzerain, mais bien que l'on traiterait d'égal à égal; de Royaume à Principauté. Qu'il fut lui même traité en rival du futur Prince Consort ne laissait pas son orgueil indifférent, bien qu'il n'aimait guère l'idée qu'on lui préta des ambitions qui n'étaient pas les siennes. Daemon n'avait jamais convoité qu'un titre, et il l'avait déjà obtenu, cinq ans auparavant. Etre chevalier, et non Prince. Même lorsqu'il avait demandé dans un élan sincère et naif la main de la jeune Arianne, l'idée de devenir son égal ne l'avait pas traversé.  
Son coeur, en jongleur habile,  décida bien vite de la réponse. Son regard s'abaissa l'espace d'un instant, et la négation qu'il aurait voulu exprimer ne passa jamais la frontière de sa bouche. Puis ses yeux se relevèrent pour attraper à nouveau le regard de Lucerys alors que la méfiance farouche qui y avait jusque là élu domicile s'en effaçait doucement à la faveur d'une curiosité intriguée. Enfin, lorsque le noeud du problème lui fut révélé, ses yeux s'aggrandirent et il se sentit blémir. Quelques années passées loin du soleil brûlant de Dorne avait retiré à sa peau le hâle doré dont elle s'était paré dans sa jeunesse et il craignait qu'à cet instant, la paleur nouvelle de sa carnation ne fut semblable à celle d'un bidet.

Abasourdi, le silence lui parut plus opaque qu'une épaisse fumée, et ce dernier reprit bien vite ses droits sur la tirade bientôt achevée du jeune Lucerys. Sa main demeura le long de son corps et l'envie de dégainer, si elle l'avait un seul instant saisi au cours de leur étrange discussion, l'avait quitté. Un mariage. Désormais tout devenait bien plus limpide. Tous ces regards en coin qu'il avait attrapé, ces sourires mystérieux, l'admiration nouvelle et défiante des soldats au lion à son égard et dont son égo s'était emparé comme le fruit de l'intégration qu'il avait espéré conquérir au sein des armées Lannister n'étaient que des mensonges, des messagers de contrebande qui lui avaient vendu du faux.
Seul le garçon devant lui avait été sincère. Une telle situation ne pouvait guère durer. Le bâtard n'avait que rarement flirté de si près avec l'imprudence, et le départ  prochain que lui conseillait le jeune homme quelques instants plus tôt faisait de plus en plus sens à ses yeux à mesure que les secondes s'écoulaient. Les dorniens sabraient, poignardaient, empoisonnaient et posaient les questions après. Mais il ne pourrait échapper longtemps à un mari courroucé,  puisque celui dont la colère à naitre plombait déjà son avenir portait un diadème sur ses cheveux de cendre.
Sans dire un mot il jeta un regard autout d'eux et avisa deux septas qui ne semblaient pas observer d'un bon oeil leur échange. L'une d'elle, qui avait un teint qui donnait presque à ses joues la couleur de la betterave mure, se pencha même à l'oreille de sa voisine pour chuchoter quelques propos dont ils paraissaient être le sujet.  D'un subtil signe du menton il invita le jeune noble à la suivre. Le bâtard jetait vers ce dernier de brefs coups d'oeil tandis qu'ils s'avançaient. Bien que moins belliqueux que tout à l'heure, le dornien demeurait tendu comme un arc, méfiant comme un chat sauvage. Ils se dirigeaient en silence vers les marches qui remontaient vers la grande entrée du Septuaire de Baelor lorsque sa propre voix cynique vint les soulager du mutisme pesant qui les avait enveloppés tous deux.

"Dorne a été insultée par un homme il y a des années et rien ne lui est jamais arrivé. Mais il était un Prince du Sang, et je ne suis pas un Prince..." Il paraissait réfléchir à haute voix. Son ton était grave et, sur sa fin, quelque peu affligé et même résigné. La prière qu'il avait été forcé d'achever lui revint en mémoire. Ce supplique était le fruit d'une éducation particulière à la Grâcedieu, où l'on n'exigeait pas de faveur des Dieux. Une superstition propre à cette région de la Sang-Vert disait même à qui voulait l'entendre que les Sept, lorsqu'ils donnaient aux mortels, reprenaient tôt ou tard leur bien, se remboursant par Sept fois la valeur de leur bienfait. Aussi, se contentait-on souvent de les remercier pour les grâces dont on était déjà doté. Humblement, on ne levait jamais que les yeux vers la figure juchée sur le piédestal, et non une main avide. A quoi cela lui servirait-il de leur demander de le protéger de l'outrage dont le Cadet du Roi était insulté, de la colère de Tywin Lannister lorsque la nouvelle parviendrait à ses oreilles, de celle de Doran lorsqu'il l'apprendrait, alors qu'il lui serait interdit de lever la seule arme qu'il savait manier. Sa lame ne pouvait pas le protéger. Le sang bleu le laissait de marbre, mais ses voeux de chevalier, sa religion et la simple prudence l'empéchaient de le faire couler de par son sabre. Il était contraint d'attendre de connaitre son sort. Daemon se tourna finalement vers le jeune homme, posant sur lui un regard sévère.

"Vous êtes un ami de la Couronne. " affirma-t-il d'un ton sûr. Les Velaryon avaient toujours été proches de la famille royale, et son jeune âge ne pouvait que le pousser dans l'entourage privé des Princes, jeunes eux aussi. Une fois parvenu en haut des marches, à quelques pas de la grande porte, le Sand marqua un arrêt."Même si vos intentions me semblent troubles, je vous remercie de m'avoir averti. " lacha-t-il sincèrement bien qu'il devina que comme souvent ses paroles rares donneraient une allure austère à sa gratitude.
La lumière du jour qui s'épanouissait sur cette partie de l'escalier remonta sur son corps, léchant l'amarante et l'or de son armure avant de se déposer sur son visage et celui de son interlocuteur. "Dites-moi ce que le Prince désire vraiment. Si il avait voulu ma tête sur une pique, j'imagine que nous n'aurions pas cette discussion en ce moment."Sourit-il amèrement. Ses doigts jouèrent un instant sur la surface ouvragée de son heaume, où il pouvait sentir que la gravure serait vite brûlante comme une chaudière sous le soleil du midi. Et puisque Dorne lui appartiendra bientôt,je ne peux guère espérer me terrer à la Grâcedieu. Autant savoir ce qui m'attend.Il poursuivit, déterminé et pensif tout à la fois, comme s'il énonçait une banalité."Je ne veux pas que cette rumeur menace l'avenir de la Princesse. C'est tout ce que je souhaite, le reste m'importe peu."
Arianne était une enfant capricieuse, naive et ingérable, mais elle était sa Princesse. Daemon se souvenait du rire léger d'Oberyn Martell lorsqu'il avait posé la lame de son épée sur son épaule, le faisant chevalier, lui qui venait de préter serment en ne promettant sa protection et sa vie qu'à elle et non au nom des Martell ainsi que la tradition l'exigeait souvent des chevaliers de Dorne. Malgré l'urgence périlleuse qui l'avait tout d'abord enflammé, le bâtard commençait à trouver ce on-dit amusant. Amusant, et triste aussi. Il aurait aimé être là lorsque la rumeur atteindrait finalement ses oreilles ornées d'or et de boucles de cheveux noirs entremelées, pour savoir si elle allait se mettre en colère dans ces éclats puériles qui n'appartenaient qu'à elle, ou si elle allait sourire en souvenir de leur passé perdu. Mais après les avertissements pressés du jeune garçon, pouvait-il seulement espérer la revoir un jour? Il replaça le casque au mufle léonin plus haut contre son flanc, et fit face au Velaryon, l'accusant d'un regard calme. Les âmes de la capitale n'étaient pas réputées pour leur altruisme, et si les Dieux étaient grands en ces lieux comme dans son coeur et son esprit, Daemon doutait fortement que seule l'empathie ait guidé les pas et les mots du garçon.Lorsqu'il parla,
son ton était brusque, mais dénué d'agressivité. "Et vous? Que voulez-vous? Je déteste être redevable envers des inconnus, aussi, si vous voulez réclamer votre prix, faites le maintenant ou bien ne vous avisez pas de me reparler à l'avenir." Surveillant la réaction du garçon, il releva le menton. Le Sand avait parlé d'une voix claire bien que basse, et il espérait que l'autre ne prendrait pas ombrage de ses paroles, tout comme il espérait que le jeune homme n'en profiterait pas pour exiger de lui plus qu'il ne consentirait à lui donner.

© DRACARYS
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Mes paroles semblèrent souffler sur le lion comme un ouragan, suffisamment fort pour en avoir balayé les crocs. Il venait en effet de baisser les yeux, ce qui me surpris. Le doute s’était-il glissé dans son coeur, en contrebande ? Cela se confirma lorsque son regard croisa à nouveau le miens, dépourvu du dédain dont il était encore porteur il y a une poignée de minutes. Mon changement soudain d’attitude, témoin d’une adaptation faite en un temps record, avait peut être fait  éclater son animosité, au profit de sa raison. Du moins, je l’espérais.

Ses yeux noirs s’écarquillèrent légèrement, attestant de sa surprise. Venait-il de comprendre ce que ces suppositions impliquaient ? Le fruit d’un adultère, secrètement marié à l’héritière de Dorne… Voilà qui risquait effectivement d’énerver le frère du Roi. Un bidet ne suffirait certainement pas à laver ses parties génitales de ce qu’il risquait de leur arriver. À moins que le Prince ne décide de lui couper les mains, ne laissant plus que des moignons à la place de ses poignets. Peut être les deux ? Nul ne savait ce que le courroux d’un dragon, certes sans ailes, pouvait provoquer, mais tous s’accordaient en un point : c’était de mauvaise augure.

Je me relaxai en constatant que sa main reposait le long de son corps, éloignant de fait la mienne de ma propre lame. Un léger soupir franchi la barrière de mes lèvres, montrant mon soulagement et trahissant donc le stress que le Sand avait su me faire ressentir, ce dernier n’ayant pas manqué de faire bouillir mon sang d’angoisse et de panique, avant qu’il ne soit refroidi par son regard glacial, telle une chaudière à court de combustible. Je me surpris à me laisser aller à des superstitions saugrenues, ce soudain retournement de situation venait-il de mes talents de jongleur verbal, ou bien de la bénédiction du Guerrier ?

Je fixai l’endroit où ses yeux se dirigèrent du coin de l’oeil, remarquant les deux Septa, dont celle au teint de betterave, aussi laide que ce que son regard inquisiteur sous-entendait, pointé tel une lame vers le bâtard. Un ou deux mots devaient s’être malencontreusement glissés jusqu’à leurs oreilles, le choix de quitter le Septuaire me paru donc logique. Je suivis mon interlocuteur d’un pas rendu lourd par la méfiance, souhaitait-il continuer à parler, ou comptait-il tout compte fait m’affronter ? Ses intentions demeuraient à mes yeux, plutôt floues, peut être que lui même ne savait que penser. Le voir me lancer de discrets coups d’oeil ne me rassura pas, au contraire, cela ne fit que me communiquer son stress… Estimait-il les possibles conséquences de mon meurtre ?

J’avalais ma salive, manquant de peu de m’étouffer, le battement d’aile d’un oiseau ayant suffit à me prendre par surprise. J’étais si concentré sur l’homme sujet mille ragots, que je ne percevais presque rien d’autre de mon environnement. Avais-je toujours possédé de telles capacités de concentration, ou était-ce normal avec cette boule de peur remplissant mon estomac comme des pierres, au point d’alourdir mes mouvements, de rendre le simple fait de respirer, de parler, surhumain ?

Le silence fut détrôné par sa voix, plus calme que ce à quoi je m’attendais. Il semblait cynique, plus réfléchis qu’avant. L’avais-je calmé, ou se contenait-il ? Je n’ignorais rien des colères froides, auxquelles j’étais moi-même parfois proie. Certain cédaient leur raison à leurs émotions, détruisant tout dans leur folie, sans que cela n’ai de sens ou d’intérêt quelconque. On disait de Viserys qu’il était de ce genre.

Me concernant, mes ires constituaient une sorte d’abysse, noir et sans fond, avalant les malheureux si aventurant, leur promettant une noyade très douloureuse. Je ne détruisais pas les objets, mais les esprits, y prenant d’ailleurs un malin plaisir. En habile jongleur, jouer avec les sentiments des individus ayant su s’attirer ma haine, s’avérait pour moi aussi naturel que de manier l’épée. Un sadisme malsain caché sous des traits angéliques, me valant d'ailleurs parfois d’être placé sur un piédestal

En ce sens, je comprenais l’oncle d’Aegon, ainsi que tous les Hommes de ce monde : une fois enragés, nous détruisions. Néanmoins, certaines destructions demeuraient plus valables que d’autres. Ma colère étant froide, j’agissais avec logique et parcimonie, jamais dans l’excès. Enfin, l'heure n’était pas aux réflexions, mais à l’écoute. Le dornien, comme à son habitude, resta sobre dans ses paroles. Nous savions tous deux qu’en tout instant, n’importe qui pouvait écouter… Mais lui avait appris à en dire le moins possible, moi non. Une énième différence entre homme et garçon, entre bâtard et noble, bien que nous ne soyons pas réellement mieux nés l’un que l’autre.

J’acquiesçai silencieusement, l’invitant implicitement à continuer, montrant mon écoute ainsi que mon intérêt, tâchant d’analyser la moindre trace d’émotion, à la fois dans son intonation, ses mots, son langage corporel, ses micro-expressions… Je scrutai le corps de Daemon comme une amante étudierait celui de son compagnon après l’amour, se délectant des moindres rides, des moindres traces de sensibilité là où sa mains, ses lèvres, s’aventureraient. En soi, la seule différence entre ces deux pratiques, demeurait dans le contexte et le but de l’observation.

Ainsi, je perçu une sorte de résignation, dure comme la pierre constituant les idoles silencieuses, spectatrices de nos échanges verbaux. Nous venions littéralement d’échanger sous le regard solennel des dieux. Peut être que cela lui serait profitable.

J’avais l’impression de me tenir face à un homme rendu dur par la vie, mais encore jeune, n’ayant rien fait de plus que de suivre son coeur et ses passions… Une chose compréhensible, bien qu’impossible, voir prohibée, au sein des nobles. Si être bâtard devait avoir un avantage, cela devait être celui-ci. Je me sentis compatir à nouveau, quelle tristesse que d’être punissable pour cela… Il avait aimé la mauvaise femme, aussi bien qu’il était sorti du mauvais utérus. Sa vie était une suite de malencontreux événements, de hasards perfides, peut être articulé par la lourde main d’une de ces stupides déités. L’imagination ne doit pas manquer, lorsqu’on est à Sept pour discuter du sort d’un individu... Sept, comme au conseil réduit, non ?

Sa simple vue me rappelait pourquoi je vouais à l’amour une haine profonde. Cela rendait vulnérable, aveugle, bête. Tout aurait été bien si le soldat s’était épris d’une femme du peuple, d’une autre bâtarde, voir d’une lady d’une Maison mineure… Mais en véhiculant ses ardeurs vers la fiancée du prince, c’est à dire nul autre qu’un pion de plus sur l’échiquier politique de Doran Martell et Rhaegar Targaryen…
Un homme admirable, mais sur le sort duquel on se lamenterait peut être plus tard. Dans le pire des cas, il deviendrait un martyr.

J’opinai à nouveau du chef lorsqu’il me communiqua son affirmation, ne souhaitant pas nier. Qui ignorait l’illustre histoire liant les dragons des cieux aux dragons des mers, ou même ma présence à Port-Réal, que certains nobles prenaient comme une insulte. Pourquoi ne pas avoir envoyé Monterys ? On avait bien envoyé Robb Stark à la Cour avant son premier anniversaire.

Certains comprenaient que le jeune fils de Monford n’aurait pas pu se lier à une quelconque personne de sang royal, moi oui, l’âge le permettait… Mais personne ne doutait qu’il s’agissait également d’une tentative de mon père d’éclipser l’héritière légitime de Lamarck, au moins au Donjon Rouge.

Peut être finirais-je même plus influent… Ou peut être pas, tout dépendait de ce que les princes penseraient de mon initiative. Si j’évitais là un probable incident diplomatique, la folie coléreuse dans laquelle risquait d’entrer le fiancé de la jeune Martelle, ne m’épargnerait peut être pas plus que le serviteur de Tywin Lannister. Mon acte s’avérait effectivement aussi passionné que raisonné, mais la défaveur de mes semblables valyriens m’apporterait peut être la bienveillance du Vieux Lion. N’étais-je pas entrain de plus ou moins sauver son fidèle subordonné, après tout ? Pas que cela ai beaucoup de valeur, mais dans ma situation, tout était bon à prendre.

Je souris, plus bêtement que gentiment, lorsqu’il me remercia. Cette manoeuvre me pris effectivement de court, ce qui se perçu probablement dans mon faciès. Mes yeux étaient écarquillés, mes lèvres arquées de manière improbable, montrant que je ne savais là plus sur quel pied danser, avec quelle main jongler. Le soleil vint d’ailleurs étayer ses paroles de sa lumière, donnant à ses paroles la chaleur que sa voix ne savait leur donner, me caressant la joue agréablement. La sincérité pris le dessus sur son austérité, et me touchèrent, m’arrachant finalement un rictus un peu plus sincère. Les mots franchirent plus facilement la barrière de mes lèvres.

- Je ne peux pas vous dire ce que le Prince désire, pour être honnête. Je suis proche d’Aegon, mais moi et son oncle n’avons qu’une relation… De sympathie, plus ou moins cordiale. Il m’aime plus pour mon sang et la longue histoire liant nos familles, que pour ce que je suis. Cela dit… J’ai pris le pas sur lui, disons. Je ne sais moi-même pas ce qu’il fera quand il apprendra que vous êtes la Capitale, puis quand quelqu’un d’autre viendra lui chuchoter que nous avons longuement échangé. Qui sait ce que son énervement entrainera ? Mais bon, j’ai le sang, l’histoire, et son neveu, de mon côté. Peut être que je me ferais engueulé ou souffrirais d’une baffe humiliante, mais rien de plus… J’espère.

Mon expression devint un peu plus nerveuse, bien que mon ton traduisait une certaine sincérité doublée d’une certaine ironie. Au final, peu m’importait ce que Viserys allait me faire. Il ne régnait pas, et les siens ne devaient pas ignorer les possibles conséquences de son comportement… Autrement dit, la raison était de mon côté… Normalement. Les mots du bâtard de la Grâcedieu m’émurent à nouveau.

- Il l’aime…


Ces quelques pensées firent vibrer l’air avant que ne m’en rende compte, à voix basse, d’un ton à la fois attristé et admiratif, mais sûr.

- Je ne pense pas qu’elle risque grand chose… Port-Réal à cracher sur Lancehélion il n’y a pas si longtemps, dans le pire des cas, cela paraitra légitime et les fiançailles seront annulées… Et l’alliance ne se fera pas. Peut être qu’il y aura une certaine animosité entre Martell et Targaryen, mais si cela suffisait à déclencher des guerres, vous seriez ici pour saquer la ville, pas pour prier… Votre dévotion est admirable, réellement. On dit des bâtards qu’ils incarnent vice, mais pour moi, vous êtes un homme de vertu.

Pourquoi ces mots ? Aucune idée, l’honnêteté n’apportait rien dans ce monde… Mais ne me coûtait pas grand chose non plus, dans le cas présent. Au pire, je ne risquerais pas grand chose de plus à convier ces quelques impressions, à quelqu’un qui mourrait potentiellement sous peu. À moins que je ne dramatise… Mais à nouveau, mes pensées furent interrompues par mon interlocuteur. Un léger rire m’échappa.

- Navré, ce n’est pas de la moquerie, n’ayez crainte, vous devez avoir saisi que je n’étais pas ici pour me jouer de vous… Vous n’êtes pas naïf, visiblement. De nos jours, qui rend un service sans attendre une récompense, après tout…

Le silence repris son règne, du moins à mes oreilles, car dans la rue… Il était dur d’avoir l’esprit tranquille, même enfoncé dans les murs du Donjon Rouge, d’ailleurs, malgré leur épaisseur.

- Cela va sonner comme une blague mais, restez en vie, ça me suffira. Accessoirement, vous êtes une personne intéressante, plus noble que bien des nobliaux malgré votre bâtardise… C’est à en faire pâlir les théories eugéniques du prince, que je ne partage guère, même si cela me permet d’être dans ses bonnes grâces… Enfin, peu importe. Si ce qui vous dérange c’est de redevoir quelque chose à un inconnu, eh bien considérez que nous sommes amis. Des camarades se rendent services sans contrepartie, parce qu’on sait que la personne que l’on sauve peut nous sauver un autre jour… Mais, pour retomber sur mes pattes, vous ne pourrez pas me sauver à votre tour si vous mourrez. Alors restez en vie, rendez mon avertissement utile, croyez en sa sincérité… Et cela me suffira amplement. C’est même plus que je n’en mérite. Je ne fais que vous prévenir, je n’ai pas le pouvoir de vous aider plus que cela… Mais prévenir le mal est mieux que de le guérir, surtout lorsqu’on a pas le remède…

Je conclu ma tirade par une expression espiègle, presque fier de cet artifice, pourtant enfantin.
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An 298 - Lune 12 - Semaine 3



Lucerys Velaryon & Daemon Sand

D'aussi loin qu'il put s'en souvenir, ou du moins, remonter dans son passé jusqu'a des images que ni le temps ni l'orgueil ni le rêve n'avaient modifié, jamais le Sand n'avait donné sa confiance facilement. Etait-ce la séparation hâtive d'avec sa mère qui avait ainsi influencé son esprit et son coeur? Sa grand-mère avait coûtume de dire que le long voyage qu'il fit peu après être né dans les bras de son père en quittant  les abords de Haut-Hermitage pour rejoindre le fief des Allyrion avaient couté à son coeur d'enfant l'ancrage solide et confiant qui liait naturellement un fils à sa mère, et donc au monde. Lui avait plutôt tendance à voir là le fruit de son éducation rude, et de ses premières années de vie où il avait été le seul enfant entre les murs blancs de la Grâcedieu. Qui plus est, il assumait depuis toujours cette part abrupte de sa personnalité qui servait si bien son goût pour la solitude et le calme. Le brun n'avait jamais tenté de s'en défaire, ni même de s'en guérir par les simples principes de la cordialité et s'il se trouvait parfois entrainé dans quelque réjouissance c'était systématiquement du fait de ses amis, et jamais de lui-même.
Mais devant le comportement avenant du jeune garçon aux boucles d'or fondu, son sourire presque espiègle, Daemon sentit sa méfiance originelle ébranlée par le doux rayonnement de la sincérité du Velaryon. Devant tant de candeur, il regretta ses derniers mots. Ses paroles qu'il avait prononcé sans méchanceté bien que sans amitié non plus, et par pur principe de réciprocité lui paraissaient bien dures désormais. Cependant, il fut soulagé de constater que l'autre n'en avait pas pris ombrage pour autant. Il est imprudent, mais il n'est pas idiot, décida-t-il en silence tout en jaugeant l'autre qui lui répondait.

S'il n'avait pas manqué d'attention  précédemment, il ressentait à présent pour les propos de Lucerys un intérêt particulier et vif, comme il pourrait en juger par ses yeux qui ne cillèrent pas en l'écoutant. Le jeune blond ne manquait pas de choses à dire. Et bien qu'il accueillit ces propos avec bienveillance, et qu'il sentait s'effacer en lui la contrariété première que ces derniers lui avaient inspiré plus tôt, le dornien ne pouvait s'empécher d'être préoccupé. Dans un tel débis de parole, il craignait que le jeune homme et sa langue trop vive ne vinrent à relacher quelque secret égaré par son entrain  dont il devrait alors supporter le poids. Mais il l'écoutait. Il avait maintenant l'assurance qu'il ne faisait pas face à un espion du Prince. Peu lui importait le poids d'un autre fardeau tant qu'il n'était pas traqué par le cadet du Roi, pour le moment tout du moins. Ses machoires étaient légèrement serrées, plutot de concentration que de réelle nervosité. La possible correction évoquée si négligement par le jeune homme réussit à soulever un coin de ses lèvres d'un demi sourire un peu éteint. Si ses yeux reflétaient l'amusement qui s'épanouissait timidement sur sa bouche, il n'en demeurait pas moins préoccupé par cette plaisanterie qu'il gouta peu, aussi caucasse pouvait-elle être.
Ce qu'il entendait ne lui plaisait guère. Ainsi donc, le Prince n'avait d'estime que pour le sang semblable à celui qui coulait dans ses veines? Mais que pensait-il alors de l'ascendance Rhoynar de sa future épouse? Si les Valyriens ont des cheveux d'argent c'est car leur sang est blanc, comme celui des vers, se remémora-t-il silencieusement. Daemon ne se souvenait plus du visage du pécheur qui avait un jour dit cela à Lady Delonne, sa grand-mère, lors d'une audience; mais il se souvenait que c'était un orphelin de la Sang-vert qui avait prononcé ces mots et que personne dans le Grand hall de la Grâcedieu ne l'avait contredit en l'entendant parler ainsi. Ce Prince blanc aurait, avec la sombre et eclatante Arianne, bien des sujets à débattre au coeur de Lancehélion lors de leur règne prochain. La tranquilité de Doran allait être mise à rude épreuve.
Le brun aquiescait aux propos de Lucerys sur le juste retour de flamme que semblait être cette vilaine rumeur pour les Targaryens lorsque la fin de sa tirade lui fit ouvrir de grands yeux surpris. "Un homme de vertu"...Daemon avait déjà vu les courtisans à l'oeuvre. Combien de nobles avait-il observé avec dédain tandis qu'ils plongeaient dans des révérences absurdes et redoublées, agrémentés de mots brodés d'hypocrisie et aux yeux ourlés d'avidité devant le Lion du Roc. Mais Tywin Lannister était Tywin Lannister. En quoi était-il estimable au point que le garçon s'abaissa à ce jeu de flatterie auprès de lui qui n'avait rien à lui offrir, sinon le poing que sa colère lui promettait lorsqu'ils étaient auprès du Guerrier? Sa gorge se serra alors qu'il réalisait, une fois encore, la sincérité du noble. Le rire qu'il eut, pourtant, manqua de le rembrunir à nouveau.

"Que...? "lacha-t-il en haussant des sourcils étonnés, hébété, avant que l'autre ne l'interrompit à nouveau pour s'excuser de son hilarité et s'en expliquer.

A ses mots rassurants, ses épaules se relachèrent. Un long silence suivit cet étrange instant. Tout en haut du Grand Escalier qui coulait depuis l'entrée du Septuaire, leurs deux silhouettes contrastaient violemment entre elles comme avec les briques et les dalles blanches dont ils etaient entourés. Déjà, les rumeurs de la rue, de la ville, remontaient jusqu'à leurs oreilles dans une cacophonie étouffée. Le soleil, déjà haut, lui fit plisser ses yeux. Comme il sentait que le garçon souhaitait lui dire quelque chose, Daemon ne s'autorisa pas à prendre la parole, attendant patiemment que l'autre eut choisit son moment pour parler à nouveau. Le Sand en profita pour balader distraitement son regard pâle sur la silhouette élancée du Velaryon, le jugeant extraordinairement semblable au jeune Dauphin. Il ne pouvait que reconnaitre alors la suprématie ostentatoire que le sang de Valyria offrait à ses enfants en les démarquant singulièrement des autres hommes. Mais, comme le disait si bien son père en choyant son cheptel: On ne choisit pas un cheval pour sa robe, et un champion peut mettre bas cent fois avant d'engendrer un pur-sang réellement digne de ce nom. Sur tous les Targaryens et les Velaryons qui étaient nés depuis la Conquête, combien avaient été retenus par l'Histoire pour autre chose que leur Nom? Daemon ne doutait pas que ce chiffre tenait sur les doigts de la main, puisqu'il n'avait consenti à reconnaitre la grandeur de cette dynastie que dans les parcours peu ordinaires d'hommes qui n'avaient pour Patronyme non pas le légendaire étendard d'Aegon mais des noms comme Rivers ou Waters, ou dont le mérite était du à d'autres hommes, qui n'avaient pas eu besoin de nom pour être grands.
Ses pensées furent interrompues par la voix du garçon. Il se redressa. La surprise fit finalement fondre l'espression fermée qui ornait jusque là ses traits. Son visage se fendit d'un sourire fin et ses sourcils se haussèrent dans un arc agréablement surpris.
"Amis? "S'étonna-t-il d'une voix claire et rieuse. Ses yeux le regardèrent de pied en cap, une fois, puis deux, avant qu'il ne sembla finalement se décider après un dernier jugement. Il lui sourit d'un sourire qui découvrit ses dents et qui révéla la longue faussette qui creusait sa joue gauche, vestige d'une cicatrice."Eh bien soit, l'idée n'est pas mauvaise. Soyons amis. "proclama-t-il avec une joie légère qui était pourtant teintée d'un voile d'amertume. Car sous l'apparence puérilité de ce qui ressemblait à un défi jeté à la figure de l'avenir comme seuls les enfants savaient en décider, ils ne pouvaient ignorer le contraste qu'offraient ces quelques mots avec la gravité des propos et des sous-entendu qui avaient enrichi leur discussion.

Son regard s'attarda un peu plus dans celui du Velaryon, encore incrédule, puis s'en détourna pudiquement. Un rire léger franchit ses lèvres. Il s'avança de deux pas, puis se tourna pour faire à nouveau face au jeune homme. Sa main droite tenait toujours son heaume contre sa hanche, l'autre reposait contre son corps. Plus il passait de temps avec Lucerys, plus il réalisait à quel point son avertissement, aussi perturbant et naif pouvait-il lui semblait, était précieux. Qui savait ce que son caractère imprévisible aurait pu l'amener à comettre si un autre que lui était venu lui chercher des poux à ce sujet? Si le Prince venait à vouloir le voir, ou à envoyer ses hommes à sa rencontre, le Sand jouissait désormais d'un recul qu'il n'aurait jamais pu acquérir sans l'intervention du dragon des mers.

"Le Prince serait bien sot de vous faire corriger pour cela. Ce n'est pas à vous de payer pour un bruit colporté par le vent. Compte-t-il faire taire ainsi toute la capitale? Vaste programme..." Il rit à nouveau doucement avant de laisser un voile un peu plus serieux tomber sur son visage. Il déglutit, tout en tachant de ne pas prendre un air trop sinistre. Son regard préoccupé mais résigné passait sur le visage du garçon. "En tant qu'ami, je ne peux vous mentir. Si jamais votre geste devait déplaire au frère du Roi, il n'y a rien que je pourrais faire pour vous protéger. Cependant, je peux vous promettre que je ne trahirais pas votre confiance.  " Déclara-t-il d'une voix plate. Sa franchise lui interdisait de partir le sourire aux lèvres en promettant de bientot revoir le garçon, de débuter dans les règles cette amitié dont ils avaient fait le pari et de le protéger au péril de sa vie alors que rien ne l'y obligeait foncièrement et que rien ne le retiendrait longtemps à la Capitale, près du Velaryon.
Son coeur brulait de dire à l'autre comme il pouvait voir sa bonté aussi bien qu'au travers d'une vitre, et tant d'autres chose encore. Mais son austérité reprit vite le dessus."Je tâcherai de rester en vie. Faites en de même. Je détesterai avoir à ajouter votre nom à mes prières. "Il le regardait. Il se sentait fébrile et serein tout à la fois. Il se sentait comme le cerf que l'on avait averti de la présence du chasseur dans les bois, et il savait qu'il s'apprétait à fuir cette personne même qui lui avait tendu la main et à s'enfoncer dans la forêt sans avoir la garantie de jamais y recroiser cet homme au moment propice où il pourrait, à son tour, lui sauver la mise.

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Je cru voir dans le faciès de mon interlocuteur, une sorte d’adoucissement, d’apaisement, comme si mes dernières paroles avaient su éclater, détruire, anéantir sa méfiance pour de bon. Mes mots avaient lentement limé ses crocs, ce qui me soulagea. Je m’étais montré plus habile jongleur que je ne l’aurais cru, faisant passer cet échange de tendu à presque cordial… Du stress naissait l’évolution, visiblement. Le raisonnement se tenait, après tout, le Conquérant lui-même n’avait-il pas conquit la grande majorité des Sept Royaumes en un temps record, peu après le fléau qui ravagea Valyria ? La crise avait forgé une légende, comme un forgeron donnait forme au métal…

Le dornien semblait adhérer à mes propos concernant ce juste retour des choses. Rhaegar Targaryen avait déshonoré son épouse, Elia Martell, en s’entichant d’une louve… Et cela fit couler bien du sang, et autant, sinon plus, d’encre. Ainsi, peu importe les raisons de cette rumeur, fondée ou non, mais en tout cas pas réellement démentie par l’intéressé, elle remettrait peut être le roi à sa place, lui rappellerait son impardonnable faute en temps que Prince. On se rappellerait de lui, probablement plus pour ce conflit, fruit d’un adultère pour certains, d’un viol pour d’autres… Nos descendants le surnommeraient peut être, ironiquement, le Roi Bâtard.

La pensée m’amusa, puis m’attrista, car elle attestait à elle seule d’à quel point quelques coups de reins entre les cuisses d’une jeune fille pouvaient meurtrir toute une nation, ainsi que des millier, millions, de familles. Notre souverain aurait sans doute eu meilleur temps de se branler dans un bidet et d’y laisser sa frustration, plutôt que se laisser aller à des folies que l’on aurait appelé erreurs de jeunesses, si la gravité des conséquences n’avait pas été aussi importante.

Le zénith semblait être passé, pourtant, mes yeux me piquaient légèrement à cause du soleil, tandis que le brouhaha assourdissant de la foule parasitait mes oreilles… Si le Sand n’avait pas été un homme de qualité, j’aurais sans doute regretté de ne pas être resté dans les jardins à lire, paisiblement, seulement perturbé par le chant des oiseaux, le rire des Ladies, ou les vannes d’Aegon… Cela me fit également penser à quelque chose : j’avais chaud dans ma cotte de maille, au final aussi ostentatoire que ma tenue dans cette situation, bien moins critique et dangereuse qu’aux premiers abords… N’étouffait-il pas dans son armure ? Son heaume à lui seul devait être aussi brûlant qu’une chaudière, et si il ne l’était pas, il le serait sous peu.

En observant la rue du coin de l’oeil, j’apperçu certains regards se tourner vers nous, avant de disparaitre dans la marée humaine, presque aussitôt. J’eu la sensation de me trouver sur un piédestal, et peut être aurais-je été admiré comme si c’était le cas, si mes vêtements avaient été rouges et non bleutés. Le peuple m’aurait à coup sûr pris pour un Prince… Pas que l’idée me déplaise. Si j’avais rejoint le Donjon Rouge plus tôt, peut être que l’héritier et moi-même nous serions amusés à échanger nos rôles. J’aurais eu ses obligations tant convoitées un jour, lui ma liberté… La pensée m’amusait, et m’arracha un sourire.

L’errance de mon esprit n’attestait-elle pas d’un relâchement, d’une baisse de mon angoisse, de mon stress ? Peut être… Mais le regard que nous adressa la Septa aux joues couleur betterave me revint à l’esprit, augmentant soudainement la vitesse des battements de mon coeur. Viserys n’était pas Varys, mais saurait sous peu pour cette entrevue avec le Bâtard de la Grâcedieu, l’homme l’ayant fait cocu avant même qu’il ne pose ses yeux sur Arianne Martell… À nouveau, la pensée manqua de peu de me faire rire, mais cela se serait avéré inopportun.

L’emploi du terme ami eu le mérite de lui arracher à la fois un mot et une expression proche de celle de la surprise… Encore une émotion que j’avais su faire passer en contrebande, sous l’habile couverture de mes mots, dans son coeur… Peut être, en tout cas. Enfin… J’avais bien le droit de me sentir fier et bon pour cette fois, non ? N’étais-je pas entrain de changer une main, qui aurait sans doute apprécier me tordre le cou, en une main amicale ? La notion lui sembla apparemment improbable, presque folle, comme l’idée de manier une épée avec un poignet cassé… Et pourtant…

En tout cas, le fait qu’il accepte m’arracha un réel sourire de chérubin, témoignant de ma joie. Bien des nobles se railleraient de moi si il le pouvaient, à n’en pas douter… Quoique, qui oserait risquer de vexer un homme proche de la famille royale ? Enfin, je n’en demeurais pas moins conscient que j’étais une pièce remplaçable, aussi bien dans le coeur du futur roi que celui du futur Lord de Winterfell, car mon statut faisait de moi un moins que rien parmi les plus que tout… Je ne pouvais donc me leurrer dans la superstition que mes relations me plaçaient au-dessus du lot… Même si mon sang faisait de moi un privilégié, au moins du point de vue du Prince cocufié… Peut être qu’on se souviendrait de Viserys comme cela, le Prince Cocu… Ou le Cocu Vierge, pour plus d’ironie…

La pensée sembla cela dit le laisser… Dubitatif, non pas vis-à-vis de moi, mais de sa propre personne. Cela devait être rare pour un mal-né de faire ami-ami avec un « bien-né », si bien que la situation devait prendre pour lui plus les traits d’une farce ou d’un rêve que de la réalité… Il serrait son casque comme un soldat apeuré serrerait son épée face à l’inconnu, ou comme un enfant serrerait le bras de sa mère face à un bruit inconnu… Une sorte de vulnérabilité s’émanait de Daemon Sand, pas physique… Son statut suffisait à démonter son efficacité militaire, mais de coeur. Son âme me paraissait aussi sensible que de la chair face à une lame, d’où le besoin d’une armure de cynisme, d’austérité, de méfiance, polie par la croyance et entretenue par sa vie dure… Il n’en demeurait cependant pas moins fascinant, et par contraste, bien plus que ces inintéressants nobliaux.

- Présenté comme cela, c’est presque risible… Cela dit, on peut trouver bien des prétextes pour punir un noble, il n’y a qu’à voir le pauvre chevalier dont les rotules pavent maintenant le sol… Pour avoir rapporter la rumeur au prince, parait-il. Ce n’est pas pareil pour s’attaquer au peuple, il n’a aucun pouvoir, aucune influence… La rumeur passera comme les nuages après l’orage, ou la sécheresse après la pluie, puis la plupart avaleront ce que l’on voudra bien leur dire comme un glouton avale sa nourriture… Je suppose que mon ethnie me sauvera, cela dit. Si tout ce que je risque est une claque humiliante, ce n’est pas grande chose…



… Bien que de dire ça à voix haute puisse être plus risqué que prévu, mais peu importe. Je me sentais intouchable, peut être à juste titre, sans doute même… Mais l’avenir me contredirait peut être, ne venais-je après tout pas de prendre mon coup de réalité dans la gueule ? Enfin, peu importe.
Les paroles de mon nouveau compagnon me parurent aussi sages que tristes, mais je ne pu qu’acquiescer. Il ne pourrait rien pour moi, à part sur un champ de bataille, tout comme je ne pourrais rien pour lui si notre cher prince efféminé attentait à sa vie… Mes cartes étaient jouées et entre ses mains, mon pouvoir n’allait pas plus loin que la prévention, mais peut être que cela suffirait… Cela dépendait de lui, plus de moi.

- Je compte bien vivre longtemps, ne vous en faites pas, cher ami. J’ai trop à faire avant de mourir, mon ambition n’ira sans doute pas jusqu’à son bout… Mais je veux être le prochain Corlys Velaryon. Ma Maison est sur une pente descendante depuis la Danse des Dragons, je compte changer cela… Bien que je ne sache comment, mais les grands hommes n’ont pas toujours besoin d’un grand nom ou d’une bonne place dans leur famille… Bien que cela puisse aider. Même certains bâtards, malgré la disgrâce factice qu’impose ce statut, ont su se hisser haut, il n’y a qu’à voir Bloodraven… Un homme admirable.


Je conclu ma tirade d’un sourire à la fois espiègle et arrogant, ponctué d’un léger rire, plus stressé qu’amusé. Je commençais à apprécier ce capitaine, nous contrastions aussi bien physiquement que psychologiquement, les paires les plus intéressantes naissaient souvent de ce type de profil ambivalent.
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La rumeur est la fumée du bruit

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Lucerys Velaryon & Daemon Sand

Daemon ne lachait pas des yeux le visage du jeune blond. Ils offraient à la vue des passants qui remontaient les marches le fruit d'un contraste des plus étonnant. Le bleu éclatant de la mise du garçon confrontait sans honte aucune le carmin profond qui coulait sur l'armure de la silhouette qui lui faisait face, et qui était bien solennelle, rigide d'une droiture toute militaire, comparée à la nonchalance de l'autre. S'il le connaissait mieux, sans doute le bâtard aurait qualifié ce dernier trait d'ouvertement provocateur, voire de dangereux. En équilibre sur son piédestal, le Velaryon semblait jouir de son statut et en jouer comme un jongleur impudent en n'imposant apparement pas le moindre filtre aux paroles qui s'échappaient d'entre ses lèvres. Conscient ou non, le risque était bien grand, et il fit jeter un long regard circulaire, calme mais préoccupé, autour d'eux au dornien. Mais ce qu'il lui dit alors devait le surprendre plus qu'il n'aurait pu l'imaginer. Ses yeux s'agrandirent.

"Comment?"s'exclama-t-il dans un souffle surpris. En entendant parler le jeune Velaryon, son poignet droit se raidit tout à coup contre son heaume, comme si sa main d'épée venait soudain le démanger. Aussitôt son visage qui s'était plus tôt illuminé d'un sourire recouvrit l'expression fermée qu'il lui avait offert plus tôt et ce, en un temps record. Un soupir rageur lui échappa, et son regard se fit plus dur. "Décidémment, les nobles de cette région n'auront jamais de cesse de surprendre dans le bon comme dans le plus mauvais." L'insouciance insolente de Lucerys ne rendait que plus sombre à ses yeux le traitement qui avait été infligé au chevalier qui n'avait commis qu'une seule erreur: celle de vexer le fils d'Aerys. Sa voix était basse, mais vibrante.

"La prospérité de son nom aura surement monté à la tête de ce pauvre Prince. Qui aurait pu prédire qu'il cachait un telle nature sous cette apparence efféminée? Je vais finir par croire que les toilettes les plus somptueuses cachent toujours les pires des hommes. Un chevalier....Mais ne craint-il donc rien pour jeter ainsi sa hargne sur un homme d'épée comme on ne traite pas un chien? Et le roi, le sait-il seulement? "Poussant un soupir las, ses traits se détendirent malgré son inquiétude et sa révolte.

L'alliance était signée et actée mais le Sand devait bien admettre qu'il avait le plus grand mal à se résoudre à l'idée qu'un tel homme puisse un jour monter sur le trône de Dorne. La permissivité dont il jouissait sur ses terres ne serait certainement pas du gout des Martell. Un Prince qui se permet de telles bassesses...Que Quentyn s'autorise jamais un tel comportement et je ne donne pas cher de sa peau. Doran goutait peu, en effet, les actions de ce genre. Après tout, n'avait-il pas lui même exilé son propre frère après que ce dernier ait humilié puis affronté le Lord d'une grande famille? Mais il avait été question là d'un duel qui, s'il ne fut pas équitable, n'en était pas moins légitime et encouragé par les sentiments déraisonnés de la jeunesse. Le cadet du roi avait atteint l'âge d'homme depuis longtemps. Quant à l'homme qui avait eu le malheur de se moquer de lui, cela devait être un pauvre erre qui, comme le Sand, ne jouissait que d'un seul et unique titre et n'était pas protégé par la moindre goutte de sang noble. Rapidement, le gout de l'injustice tapissa son palais, bien au dessus de la crainte qu'il se savait maintenant devoir éprouver quant au sort que le Prince Targaryen lui réservait à lui, et à lui seul.
Le Prince ne se doutait sans doute pas de ce qui l'attendait. Mais il le comprendrait bien vite, dès lors que le Soleil de la Principauté se serait charger de colorer son teint de bidet d'une teinte betterave, pour mieux lui rappeller dans quel pays il mettrait un jour les pieds. Viserys ravalerait bientôt son arrogance de Prince gaté. L'insoumise Dorne le resterait et tous ses caprices n'y changeraient rien.

"C'est une bien sombre époque pour votre sang que vous appelez de vos voeux. Mais je vous comprends. Le Serpent de Mer était un homme de son temps, et je ne peux que souhaiter que vous parveniez à vos fins, pour vous-même comme pour les Sept couronnes. " Corlys Velaryon avait été, il le devinait, un homme qui avait eu la qualité rare de passer les tempêtes comme personne, et de suivre dans leurs règnes successifs comme conseiller près de trois rois et reines Dragon, autant comme maitre des navires, Main ou encore Régent au crépuscule de sa vie.  Des décennies pouvaient s'écouler sans qu'un tel personnage ne vit le jour. Au fond de lui, Daemon commençait à penser et à comprendre que cette persistance obstinée à toujours  retomber sur ses pattes s'était réincarné en la personne de Tywin Lannister. Qui eut prédit en effet que le père d'un Régicide poursuivit ainsi la politique avec tant de brio sans que ses crocs ne furent élimés par les affres d'une guerre où les Lannister, s'ils n'avaient guère été les instigateurs de la rébellion, en étaient ressorti grand perdants alors que la trahison du fils jetait l'opprobre sur l'ensemble du clan de Castral Roc.
Aux derniers mots qu'il lui dit, une ombre amusée et narquoise vint ourler un coin de sa bouche d'un sourire fin tandis que ses yeux insondables plongeaient à nouveau dans ceux du jeune noble. "Vous maniez bien les mots, Velaryon." Le rire que l'autre avait laché dans l'air était léger et libre comme un oiseau et plaisait au Sand bien qu'il demeura muré dans son austère pudeur plutot que de l'accompagner dans son hilarité. Le garçon semblait nerveux, bien que toujours envahi de cette insouciance folle, celle-là même qui l'avait guidé jusqu'à ce Septuaire en ce jour pour prévenir un inconnu dont il ne savait rien du sort funeste qui le menaçait avec une désinvolture qui inspirait au Sand autant d'émerveillement que de méfiance. Oui, il est doué avec les mots, même s'il n'a pas l'air de s'en rendre compte lui même se répéta-t-il pour lui même. Sa futilité désinteressée, feinte ou non, ne pourrait que le servir si elle ne menaçait pas de l'exposer à des hommes de la trempe du Sand qui ne goutaient guère les bavardages et que les compliments laissaient indifférents. Le dornien ignorait si sa dernière remarque sur le Rivers le plus célèbre de l'Histoire avait pour but de le flagorner ou si elle était encore une fois fruit de la spontanéité du fils de Lamarck, mais, dans un cas comme dans l'autre, la flatterie aurait été si évidente pour un oeil extérieur qu'elle amusait Daemon comme l'aurait fait l'insolence involontaire d'un enfant.
"Freuxsanglant était un grand homme, en effet. Mais il a eu à traverser bien des épreuves que personne ne peut lui envier. Aucun homme ne devrait avoir à affronter son propre sang au nom du Royaume mais les hommes sont ainsi faits qu'ils ne peuvent que se faire la guerre. Si l'on veut protéger une chose il faut en sacrifier une autre, ça  je crains que personne, noble ou non, ne peut y dérober." Dit-il calmement avec l'aplomb qu'avait inscrit en lui la superstition de sa Grand-mère qui croyait si fort en ces revers de médaille et autres retours de flammes qui guettaient tous les hommes à un moment ou à un autre de leur vie. A tout moment, des courants plus tumultueux menaçaient d'emporter avec eux les témoins d'un passé révolu."Il faut savoir varier selon les circonstances car ce sont elles qui gouvernent les etats et non quelques lettres cousues sur un blason. Je pense que vous y arriverez, vous m'avez l'air d'être ce type d'homme, Ser Lucerys." poursuivit-il en fixant une dernière fois son regard dans l'azur de celui du dragon des mers. S'étant remis en mouvement, il avait entamé la descente des marches en compagnie du garçon au sang bleu. Il ne savait presque rien du garçon, mais il avait déclamer ces derniers mots avec sincérité, puisque la prévenance de ce dernier à son égard, motivée ou non par l'appat d'un gain quelconque, ne pouvait que le pousser à penser en ce sens.
L'amarante pesant de sa cape glissait sur les dalles de pierre comme une blessure encore fraiche sur le marbre. Sa silhouette en armure accompagnée de l'avenant jeune homme vétu d'étoffe topaze n'avait pas tardé à attraper quelques regards biaiseux des visiteurs comme des soldats postés autour d'eux.
Assis au pied des marches, un troubadour commença à entonner une chanson pour distraire les soldats aux manteaux d'or qui gardaient l'entrée du sanctuaire, rappellant soudainement le bâtard à son devoir lorsqu'il avisa la silhouette pâle de sa monture que le manteau d'or à qui il l'avait confié avait eu la délicatesse d'abriter à l'ombre d'une des habitations qui siégeait au pied du Septuaire. Grattant les cordes de son luth, le ménestrel esquissa d'une voix grave et chaude comme le jour l'histoire de quelques brigands et leurs aventures terribles au creux des Montagnes Rouges où la contrebande s'heurtait aux féroces bêtes ainsi qu'aux gardiens des Voies. Daemon jeta un regard de coté au Velaryon avant de déclarer placidement: "Il me faut maintenant retourner au Donjon Rouge." Dans le tintement léger de son armure mordorée, il reprit son heaume à deux mains pour le placer sur sa tête et l'ajusta quelque peu en soufflant quelques mots au Velaryon. Un soldat s'approcha d'eux, menant par la bride le pur-sang aux allures d'antilope. Le barbu regardait successivement un regard au noble puis au batard, visiblement dubitatif de ce duo improbable. Le Sand n'y préta pas attention, bien que cela le fit sourire intérieurement.
Qui savait ce que le militaire était en train de s'imaginer dans sa tête ingrate avec toutes ces folles rumeurs et tous les soupçons qui affluaient dans la Capitale depuis l'arrivée du Lion. "Devons-nous nous quitter ici, ou bien comptez-vous me poursuivre toute la journée? " Sourit-il sobrement en se moquant gentiment du débit de parole de son interlocuteur, auquel il n'avait répondu que tardivement. La chaudière qui alimentait le feu de sa langue semblait en effet ridiculement inépuisable et il avait la désagréable mais pas moins charmante impression que le garçon était déterminé à poursuivre leur discussion.




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Mon interlocuteur me fixai avec attention, avec des traits neutres mais adoucis, si bien que le dédain, l’animosité, la colère, voir même le mépris, voilant son visage, lui donnant une allures ténébreuses, accentuée par le noir résidant dans ses yeux, m’évoquaient plus un rêve lointain, un cauchemar brumeux dont on se rappelle au réveil, avant qu’il ne s’évanouisse au cours de la journée, qu’une réalité perçante, dont la pensée me donnait encore des hauts le coeur. Je crus néanmoins distinguer un soupçon de préoccupation sur son visage…

Le Dornien me donnait l’impression que ma langue trop pendue l’agitait plus lui, qu’une amante lors d’une nuit fougueuse. Une pensée comme à mon habitude, aussi fugace que cocasse, qui m’arracha de ce fait un léger sourire, à peine perceptible, mais rien n’échapperait sans doute à l’homme se tenant en face de moi. Le soucis céda rapidement sa place à la surprise, voir même à l’horreur, lorsque je lui énonçai le cruel sort réservé au pauvre Ser Medrick… Enfin, il fallait faire preuve d’une certaine relativité. L’individu se vantait parfois de sa tentative de viol sur Margaery Tyrell. Un autre retour de flamme, et la pensée arqua davantage la commissure de mes lèvres, s’en échappant même dans un léger murmure, couvert par le chant des oiseaux. Le Sand paraissait se cramponner à son casque comme une jeune fille se serrerait à sa couette lorsqu’un cauchemar venait de perturber sa douce nuit, emplie de rêves de héros aux noms chantés dans les chansonnettes que l’on leur enseigne pour des raisons aussi obscures que l’humeur imprévisible du frère du roi.

J’attendis qu’il achève sa tirade, laissant à mon visage le temps d’arborer les traits de l’hébétement à son tour, pour changer. Nous échangions nos faciès comme les brigands se refilaient des objets de contrebande divers. Un nouveau joujou intellectuel pour moi.

- Les individus les moins suspects sont ceux dont ils faut le plus se méfier, cher ami. Ne sommes-nous pas au plus vulnérable lorsque nous dormons aux côtés d’une jolie femme ayant partagé notre lit ? Un visage angélique pouvant cacher une dague sous l’oreiller, après s’être délectée des quelques secrets malencontreusement révélés par l’oisiveté que donnent la fatigue et les plaisirs charnels… Et pourtant, quel homme d’épée se méfie d’une Lady, n’ayant appris qu’à manier l’aiguille ? Lui est pareil… Il n’est même pas chevalier, et pourtant…

Son statut suffit à lui donner les crocs qu’il n’a pas acquis, mais je laissai le loisir de le deviner au Bâtard de la Grâcedieu. Ce dernier accentua ma surprise lorsqu’il se mit à parler de mon illustre ancêtre… Le dernier homme admirable né à Lamarck, à n’en pas douter.

- L’un des rares nobliaux dont la valeur égalait celle de son sang et de son héritage historique, à n’en pas douter…Un homme de son temps, comme vous dites… Mais l’heure est celle de Monford, malheureusement. Son sang est d’un bleu si décoloré qu’il en ferait pâlir la neige de jalousie.


Je ne cachai pas mon mépris pour cet individu, incarnant à mes yeux une incompétence tolérée par son ascendance. Le Serpent de Mer se retournerait sans doute dans sa tombe, si depuis les abîmes de l’oublis, il pouvait poser le regard sur les restes de son héritage ainsi que sa descendance. Lord Velaryon représentait pour moi la déchéance de sa famille, de sa Maison, une tare, une souillure malgré son sang pur, purement blanc. Une légère rage devait à présent se percevoir dans mon regard… Celle de l’impuissance, de l’injustice sanguine. Qu’il serait appréciable de le saigner, le sang s’échappant de sa gorge arborerait-il un rouge décoloré, ou bien un rouge betterave ? Si seulement l’opportunité se présentait…

- … Quoiqu’il en soit, vos mots me touchent, cette fois dans le bon sens du terme.


Une petite boutade sans conséquence, cristallisant en soi l’évolution de notre interaction, voir même de notre relation. Notre échange presque haineux devint l’arbre, dont les branches donnèrent contre toute attente, naissance au fruit de l’amitié au lieu de celui de la mort… Car passé de vie à trépas fut bel et bien un risque réel pour moi, j’en demeurerais à jamais convaincu.

J’acquiesçai lorsqu’il parla de Freuxsanglant, constatant que l’amant d’Arianne Martell ne manquait pas de connaissances historiques… Un bel esprit orné d’un beau corps, tous deux taillés comme des glaives, forgés par la chaleur du soleil de Dorne ainsi que sa dure vie. À y réfléchir, les bâtards célèbres, dont le renom parvint jusqu’à notre ère, dû rapidement prendre pour lui une importance majeur. Ces figures historiques devaient sans doute représenter des héros, auquel il s’identifiait et qui le soutenaient dans les moments difficiles. De telles personnes rappelaient sans doute que la bâtardise n’aliénait pas plus l’esprit que le corps et n’empêchaient de ce fait pas de posséder des compétences utiles au royaume, digne que l’on s’en souvienne et que l’on les content encore plusieurs décennies, voir siècles, après la mort.

Un sourire mêlant chérubinisme (j’invente le mot wé) et stupeur décora mon visage lorsqu’il me compara aux deux illustres hommes dont nous venions de discuter un court instant. Des mots simples et austères, tout comme Daemon Sand, mais ils demeureraient dans mon esprit à jamais, comme l’histoire résidait dans la pierre des châteaux où elle prit place des siècles auparavant.

- Nous sommes ce type d’homme, Ser Daemon. Survivez à cette épreuve, et peut être que vos vertus vous mèneront à une place insoupçonnée.

Notre échange semblait toucher à sa fin, les devoirs du Dornien devaient l’appeler… Cela s’avérait sans doute parfois contraignant, mais nul doute que des obligations apportaient sans doute une satisfaction certaine, parfois. J’en manquais cruellement, encore à ce jour, malgré tout ce temps passé à la Capitale. Ma proximité des princes ne me rendait pas plus influent ou puissant, et n’avançai pas mon projet de rehaussement de mon clan… Cruel constat qui vint ajouter un peu d’amertume à cette rencontre, pourtant mémorable et enrichissante.

Je suivis mon interlocuteur tandis que nous descendions le long des marches du Septuaire, quittant notre piédestal pour regagner la rue, laissant le divin et l’extraordinaire derrière nous pour retourner chez les mortels. Son casque le rendait encore plus impressionnant, lui donnant une stature plus intimidante… Un soldat féroce sur le champ de bataille, à n’en pas douter. L’idée d’un duel avec lui me traversa l’esprit, mais le temps nous manquaient. Une autre fois, sans doute. Le regard étrange, interloqué, du militaire lui apportant sa monture -une bien belle bête, noble ou non, je ne pouvais me vanter de monter une telle splendeur tous les jours que les Sept font-, m’amusa légèrement. Je m’amusai à le regarder fixement quelques secondes, ce qui le fit fuir, quelques peu agité. Nous ne nous tenions visiblement pas face à un présomptueux, tant mieux… Nul besoin d’attirer plus l’attention.

- Je vous accorderais bien la faveur de vous escorter, mais je ne réserve ce plaisir qu’aux Ladies. Navré…

… Un homme comme vous ne devrait pas rencontrer de problème, du moins, à court terme… Mais à nouveau, je scellai les mots dans ma gorge. Je lui tendis la main pour la lui serrer amicalement, puis tournai les talons.

- J’espère vous revoir.

Et cela conclu notre rencontre, aussi improbable que grandiose.
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